Une magnifique fourrure blanche, voilà mon pelage. J’aurais pu me vanter de ça, mais à quoi bon ? Je ne suis pas discrète pour la chasse à come de ça, on me voit à des kilomètres, alors à quoi bon de se vanter de quelque chose qu’on déteste ? Parce que c’est beau ? Je m’enfiche de la beauté moi, car ce n’est pas quelque chose d’important c’est superflu.
J’ai une cicatrice qui part du bas de mon crâne et qui va jusqu’à mon épaule gauche, ainsi qu’une autre au niveau du poitrail. Au moins ça me donne moins l’air d’être une petite louve fragile, qui dès qu’il y a un coup de vent s’envole.
On pourrait le croire car je suis assez maigre, ça doit être à cause des nombreuses journées d’hiver sans rien dans le ventre.
J’ai des yeux noirs, je ne sais pas vraiment comme ça se fait, peut-être à cause de l’environnement qui m’entourent et des radiations émise par la nature même.
Enfin voilà, je ne suis pas extraordinaire.

Lente respiration, douloureuse, froide, presque comme si la vie me quittait petit à petit, c’est peut-être le cas. Chaque goulée d’air me fait tourner la tête, fait souffrir mes poumons en feu, de plus, j’ai le goût amer et âcre du sang dans ma gueule. Dois-je mourir maintenant ? Comment en suis-je arrivée à ça ? J’aurais tellement voulu te voir, encore une fois, une seule fois, mon cher frère.

Fermant lentement les yeux, j’abandonne presque le combat pour la survie, laissant la neige tomber lentement sur mon pelage abordant la même couleur que celle-ci.
Les flocons immaculés, prennent alors une teinte de rouge, et doucement, me glacent jusqu’aux os.
Je me rappel alors tellement de choses, comme si c’était réellement ma fin, et que je devais revoir le passer pour payer de mes fautes, de mes erreurs.
Je me revois louveteau, m’amusant avec toi, toi au pelage foncé, toi qui me semblais si fort, si puissant, si sage, toi qui étais mon héros, je vois également notre mère, à cette époque, elle mangeait encore à sa faim quand père nous ramenait du gibier.

Malheureusement, un jour, il n’est plus jamais venu, sûrement tuer par le froid d’hiver, ou bien des chasseurs, qui étaient nombreux à ce moment-là, et celle qui nous nourrissait, nous offrait un peu de chaleur et d’amour mourait un peu plus chaque jour en nous donnant son souffle de vie. Grâce à elle, nous avons pu survivre jusqu’à être assez fort pour nous débrouiller, mais à quel prix ?
Quand nous sommes rentrés un soir, nous avons découvert le corps sans vie de celle qu’on aimait. Elle nous avait quittées pour rejoindre le ciel, le vent, la nature, car elle nous disait souvent que son esprit resterait sur cette terre pour nous guider, pour nous protéger s'il nous arrive malheur, à cette époque, on lui répondrait à chaque fois « Tu es encore là, donc pense à autre chose et vie ! ».
Mon frère avait pour nom Axyltos, je le trouvais magnifique, il avait des yeux ambrés et un pelage ébène, moi, j’étais simplement blanche. Nous vécûmes ensemble un long moment, ne pouvant se passer de l’autre. Sauf qu’un jour de tempête de neige, mon frère disparu, inquiète, j’étais partie le chercher.

Voici ce qu’il s’est passé.

Je marchais avec difficulté sous cette tempête, même si j’avais hurlé son nom, il ne m’aurait sûrement pas entendue, même si j’aurais essayé de le repérer aux odeurs, ça aurait été impossible, le froid rendait mon odora presque inexistant, même si j’aurais essayé de le suivre aux traces, la neige les avait effacé, si j’aurais essayé de le repérer au son, tout ce que j’aurais pu entendre c’est le sifflement du vent dans mes oreilles. Quel sentiment horrible, j’avais le sentiment d’être inutile, de ne pouvoir rien faire. C’est alors que des traces de sang fraiches tachaient la neige et n’étaient pas encore recouvertes par celle-ci.

