Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
Kira pataugeait depuis une longue heure. La jeune louve détestait cet endroit. Elle détestait le fait d'avoir dû quitter leurs anciennes terres, elle détestait cette fichue exode pendant laquelle elle avait bien failli se perdre - ou pire - et elle détestait ce fichu étang. Astral lui avait demandé d'aller voir si elle pourrait y trouver des plantes utiles. La jeune apprentie s'était exécutée. Mais une fois dans l'étang elle s'était rendu compte de la stupidité de cet endroit. Comment pouvait-elle trouver quoi que ce soit d'intéressant dans toute cette vase ? Ses pattes étaient vertes à force de remuer les bas-fonds et elle commençait à avoir froid. La louve pouvait déjà entendre Astral râler lorsqu'elle reviendrait la gueule vide. En même temps, pourquoi les Aldarks avaient-ils choisis de vivre dans un endroit pareil ? Des galeries obscures où la louve n'y voyait strictement rien et ne cessait de se cogner dans tous les recoins et un étang de vase totalement inutile. Kira pesta contre elle-même lorsqu'elle sentit qu'elle marchait encore une fois sur un crapaud. Le batracien bondit plus loin en croassant d'indignation. «Oh ça va, je ne l'ai pas fait exprès !, lança Kira, agacée. Depuis leur arrivée ici, la jeune louve était de mauvaise humeur. Elle avait presque huit mois et elle avait l'impression que son apprentissage n'avançait pas, qu'elle ne deviendrait jamais guérisseuse à part entière. Astral insistait pour que la jeune louve suive ses enseignements comme n'importe quel apprenti, ce qui était franchement compliqué lorsqu'il décidait de rester dans son antre pour lui donner les propriétés des différentes plantes qu'elle ne pouvait voir donc qu'elle ne parvenait pas à identifier à l'extérieur. Et Kira ressortait de chaque nouvelle leçon encore plus frustrée que précédemment. Tandis qu'elle recommençait à fouiner et à se salir les pattes, la jeune louve entendit des pas humides derrière elle. Elle tourna la tête dans cette direction, les oreilles dressées vers l'avant. Isanagi se dirigeait vers elle. Kira n'avait pas vu la louve blanche depuis un petit moment. -Salut Isanagi !», la salua-t-elle d'un ton neutre. Elle détourna ensuite son attention de son amie pour reprendre ses fouilles. Elle n'était pas vraiment d'humeur à parler, et le temps s'écoulait tandis qu'elle avait de moins en moins de succès dans ses recherches.
J'errais tranquillement dans les marécages, mes pattes émettant des bruits de succion à chaque pas, dû à cette mer de vase. Même si au début ces terres m'avaient semblé détestable, au final je m'y étais habituée. J'avais même compris quelques techniques de chasse pour ce nouveau bout de territoire. En revanche, bien que désormais je connaisse assez bien l'Etang de Vase, je n'avais toujours pas exploré la Tranchée Abandonnée. J'avais remarqué que certains avaient étés grandement bouleversés par l'exode et bla et bla et bla... Pas moi. L'exode m'avait bien amusé et puis cela avait fait un petit tri. Les plus faibles, même parmi les faibles avaient, comme je m'y attendais et l'avais espéré, étaient tués. Soit pendant le route pour ces novelles terres, soit pendant que la Terre foutait le bordel sur notre petit monde. Alors que je pensais à tout ceci, j'entendis un énorme croassement indigné puis une louvette à la voix familière pester contre le batracien. -Oh ça va, je ne l'ai pas fait exprès ! Je retins un petit soupir d'exaspération. Pas encore elle. Je continuais à avancer et déboulait rapidement dans une petit clairière où je vis Kira, l'air agacée. Ma posture était, par simple habitude, légèrement dominante : queue assez haute, oreilles dressées et posture bien droite. La femelle noie tourna ses oreilles couleur d'ébène vers moi et lança d'un ton neutre. -Salut Isanagi ! J'inclinais mes oreilles vers elle et la salua du même ton neutre. -Salut Kira ! A peine lui lançais je mes salutation que la noiraude se retourna et continua à farfouiller dans ses buissons. Je poussa un petit soupir. Qu'aurait fait une petite louvette niaise et gentille dans ces situations là ? Ah, je sais ! Je lançais d'une petite voix faussement curieuse, la tête penchée sur le côté, un air amusé dans mes yeux. -Tu as besoin d'aide petite louve ? Le "petite louve" m'avait échappé des lèvres. Mais bon, après tout j'étais libre de dire ce que je voulais et puis j'étais plus âgée qu'elle. Mais bon cela pourrait lui paraitre bizarre. Mais peu importe, cette petite louve n'allait pas m'embêter pour un détail.
