Traîtrise, tricherie... Fourberie?

Des hommes apparurent bientôt dans son champ de vision, munis d'armes et avec, au bout des mains, des laisses auxquels étaient attachés des molosses. Ils semblaient effectuer une première ronde matinale, certainement pour s'assurer que personne n'avait pas pénétrer au sein de leurs doux foyers.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

D'autres arrivèrent, laissant aucun moyen d'infiltration au canidé qui les observait. Ne voulant pas attendre plus longtemps, celui-ci fit volte-face, un peu déçu de ne rien rapporter à la meute aujourd'hui.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

Le vent soufflait toujours sur le vaste territoire, ébouriffant les poils de tout être qui osait affronter les basses températures hivernales. Les tempêtes de neige avaient décidées de s'accorder une pause, laissant un épais paysage blanc dans lequel on peinait à se déplacer par moments. La météo n'avait pas effrayée le solitaire qui, aux premières lumières de la matinée, s'était levé pour se diriger vers le camps des hommes. Devenant une routine, il tentait désespérément de trouver de quoi manger, du moins, de piquer quelque chose. Il avait déjà réussi deux fois et aujourd'hui était encore une énième tentative. Allait-il y arriver ce coup-ci ?
C'est avec une cadence des plus lentes, freinée par le manteau neigeux, que ce même loup arriva près des bipèdes. Il n'y avait personne à l'extérieur, pas même les molosses qui monter d'ordinaire la garde. On pourrait presque croire que les événements climatiques ont effrayés ces hommes à l'apparence très robustes.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

Ses coussinets continuèrent à s'enfoncer dans la poudreuse jusqu'à la première maison où le canidé s'immobilisa. Il analysa rapidement les lieux avant de continuer furtivement. Même s'il n'y avait personne à l'extérieur, il ne comptait pas se repérer. Le noiraud se mit doucement à trottiner silencieusement, le cou bien bas et la queue traînante. Il ne savait que trop bien qu'il fallait agir vite dans ces situations.
Ses foulées le menèrent rapidement près de la réserve où il jeta un dernier coup d’œil derrière lui avant de s'y insérer. Empoignant une première proie par le cou, l'animal se mit de nouveau près de l'entrée pour voir si aucun bipède n'arrivait dans sa direction.

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Par chance, personne n'arrivait. Il prit alors une deuxième proie et sortit du Garde-manger. Presque trop simple. Ses deux lapins bien figés dans sa gueule, il se mit à courir hors du Village dans une allure incroyablement rapide. Ni vu, ni connu.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

Camps des hommes, terre maudite. Le canidé s'avançait à nouveau, pour une énième fois, sur ce terrain qu'il appréciait pas énormément, mais sur lequel il pouvait se nourrir et tenir parole auprès des Sekmets en apportant de nouvelles denrées lorsqu'il réussissait. C'est donc encore une fois en début de matinée qu'il apparut à l'orée du bois précédant le Village, les canines bien en vue et le poil hérissé.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

En apercevant qu'aucun bipède se trouvait à l'extérieur, il tenta une première approche. Furtif, il se déplaça d'habitations en habitations en veillant à s'arrêter à chacune d'elle. Jusqu'à la réserve. Sans encombres, il pénétra à l'intérieur, saisissant une proie par hasard. Il veilla à ce qu'elle soit tout de même bien dodue pour satisfaire la meute pour laquelle il pillait désormais.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

L'absence d'autres individus lui permit d'en prendre une nouvelle et, aussi tôt prise, il s'échappa du Garde-manger à vive allure en s'assurant de ne pas être repérer. Le loup enchaînait les réussites, mais demain était un autre jour, peut-être ne serait-il pas aussi facile que les deux dernières tentatives.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

Le jour venait à peine de se lever sur la terre des Hommes qu'il était là, les observant d'un œil avisé. Ses lèvres était sèches et fracturées. Les blessures qu'on lui avait infligé, il y a quelques jours à peine, peinaient à se fermer, profondes dans ses muscles. Helya ne l'avait pas épargné, même s'il pouvait s'estimer fier d'être encore en vie. Sans ce rocher, il n'aurait pas pu en espérer autant. Il avait vraiment eu de la chance ce jour-là.

