Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
Je suis de retour sur les terres que ma famille avait quitté sous l'impulsion de mon frère. L'impulsion d'un loup brisé n'ayant pas trouvé d'autre moyen de lutter contre le chagrin dévorant chaque parcelle de son être qu'en abandonnant les lieux qui avaient marqués son histoire, l'histoire qui avait pris fin abruptement lorsqu'il avait découvert le corps sans vie de sa compagne. Je ne juge pas mon petit frère. Il a toujours aimé d'un amour sincère et sans limite. C'est peut être son plus grand défaut. Celui de donner entièrement son cœur aux personnes qu'il aime. Il n'y a pas de demi mesure avec lui. Soit c'est noir soit c'est blanc. J'ai toujours trouvé cela étonnant étant donné qu'il était le plus calme, apaisé et sage de nous deux. Il semblerait que mon indifférence pour les femelles m’aie été bien plus utile que prévu. Je suis le genre de loup semblable à un papillon. Celui qui butine de fleurs en fleurs, qui savoure ce que chaque louve a à offrir sans vraiment m'attacher. Une seule avait réussie à changer cela. Elle était morte depuis un certain temps maintenant. En repensant aux discussions qui avaient vu nos liens familiaux se renforcer encore davantage au cours des derniers mois Ebène a tord. Ce n'est pas lui qui est maudit, ce n'est pas notre famille, notre première meute mais bel et bien ce monde cruel et froid.
Ce monde voulant faire disparaître tout ce qu'il y a encore de vivant en son sein. Notre simple existence représente un joli pied de nez à sa face, un pied de nez que je savoure à sa juste valeur. Pour en revenir aux louves. Une autre jeune louve avait failli me faire changer à nouveau. Mais, j'avais suivi mon frère sans hésitation et sans le moindre remords. Je ne suis pas Ebène. Je n'ai pas son honneur, ni son amour pour les Navniks. Il n'y aura à jamais qu'une seule meute dans mon cœur et le fait qu'elle soit éteinte n'y change rien. Tant que mon frère, mon neveu et moi serions encore en vie. La meute dans laquelle j'étais né le serait aussi. Oh, j'apprécie la plupart des Navniks. Je me suis battu pour eux alors même que je les connaissais à peine. Seulement, cela ne serait jamais arrivé si mon frère n'avait pas tant de sentiments pour cette jeune meute. Je ne l'ai intégré que pour lui. La vie de solitaire est compliquée, bien plus dure que celle des meutes mais elle a ses avantages. Et elle est agréable avec les bonnes personnes. J'aurais sûrement du essayer de convaincre mon frère de les quitter. Mais, j'ai préféré épargner ma salive. Il peut se montrer intraitable et têtu lorsqu'il le souhaite. Rhaegar est encore dans les montagnes. Ebène voudrait m'arracher la tète s'il savait. Mais, le gamin a besoin de se sentir libre et d'apprendre à se débrouiller. Ce n'est pas un foutu bambin, il sera bientôt adulte. Il est doué, a eu une bonne mentor chez les Navniks et a bénéficié des conseils de son père et son oncle. Il s'est montré ravi que je lui laisse un peu d'air. Et c'est ainsi que je me trouve ici dans les ruines de la ville bipède autrefois florissante si l'on se fie à tout le merdier traînant dans tout les coins. Un merdier sans nom faisant de ce lieu, un terrain d’entraînement monumental. Je prends quelques minutes pour établir mentalement un périmètre d’entraînement et me préparer aux différents efforts que je vais réaliser dans les heures à venir. Une fois cela fait, je m'étire longuement en admirant la puissance de la destruction de choses qui nous dépassent de très loin. Preuve éternelle que rien n'est immortel, rien n'est trop puissant pour la faucheuse. Rien ne peut prétendre triompher du plus grand ennemi des vivants. Chaque chose a une fin. Que la chose en question soit d'accord ou non, en soit consciente ou non. On finira tous comme cette ville. Le comprendre et l'accepter est un bon début vers la plénitude. Je m'élance sans crier gare et commence par trottiner le long de l'avenue me servant de terrain de course. Je trottine à une allure plus que modeste le long des bâtiments encore debout, et d'autres écroulés depuis belle lurette.
Je trottine tranquillement sans me forcer. Laissant ainsi mon organisme s'échauffer naturellement et se préparer pour la hausse d'intensité qui va suivre. Je sens mes muscles rouler sous ma peau et savoure la sensation d’être en bonne santé et en pleine forme. Je trottine en ligne droite, le soleil effleurant mon pelage fourni et augmentant ma température corporelle plus rapidement que de coutume. Je presse légèrement l'allure une fois arrivé au milieu de la langue de bitume brûlante sous mes coussinets. Je ne galope pas pour autant mais me meus à une allure plus élevée. Je savoure l'augmentation de la vitesse et fixe une carcasse de monstre de fer à une bonne trentaine de kilomètres de ma position. Je prends de la vitesse par pallier successif tandis qu'une goutte de sueur perle le long de ma nuque pour aller s'écraser sur le sol. Je cours de plus en plus vite en ne lâchant pas le monstre de fer des yeux. Je pousse l'effort à son maximum sur les quinze derniers mètres de terrain et donne tout ce que je peux dans un sprint intense et éreintant. Je galope comme si ma vie en dépendait. Comme si les flammes de l'enfer me poursuivaient et léchaient ma fourrure soigneusement entretenue. Je galope à en perdre haleine durant quelques minutes avant de freiner en crissant des griffes pour ne pas percuter de plein fouet le grand machin bipède à échelle impressionnante. Je continue de marcher, la langue pendante, le cœur battant à tout rompre. Les muscles gonflés par l'effort accompli. Je continue de marcher pour ne pas refroidir tout en respirant bruyamment pour reprendre mon souffle. Je marche tellement que je suis de retour à la trentaine de mètres de mon point d'arrivée. Je me remets à galoper vers la machine inanimée mais sans tout donner cette fois ci. Je mesure mentalement mes foulées pour optimiser la portée de l'exercice. Je galope un sourire en coin sur les babines. Je me rappelle encore ma faiblesse lors de mon arrivée sur ces terres. De l'histoire ancienne désormais. Je galope durant quelques minutes avant de ralentir l'allure en tournant en rond.
Puis, je décide de me lancer dans un parcours d'obstacle. J'avise les lieux et remarque une rue adjacente suffisamment encombrée pour faire l'affaire. Je m'élance à vive allure dans la direction souhaitée et bondis sur une carcasse de véhicule. Un autre bond me propulse sur le toit. Je baisse la vitesse avant de sauter du capot qui se plie sous mon poids. Mes pattes retrouvent la terre ferme et je me faufile entre deux monceaux de débris. Puis, je bondis au dessus d'un obstacle non identifié avant de ralentir progressivement l'allure et de ramper sous un panneau renversé, dans un trou creusé par un obus. Je m'ébroue une fois de l'autre coté avant de repartir au trot. Je slalome entre une série de carcasses métalliques usées par le temps avant de frôler un mur en partie effondré. Le contact rugueux contre ma peau est désagréable mais je continue à la même allure. Une autre voiture me barre la route. Je prends de la vitesse et bondis. J’atterris sur le capot et manque de glisser sous le métal froid. Je me rattrape de justesse et m'accroche fermement. Mes griffes produisent un affreux crissement et je pousse sur mes pattes arrières pour me propulser plus haut. J'atteins le toit et me mets au pas pour bondir de nouveau du véhicule.
