Un triste décor s’offrait à mes yeux. Arbres noirs, calcinés, terres sèches, plus rien n’est vert ici tout est mort plongé dans la désolation ne pouvant revivre, plus aucun animal ne venait ici, à pat ceux qui se perdent et qui rebroussent chemin une fois qu’ils se rendent compte du peu de vie qui émane de cet endroit. Mais ce n’était pas le cas de cet écureuil. J’avais senti son odeur et le traquait depuis un moment, je l’avais vu courir dans les arbres, sauter branche par branche pour atterrir ici. Dans ce lieu néfaste. La faim tenaillait mon estomac depuis le petit matin, ce rongeur était un cadeau, une friandise que mes papilles aller savourer avec grand plaisir. Aussi discret que le souffle du vent, je suivais la trace fraiche de l’écureuil qui semblait décider à rester dans ce lieu. Soudain une queue rousse, touffue apparue devant mon champ de vision, je me plaquais ventre à terre derrière un tronc qui fut jadis un imposant chêne. Le petit sciuridé fit son apparition, il semblait en alerte, terrifié, il s’approcha de plus en plus de mon tronc dans un instant j’allais bondir et il n’avait aucune chance de m’échapper. Soudain, une brindille craqua, un simple petit bruit. Crac. Mais c’était largement suffisant pour que l’écureuil prenne les pattes à son cou en s’enfuyant, un grognement de rage sorti de ma gorge. Je m’élançais derrière ma proie, mais c’était peine perdu : il avait trouvé refuge sur le seul arbre qui tenait encore debout. Je retournai sur mes pas en direction de la provenance du bruit. J’avais reconnu son odeur depuis un moment, aussi ne fus-je pas étonné de découvrir un loup, un Esobek devant moi. On avait beau faire partie de la même meute le fait que par sa faute ma proie ai filé ne l’excusait pas.

>> Imbécile ! Es-tu aussi inexpérimenté qu’un louveteau ou autant d’indiscrétion était volontaire ? Tu as fait fuir ma proie !

Il ne me répondit pas, se contenta de me fixer avec un calme qui avait le don de m’énerver. Je l’observai, je ne le connaissais pas ne l’ayant encore jamais vu dans la meute, c’était un grand loup et autant son pelage était d’un noir ébène autant ses yeux étaient d’un bleu ciel. Glacés. Paralysants. Je soufflai d’une façon peut élégante montrant mes crocs, je voulais lui faire comprendre que sa simple présence et son calme m’agaçait et j’étais bien décider à le lui faire comprendre de n’importe quelle manière.

>> Tu es un Esobek, je ne t’ai encore jamais croisé. Qui es-tu ?

J’allais bien finir par entendre le son de sa voix, et je voulais connaître l’identité de ce loup si mystérieux.

>> Asclépios
Merveilleux ! Il parle !

Il continua son chemin en me snobant proprement. Ah non mon gars je ne vais pas te laisser filer si facilement ! J’ignorais pourquoi, je sentais en moi ce besoin de le provoquer, de voir sa vraie nature cachée sous un masque de fer ou ce que je supposais être sa vraie nature. J’allais sans doute payer les frais de ce jeu dangereux car le loup en face de moi était – je le sentais – plus fort en force, mais faible en endurance … ce qui me donnait une chance si cela tournait mal.

>> Asclépios … Moi c’est Crépuscule ou Eclipse d’Or si tu préfères, dis-je-en le suivant restant cependant derrière lui.

Silence. De toute façon je ne m’attendais à aucune réponse ou remarque, je continuais comme si de rien n’étais.

>> Quel bon vent t’a amené en cet endroit paradisiaque si ce n’est pas pour chasser ? Si tu cherches la tanière du guérisseur elle n’est pas bien loin.

Mon ton se fit plus amical que je l’aurai voulu, j’étais un véritable moulin à paroles en compagnie de ce loup ça ne de déplaisait pas pour autant.
Asclépios, m’ignora comme il le faisait depuis le début, je n’existais pas à ses yeux. Truffe contre sol, il continuait à chercher je-ne-sais-quoi, je-ne-sais-où. Un grognement d’agacement sorti de ma gueule, je fis un bond me retrouvant face à lui je hurlai :

>> EH ! Je te parle, tu pourrais quand même avoir le loisir de répondre. Nous sommes de la même meute, nous devons cohabiter, pour se protéger les uns des autres il faut apprendre à se connaître.

Asclépios releva sa tête la gardant cependant à la limite du sol boueux, il me transperça de ses yeux bleus. Une louve aurait sans doute tombé sous le charme de ce regard qui rappelait le ciel bleu qui nous manquait à tous. Mais moi j’étais un loup, et son regard au lieu de me charmer me fit frissonner.
Il releva délicatement la tête en douceur, je reculais d’un pas. Vas-y attaque ! Mais il se contenta de s’asseoir sur son arrière-train tout en continuant à me fixer. Sans me rendre compte je fis la même chose, j’avais compris que ce loup ne chercherait pas à m’attaquer, il semblait d’ailleurs plutôt amusé de mes veines tentatives de lui faire cracher un mot. J’attendis … attendre quoi ? Une réponse, car je sentis qu’il n’allait pas rester sur son mutisme.