Allongé dans la neige, il ne tarda pas à se lever pour s'avancer, à pas feutrés, vers les défenses humaines. En à peine quelques jours, le Village avait pris des allures de forteresse. Les bipèdes devaient en avoir marre d'eux, les loups, pour opposer une telle résistance. Les poils hérissés par l'excitation, ses babines se retroussèrent lorsqu'il fut suffisamment près de ses ennemis pour pouvoir les flairer. S'empêchant de grogner, il longea la première barricade. Le contact avec le bois gelé le fit sursauter. Il essaya de tempérer ses réactions, le regard toujours dirigé vers l'intérieur du camp. Il ne devait pas rater son entrée, pas après avoir passer autant de jours sans tenter le diable.

Brusquement, un chien sembla sentir à son tour son cousin et se mit à aboyer, alertant les autres molosses à ses côtés. Le solitaire cracha quelques murmures dans le blizzard avant de se décaler vers une autre barricade, empêchant ainsi à ces canidés de le repérer à nouveau. Ils se turent quelques secondes après et l'ébène put enfin de nouveau avancer.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

Des traces commencèrent à se dessiner dans la neige, signes que le prédateur était entrain de progresser au sein du Village. Il aurait peut-être du prendre le temps de les dissimuler... Puisqu'une patrouille, passant près du chemin qu'il venait d'emprunter, repéra ses empruntes. Aussitôt, les hommes se mirent à chercher l'animal, empoignant leurs chiens à l'aide de leurs chaînes. Ils hurlèrent quelques paroles dans un dialecte que le loup ne connaissait pas. L'agitation au sein du camp grimpa rapidement, l'obligeant à s'immobiliser près d'un talus. Une erreur de débutant... Il commençait à se maudire silencieusement. Son enseignement lui parut bien loin brusquement, comme si en l'espace de quelques mois, il avait oublié qu'autrefois, il était une sentinelle redoutée, silencieuse et agressive.

Peu à peu, les bipèdes s'éloignèrent de son abri temporaire, lui permettant de se relever pour se déplacer encore plus près de la réserve. Ses foulées étaient grandes et rythmées. Ce coup-ci, il fit tellement de traces qu'il était impossible de savoir sa direction. Ses muscles s'échauffèrent durant sa traversée grâce à son galop aérien. Subitement, il se tapit de nouveau près d'une maison longeant l'endroit de sa convoitise, pour regarder si aucun homme n'était là. De sa position, il pouvait sentir les odeurs alléchantes des proies qui lui mit rapidement l'eau à la bouche.

Traîtrise, tricherie... Fourberie?

S'apercevant que personne ne revenait sur ses pas, le canidé gravit dans un trot silencieux les derniers mètres qui le séparaient du garde-manger. La porte était restée entrouvertes, une chance pour le prédateur qui n'eut aucune difficultés pour s'y insérer. Il observa pendant quelques minutes les proies, si bien qu'une goutte de salive s'échappa de sa bouche pour se répandre sur la terre froide. Il prit brusquement dans sa gueule un lapin, avant de tourner les talons pour sortir. Seulement, ce que n'avait pas prévu le solitaire, c'est que les hommes étaient revenus entre temps.

Alors qu'il s'approchait de la porte, il entendit l'un d'eux à travers. Il était tellement près... qu'il finit par rentrer à son tour dans la réserve, tombant nez à nez avec le loup. Effrayé, celui-ci voulut s'enfuir, mais l'humain l'empêcha de sortir sur le coup. Résigné à rester à l'intérieur, Linceul des Âmes se mit à grogner, gardant fermement son du dans sa mâchoire. Il comptait pas lâcher aussi facilement... Terrant ses postérieures dans le sol, il se propulsa vers l'avant pour bondir vers le torse de l'homme, qu'il heurta quelques secondes après s'être envoler. Tombant à la renverse, il injuria le canidé qui s'empressa de s'enfuir loin de lui. À chacun de ses pas, il soulevait la poudreuse tellement il était rapide et vif. Derrière lui, ses ennemis se mirent à courir et à tirer plusieurs fois. Agile, il changea plusieurs fois de place pour éviter les balles perdues. Il sentait le vent s'engouffrer dans son poil par un baiser glacial qui lui donnait froid dans le dos.

Ce n'est que lorsqu'il pénétra dans la forêt qu'il se mit à ralentir pour récupérer.