Je décide de conclure l'exercice en traquant un rat ou un autre rongeur vivant dans les ruines de ce cimetière géant. Je me fige trempé de sueur, les muscles encore tendus par l'effort réalisé et tends l'oreille. Je laisse mes sens quadriller la zone à la recherche du moindre petit rongeur. Mais n'en détecte aucun. Jusqu'au moment ou le bruit caractéristique d'un rat attire mon attention. Je me précipite vers la cible qui s'enfuit à toute patte. Je la traque à vive allure, tantôt bondissant, tantôt le museau au ras du sol. Mes foulées sont amples et je suis la proie quelques pas en arrière mais dans cette jungle. C'est bien ce minuscule être qui est le roi. Il en connaît les moindres recoins et est très avantagé par son gabarit miniature. Je continue pourtant de le traquer jusqu'à ce qu'il se faufile dans un trou hors de ma portée. Je m'immobilise alors et m'allonge sur le flanc pour me reposer avant de reprendre mon entraînement.
Après une longue et bonne heure de repos, je me relève et m'ébroue furieusement. Il est temps de se remettre au travail. Je m'étire une nouvelle fois et prends le temps d'observer les environs pour établir la suite des événements. Voyons voir ce que je pourrais utiliser. Il y a des débris, des débris, des débris et encore des débris. Quel paradis à condition de ne pas avoir une dent contre les débris. Je m'approche d'un morceau de métal ayant pu appartenir à n'importe quelle horreur visuelle ayant échoué ici dans ce tombeau à ciel ouvert et le saisis entre mes crocs avant d'essayer de le tirer et de le soulever en vain. Trop lourd, bien trop lourd. Je ne tiens pas à m'arracher la mâchoire non plus. Je m'approche d'un autre poids potentiel et réitère l'opération mais celui ci est trop léger alors je continue mon petit marché au milieu de la ville en ruine. Je finis par trouver ce que je cherche, soit une dizaine de débris en tout genre servant de poids.
Je les dispose en ligne à une égale distance les uns des autres. Puis, je prends quelques minutes pour souffler avant de saisir le premier entre mes crocs. Je resserre la prise sur le morceau de bois et commence à traîner le poids mort derrière moi en le tirant. Mon allure est modérée, je vais comme tout à l'heure y aller progressivement. Je sens le poids du morceau d'arbre mort tirer sur ma mâchoire mais garde les crocs profondément ancrés dedans. Je fais un pas puis un autre avant de tenter de trottiner en tirant mon poids d'écorce. Un pas puis un autre, je vais déjà un peu plus vite. Les poids les plus lourd se trouvent au milieu de la ligne. Je jette un coup d’œil vers ma destination soit le trottoir d'en face. Ce n'est plus très loin. Encore quelques petits efforts. Je pousse sur mes pattes arrières, serre les crocs et tends les muscles dans un dernier effort de puissance physique. J'atteins enfin le trottoir ou du moins ce qu'il en reste. Et laisse tomber mon poids sur le sol avant d'inspirer de grandes goulées d'air pas franchement ce qu'il y a de plus frais. Je compte mentalement le temps de repos que je m'accorde avant de saisir de nouveau le morceau de bois et de tirer cette carcasse derrière moi en sens inverse. Je la tire sans me presser mais plus rapidement qu'à l'aller.
Je sens les muscles de ma mâchoire se tendre sous l'effort mais ne relâche pas la pression et maintiens mes efforts. Un pas en avant, un pas en avant, un autre puis un autre et encore un autre. Ma prise se desserre alors je rectifie ma position et ré-enfonce mes crocs dans le bois. Je continue mon petit bonhomme de chemin sans coup férir. Allez Daante, repense à ce vieux gueulard de mentor et aux regards des louves de la meute, à la fierté dans le regard de Trésor et Asmar ainsi qu'à l'admiration dans le regard d'Ebène. J'arrive au niveau de la ligne et lâche le poids sur le sol. Je saisis le second bout de bois récupéré dans le coin. Celui ci est beaucoup plus léger et tiens entre mes crocs. Je m'élance à toute allure vers le trottoir parallèle à ma position et galope dans un sprint explosif faisant brûler mes muscles. Je fais rapidement demi tour et reviens à la même vitesse. Je laisse tomber le bout de bois et prends quelques instants pour me remettre de la course avant de passer à l'autre poids. Lourd celui ci, à peine plus que le premier mais suffisamment pour sentir la différence. Mon pas est sur, mes foulées amples.
Mon corps endolori par l'effort et trempé de sueur. Mes muscles contractés et ma mâchoire lancinante mais malgré cela, je me sens très bien. J'avance lentement mais le but est bien d'alterner entre effort explosif et effort intense mais tranquille basé sur l'endurance. Je traîne mon outil d’entraînement derrière moi en observant le bitume à mes pieds. Je ne le sens même plus me chauffer les coussinets tant mon corps est enfoncé dans l'effort et mes sensations concentrées sur ce dernier. Je tire lentement mais sûrement le poids mort derrière moi et le tire encore sans m'avouer vaincu lorsque ma mâchoire me lance encore un peu plus. J'y suis presque. Je desserre légèrement ma prise et pousse une dernière fois pour atteindre mon but. Mes crocs se détournent de son boulet et je prends un peu plus de temps pour détailler les environs, claque machinalement des mâchoires pour m'assurer qu'elles vont bien. Puis, je repars vers la ligne que j'atteins une dizaine de minutes plus tard. Repos, puis bâton plus léger. Je m'élance une nouvelle fois au galop le plus vite possible. Mais reviens cette fois en trottinant. Puis, je m'attaque à la masse la plus lourde que j'ai pu déniché. Je la traîne à un rythme bien inférieur aux précédents mais la traîne. Je dois parfois la lâcher pour reprendre mon souffle et épargner à ma mâchoire des douleurs inutiles. Mais, je termine tant bien que mal mon exercice avec l'impression d'avoir des pattes en plomb et une mâchoire lancinante.
Je prends plus de temps pour me reposer avant de terminer la ligne en utilisant des variantes. Variantes de vitesse avec les poids plus légers, galop, trot, galop, pas, trot, pas... Variantes dans le tirage de charge lourde, je zigzague ou tente d'aller plus vite. Tout cela fait que je m'écroule épuisé sur le flanc à l'issue de l'exercice. Je reste étendu ici au milieu des restes du chaos durant une durée indéterminée. Puis, je me relève et vais me chercher une tanière du coté des terres de l'ouest. Ce monde ne nous blessera plus mon frère. C'est nous qui le blesserons. Ce monde ne nous brisera plus mon neveu. C'est nous qui le briserons. Ce monde ne nous causera plus de frayeur. Nous serons sa frayeur. Il ne nous abattra pas. Je vous le promets. Ebène et Rhaegar, ma famille, ma force. Mon avenir.
Un nouveau jour d’entraînement s'offre à moi. Il m'appartient de le gâcher ou de le rentabiliser selon mon bon vouloir. Bon, je reconnais que s’entraîner sans désirer réellement le faire serait notablement stupide. Ce n'est de toute manière aucunement mon cas. J'aspire à atteindre le maximum de mes capacités et à rentabiliser ce temps qui est une denrée bien précieuse dans un monde qui ne l'est plus depuis qu'il n'est plus que ruines, immondes excroissances à la surface de la terre et autres blessures de gravité plus ou moins étendue. La face du monde est ravagée de manière brutale et extrême mais quelques fois je me dis que ces ravages ne sont rien à coté de ceux éprouvant nos êtres. Quoi qu'il en soit il était plus que temps de mettre un terme à cette philosophie de bas étage et de me mettre en chemin vers mon nouveau terrain d’entraînement. Immense, silencieux, créatif, difficile et gage de promesse d’entraînements plus variés les uns que les autres. Les proies se sont raréfiés dans le coin mais je suis persuadé que mon frère mange à sa faim. C'est le meilleur chasseur que je connaisse. Je ne me fais aucun souci pour lui. Ni pour mon neveu livré à lui même là bas dans les montagnes. Ma famille va bien malgré son éparpillement actuel.