Je l'ai suivi le cœur battant, les pensées qui s’emmêlaient imaginant toute sorte de chose, je voulais tellement chasser ce sentiment horrible qui remplissait mon cœur, le faisant devenir aussi lourd que de la pierre. Je marchais rapidement, puis je me mis à courir, de plus en plus vite, j’ignorais la douleur au niveau de mes coussinets meurtri par le froid. Une masse sombre recouverte par de la neige se fit voir au loin. Je m’approchais, les pattes tremblantes, une boule au niveau de la gorge. Je posais mon museau sur poitrail, respirant son odeur avec le peu d’odorat qu’il me restait, c’était bien lui. Il n’était pas glacé, mais il ne respirait plus, de plus un long filet de sang coulait d’une blessure, la cause ? Je ne saurais dire. Je baissais mes oreilles, puis je relevais la tête vers le ciel avant de laisser échapper une longue plainte, une chanson d’adieu, et celle-ci était emportée par le vent, comme tous les bons moments avec mon frère. Plus de chasse à ces côtés, plus de jeu, plus de rire, plus rien, seulement la solitude qui me guettait maintenant.
Je me sentais vide, comme si tout mon monde c’était écroulé.

Les mois ont donc passé, peut-être une année.
Je m’étais faite alors attaquer par un loup, je ne sais pourquoi, peut-être parce qu’il avait faim, parce qu’il était malade, ou devenu fou par la solitude. Je le regardais, puis avec mes dernières forces, je l’ai mordu au niveau de la gorge, lui qui croyait que j’allais mourir, je l’emporterais dans ma tombe.
Nous sommes tombés tous les deux sur le sol de neige, me voilà étendue sur la neige, comme mon frère. Alors que j’abandonnais doucement la vie, je me rappelais tous ces bons moments, tout ce que j’avais fait pour vivre, tous les sacrifices fait, tout cela ne sera pas inutile.
Je me levais avec mal, tremblant, épuiser, fatiguer, glacée. Mon arrière tain ne suivait pas le reste du corps, il retombait presque aussitôt.
Je haletais, je ne mourais pas, c’est ce que je me répétais. Je devais vivre et trouver un but à cette vie qui était devenue fade.
Une ombre s’avança, ma vue était brouillée, c’était difficile de savoir si c’était réellement un loup avec sa taille. Je me mis à grogner. Était-ce la mort qui était venue me chercher ?
J’articulais avec mal :

-Qui es-tu ?
Le loup me répondit d’un ton froid, sans aucune émotion.

- Moi ? Tu te fous de ma gueule ? Ce n’est pas à toi de poser les questions ici merdeuses. Toi, qui es-tu ?

-Je… Je suis Byym.

-Qu'es que tu fous ici ?

Quel loup désagréable. Je lui répondis comme je pouvais, déjà que je n’avais pas beaucoup de force.

-Je me suis perdue… Je ne sais pas vraiment pourquoi je suis ici.

Le loup lâchait un ''Tss’’ comme de dégoût. J’avais envie de le mordre, mais vu mon état actuel, tout ce que je ferais, c’est mourir.

-Pathétique.

- Au moins, moi, je ne regarde pas une louve en train de crever. Grognais-je.

-Ferme ta gueule. Je suis Tybalt. Navnik.On manque de loups, tu peu marcher et me suivre où je t'achève?

Je le fixais un moment, il n'y avait pas vraiment le choix, on peut dire. J’essayais de me lever à nouveau, bien que cela m’ait demandé un effort très important, je ne sais pas d’ailleurs où j’ai trouvé cette force.
Le mâle s’approcha de l’agonisant, et l’acheva purement et simplement. On peut dire que j’avais échappé à ce sort.
Je regardais le ciel quelques secondes puis je souris en comprenant quelques choses, peut-être finalement que c’était vrai, que ma famille veillait sur moi, et que d’une quelconque façon, m’avait redonné un but. J’avais échappé à la mort, au désespoir, à la faim et à la solitude, peut-être que ce loup n’est peut-être pas la mort, mais le présage d’un espoir. Comme pour confirmer ça, le vent souffla dans mon pelage, son souffle allait dans la direction du mâle, comme pour dire de le suivre, ce que je fis, bien que chaque pas me fit souffrir.
Le début d’une nouvelle vie, tu entends ça cher frère ? Je serais heureuse pour toi, pour mère et père.

© ASHLING POUR EPICODE