«Salut Kira !, lui répondit Isanagi. Kira ne rajouta rien. Elle n'avait pas de temps à perdre et elle espérait que son amie pourrait le comprendre et trouver quelqu'un d'autre pour discuter. De plus, elle avait eu certains échos sur la louve blanche lors de sa dernière discussion avec Eren et elle ne savait trop quoi en penser. Mais après tout, ce n'était pas parce que le jeune mâle n'appréciait pas l'apprentie Umbra qu'elle devait l'ignorer elle aussi. Isanagi s'approcha d'elle en penchant la tête de côté, s'intéressant à ce que faisait la louve noire. -Tu as besoin d'aide petite louve ?, questionna-t-elle. Kira releva la tête avec étonnement. Ce n'était pas vraiment du genre à Isanagi de proposer son aide. Et "petite louve" ? D'où sortait ce nouveau surnom ? L'apprentie guérisseuse secoua la tête: -Non merci, je dois me débrouiller seule. De toute façon, il n'y a rien ici, Astral m'a encore fait perdre mon temps. Elle fixa la louve blanche un instant avant de remettre de nouveau le nez dans la vase. -Et je ne suis pas une petite louve., marmonna-t-elle. Je te rappelle que tu as seulement un mois de plus, petite louve blanche. Kira n'aimait pas vraiment rabaisser les autres, mais sa mauvaise humeur et son irritation ensemble lui faisaient perdre quelque peu son contrôle. Et se faire traiter de petite louve lui rappelait trop les moqueries des autres louveteaux lorsqu'elle était plus jeune, à cause de ses yeux et de sa faiblesse. Elle ne se laissait plus marcher sur les pattes désormais et Isanagi n'aurait aucun traitement de faveur. Abandonnant finalement sa tâche vaine, Kira se retourna finalement vers Isanagi. La louve noire n'avait pas l'énergie pour se disputer avec elle. -Si tu n'as rien d'autre à me dire alors va-t-en. Je dois faire le rapport de mes recherches qui n'ont rien données à Astral.» Elle lança un regard mauvais à son amie. Ce n'était vraiment pas le moment de l'ennuyer. Kira n'avait jamais été aussi énervée de toute sa vie.
La femelle noire aux yeux rouges secoua la tête et répondit. -Non merci, je dois me débrouiller seule. De toute façon, il n'y a rien ici, Astral m'a encore fait perdre mon temps. Kira sembla rester supsendue ainsi quelques instants puis, l'air irrité, elle marmonna, remettant son fin et frêle petit museau dans toute la vase. -Et je ne suis pas une petite louve. Je te rappelle que tu as seulement un mois de plus, petite louve blanche. Un mince sourire amusé vint fleurir sur mes lèvres. La petite loupiote commençait à s'énerver. Je me reculais de quelques pas d'elle, je n'aimais pas le fait d'être trop à proximité de cette louve niaise, et je m'assis. Pourquoi ne pas l'embêter encore un peu... Au bout d'un petit moment, l'apprentie guérisseuse arrêta de farfouiller dans la vase et se returna vers moi, le museau plein de ce liquide terreux. La petite louve aux yeux sanguins avait l'air fatigué, comme si un poids invisible pesait sur ses épaules. Le poids de quoi ? de sa crédulité ? Je rigolais intérieurement. -Si tu n'as rien d'autre à me dire alors va-t-en. Je dois faire le rapport de mes recherches qui n'ont rien données à Astral. Kira me lança un regard mauvais. Aussitôt, une colère sourde, destructrice monta moi. Ce petit insecte dérangeant osait me donner des ordres ? A moi ? Ce petit visage frêle et si mignon... Je l'imaginais déjà entre mes pattes, en train de lui arracher la peau tandis qu'elle hurlait de douleur... Aahaaa... D'un pas lent et impérial, je m'avançais vers la femelle noire, le pelage gonflé au maximum, les crocs dévoilés en un sourire béats, effrayants et mes yeux emplis de tant de haine et d'envie de faire souffrir que cela en aurait fait trembler plus d'un. Ma queue était haute. Lorsque je fus arrivé à a peine quelques centimètres de la noiraude, je leva lentement ma patte et passa lentement une petite griffe sur tout son visage. Ma griffe se rapprocha dangereusement de son oeil gauche par rapport à moi et droit pour elle. Je chuchota d'une petite voix. -Tu as de si beaux yeux... Je poussais un petit soupir exalté et je lécha l'oreille toute douce de cette petite femelle. Bien entendu, je m'étais préparée à une riposte de la femelle et mon corps était solidement campé sur ses pattes.