Diaspora lupine dispersé aux coins du monde. Lorsque nous serons enfin de nouveau réunis tout rentrera dans l'ordre et nous avancerons tel une vague de l'océan vers nos objectifs. Pour l'heure, je me sens incomplet. Cependant, cette incomplétude ne m'empêchera pas de faire ce que j'ai à faire. Je me mets à trottiner aux abords de la vieille ville morte et la pénètre d'un pas déterminé. Déterminé à m'infliger la souffrance saine d'un entraînement sans concession, encore et encore jusqu'à ce que mes limites soient atteintes et peut être pousserais je même au delà. Je détaille rapidement les alentours, réfléchissant au sujet de la marche à suivre. Finalement, je m'élance dans un parcours d'obstacle acharné qui constituera ma foi un échauffement adéquat. Je m'élance à vive allure dans une rue jonché de débris et de détritus. Un bond me propulse au dessus d'un tas de pierre grise proche de l'effritement le plus complet. Mes pattes foulent de nouveau le sol et je me jette sur le coté pour éviter un obstacle dressé sur mon chemin sous la forme d'un panneau publicitaire tombé de son promontoire lors d'un bombardement. Je ralentis l'allure pour me lancer dans une série de zig zag, esquivant divers restes de bâtiments en tout genre.
Un bond à droite, un bond à gauche, un écart sur le coté, un autre à l'opposé et ainsi de suite sur une bonne dizaine de mètres. Je sens mes muscles rouler sous ma peau en une belle mécanique bien huilée lorsque je pousse sur mes pattes arrières pour me propulser en avant. Mes foulées sont amples et rapides. Ma masse équilibrée sur mes pattes et ma course intense. De la sueur perle sur mon front mais je n'y prête aucune attention. J'ai attendu que la journée soit avancée pour ne pas devoir compter avec une météo atroce. Je bondis par dessus un tonneau de bois troué de toutes part et atterris lourdement de l'autre coté. Je réduis machinalement ma vitesse pour reprendre mon souffle et travailler mon endurance. Ainsi, je me contente de trotter le long d'une belle ligne droite sans impuretés. Je jette des coups d’œil à droite et à gauche pour chercher d'autres obstacles à franchir. Là dans une rue adjacente, je bifurque en augmentant ma vitesse dans un arc de cercle parfait et m'engouffre dans la vaste rue encombrée. Je suis contraint de ralentir jusqu'à me mettre au pas pour ramper sous une langue de pierre suspendue en équilibre précaire. Une partie du bâtiment le plus proche enfin s'il est possible de qualifier ce qu'il reste de bâtiment. Je rampe en tortillant mon corps comme un serpent contorsionniste encore et encore sur quelques mètres tout en pestant parce que toutes ces saletés allaient assurément pourrir mon pelage parfaitement entretenu. J'émerge de l'autre coté et m'ébroue pour la forme avant de repartir à toute allure sur un espace dégagé.
Je galope à en perdre haleine, d'ailleurs ma langue pendouille de façon peu flatteuse en raison de l'effort. Mon rythme cardiaque est élevé et le sang pulse à mes oreilles. Je bondis par dessus un cadis renversé avant de bondir de nouveau pour atterrir sur le capot d'un monstre de fer aussi jaune qu'un foutu tournesol. Je grimpe tant bien que mal sur le sommet du véhicule avant de redescendre au niveau du capot puis de bondir sur le sol. Je rampe une nouvelle fois à l'allure d'un escargot mais cette fois pour ne pas faire un détour devant un camion. Une fois de l'autre coté, je donne tout ce qu'il me reste dans ma course. Quelques esquives habiles, rasages de murs et de façades ainsi que des ralentissements suivis d’accélération plus tard, j'atteins le bout de la rue en nage et le souffle court. Je bondis sur le capot d'une voiture et bondis tout de suite après sur une sorte de malle en bois qui se brise sous mon poids. Je roule sur le coté sur quelques mètres avant de me relever d'un bond. Fin de l'exercice.
Je ne compte pas le temps que je prends pour me reposer. Le repos est essentiel à la progression physique et c'est un foutu guérisseur qui vous le dit. Étendu sur le sol de béton de la vieille ville morte à présent silencieuse, je laisse mon regard dériver autour de moi. J'ai peine à croire que ces lieux aient été un jour remplis et vivants. Je m'imagine des bipèdes marchant à une allure rapide leurs fusils sur l'épaule et leurs masques étranges sur le visage se bousculant les uns et les autres en pestant. Puis, le ton monter dans une explosion de sentiments négatifs. Avant d'entendre les balles claquer au vent et filer à leurs vitesses foudroyantes. Le chant mortellement morbide des bâtons de feu s'égrener aux quatre vents tandis que les deux pattes s'effondreraient mollement comme des pantins désarticulés sur le sol froid et désagréable du cœur de leur monde aseptisé. Un tableau un brin glauque et macabre mais au goût bien savoureux pour quelqu'un qui comme moi leur voue une haine incommensurable. Je me retourne sur moi même pour suivre le courant imaginaire du torrent de sang s'écoulant des blessures à jamais béantes de cadavres fumant émergeant tout droit de mon imagination bouillonnante sous une température diantrement excessive. Tellement excessive que cela devrait être illégal.
Je bondis sur mes pattes et prends le temps d'étirer mes membres refroidi par ce sommeil réparateur et m'élance le long de la longue avenue dans laquelle je me trouve. Je fais quelques aller retours histoire de réchauffer mes muscles. Une fois cela fait et mon rythme cardiaque sensiblement augmenté, je me mets en quête d'un objet susceptible de me servir de cible d’entraînement. Je déniche finalement un morceau de bois ayant du appartenir à une poutre ayant été brisé par les obus lors d'un bombardement. Je m'acharne sur le morceau de bois de mes griffes et mes crocs avec le vague projet de le réduire en petits morceaux avant d'aller dénicher quelque chose de plus pratique. Mes griffes dérapent sur le bois et l’éraflent durement tandis que je me dandine sur place histoire de rendre l'exercice plus dynamique. Je tourne autour du reste de bois en dessinant un cercle parfait. Mes griffes écharpent le bois créant ainsi des échardes voletant par morceaux dans les airs. Je bondis en arrière avant de revenir au devant de ma victime du jour d'un autre bond. Mes crocs claquent prêt de la matière inanimée se réduisant comme peau de chagrin sous mes assauts. Je me laisse rouler sur le coté pour esquiver une attaque non existante.
