Non Anathos, ce n’est pas un cauchemar. C’est bien la merveilleuse réalité. L’odeur qui se repend parmi la cendre est belle et bien celle que tu as du supporter pendant les cinq années de ta captivité. Oui, cette odeur n’est autre que celle de mes semblables : les hommes.

Durant les deux premières années de ta liberté, tu n’as pas fait la rencontre de moindres bipèdes, explorant des terres trop éloignées de la civilisation pour eux, mais ces terres où tu as atterris aujourd’hui sont différentes, tu as dû le remarquer au peu de nourriture qu’elles procurent et aux paysages morts qui l’habitent. Et voilà que tu te retrouves juste au-dessus d’un village humain, le comble pour toi.

Ta réaction est très amusante, tu trembles de partout. De peur ? Non, il y longtemps que tu ne ressentais plus la peur, c’était de la haine, une haine folle qui contamine ton sang et atteint ton cerveau. Déjà je te vois les oreilles plaquées sur ton crâne, les babines retroussées, la bave dégoulinant de ta gueule, on pourrait croire que tu as la rage. Tu voulais tuer tous ces hommes vivants dans ce village, les tuer un par un par, les voir agoniser, voir la mort prendre peu à peu possession d’eux, voilà ce qui te pousse à descendre la colline. Même la cendre qui flotte dans l’air n’atteint plus tes bronches, tu es en transe, tuer … non que dis-je, massacrer est la seule chose que tu souhaites faire. Tu ne fais même plus attention à l’odeur familière qui chatouilla tes narines, une odeur de loup, par contre le bruit – quasi inaudible – qui cassa le silence de la plaine te fit stopper net.

FLASH ! Tu te trouvais dans une salle … non une arène … l’arène où tu te battais à mort ! Le combat était fini, les parieurs sortaient un à un de la salle, certains les sacs gorgés d’or d’autres ont eût moins de chance. Toi tu les regardais partir, tu voulais par-dessus tout leur courir après, tu voulais par-dessus-tout planter tes crocs dans la tendre chaire. Un bruit, te ramena à la réalité, un bruit quasi inaudible, un râle d’agonie. Tes yeux se posèrent alors sur le chien égorgé – mais encore vivant – dont la sciure buvait le sang qui coulait de son corps ….

Une de tes visions est venue te hanter. Ton esprit s’amuse avec toi et pour une fois j’en suis content ! Tes griffes plantées dans la terre tu soufflais comme si tu venais de courir durant des jours sans t’arrêter. Mais … que fais-tu ? Tu ne continues plus jusqu’au village des hommes, tu te diriges droit vers le bruit. Intéressant.

Presque aussitôt, un loup apparu, beige et noir comme toi, à la différence qu’il n’était pas menaçant comme toi tu l’étais. Tu avais toujours les babines retroussées, montrant tes crocs étincelants, quelques spasmes nerveux parcoururent tes pattes, mais ce n’étais pas contre lui que ta rage écumait. Tu tentas de te calmer, refermant ta gueule et redressant les oreilles ce qui ne t’empêcha d’avoir un air toujours aussi menaçant.

« Qui êtes-vous ? » dis-tu d’une voix de velours liquides.

Tant de courtoisie en toi … mais non. C’était juste pour souligner à quel point vous êtes des inconnus, pourquoi ne l’attaques-tu pas Anathos ? Tue-le qu’on en finisse ! Mais ta conscience elle te dictait autre chose. Il pourra peut-être t’expliquer sur quelles terres tu as atterris et comment se fait-il qu’il y est des hommes ici.
J’ai hâte de voir ce que cette rencontre donnera.