C'était une belle fin d'après-midi comme en compte par dizaines la période de l'automne. Un peu bizarre, tout de même, avec ces ombres menaçantes et hautes, ses couleurs orangées et toute cette brillance aveuglante. Daria aimait ce temps-là où le soleil embrase le ciel et semble plonger dans les entrailles de la terre. Un temps pour chasser.

Ses pattes commençait à lui faire mal, mais qu'importe. Il fallait chasser, il fallait qu'elle sorte. Avec la chance qu'elle avait eut ces derniers temps, elle se devait de retenter le coup.

Pas de grand vent , ce soir-là, mais seulement la fraicheur habituelle. La louve leva sa truffe haut, huma les senteurs que lui portait un léger zéphyr. Elle reconnut alors l'odeur familière d'un animal. Et non loin de l'endroit où elle se trouvait. Envahit par l'adrénaline caractéristique de la chasse, elle rejoint en moins de deux l'animal. C'était une belle proie, et de taille. Un caribou. Il fallait qu'elle soit rapide. "C'est parti" pensa-t-elle avant de s'élancer.

L'animal l'aperçut et prit la fuite. Avant qu'il n'est eût le temps de galoper, Daria lui avait saisit une patte arrière. La bête poussa des mugissements apeurés et secoua durement sa jambe, si bien que Daria se cogna contre ses antérieurs. Remise sur ses pattes douloureuses en un rien de temps, elle profita de sa position pour lui foncer dans les pattes avant et le renverser. Le caribou tomba tête la première dans l'herbe et la louve s'écarta de justesse avant qu'il ne s'écroule sur elle. A cet instant, le prédateur sauta sur le coup de sa proie, qui résista. Elle s'acharna pour rejoindre sa gorge et d'un coup de dents sec, elle l'égorgea.
Le museau souillé de sang, le poil plein de brindilles, elle se relava en contemplant sa prise qui ferait assurément des heureux.

Quand Daria revint pour chasser, il faisait presque nuit. Une légère bruine tombait du ciel, perlant le pelage de Daria de mille petites gouttes. La louve appréciait de chasser dans le noir, car les petites proies sortaient essentiellement la nuit.

Elle trottait, comme toujours, la langue pendante pour savourer la fraicheur nocturne. La truffe à l'affût, elle repéra bientôt l'odeur d'une proie. Elle ralentit l'allure. Plus lentement, elle suivit la trace du gibier. La louve était attentive. Mieux valait ne pas foncer dans sa proie au risque de la voir filer. Elle eut bientôt rejoint la bête en question. C'était une perdrix, un bel oiseau. Elle fouillait le sol de sa patte, cherchant quelques graines. Daria s'imagina planter ses crocs dans sa chair tendre, ce qui lui redonna de l'entrain.

Presque couché à terre, elle se rapprocha le plus possible de la bête et, bondissant dans la nuit, elle lui atterrit dessus. L'oiseau battit des ailes et piailla si fort que la louve crut qu'elle perdrait le sens de l'ouïe. Tant bien que mal, la perdrix se dégagea mais Daria réussit, entre deux coups d'aile dans le museau, à lui briser le cou.
Et hop, une proie de plus pour le garde manger.

Truffe à terre, sens aux aguets, oeil perçant. Daria cherchait la proie adéquat pour couvrir les besoins de sa meute. Il fallait si possible une grosse bête et grasse, peu rapide et qui ne crie pas (pour le côté agréable). Mais tout le monde savait que cet animal idyllique n'existait pas. En cherchant bien, la louve réussit à débusquer la trace d'un bel animal. Trop éventée pour déterminer son espèce, elle la suivit sans relâche jusqu'à atteindre un endroit où l'odeur était plus présente que jamais. Stoppant sa course silencieuse, elle fit volte-face, les oreilles dressées, très attentive. C'est alors qu'elle aperçut la silhouette d'un ovin au pelage peu fourni. Il broutait l'herbe grillée et relevait parfois la tête pour bêler. Un mouton ? Si loin de chez les hommes ? C'était inné, et une chance à ne pas rater !

Prudemment, Daria s'avança vers lui. Le vent lui était favorable, si bien que la bête de l'entendît pas approcher. Un pas, puis un autre pas, doucement. Puis un arrêt quand le mouton relève la tête, et puis on continue. Ce petit jeu dura près de 10 minutes tant la louve était éloignée de sa proie. Quand elle fut assez près pour détailler son repas, elle remarqua avec surprise que ce n'était pas un mouton, mais une chèvre. Autour de son cou pendait un long fil qui semblait avoir été rompu violemment. "La vilaine bête s'est enfuie de chez ses gardiens… pensa le bras-droit avec plaisir. Elle va regretter d'avoir joué l'aventurière".

Sans plus aucune hésitation, elle s'élança vers la chèvre. Bondissant sur son dos, elle réussit à la plaquer sans trop de mal au sol mais l'animal rua et donna un gros coup de sabot dans la mâchoire de la louve, qui retint un hurlement de douleur. La chèvre profita que son assaillant soit sonné pour tenter de s'enfuir à découvert. Après une seconde d'hésitation, Daria courut après elle. Ses muscles allaient bientôt la lâcher, et c'est alors qu'elle eut une idée. Bondissant, elle saisit la corde qui trainait derrière la chèvre et freina de toute ses forces. Sa proie tomba à la renverse et s'écrasa lourdement au sol. Elle bêla de terreur et Daria mit fin à ses jours d'un rapide cou de crocs.
Sa mâchoire la lançait terriblement, mais elle finit par se dire que ça en valait la peine.