Kira était peut-être allée trop loin. Elle avait peut-être été un peu trop désagréable. Elle ne le voulais pas mais tout l'agacement accumulé depuis leur arrivée avait besoin de sortir un jour ou l'autre. C'était peut-être une erreur de s'en prendre à Isanagi. Elle s'en rendit compte lorsqu'elle vit l'expression de cette dernière passer de l'amusement à la colère. Il était trop tard pour s'excuser, le mal était fait. Son amie se releva lentement et s'approcha à pas effroyablement lents de la jeune louve. Kira ne bougeait plus, ne sachant comment réagir. Isanagi n'était plus la même. Elle n'était plus la gentille louve qui jouait avec elle. Et cette nouvelle apparence pétrifiait Kira. Elle ne put reculer que d'un pas lorsque la louve blanche parvint à son niveau. Alors, elle glissa sa griffe dangereusement proche de son œil droit, tout en lui léchant l'oreille. «Tu as de si beaux yeux..., chuchota-t-elle d'une voix glaçante. Aussitôt, Kira la fit reculer en claquant des mâchoires à quelques centimètres de la gueule d'Isanagi. L'apprentie guérisseuse se mit sur la défensive, les oreilles rabattues sur le crâne, montrant les crocs et poussant un grondement d'avertissement. -Laisse-moi tranquille !, grogna-t-elle d'une voix mal assurée. Tu n'es plus toi-même, je ne veux pas te parler ! Kira essayait de paraître menaçante, en vain. Elle sentait ses pattes trembler et elle n'avait qu'une envie: fuir. Si la situation dégénérait, elle ne savait comment elle s'en sortirait. Ce qu'elle savait par contre, c'était qu'Isanagi était une apprentie Umbra et qu'elle était plus forte et agile qu'elle. Il fallait qu'elle s'en aille. Mais elle n'osait tourner le dos à son "amie". -Dégage !», lança-t-elle. Elle regretta aussitôt ses paroles lorsqu'elle vit que la colère d'Isanagi ne faisait que s'accroître ...
Aussitôt que ma phrase fut prononcée, la louvette noire recula précipitamment d'un pas et fit claquer ses mâchoires près de mes fines oreilles délicates. La femelle noire se mit en posture défensive, oreilles rabattues en arrière, crocs découverts, et un fin grognement d'avertissement sortant de sa gorge. D'une voix légèrement plus aiguë que la normale, la femelle glapit. -Laisse-moi tranquille ! Tu n'es plus toi-même, je ne veux pas te parler ! La louvette puait la peur. Ses pattes tremblaient sous son corps et, elle regardait furtivement un peu partout, comme si son instinct lui hurlait de fuir. Soudainement, la noiraude s'écria. -Dégage ! Un sourire atrocement déformé fleurit sur mes lèvres, un éclat de folie luisant dans mes yeux. Je pencha doucement ma tête sur le côté, fixant Kira d'un oeil mauvais. Je me jeta alors sur la femelle, la plaquant au sol. Je plaqua mes deux pattes avant sur ses épaules, la maintenant fermement. Je lui gronda férocement dessus et fit mine d'avancer mon museau vers sa gorge avant de la défaire de mon emprise en faisant un bond en arrière. Je commenças alors lentement à tourner autour d'elle, poussant un petit rire cristallin. J'allais écraser cette louve. J'allais l'écraser comme tout les insectes qui se montreront devant moi et deviendront gênants. Mais bon, malheureusement je ne pouvais ni tuer cette louve, ni lui faire réellement du mal. Si je laissais des traces, les gens auront une raison de m'accuser alors que si elle n'avait aucune trace et m'accusait, l'on pourrait apparenter cela au fait qu'elle ait accidentellement reniflé des herbes hallucinogènes en cherchant des plantes pour son mentor. Tout était prévu ! Mais bon, prenons précautions mais aussi quelques avantages... Je lui soufflas, tentant de la faire chanter. -Si tu veux vivre, je pourrais te proposer quelque chose... J'attendis un petit peu avant de reprendre, d'une voix lente, si tu veux continuer à vivre, tu vas devoir faire tout ce que je veux quand je le voudrais et surtout, ne rien dire de ce qu'il s'est passé ici. Facile, non ? Cette petite louve pourrait sûrement me servir. Je lui trouverais bien une utilité. En revanche, si elle n'acceptait pas ma proposition, j'allais continuer à jouer avec elle encore un petit peu...