Je me relève rapidement et plonge mes crocs sur le morceau de bois. Mes lames de rasoir s'enfoncent dedans assez durement. Je retire mes crocs et les ré-enfonce rapidement à de nombreuses reprises tout en laissant mes pattes avant faire un carnage sur mon outil de travail si je puis dire. Il ne reste plus grand chose du pauvre reste de poutre alors je bondis par dessus et décoche un coup de patte arrière frappant le vide au dessus. Puis, je me dévisse le cou pour claquer des mâchoires derrière moi. Avant de me mettre à ruer dans tous les sens pour me débarrasser d'un gus imaginaire assez stupide pour tenter de s'y raccrocher. Puis, une fois les pirouettes de clown terminées je reporte de nouveau mon attention sur le morceau de bois que je saisis entre mes crocs. J'essaie de le soulever mais il est bien trop imposant alors je me contente de le traîner à la pression de ma mâchoire. J'avance lentement pas à pas, mètre après mètre pour finalement atteindre une carcasse rouillée un peu plus loin. Je me débarrasse de mon poids et m'assieds sur mon séant pour observer ce qui m'entoure. Un trou dans un édifice ne tarde pas à capter mon attention et je m'élance sans aucun plan en tète. Je pénètre dans une drôle de construction humaine. Le tout m'évoque une sorte de cocon de larves rempli de divers affaires m'apparaissant toutes comme plus inutiles les unes que les autres.
A moins que... Ce drôle de machin sentant le cuir. Oui, j'en avais déjà vu lors de mes anciens entraînements dans la fête foraine notamment. Je m'élance d'un coup sec et percute le machin donc qui se renverse dans la foulée. Mes crocs s'enfoncent dans la chair rugueuse du fauteuil avant d'en ressortir promptement. Mes griffes lacèrent l'ensemble rouge avec animosité tandis que je me lance dans le dépeçage en règle. Je recule en arrière d'un bond avant de percuter de nouveau ma cible d'un roulement d'épaule. Puis, je continue de lacérer la surface du fauteuil avec application tel un travailleur méthodique. Je me jette sur le coté et effectue une roulade avant de rouler de nouveau sur moi même dans l'autre sens. Je m'acharne de mes crocs et de mes griffes sur ma cible en y mettant toute la rage m'animant avant de me lancer dans une série d'esquives bien placées. Je décoche un coup de patte arrière vers le sommet de ma cible. Puis, un revers de la patte et un autre avant de bondir sur le machin bien utile avant de me laisser tomber sur le flanc haletant comme si mon cœur allait quitter mon poitrail. Un sourire satisfait étire mes babines tandis que je sens mon sang pulser dans mes veines avec vigueur.
Je me réveille le lendemain de cet entraînement physique éprouvant avec la gorge en feu. Je suis littéralement assoiffé et je me trouve dans le cœur de la vieille ville en ruine des deux pattes désormais loin d'ici. Je me relève lentement et m'ébroue furieusement avant d'entreprendre de me lustrer le poil. Une bonne dose de coups de langues plus tard, mon pelage grisonnant a retrouvé son éclat d'antan. Je m'étire pour soulager mes muscles endoloris avant de me mettre en quête de quoi apaiser ma soif. Une soif ne demandant qu'à être étancher. Surtout qu'il ne fait aucun doute que dehors le soleil tape plus violemment qu'un môme mal élevé pourrait le faire sur mes nerfs déjà bien mis à l'épreuve par la brûlure de mon gosier. Comme chaque matin, j'ai une pensée pour les membres de ma famille. Je murmure leurs noms comme une sainte litanie tout en explorant l'espace direct de ce trou à bipèdes. Une litanie qui guiderait mes pas jusqu'à une source d'or bleu. Je pénètre d'un pas sur dans une autre pièce bien plus petite empestant la nourriture avariée. Étrange que tout cela. Je crois reconnaître des outils que j'avais déjà vu dans les geôles du laboratoire l'hiver dernier. Rien de bien réjouissant en somme.
Mais, cela n'a aucune importance à coté de ce qui se trouve devant moi. De l'eau, je ne vois pas ce que cela pourrait être d'autre. Un sourire victorieux se dessine sur mes babines. Le problème c'est qu'elle se trouve dans une sorte de contenant transparent puisque je peux admirer la récompense tant attendue. Sans hésiter, je m'approche et tente une première approche avec un coup de griffe. De l'eau s'écoule et je me mets à laper avec avidité. J'agrandis le trou au fur et à mesure et soulage le feu dans ma gorge. Je m'attaque à un contenant similaire se trouvant un peu plus loin avant de me lécher les babines. Puis, je reviens sur mes pas et décide de continuer l’entraînement d'hier là ou il s'était arrête. Il y a d'autres structures de cuir à transformer en charpie. Alors, je me détourne de celle ayant déjà subie mon courroux. Et m'élance vers la deuxième sur laquelle je bondis prestement. Le fauteuil se renverse sous mon poids. Mes crocs se plantent brutalement dans le cuir et je secoue la tète pour faire le plus de dégâts possibles, tirant dans un sens puis dans l'autre avant de se retirer le temps que je crache les morceaux de cuir encombrant ma gueule. Je les replonge aussitôt pour réitérer l'opération et transformer cet objet étrange en carcasse. Je les enfonce plus profondément et me redresse à l'aide de mes pattes arrières avant de les retirer et de lacérer la surface plane de mes griffes. Un bond sur le coté pour mimer une esquive opportune. Je roule sur le coté opposé avant de bondir sur le fauteuil qui se relève sous l'impact en un drôle de mouvement de bascule. Je suis projeté sur le sol carrelé et roule sur quelques pas. Un sourire étire mes babines. Je me mets à tourner autour de mon ennemi inanimé. Claquant des mâchoires à une intervalle régulière tout en me rapprochant méthodiquement. Un revers de la patte relance les hostilités.
Bien vite suivi d'un dressement sur les pattes arrières pour atteindre le sommet du punching ball. Je plante mes crocs une nouvelle fois tout en m'aidant de mes pattes avant fermement posées sur le machin. Je retire mes crocs dans la foulée avant de les replonger et ainsi de suite encore et encore jusqu'à que ce le cuir soit en lambeau. Je me laisse retomber sur mes quatre pattes pour le coup avant de bondir en arrière et de me mettre à ruer dans tous les sens percutant au passage une multitude de choses toutes plus inutiles les unes que les autres. Les contacts sont douloureux seulement sur le moment parce que ce n'est rien que quelques petites babioles sans intérêt. Je me mets ensuite à rouler sur moi même en décochant une série de coups de pattes et de griffes dans le vide histoire de repousser l'ennemi imaginaire que vous ne pouvez pas voir faute d'imagination. Puis, je bondis sur mes pattes et bondis comme la première fois. Mon épaule percute de plein fouet le fauteuil qui rebascule sous mon poids. Je bondis en arrière puis sur le coté avant de bondir de nouveau en avant et de me mettre à déchirer ce qu'il reste de mon punching ball coopératif. Mes griffes fendent l'air et s'abattent sur la surface plane déjà bien écharpée par mes précédents assauts.
Je dessine des motifs se voulant sanglants dans le cuir rugueux mais un objet émanant des bipèdes n'est pas vivant et n'a donc pas de sang à m'offrir. Seuls, les morceaux de fauteuil voletant devant mes yeux offrent un bien piètre spectacle. Je laisse mes crocs prendre la suite des opérations et les laisse se tracer un sillon de destruction autour de moi. Lorsque je les ressors ma cible d’entraînement ne ressemble plus en rien à ce qu'elle était il y a encore une bonne vingtaine de minutes. Mon cœur bat à belle vitesse dans mon poitrail. Je prend le temps de me remettre de cet effort intense ici à l'ombre d'un soleil tapageur. Histoire d'émerger frais de ce trou de souris.
