Dés de chasse : 9 + 2 = 11

Je les vois, là tout près. Elles se pavanent comme si rien ne les menaçait. Comme si elles ne vivaient pas dans un enclos, enfermées comme des bêtes de somme. Comme si les loups ne rodaient pas tout près d'elles. La frustration coulant de mes babines me fait arrêter net ma course. Alors que je courrais depuis plusieurs minutes autour de l'enclos, veillant à garder une bonne distance entre les barrières et moi, je suis décidée. Je ne laisserais pas cette opportunité me glisser entre les pattes. Non. Je me couche au sol sans les quitter des yeux. Aucune ne semble m'avoir remarquée, alors je rampe discrètement sous le barbelé et je m'avance vers le troupeau sans me relever. Mon pelage immaculé, dans l'obscurité, ne m'aide pas. Mais certaines chèvres sont blanches aussi, alors je suis en partie couverte. Je m'avance sans faire de bruit, je repère l'animal le plus faible du troupeau, et je le prends pour cible. Alors, d'un seul coup, je me relève d'un bond et je cours vers lui. Le troupeau entier panique, toutes ses mettent à courir et je prends ma proie en chasse. Déjà les cloches appellent les protecteurs, mais je serais partie lorsqu'ils arriveront. Je ricane, claque des mâchoires près des jarrets et flanque des coups de pattes à celles qui me gênent sur ma trajectoire. Je bondis sur certaines d'entre elles lorsque je perds ma cible de vue, et je me projette dans sa direction dès que je la retrouve. Bientôt, me voilà face à cette chèvre maigrelette et bien moins agile que les autres. Elle bêle, part en courant, mais je la poursuis avec énergie et parviens à la séparer du groupe. Je l'accule dans un coin du pré, et je lui saute à la gorge comme n'importe quel prédateur le ferait à ma place.

Dés de chasse : 9 + 2 = 11

Pleine d'assurance, je décide de revenir sur mes pas. Les chiens ne croiront pas à une seconde attaque la même nuit. Ils sont certainement déjà retournés se coucher dans leur foutue tanière en bois, ces traîtres. Je rampe de nouveau sous le grillage, et je guette le troupeau qui paraît étrangement serein malgré mon récent passage dans leurs rangs. Je ne me méfie pas, avance sans même me cacher. Grossière erreur. Alors que je disloque le groupe de chèvres, une énorme masse claire se profile devant moi. Un patou d'au moins deux fois mon poids me fait face, tous crocs dehors, et gronde ses menaces dans ma direction. Je me raidis, l'observe quelques secondes, et pars en courant. Pas le temps de traquer une autre proie, l'animal me prend en chasse comme si j'étais la chèvre et lui le loup. Je bondis d'une chèvre à l'autre, ne fais plus attention où je vais ni pourquoi. Je ne pense qu'à survivre, à fuir pour sauver ma peau. Je grogne, claque des mâchoires pour échapper à ses crocs meurtriers. Bientôt l'air manque à mes poumons mais je ne m'arrête pas, je continue de courir malgré les brûlures dans mes muscles et la chaleur étouffante dans mon cerveau. Je me précipite le plus loin possible du clébard furieux et je ne pense qu'à ma survie. Plus tard la bouffe, il est temps de rentrer ! Mes pattes me font un mal de loup, mes poumons semblent être pris sous un étau puissant et jamais je ne m'arrête de galoper comme une forcenée. C'est ça, ou les crocs puissants de mon poursuivant se bloqueront sur mon échine pour ne plus jamais me lâcher. Il faut un temps interminable avant qu'enfin j'atteigne la clotûre, et je m'en arrache si vite que mon pelage reste en parti dessus. Mais pas le temps de faire ma mijaurée, je disparais entre les arbres tandis que le clébard cesse sa traque pour retourner veiller.

