J’errais aux alentours du Marais depuis plusieurs jours. Parfois, quand je n’étais pas trop épuisé, je recherchai de la nourriture, la truffe dans la boue puante. Cet endroit grouillait de vie, mais pas forcément de choses mangeables. Ce matin-là, j’étais étendu aux couverts des arbres au bord de l’eau, le museau posé sur mes antérieurs croisés. Je reposais mes paupières et mon corps épuisé, les oreilles plaquées sur mon crâne. Les sons autour de moi étaient étouffés et je ne prêtais pas attention aux odeurs. Le temps avait passé et j’avais perdu en vigueur. Je devais me nourrir mais chasser seul ne donner rien en général. Je respirais lentement en prenant plaisir à sentir le sol mou et tiède sous mon ventre et l’air doux sur mon dos. Gardant les yeux fermés, je passais paisiblement ma langue sur les poils en batail de mon poitrail. Ces temps-ci, je faisais attention à l’état de ma fourrure et j’étais sans cesse irréprochable. Je me pourléchais les babines en imaginant un gros rat des eaux dodu. Mon estomac se tordit à cette pensée et je serrais les mâchoires pour retenir un grognement plaintif. Soudain, je remarquais un fumé étrange. Celui d’une louve de clan. Quel clan, je m’en fichais royalement. Elle représentait un danger considérable car je n’étais pas au meilleur de ma forme et depuis le temps que je flânais à l’ombre elle avait eu des heures pour m’observer. J’ouvris les yeux et jetais un discret coup d’œil circulaire sans bouger la tête. Je repérer une masse derrière un petit bosquet. Je réunis intérieurement tout mon courage et les lambeaux de force qu’il me restait. Je bondis sur mes pattes en feignant d’être vigoureux et bombais la poitrine en fusillant sa silhouette du regard.

« Sortez de votre cachette vous êtes démasquée, grognais-je en adoptant une position défensive, tête basse et poil hérissé. »