Je ne m'étais pas trompé le soleil tape bel et bien de son trône céleste. Astre briseur de nuage tel la proue d'un navire écartant les vagues et les creusant sous son passage. La température est toujours aussi élevée et je savoure la satisfaction complète de m’être rafraîchi le gosier un peu plus tôt dans la journée. Puis, j'observe les environs d'un œil concentré à la recherche d'indices concernant le type d’entraînement susceptible de me convenir. Je sens mes muscles rouler sous ma peau tandis que je trottine le long de la l'avenue à la recherche d'un poids à traîner. Il y a bien un nombre incalculable de débris en tout genre mais cela ne fera pas l'affaire. Il faut que je puisse planter mes crocs dedans. Là, ça devrait faire l'affaire faute de mieux. Je m'approche d'un reste de porte ayant été en partie calciné par une lointaine explosion. Je plante mes crocs le plus fermement possible dedans et entame l’entraînement. Je tire à une vitesse très réduite en me fiant uniquement à la puissance de ma mâchoire.
Je tire le poids derrière moi à une allure très faible mais c'est justement le but de la manœuvre. Je pousse sur mes pattes arrières tandis que mes muscles se contractent sous l'effort. Je resserre ma prise sur le bois et pousse une nouvelle fois sur mes pattes arrières. Je traîne mon poids à l'allure d'une tortue. Les muscles de ma mâchoire sont mis à rude épreuve mais se montrent performants. En même temps, ce sont les miens. Remarquez. Je tire et pousse en même temps et avance mètre après mètre le long de ce boulevard désert et déserté. Je tire fermement et commence à sentir le poids sur ma mâchoire à mesure que mes pas se succèdent les uns aux autres. Une douleur lancinante commence à me chatouiller la gueule mais je poursuis mes efforts et continue d'avancer un pas après l'autre. Je finis par atteindre le point que je m'étais désigné comme ligne d'arrivée et lâche brutalement le reste d'arbre mort m'ayant servi d'outil. Puis, je m'assieds sur mon séant pour reprendre mon souffle tout en détaillant le spectacle toujours aussi solennel d'une ville morte silencieuse. Je me relève d'un bond et m'élance toute allure vers une carcasse rouillée me servant de point de repère.
Je galope à toute allure comme si je participais à une stupide course que je voulais à tout prix gagner. Cela me rappelle des souvenirs d'enfance. Mes foulées sont amples et sur quelques mètres j'ai l'impression de voler. Le vent siffle dans mes oreilles tandis que je file à toute vitesse vers le défunt véhicule. Je galope comme un fou furieux. Mes muscles roulent agréablement sous mon pelage lustré tandis que mon cœur galope lui aussi de là ou il est. Le sang pulse dans mes veines et une décharge d'adrénaline se dilue dans mes veines palpitantes. Je cours à en perdre haleine. D'ailleurs, je perds haleine et ma langue se met à pendre lâchement sur le coté de ma gueule tandis que je jette mes dernières forces dans la bataille de vitesse que je me suis assigné. Trois mètres en moins, puis quatre, puis deux. La voiture se rapproche rapidement dans mon champ de vision. Je me prépare pour le mouvement que j'ai en tète depuis le début de cette course folle. Mon allure baisse en intensité d'elle même tandis que mon organisme me fait comprendre que ce sprint ne saurait être éternel. Je vois désormais nettement la peinture écaillée de la carcasse rouillée devant moi. J'amorce mon saut peu avant de pousser sur mes pattes de toutes mes forces. J'ai bien fait attention à choisir le meilleur moment pour bondir. J'aurais détesté sauté trop tôt et être trop court ou trop tard et me fracasser contre l'obstacle impudent.
J’atterris donc sur le coffre avant de bondir sur le toit et me laisser glisser sur la vitre bien plus solide que ce que j'aurais pu imaginé avant de bondir de nouveau pour retrouver la terre ferme. Je me mets à marcher pour ralentir mon rythme cardiaque et retrouver une nouvelle fois mon souffle mis à rude épreuve aujourd'hui. Je furette ensuite à droite et à gauche dans l'optique de dégoter un poids plus léger pour un petit parcours d'obstacle dans le labyrinthe de la veille ville. Je déniche quelque chose me semblant faire l'affaire malgré qu'il soit fait dans une drôle de matière que je ne parviens pas à identifier. Je m'élance au trot et esquive diverses carcasses rouillées en me faufilant entre elles avec la dextérité d'un serpent. Le bâton de matière inconnu dans ma gueule tente de se faire la malle mais je l'en empêche. Un bond par dessus un tas de débris est bien vite suivi d'un bond sur le coté pour ne pas percuter une masse de pierre. J'avance un peu plus vite et me lance dans un zig zag à s'en coller le tournis puis je bondis une nouvelle fois pour me poster sur un petit monticule de débris en tout genre. Je laisse tomber le truc à mes pattes et lève les yeux vers le ciel. J'en ai fini pour aujourd'hui. Je me sens bien d'avoir donné tout ce que j'avais en ce jour morne et caniculaire.
Je suis allé chassé dans la plaine de cendre un peu plus tôt mais me sens toujours d'attaque pour un effort supplémentaire. C'est la raison pour laquelle je me dirige une fois de plus vers le tombeau à ciel ouvert connu sous le nom de ville en ruine. Qui aurait pensé que la destruction de cette forteresse bipède la transformerait en un terrain d’entraînement d'un tel calibre. Pour peu, j'aurais pu les en remercier si je n'avais pas plutôt envie de me baigner dans leur liquide écarlate et jouer avec leurs os. Oups, c'est un peu trop sanguinaire comme point de vue. Rien à foutre. Mais assez disserter de choses plaisantes et d'envies meurtrières. Je pénètre dans la vieille ville comme je l'ai rebaptisé d'un pas léger. Tout vous paraît bien plus léger une fois que vous avez l'estomac bien rempli vous pouvez me croire. J'arpente les lieux à la recherche de quelque chose de bien précis. La montagne de débris que j'avais aperçu il y a quelques jours en explorant ces lieux désertés et en m’entraînant.
Je m'enfonce toujours plus profondément dans cette ruine à taille gigantesque avant de finalement dénicher mon défi du jour. Je prends un certain temps pour contempler cette montagne artificielle de débris en tout genre comme on contemplerait une montagne naturelle imposant naturellement le respect. Puis, je m'étire longuement avant de me mettre à trottiner aux abords de l’immense tas. Je sens mon cœur battre un peu plus vite et le sang commencer à pulser dans mes veines. Tandis que l'adrénaline se déverse en moi à l'idée de cette ascension s’annonçant exaltante mais éprouvante. Je commence à augmenter ma vitesse de course petit à petit. Laissant ma température corporelle s'élever tandis qu'un sourire étire mes babines à l'idée de ce qu'il m'attend. Je bifurque dans un crissement de griffes et pousse brutalement sur mes pattes arrières pour bondir en avant. Mes pattes avant percutent durement l'amas de déchets en tout genre faisant office de pente improvisée. Je vais saloper mon pelage avec ces conneries. Bah, trop tard pour reculer. Je grimpe en y mettant toute mon énergie. Ce qui n'est pas très malin car je devrais m'économiser au début pour tout donner sur la fin. Je pousse une nouvelle fois sur mes pattes arrières et gagne quelques centimètres. La pente est fichtrement sèche. Je trottine à une allure modérée tant pour ne pas me briser une patte en galopant comme un fou furieux.