Kira restait sur sa posture défensive, tentant de paraître impressionnante. En vain. Ses pattes tremblaient de manière incontrôlable. Elle cherchait une échappatoire du regard, ou alors quelqu'un, n'importe qui pour l'aider. Mais rien, ni personne. Kira reporta son attention sur Isanagi, qui semblait plus énervée que jamais. Soudain, sans avertissement, la louve blanche lui bondit dessus. Kira laissa échapper un glapissement de terreur tandis que la louve la plaquait violemment au sol et l'y maintenait à l'aide de ses puissantes pattes. Elle approcha dangereusement ses crocs de la gorge de l'apprentie guérisseuse, qui déglutit en se débattant faiblement. Non, elle ne pouvait pas mourir comme ça. Ce n'était qu'un cauchemar, Isanagi était gentille ... Et pourtant elle était bien là, tout était réel. Isanagi la libéra aussi soudainement qu'elle l'avait attaquée. Kira se releva à moitié, restant accroupie au sol, les oreilles plaquées sur le crâne et le regard terrifié fixant celle qu'elle appelait son amie il y a quelques instants encore. «Si tu veux vivre, je pourrais te proposer quelque chose ... si tu veux continuer à vivre, tu vas devoir faire tout ce que je veux quand je le voudrais et surtout, ne rien dire de ce qu'il s'est passé ici. Facile, non ?, annonça cette dernière d'une voix glaçante. Kira la fixait toujours, mais avec incompréhension maintenant. Elle venait de la menacer ... de mort ? Non, impossible. Et pourtant elle avait clairement entendu ses paroles et elles ne pouvaient être plus directes. Elle songea à ce qu'elle lui avait dit ensuite. Faire ce qu'elle voulait ... absolument tout ... Kira ne pouvait s'y résoudre. Elle devait avertir les autres, Isanagi avait un problème. Elle ne savait quel mal, quelle maladie la louve blanche avait contracté mais Astral pourrait certainement la soigner. Isanagi n'était pas dans son état normal. Elle se releva finalement, lentement, tentant toujours de maîtriser ses tremblements. Puis elle se campa solidement sur ses pattes face à son amie. -Non, je ne t'obéirais pas Isanagi. Tu vas mal, il faut que tu te fasses soigner.», gémit-elle. Elle planta son regard de rubis dans celui de la louve blanche, avec une lueur d'espoir.
Kira me fixa un long moment, l'air pensive, mais aussi, et surtout, terrifiée. Lentement la noiraude se releva mais ses tremblements ne cessèrent pas. La femelle tenta tant bien que mal de se camper sur ses pattes. Dans un petit gémissement pitoyable, la louvette me lança. -Non, je ne t'obéirais pas Isanagi. Tu vas mal, il faut que tu te fasses soigner. Avec une petite lueur d'espoir, la femelle planta son regard dans le mien. Pauvre petite créature naïve et faiblarde. Tu aurais mieux fait de finir ta vie avant qu'elle ne commence, sale insecte. Je lui lança un regard méprisant chargé de haine. Je m'avança lentement, prit un visage attendrissant et... Envoya ma patte, griffes rentrées, droit dans la figure de la femelle noire avec violence. Moi même me fit un peu mal à la patte en la frappant. Une douleur délicieuse que j’accueillis les bras grand ouverts. La gifler ne devrait laisser presque aucune trace physique, non ? Je lançais un grand sourie à Kira, attendant sa réaction. Je me tins prête à filer à toute allure si jamais elle tentait de s'enfuir. Mieux vaut être prévisible. Mon sourire était narquois et, de la patte gauche, je fis mine de lui remettre la même gifle mais, bien évidamment, je ne le fis pas. au dernier moment, j'arrêtais mon geste et poussa un petit rire cristallin. J'effaça alors soudainement toute trace de jovialité de mon visage et fixa d'un regard lourd, pesant, la petite femelle. D'une voix froide, je lui lança en m'approchant de quelques pas. -Tu te fiche de moi ou quoi ? Je suis aussi malade que toi. Et bien quoi ? Tu croyais vraiment que je t'aimais bien peut être ? Tu n'es qu'un pauvre insecte inutile et misérable ! crachais-je. Tu n'es qu'un pion dans mes plans. Mais un pion inutile. Tu n'es encore en vie que car tu es de ma meute et que te tuer mettrait l'bordel dans mes plans. Tu n'est PAS mon ami. Ce n'est pas en souriant comme une idiote que tu vas survivre ! Finis je en criant. Je me jeta alors sur cette créature à forme lupine et lui colla une autre gifle. Je me recula de nouveau, écumante de rage. C'était limite si la bave coulait à mes babines.
