Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
Rien n'était comparable à cette nouvelle situation que je découvrais de jours en jours. La chaleur d'une meute, l'étrange atmosphère qui y règne, ses membres... Ils étaient tous plus ou moins soudés. Ils se faisaient confiance, s'écoutaient, s'entraidaient. Pourquoi le faisaient-ils? Je les observais, incapable de mettre de mots sur leurs actes, leurs gestes et leurs signification. Tout m'était complètement étranger... C'était comme recommencer de 0. Être de nouveau le louveteau innocent et apeuré que je fus lorsqu'on me découvrit au village. La seule différence se trouvait ici cependant... J'étais censé être réellement chez moi dans cette nature atypique.. Alors pourquoi ce malaise? Pourquoi leurs coutumes, leurs façon d'être m’écœure-elle? Je n'aime pas garder de la boue sur mes pattes, je n'aime pas avoir froid alors que d'ordinaire le crépitement d'un feu réchauffe mon être et mon échine. Le sort est injuste. Pourquoi dois-je être comme eux? Pourquoi m'a t-on retirer ma famille? Le confort d'une maison et des caresses me manque. Les applaudissements des enfants quand dans ma gueule git le doux cadavre d'un animal que j'ai brisé de mes crocs. Oui, toutes ces sensations me manquent.
Tournant les talons dans la forêt charbonneuse, j'observe, impuissante, le décors qui m'entoure. Preuve de la folie humaine, ce paysage est complètement difforme. Triste. Les tanks ont creusé dans la terre, des sillons qui ne s'arrêtent jamais. Ils sont sans fin. Sans lendemain... Je saute dans l'un d'eux y flair l'odeur de la rouille et du plomb. Je finis par me rouler en boule dedans, le museau sur l'une de mes pattes avant alors que je vois l'ombre de mon oreille au sommet de mon crâne dont l'anneau de fer scintille au soleil.
Las, je me repose. Je ne sais pas encore où est ma place. Je ne sais pas encore si je la trouverait réellement au sein de cette meute qui m'a accueillis depuis plusieurs jours désormais. Pragmatique, je me dis qu'au final, qui ne tente rien n'a rien, s'intégrer dans une meute ne doit pas être si compliquer. Fatiguée, je me roule alors sur le dos pour faire face au soleil cuisant. En ces temps de sécheresse, nombreuses étaient ses victimes. Déshydratation, fatigue, famine, et la liste étaient encore longue. Rien que pour cela, j'étais contente de pouvoir compter sur l'aide de mes comparses bien que mon égoïsme et mon impatience ne m'aidaient pas particulièrement à partager lors de mes chasses. M'enfin, il fallait que les sacrifices aillent dans les deux sens... Je devais d'ailleurs m'estimer chanceuse qu'ils m'aient nourris et recueillis alors que je n'avais sur le moment, rien à leur rapporter. Observant mes flans, ma maigreur était toujours là mais je comptais bien la faire disparaître avant l'apparition de l'hiver. Là encore, les feu de cheminé allaient bien me manquer, mais encore une fois, je m'égare dans mes pensées. Des bruits de pas se font non loin de là, mais je décide de les ignorer et de rester allonger et étendue dans mon trou, discrète au possible.