Cette montagne est quand même constituée de débris. Je sens mes muscles se tendre sous l'effort et je suis déjà en nage alors que je viens à peine de débuter l'ascension. Je trottine en faisant attention à ne pas trébucher sur quoi que soit. Mes foulées sont assurés et je regarde à mes pattes et non devant moi. Je bondis pour passer par dessus un obstacle encombrant et accrois la distance entre la terre ferme et ma position. Un autre bien trop dangereux car coupant aux extrémités me pousse à dévier de ma trajectoire et je bondis sur le coté avant de manquer de dégringoler. J'enfonce mes griffes dans le carton mouillé avant de pousser sur mes pattes arrières et reprendre mon ascension en courant plus vite que tout à l'heure. Sans pour autant avancer au galop. Je bondis une nouvelle fois pour gagner de l'espace et bondis une nouvelle fois. Puis, je me fige et prends le temps de retrouver ma respiration. Une fois mon rythme cardiaque moins sauvage. Je reprends mon ascension au trot. Je ne suis plus très loin du sommet. A condition de pousser dans mes retranchements. Je ne réfléchis pas et m'élance à toute allure en prenant impulsion sur mes pattes arrières. Cette fois, je galope à toute allure le long de la pente abrupte. Je sens mes muscles rouler et ma langue pendre mollement au coin de ma gueule. Mes foulées sont amples et j'ai littéralement l'impression de voler.
Je bondis une nouvelle fois pour avaler plus de distance mais lorsque j’atterris sur mes pattes un peu plus haut. L'impact produit une légère onde de choc suffisante pour déséquilibrer les débris du sommet et une bonne part de ces derniers se met à dévaler la pente. Je peste en constatant que je me trouve sur la trajectoire et me retourne pour dévaler la pente en sens inverse. Ce que je fais aussi vite que mes pattes peuvent me porter avant de bondir sur le coté pour ne pas me faire emporter par le torrent de tout et n'importe quoi. Je termine la descente fourbu et épuisé au pas. Avec un sourire sur les babines, certes je n'ai pas atteint le sommet. Mais, ce fut un bien bel effort et j'ai échappé à un écrasement corporel avec doigté. Il faut savoir profiter des petits plaisirs de la vie.
Les derniers entraînements ont portés leurs fruits mais il me reste encore bien du travail avant d'atteindre mon plein potentiel. Je le sais, je le sens sous ma peau, dans mes muscles. Je progresse à vive allure. Et ce parce que je donne tout dans chaque effort physique. Dans chaque entraînement, chaque chasse, même lors d'une action anodine. Je donne tout ce que j'ai parce que c'est comme cela que je suis depuis toujours. Il n'y a que dans ma fonction de guérisseur que mes élans n'avaient pas suivis. Peut être parce que je ne suis pas né pour être guérisseur. J'ai eu le combat dans le sang très tôt. Asmar fut le premier à le remarquer. L'oncle de mon frangin était un loup très intelligent et instinctif avec une expérience sans pareille de la chasse. J'ai eu l'impression qu'Ebène prenait ses traces depuis nos retrouvailles mais il me paraît évident que la perte de la moitié de sa famille a mis fin à cette belle trajectoire. Peu importe, bientôt je serais assez fort pour écraser le moindre obstacle voulant se dresser contre ma famille, abattre la moindre menace qui ne ferait ne serait ce qu'essayer de s'approcher des miens. Je me trouve une fois n'est pas coutume dans les ruines de la vieille ville que je commence à très bien connaître. Du moins une infime part de cette dernière car ce tombeau à ciel ouvert de mes pires ennemis est tout simplement gigantesque. Et je suis pertinemment conscient qu'il me faudrait des mois entiers d'exploration pour la ratisser de long en large et en travers. Heureusement, ce n'est nullement mon intention.
Je suis ici pour finir ce que j'y ai commencé. Je me dirige vers un trou béant dans un vieux bâtiment. Les effluves de carcasses rouillées sont puissantes à l'intérieur. Je m'engage dans l'ouverture béante au trot. La lumière du jour perçant les ténèbres des lieux dans mon dos supplée la puissance oculaire de ma vue. Il ne fait pas complètement noir dans ce labyrinthe, seulement très sombre. Je trottine à une allure modérée pour m'échauffer et habituer mes yeux à cette faible luminosité. Un coup d’œil en arrière m'indique que l'entrée diffuse bien assez de lumière pour que je puisse la retrouver et m'orienter dans le sens inverse alors j'augmente mon rythme très légèrement pour continuer de chauffer mes muscles en prévision de l'exercice qui m'attend. Puis, je continue d'augmenter ma vitesse de course par pallier. Chaque dix mètres dépassés, je mets un peu plus de puissance dans l'impulsion de mes pattes et mes foulées se font plus amples sous la contraction de mes muscles. Je sens mon rythme cardiaque commencer à accélérer dans mon poitrail tandis que l'adrénaline causé par le fait d'avancer dans une semi obscurité excite mon envie de me jeter dans un parcours d'obstacle. Je bondis par dessus un muret arrivant à la hauteur d'une carcasse de voiture puis accélère davantage. La course est grisante et je fonce à toute vitesse vers une seconde rouille à roue sur laquelle je bondis lestement. Mes pattes percutent durement le capot dans un choc sourd à réveiller un mort. Un autre bond me conduit sur le toit et je ralentis pour ne pas me manquer. Le choc du coffre est moins bruyant que celui du capot et je retrouve le sol après un dernier saut. Je galope à toute vitesse comme si quelque chose d'horrible me pourchassait à travers ce parking souterrain. Je galope à en perdre haleine. Je me rappelle des courses que je faisais avec mon frère. A quel point je me révélais être un mauvais perdant notoire.
Mes foulées sont aussi amples que puissantes et je savoure le contact du sol froid sous mes coussinets. De véhicules en piètre état, ces sombres lieux ne manquent pas. Il y en a plus que je ne pourrais les dénombrer. Je galope comme un forcené avant de ralentir la cadence pour bondir au dessus d'une barrière dans un mouvement plein de souplesse avant d’atterrir durement de l'autre coté. Je m'élance une nouvelle fois à vive allure dans la semi obscurité des souterrains. Je ralentis l'allure inconsciemment lorsque je sens des débris crisser sous mes pas. Je marche sur quelques mètres avant de pousser durement sur mes pattes arrières pour repartir au galop. Mes muscles me brûlent sous le coup de l'effort sous mon pelage lustré et trempé pour le coup. Je rampe sous l'espace offert par la taille d'un camion . Puis bondis par dessus un tas de débris , bond bien vite suivi d'un autre sur le coté pour ne pas percuter un muret de plein fouet. Je ralentis encore l'allure pour ramper sous un renfoncement avant de jeter mes dernières forces disponibles dans un sprint mémorable sur une bonne vingtaine de mètres. Je peux déjà apercevoir le mur du fond marquant la fin de ce drôle de parcours. Je me mets à slalomer sur les derniers mètres entre une série de voitures qui ne rouleront plus jamais et des tas de débris effondrés du toit et de divers murs. Je bondis, esquive, frôle les divers éléments de mon parcours d'obstacle à un rythme soutenu avant de ralentir l'allure petit à petit pour ne pas devoir freiner des quatre freins juste devant le cul de sac. Une fois au pas, je laisse mon corps retrouver son fonctionnement normal avant de prendre un peu de repos dans les allées sombres et fraîches du sous sol. Mes flancs se soulèvent à un rythme régulier à celui de mon palpitant en activité dans mon poitrail.