Kira continuait à fixer son amie avec espoir. Elle voulait que celle-ci reprenne conscience, qu'elle redevienne celle qu'elle connaissait. Mais elle vit dans ces yeux une toute autre lueur. Plus de colère, mais un sentiment bien plus fort et destructeur: de la haine. Oui, c'était cela, Isanagi la regardait avec un regard empli de haine. Elle s'avança de nouveau vers elle lentement. Pétrifiée par la peur et l'appréhension, Kira ne pouvait bouger. Ses pattes semblaient ne plus lui obéir. Soudain, elle vit la patte d'Isanagi se diriger vers elle. La seconde suivante, elle ressentit une violente douleur lorsque cette dernière vint heurter son museau. Kira glapit de nouveau et se recula de quelques pas. «Tu te fiche de moi ou quoi ? Je suis aussi malade que toi. Et bien quoi ? Tu croyais vraiment que je t'aimais bien peut être ? Tu n'es qu'un pauvre insecte inutile et misérable ! Tu n'es qu'un pion dans mes plans. Mais un pion inutile. Tu n'es encore en vie que car tu es de ma meute et que te tuer mettrait l'bordel dans mes plans. Tu n'est PAS mon ami. Ce n'est pas en souriant comme une idiote que tu vas survivre !», cracha Isanagi. Kira la fixait en tremblant de tous ses membres. La louve blanche était terrifiante. Son poil était hérissé, de la bave coulait de ses terribles mâchoires dont les crocs luisaient et son regard, son regard était froid et calculateur. Un regard de prédateur face à sa proie. Kira n'était qu'une proie. Et comme toute proie, elle finirait par être tuée si elle ne se défendait pas. Tandis que la jeune louve au pelage noir tentait de trouver une solution, Isanagi se jeta de nouveau sur elle et lui donna un second coup de patte. C'en était trop. Kira ne voulait pas se laisser faire sans rien dire. Tant pis si elle perdait ce combat et se blessait, elle ne pouvait pas laisser Isanagi l'humilier de la sorte sans agir. L'apprentie guérisseuse poussa un grondement menaçant, puis, sans autre forme d'avertissement, elle bondit sur la louve blanche. Arrivée à son niveau, Kira planta ses crocs dans son épaule sans pour autant la blesser. Elle voulait juste lui faire peur, la dissuader de l'embêter. Elle était une future guérisseuse, elle ne pouvait se résoudre à blesser quelqu'un.
Soudainement, alors que je me préparais,à,bondir sur la femelle afin seulement de la renverser, Kira gronda férocement et, sans avertir personne, me bondit dessus, me devançant. La louvette noire me prit au dépourvu. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle riposte. Moi qui la croyais faible et ennuyante, voila qui s'annonçait plus amusant que prévu... Une fois qu'elle fut arrivée à mon niveau, la jeune louvette aux yeux sanguins planta ses crocs dans mon épaule mais le sang ne coula pas, comme si elle refusait de me faire mal. Seul ma peau épaisse avait été prise. Un léger sourire vint se former sur les babines. On aurait dit qu'elle était réticente à me frapper. J'allais utiliser cet atout le mieux possible afin de la faire culpabiliser. Je poussais un faux petit cri de douleur et m'ébrouais violemment, grognant de plus belle. Je tentais de la faire relâcher prise, même si cela ne me gênait pas vraiment mais la louve pourrait resserrer fortement ses mâchoires et donc là me blesser pour de vrai. Lorsque je sentis la pression de sa mâchoire sur mon épaule, déjà faible, se faiblir encore plus, je me leva sur mes deux pattes arrières et lança une de mes pattes avant devant moi, tentant de faire dégager la noire. Je ne savais pas vraiment si j'avais touché la louvette, mon coup était puissant mais très peu précis, mais au fond de moi je l’espérais afin de l'entendre glapir de douleur.