Lancer de dés : 9 + 4 = 13

Après de longues heures d'un repos bien mérité, me voilà de nouveau dans la forêt aux pendus à errer comme une âme en peine. Je repense à mes frères, encore, et je réfléchis toujours au moyen de leur remettre une patte dessus. Un jour, je les retrouverais, j'en suis certaine. Mais pour l'heure je me dois de survivre et de me tenir prête. Où sont-ils ? Que font-ils ? Je ne saurais trouver les réponses à mes questions tant que je ne les aurais pas à nouveau en face de moi. Je reçois subitement quelque chose sur le crâne, claquant des mâchoires et baissant les oreilles sur mon crâne sous la douleur. Je redresse la tête et cherche dans les arbres le responsable. Je déniche alors un écureuil qui se paie ma tronche et je gronde, agacée par sa fausse supériorité. Je bondis sur l'arbre, m'agrippe à l'écorce comme si je pouvais grimper le rejoindre. Il jappe, s'enfuit sur les branches. Sans attendre je le poursuis, rendue fâchée contre cette ridicule petite créature qui a osé ne pas me craindre. Je bondis d'arbre en arbre, gravissant quelques mètres au-dessus du sol en arrachant l'écorce de mes griffes, et retombant lourdement dans la poudreuse fondante pour recommencer incessamment ce manège ridicule. L'animal, plutôt que de s'enfuir pour de bon, s'élance d'une branche à l'autre et semble même m'attendre, souhaitant visiblement me narguer un peu plus pour son petit plaisir. J'avoie comme une louvarde impatiente et je continue d'essayer de le capturer, mais bientôt mes muscles deviennent trop douloureux et les arbres me semblent trop hauts pour que je continue mes sottises. Alors je m'acharne jusqu'à parvenir à le faire tomber entre mes crocs, où je lui brois les os brutalement. Enfin, satisfaite, je rentre chez moi.

Lancer de dés : 5 + 4 = 9

J'étire mes membres un par un, baille à m'en décrocher la mâchoire, observe les alentours d'un oeil distrait, hume les effluves qui flottent autour de moi. Les proies sont là, quelque part, à se pavaner discrètement entre les arbres alors que le prédateur rôde non loin. Je m'éloigne en trottant entre les arbres, chacune de mes pattes touchant le sol à un rythme régulier avant de laisser le tour à la suivante, dans un accord tacite, un réflexe primal. Mes muscles se tendent tour à tour et dessinent des sillons sur ma peau, dans mon pelage immaculé. Encore seule. Toujours seule. Mes recherches sont vaines quand à retrouver mes frères, mais lorsque je pose ma truffe au sol je trouve systématiquement une cible à traquer et à tuer, même si mes tentatives échouent la plupart du temps. Je sais pourtant que mes frères sont là, quelque part, je les sens. Je me mets à galoper machinalement après quelques minutes d'une allure mesurée, et je passe de chaque côté des arbres que je longe sans trop penser à mes êtres chers disparus. Je me concentre sur les odeurs, sur les muscles qui roulent sous ma peau, sur l'air qui entre et sort de mes poumons et sur le sang qui coule dans mes veines pour réchauffer mon corps. Je cours ainsi de longues, d'interminables minutes, alors que les proies se cachent à mesure que j'avance, que je m'approche, que je m'éloigne d'elles. Mais je ne m'arrête pas, j'ai bien des choses à faire dans les jours, les semaines, les mois à venir, et je ne suis pas physiquement prête.

Lancer de dés : 10 + 4 = 14

Bientôt, malgré mes propres galopades sur la terre meuble, je perçois non loin celles d'un autre être vivant. Petit, discret, mais bien vivant. Le poul battant, je ralentis ma course et je fini par m'arrêter. Pas un, plusieurs. Des dizaines de ces petits êtres qui courent sous mes pattes, dans des galeries creusées par leurs soins. Des dizaines de ces petites bestioles qui pensent pouvoir se terrer sous terre, échapper au prédateur que je suis. Mais elles se trompent, toutes autant que sont ces créatures. Je les écoute, attentivement pendant de longues minutes, puis je découvre à force de les suivre du regard en me guidant au son de leurs pattes, une sortie de leurs galeries. Alors, discrètement, je rampe sur les quelques dizaines de mètres qui me séparent de cette petite encoche dans la terre humide. Je reste couchée là et je patiente une minute, deux minutes et de nombreuses autres encore. J'écoute leurs galopades sous moi, je sens d'ici leur sentiment de bien-être, de sécurité. Naïveté. Et à la seconde où une tête fait l'erreur de dépasser du trou, je plonge mon gueule vers elle et la capture sans difficulté, aussi vive qu'un coup de tonnerre dans le ciel. Je tire en arrière pour extraire le rat de sa cachette et je me lève rapidement, l'emportant avec moi loin de chez lui. Je le relâche sur un terre-plein où je commence à le poursuivre sur quelques mètres, l'attrapant en dérapant près de lui, en lui sautant dessus pour le sonner ou encore en le jetant en l'air. Je continue cette partie de cache cache sadique plusieurs minutes, comme si sa mort n'était qu'un passe-temps, et finalement lui brise la nuque d'un coup de mâchoires lorsque son pouls est si rapide qu'il menace d'exploser.