Je me repose durant une bonne demi heure dans les sous sols mal éclairés de ces vieux bâtiments en ruine. Mal éclairés mais disposant d'une température idéalement douce voire fraîche en raison de leur position souterraine. Je reste ainsi étendu sur le sol bétonné glacial sur mon pelage. Si j'avais su je serais venu m'installer ici depuis mon retour plutôt que d'aller me trouver une tanière dans les terres neutres. Quoi que je ne pourrais pas supporter les restes de puanteur bipède empuantissant l'air malgré leur départ du aux Hellhounds. Je savoure donc ce rafraîchissement d'autant plus bienvenu que je viens de terminer un parcours d'obstacle particulièrement intense. Je roule finalement sur moi même après avoir estimé que je me suis assez accordé de repos et bondis sur mes pattes pour me relever. Je lèche quelques endroits de mon pelage argenté pour mettre un peu d'ordre dans ces entrelacs de poils sauvages. Puis, je m'élance au trot vers la sortie de ce labyrinthe dont j'ai mémorisé le chemin. De toute manière, la lumière au loin ne m'indique que trop bien le chemin. J'émerge à l'air libre et sens tout de suite la différence flagrante de température. J'inspire une grande goulée d'air avant d'observer patiemment les lieux à la recherche du propriétaire de l'effluve m'ayant agressé les narines dès ma sortie des souterrains. Une effluve musquée mais marquée. Un prédateur à n'en point douter. Une effluve de roche et de félin. Les lynx aiment les hauteurs et cette ville en regorge plus qu'aucun autre lieu de ces terres. C'est parti pour une chasse au lynx. Je suis la piste de l'effluve tel un chasseur en traque. La chasse n'est pas moins fort mais le prédateur ne se cache nullement. Pourquoi le ferait il ? Après tout, il est lui aussi au sommet de la chaîne alimentaire dans une certaine mesure. Je suis la piste toute fraîche du lynx à travers les environs.
M'astreignant à la plus rigoureuse des discrétions, je fais le moins de bruit possible. Je prends une autre rue bien moins encombré pour me faciliter la tache. La piste semble se séparer en plusieurs chemins. Ce qui m'indique qu'il n'est pas seul. M'est avis qu'il s'agit d'une famille. Je vais devoir redoubler de prudence. J'avance tranquillement le museau près du sol lorsque des bruits de pas viennent chatouiller mes oreilles. L'effluve est très puissante tout d'un coup. Elle est proche, bien plus que ce qu'il me semblait. Proche bien trop proche. C'est au moment ou je relève la tète que le lynx atterrit sur mon dos.
Ses griffes s'enfoncent dans mes flancs tandis que ses crocs viennent danser près de ma nuque. Je ploie sous le choc mais ne tarde pas à tenter de me libérer. Ainsi, je me mets à ruer dans tous les sens pour me débarrasser de l'encombrant adversaire. Je remue en bondissant, me jetant à droite et à gauche en vain. Adversaire qui j'étais bien obligé de le reconnaître venait de me souffler au poteau d'une bien jolie manière. Ce n'était néanmoins pas franchement le moment d'adresser des louanges à ce lynx qui avait bien compris que la finesse était son meilleur atout. Je cesse de ruer car cela ne produit pas les effets escomptés et me contorsionne pour planter le plus brutalement possible mes crocs dans son visage au niveau de museau. Puis, je fais un roulé boulé pour me libérer de son emprise bien trop resserré à mon humble avis. Cette fois l'animal va rouler un peu plus loin mais retrouve sa fougue avant que je n'ai pu orienter les débats dans un sens m'étant favorable. Le lynx grisâtre s'éloigne tandis que je claque des mâchoires pour lui adresser un avertissement évident. Du sang s'écoule de mes plaies aux flancs. Fort heureusement ces dernières ne sont pas profondes. Le prédateur des montagnes pousse un feulement furieux pouvant se traduire par dégage de mon territoire le loup ce qui m'arrache un rictus mauvais. L'animal bondit sur le capot d'une voiture avec grâce avant de me sauter une nouvelle fois dessus. Je tente de l'esquiver au dernier moment mais mon mouvement n'est pas assez rapide et le lynx se retrouve une nouvelle fois sur mon dos. Cette fois, je n'attends pas qu'il fasse le moindre dégât pour m'élancer vers une carcasse et ruer en freinant le plus brutalement sur mes pattes au dernier moment. Cette ruade porte ses fruits et le montagnard grisonnant passe par dessus ma tète dans un vol plané qui prend fin dans un choc sourd lorsqu'il percute la carcasse. Je recule de quelques pas tandis qu'un grondement sourd monte de ma gorge et quitte le sanctuaire de mes babines.
Mes crocs dévoilés veulent goûter à l'écarlate et c'est d'un regard calculateur que j'observe le lynx se remettre difficilement sur ses pattes athlétiques. Une fois mon adversaire debout, je bondis en avant et plonge mes crocs dans son flanc tandis que les siens se referment sur une de mes pattes. J'enfonce mes crocs plus profondément pour y tracer un sillon destructeur avant de me laisser tomber sur le flanc pour décocher un coup de patte vers l’œil du lynx. Ce dernier détourne le visage juste avant que l'une de mes griffes ne lui entaille l’œil. Un second coup plus brutal le repousse. Le chasseur des montagnes se jette sur moi. Je plonge mes crocs dans son poitrail tandis que sa mâchoire se referme sur mon épaule. Le sang coule de part et d'autre. La rage et la tension augmentent rapidement. Je profite d’être sous lui pour caler mes pattes arrières au bond endroit et poussant de toutes mes forces le propulse vers la carcasse de véhicule.
Ce dernier parvient à atterrir tant bien que mal dessus et se relève pour bondir. Je reste au sol et attends patiemment, mimant un état second. Lorsque le lynx bondit, je le fais à mon tour et le percute en plein vol. Ce qui semble le sonner. Cette fois, nous nous lançons dans un duel sans tactique et mes assauts ne tardent pas à le faire ployer. Mes crocs s'enfoncent dans sa gorge et mes pattes balaient les siennes. L'animal se débat sous mon poids, se déchaîne dans tout les sens mais je tiens bon et enfonce mes crocs plus profondément avec dureté. Je tâtonne à la recherche de la jugulaire mais contre toute attente c'est mon adversaire qui m'y conduit en remuant comme un forcené. Une fois au bon endroit, je sectionne d'un coup sec. Le sang inonde les lieux et je lèche mon pelage pour le nettoyer. Je m'éloigne des lieux en marchant. L’entraînement de tout à l'heure et ce combat m'ayant réellement vidé de mes forces, je quitte la ville pour aller pioncer dans ma tanière.
Soldier keep on marchin' on. Head down til the work is done. Waiting on that morning sun. Soldier keep on marchin'on.
Je pénètre dans le tombeau à ciel ouvert que j'ai gracieusement renommé la ville morte à toute allure. Je n'ai pas de temps à perdre. Faire du tourisme c'est bien beau mais ce n'est pas cela qui va m'aider à avancer. Surtout que toutes ces installations et créations bipèdes me filent la gerbe. Je ne nie pas leur utilité bien au contraire puisque j'ai fait de ces lieux mon terrain d’entraînement. Seulement, ce n'est pas le genre de paysage qui me laisse sans voix. Quoi que je préfère largement cette ville dans cet état de délabrement. Cela lui confère une aura sinistre et une beauté macabre d'un certain goût. Mais encore une fois, je ne viens pas ici pour me faire un avis sur l'architecture des deux pattes qui préfèrent vivre dans un enfer bétonné plutôt qu'au contact de mère nature comme la plupart des espèces censées. Rien d'étonnant à ce qu'ils finissent fêlés de la caboche. Non mais regardez moi çà. Je pénètre donc sur ces terres d'asphaltes et de bétons au trot. Un trot relativement modéré car il ne s'agit que d'un simple échauffement préparatoire antérieur à une série d'efforts plus intenses. Je trottine le long d'une longue avenue dépouillée du moindre obstacle comme si toutes les carcasses bipèdes avaient préférées aller s'échouer ailleurs.
