Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
La nuit était agréable, sous le couvert des arbres. Epsilon n'avait pas réussi à trouver le sommeil. Son corps avait besoin de se dépenser comme il ne l'avait pas fait depuis longtemps... Il commença donc par trottiner dans la forêt, détendant peu à peu ses pattes. Après plusieurs minutes, le jeune mâle se mit à courir, de plus en plus rapidement. Il vacillait entre les arbres, évitant chacun d'entre-eux au dernier instant par de petits bonds rapides. Poursuivant l'exercice jusqu'à l'autre extrémité de la forêt, Epsilon décida de repartir dans l'autre sens. Cette fois, il courut en ligne droite, le plus rapidement possible. Ses pattes foulaient le sol avec légèreté, au fur et à mesure qu'il montait ou descendait les cotes sur lesquelles il s'engageait. Il finit par s'arrêter après un bon moment, apercevant des carcasses d'avions non loin de lui. Sans plus attendre, Epsilon se lança haletant dans leur direction, bondissant au dessus d'elles. Il devait prendre son élan avant chaque saut, tant les engins étaient larges et hauts. L'un d'entre eux l'était tout particulièrement. Il bondit au dessus, mais au lieu de redescendre, se mit à avancer délicatement sur ses ailes rouillés. La carlingue tremblait sous le poids de son corps, mais il parvint à garder l'équilibre jusqu'au bout. D'un saut, il regagna le sol, puis se remit à courir. Après quelques mètres, il se rendit jusqu'à un point d'eau asséché. Le sol était recouvert d'une boue épaisse. Il s'y engagea, posant chacune de ses pattes à l’intérieur de la matière pour y progresser tant bien que mal. Ralenti par la boue qui l’empêchait d'avancer, le loup força sur ses muscles afin de progresser tant bien que mal. Il fit plusieurs tours, avant de sortir, les pattes recouvertes de boue. Se secouant, le jeune mâle se remit à courir. Il passa par un terrain accidenté avant de regagner le camp, sautant à nouveau au dessus de plusieurs obstacles. Son corps était chauffé par l'effort.