Kira tenait la peau d'Isanagi entre ses crocs. Même si son instinct lui disait de mordre, de vraiment attaquer, elle l'ignora avec une puissante réticence. Son but, son ultime quête était de soigner les autres, de guérir leurs blessures, pas de les provoquer. Elle ne pouvait s'y résoudre, elle n'avait d'autre choix, sinon elle ne serait pas digne de devenir une guérisseuse. Soudain, Isanagi poussa un cri de douleur. Kira écarquilla les yeux. Avait-elle transgressé ses propres règles, brisé ses propres limites ? Pourtant elle n'avait pas accentué la pression de ses mâchoires. Une suspicion lui vint soudain à l'esprit. Si Isanagi n'était pas dans son état normal, se pouvait-il qu'elle simule le fait d'avoir mal pour lui faire lâcher prise ? Kira n'eut pas plus le temps d'y réfléchir que la louve blanche se secoua en tous sens. La jeune louve n'eut d'autre choix que de la lâcher. Alors, elle vit son "amie" se redresser et sentit un nouveau coup de patte, plus puissant, atteindre son flanc. Kira roula au sol avec un nouveau glapissement de douleur. Elle resta allongée là quelques instants, essoufflée. Elle n'y croyait pas, elle ne parvenait à réaliser ce qui était en train de se dérouler. Pourquoi Isanagi la frappait-elle ainsi ? Elle était pourtant son amie ... La louve songea à ses paroles. Non, elle n'était pas son amie et ne l'avait jamais été. Alors elle avait joué la comédie pendant tout ce temps ? Tu n'es qu'un pauvre insecte inutile et misérable ! Ce n'est pas en souriant comme une idiote que tu vas survivre ! Là, étalée au sol, n'ayant plus la motivation de se relever pour affronter la louve blanche, Kira se sentait bel et bien inutile et misérable. Et si Isanagi avait raison ? Et si elle était vouée à l'échec ? Après tout, elle était née différente des autres, elle avait hérité d'un handicap qui l'avait gardée loin des autres, loin de ses rêves également. Personne ne voulait d'elle, elle n'était qu'un poids mort pour la meute, elle n'arrivait même pas à progresser dans son apprentissage. Elle souriait à tout le monde, mais si les autres faisaient semblant ? Si ils riaient tous de sa vie une fois qu'elle avait le dos tourné ? Elle était inutile, elle était misérable ... Une louve faible et sans aucun avenir ... Sa vie n'était qu'une succession d'échecs et de déceptions, et si Isanagi disait vrai alors elle serait courte ... Elle se ferait tuer par le premier solitaire qu'elle rencontrerait, ou alors tomberait d'une falaise ou dans un ravin si elle était contrainte à mettre les pattes dehors en pleine nuit encore une fois ... Kira ne voulait pas d'une vie comme ça ... Dans ce cas, autant abandonner tout de suite, se laisser mourir et libérer sa meute et ses amis de tous les problèmes qu'elle leur apportait. Kira vit sa vue devenir de plus en plus floue. Elle allait pleurer, elle le sentait. Elle se releva lentement, se mit debout sur ses pattes tremblantes et se retourna vers Isanagi, le regard embué et le pelage couvert de terre. «Je te déteste !, lui hurla-t-elle. Je ne veux plus jamais te voir !» Sur ces mots, la louve fit volte-face et s'élança à travers les arbres. Elle courait à grandes foulées, droit devant elle. Elle voulait rentrer à sa tanière, s'y enfoncer pour ne plus jamais en ressortir. Kira sentit les larmes couler sur ses joues. Son souffle était saccadé, autant par sa course que par ses sanglots. Elle était faible et inutile ...