Lancer de dés : 6 + 4 = 10

Le rat fraichement tué repose désormais en paix dans la réserve des miens, là où bientôt un louveteau pourra le piocher et le manger, découvrir son odeur, apprendre à le connaître. Je piste une biche depuis quelques heures, les membres endoloris par la course effectuée derrière elle mais le coeur encore bien accroché et le cerveau déterminé. Je continue de remonter la piste, la bête n'a plus beaucoup de distance d'avance, je la rattrape un peu plus à chaque minute qui me voit courir davantage, économisant le gros de mes forces dans un trot léger, mesuré. Les traces sont de plus en plus fraiches, l'odeur de plus en plus forte. Bientôt, je tombe sur une clairière déserte mais où l'odeur est si forte qu'elle m'en fait saliver. Je m'avance discrètement, comme dans un pas de velours. Je la cherche des yeux, elle est forcément là. Et, bien vite, je la trouve, paissant dans un recoin de la prairie claire. La tête sous le niveau des épaules, je m'approche d'elle en décrivant un large cercle comme pour l'ignorer, et brutalement je fonds dans sa direction, tous crocs dehors. Je plonge sur elle comme une flèche, referme mes mâchoires sur ... le vide. Et avant que j'aie pu en prendre conscience, le sabot que je pensais capturer me percute l'épaule et m'envoie valser en arrière. Le temps que je me redresse et reprenne mes esprits, la biche est en fuite, bondissant à travers la prairie. Je pars à sa poursuite, saute sur la gauche alors qu'elle tente de m'échapper, bondis sur la droite lorsqu'elle croit pouvoir filer. Je m'écrase au sol, manquant de peu un nouveau coup de sabot, et la poursuis encore ainsi sur toute la longueur du pré, avant que la tâche blanche de son arrière-train ne disparaisse entre deux arbres.

Lancer de dés : 9 + 4 = 13

Couchée là depuis des heures, je rampe finalement sous la clôture où restent accrochées de petites touffes de mon pelage immaculé. Je m'éloigne des barbelés pour ne pas y laisser ma chair, et me relève enfin, mes pattes s'enfonçant sans la boue à mesure que je m'approche de l'enclos des porcs. Les gros animaux me regardent bêtement, trop abrutis et trop gras pour broncher ou penser à avoir peur de moi. Pourtant je suis bien là pour les abattre. Je m'approche un peu plus, entre ouvre la gueule et halète en détournant le regard, observant les alentours. Et puis, je choisis. Un animal plutôt petit par rapport aux autres, plus jeune certainement mais pas aussi petit qu'un porcelet. Un animal que je saurais traîner hors d'ici rapidement. Sans prévenir, je me jette dans la mêlée, les bruits de succion s'échappant du sol lorsque mes pattes s'extirpent difficilement de leur prison de boue. Mes gestes sont gauches, mes mouvements diminués par l'espace restreint et la boue qui tente de m'avaler entière, mais je tiens bond et me rapproche de ma proie en quelques bonds misérables. J'abats toute ma force sur elle, plonge mes crocs dans sa chair, la fait hurler de douleur et fais monter la panique dans les rangs. Elle se débats, m'échappe, et je lui cours après dans l'enclos brun de boue. Je m'écrase au sol en glissant dans la bouillasse, me relève plus sombre que les porcs, et reprends ma course poursuite derrière la bête, lui infligeant des coups de crocs violents et sanglants, goûtant à son élixir de vie comme au meilleur breuvage de mon existence. Je l'affaiblis patiemment, avec tact, jusqu'à voir le porc s'étaler au sol, épuisé et mort de trouille. Je me jette sur sa gorge sans aucune pitié, maintiens sa trachée entre mes crocs et patiente jusqu'à ce que la mort vienne le prendre, l'air quittant petit à petit le confort de ses poumons.

Lancer de dés : 16 + 4 = 20

Puisque les hommes sont si stupides qu'ils laissent leurs bêtes se balader dans les hauteurs, pourquoi une louve telle que moi ne pourrait pas profiter d'une pareille occasion ? Je sors lentement d'entre les arbres pour jeter un oeil autour du troupeau, et alors que je ne détecte aucune présence canine, je m'avance un peu plus vers les proies potentielles et les détaille chacune leur tour de mon regard d'émeraude. Bonne santé apparente, pas de faiblesses visibles. Mais, là dans le gros du troupeau, je repère une femelle qui cache comme elle peut la présence de son nouveau-né, un petit être duveteux maladroit sur ses quatre membre. Je commence à trotter, contourne le troupeau, l'observe avec insistance pour finalement découvrir un deuxième petit derrière duveteux. Deux petits, une mère, un prédateur et aucune protection en vue. Je m'élance droit sur le trio, affole quelques bêtes que j'esquive dans leur course en bondissant de droite ou de gauche selon leurs trajectoires, avant de continuer ma course vers mes proies désormais verrouillées. Je saute sur le dos d'une brebis qui geint plus fort qu'un louveteau et part en courant, mais j'atterris sur le sol d'un bond lest et je me précipite vers mes cibles sans un regard en arrière. Encore quelques foulées dans la terre humide, quelques galopades dans l'herbe froide et me voilà près de maman et ses deux petits qui cherchent désespérément à se cacher dans le reste du troupeau. Mon regard expert ne les lâche pas une seconde, et c'est concentrée uniquement sur eux trois que je poursuis ma course au milieu des moutons, sans jamais ralentir et sans jamais faiblir. Mes muscles roulent sous ma peau avec une légèreté telle que je me sens déjà victorieuse, et lorsque mes crocs se referment enfin sur une patte arrière, je ne suis pas étonnée de cette glorieuse journée. Le reste du troupeau continue de courir alors que je traîne le petit beuglant jusqu'en extrémité de la prairie, où je le relâche une fraction de seconde pour bondir vivement par-dessus lui et plonger mes crocs dans sa nuque, la lui brisant après l'avoir secouer voracement pendant plusieurs secondes.

Lancer de dés : 15 + 4 = 19

Mes pattes frappent le sol avec rage, l'humus vole sous chacun de mes pas rageurs, et mes crocs claquent dans le vide alors que je me contorsionne pour virer brutalement à gauche ou à droite selon la direction prise par cette foutue bestiole au long corps poilu. Sur mon visage, de belles griffues piquantes et les marques de crocs dans mon antérieure droite, qui me donnent une rage de vaincre encore plus redoutable que mon instinct de chasse naturel. Je me projette en avant, tors le cou et claque des mâchoires sur sa queue, faisant gueuler la bête et la voyant se retourner pour un nouveau coup de griffe terrifié. Je recule vivement la tête, freine des quatre pattes et repars dans l'autre sens. Si ce foutu furet pense s'en sortir comme ça, il se trompe et se surestime lourdement. Encore quelques foulées pour le rattraper à nouveau, il cherche une issue dans les parois rocheuses, un trou où il pourrait se faufiler pour m'échapper. Je l'écrase contre un rocher, le relâche en jappant lorsque ses crocs se referment sur mon museau, et repars à sa suite les yeux remplis de colère. Je freine brutalement au-dessus de lui, il se faufile entre mes pattes et s'enfuit dans l'autre sens, mais je le suis avec détermination et si mes muscles deviennent douloureux sous l'effort, mon cerveau n'est pas décidé à les laisser se reposer. Encore une tentative ratée lorsque mes crocs claquent dans le vide, mais cette fois je ne suis pas passée loin et la prochaine sera la bonne. Je bondis en avant, prends appui immédiatement et repars sur la droite, m'écrasant lourdement sur la créature qui laisse échapper un cri sec avant de s'immobiliser complètement sous mon poids, les os brisé, le corps inerte et le visage figé dans la mort.

Lancer de dés : 13 + 4 = 17

Je cours comme une dératée derrière la petite bestiole, creusant à bout de pattes lorsque je l'entends s'immobiliser sous mon corps. Là, dans la terre meuble, elle se terre et me nargue depuis l'aube déjà, et bientôt le maigre soleil sera à son zénith. Je grogne, frappe la terre de mes pattes, écrase mes griffes dans le sol meuble et arrache l'humus pour diminuer la distance entre nous. La petite bestiole, aveugle, se déplace trop vite pour moi, mais je n'abandonne pas et je suis ses galeries. A force de creuser à chaque sortie, à force de déclencher des éboulements partout dans son terrier, je finirais bien par l'acculer à un mur et alors il ne me restera qu'à creuser pour cueillir enfin mon butin. Je plonge mon museau dans la terre, j'éternue pour libérer ma truffe de tout l'humus qui l'emplit à chacune de mes sorties, et je recommence mon manège un peu plus loin. D'abord discrète, immobile, guettant les moindres sons, puis violente et vive, plongeant en avant pour creuser brutalement le sol à la recherche de la créature cachée là, juste sous une couche de sol à l'abri de mes pattes meurtrières. Je me redresse, le museau noir de terre, repars en courant, m'immobilise, saute, plonge sous la surface et écrase le sol, vire la terre entre mes postérieures. Encore. Encore. Sans jamais me lasser, sans jamais abandonner. Jusqu'à ce qu'enfin, les pattes dénudée et larges de ma proies s'extirpent du sol, perturbée, perdue, définitivement condamnée. Je capture brusquement son museau triangulaire entre mes crocs, la jette en l'air et bondis pour l'attraper, lui brisant la nuque d'un mouvement sec de mes mâchoires mortelles.