Je trottine à l'allure tranquille d'un loup se trouvant quelque part entre le pressé et le j'ai le temps sur une bonne dizaine de mètres. Je sens que mes muscles commencent à se mettre au travail sous mon pelage d'été. Je trottine à une vitesse légèrement plus élevée sur la dizaine de mètres supplémentaires. Mes foulées sont mesurées et franches. Je fais bien attention à ne pas faire varier la vitesse de ma course durant cette première partie d’entraînement. Je trottine en augmentant progressivement ma vitesse toutes les dizaines de mètres supplémentaires. Jusqu'à me mettre à galoper à une allure relativement légère pour un galop. Le but étant que mes muscles soient prêts à se mettre au travail pour la suite. Et non pas de m'épuiser dans des efforts aussi furieux que vains. Je cours à belle allure le long du trottoir en piteux état, sentant les palpitations de mon cœur durant ce dernier effort préparatoire. Une fois arrivé à destination soit à l'autre bout de la rue, je ralentis l'allure sans pour autant me remettre au pas car vous vous en doutez cela gâcherait l’intérêt même de mon échauffement.
Je jette quelques coups d’œil circulaires, histoire de déterminer quelle rue est susceptible de m'offrir le parcours d'obstacle le plus corsé. Allez va pour celle ci. Je m'élance à toute allure dans un bond en avant permis par une poussée puissante de mes antérieures. Je galope à belle vitesse vers le parcours d'obstacle naturel si je puis dire qui s'offre à ma vue et anticipe le premier bond que je vais devoir effectuer. Je ralentis légèrement l'allure à la distance adéquate et prends impulsion en poussant sur mes pattes. Je m'élève dans les airs et passe par dessus le tonneau renversé. Un autre bond quelques pas après le premier me permet de passer un second obstacle qui avait quant à la lui la forme d'une poubelle de plastique renversée. Mes foulées se font plus amples tandis que ma course se fait de nouveau plus rapide lorsque de l'espace se dégage devant moi. Je me lance avec plaisir dans un slalom serré entre une série de bâtons de fer plantés dans le sol des poteaux oui-me jetant un coup à gauche et l'autre à droite puis en alternant un coup à droite puis l'autre à gauche. Il m'arrive de frôler quelques poteaux mais dans l'ensemble, je ne m'en sors pas trop mal. Je me jette sur le coté dans une roulade improvisée pour éviter une carcasse de quelque chose que je qualifierais de non identifiable.
Je pousse sur mes pattes et repars à vive allure vers l'autre bout de la rue encombrée. Mes foulées redeviennent amples et je savoure comme à l'accoutumée la sensation délicieuse de mes muscles roulant sous mes épaules en une machinerie bien huilée. Je galope rapidement avant de bondir sur tas de débris puis sur une carcasse de monstre de fer un peu plus haut. Je bondis sur une carcasse de véhicule bipède avant de conclure cette séance de bonds par un ultime me permettant de retrouver le sol goudronné. Mon allure ralentit à la vue d'un camion tanguant dangereusement, à demi renversé contre un mur délabré auquel il manque un nombre incalculable de brique. Je passe au pas et me baisse pour ramper sous le mastodonte inquiétant. Je rampe lentement, préférant opter pour la prudence. Je pousse sur mes pattes, me traîne laborieusement dans la direction souhaité et finit par voir le bout du tunnel si je puis dire. Je pousse puissamment pour sortir de ce trou en faisant attention à ne pas me cogner la tète contre le fer du camion. Une fois de l'autre coté, je m'ébroue furieusement et reprends mon souffle.
Je décide de retenter ma chance dans l'un des innombrables terriers humains de cette ville gargantuesque. La dernière fois que j'avais eu l'étonnante idée d'y trouver asile pour un peu de repos bien mérité, j'avais eu extrêmement bonne surprise d'y trouver l'un de ces amas de cuir que j'avais découvert pour la première fois dans les ruines de la fête foraine. Je me mets donc en quête d'une ouverture dans un bâtiment effondré. Ce qui me prend une bonne demi heure. Je rentre prudemment dans le terrier humain comme si ce dernier pouvait receler de bien mauvaises surprises ce qui ne serait nullement étonnant vu les créatures l'ayant habités. J'avance d'un pas mesuré mais sur à l'intérieur de ce petit espace ressemblant comme deux gouttes d'eau à celui de la dernière fois et arpente les lieux à la recherche du précieux sésame allant me servir de punching ball volontaire. Ah, voilà qui devrait faire l'affaire. Le fauteuil se trouve à coté d'un canapé, les deux sont en cuir beige d'un bon goût j'imagine mais me rappelant le pelage d'un loup que j'ai connu autrefois. Désolé vieux pense-je en me préparant à transformer ce tableau bucolique pour un bipède en champ de bataille.
Je m'étire longuement et dévoile les crocs dans un grondement aussi puissant que rageur pour me mettre dans le bain. Je ferme les yeux durant une poignée de secondes pour m'imaginer que je fais face à un adversaire bien réel avant de m'élancer vers le fauteuil à vive allure après avoir bondis en avant. Je feinte à droite et bondis à gauche pour aller percuter durement le haut du canapé. Qui contre toute attente ne se renverse sous ma masse ce qui est tout à son honneur. Je laisse mes griffes tracer un chemin destructeur dans le cuir sous mes pattes avant de plonger mes crocs acérés dans la matière ayant quelque ressemblance avec de la peau animale-ce qui je vous l'accorde est passablement logique- mes crocs se plantent durement et tirent tout aussi durement sur le cuir de couleur clair. Je déchire violemment une bonne partie de celui ci et retire mes armes pour cracher quelques lambeaux au goût franchement mauvais. Je replonge mes crocs dedans dans la foulée et secoue furieusement la gueule dans tout les sens pour faire le plus de dégâts possibles à cet ennemi inanimé. Je retire de nouveau mes crocs et décoche un coup de patte avant sur la surface plane dressée devant moi comme un mur. Puis, je bondis sur le sommet relativement fin ce qui a pour effet de le faire basculer cette fois ci sous mon poids. Je m'éloigne dans une roulade avant de pivoter sur mes pattes pour me retrouver de nouveau face au combattant imaginaire et m'avance dans un bond suivi d'un claquement de crocs menaçant.
Un bond en arrière puis sur le coté et me voilà lancé dans une série d'esquives et de feintes dans un mélodieux concert de claquement de crocs. Je m'élance finalement et percute l'imposant punching ball d'un puissant coup d'épaule. J’enchaîne avec un coup de tète qui précède un coup de griffes puis un autre. Mes griffes noires lacèrent le cuir avec acharnement et méthode. Je baisse la tète avant de plonger mes crocs dans la matière tendre et d'en arracher un bon morceau que je recrache immédiatement. Un bond en arrière est suivi d'une roulade de repli. Repli ne servant qu'à une seule chose, me donner l'élan nécessaire pour aller faucher l'autre amas de cuir que je n'ai absolument pas oublier. Je m'élance une nouvelle fois, bondis sur le canapé ou ce qu'il en reste avant de pousser une nouvelle fois sur mes pattes arrières pour un deuxième bond en avant dirigé vers le second punching ball que je percute en plein vol. Ce dernier plus léger se bascule ce qui me projette plus loin. Je roule sur quelques pas avant de me relever aussi sec et de partir à l'assaut, les crocs dévoilés. Je me mets à tourner autour du malheureux amas de cuir clair, un sourire carnassier sur les babines. Je plonge en avant et claque des mâchoires à quelques pas avant de bondir en arrière puis de m'élancer une nouvelle fois pour bondir sur le fauteuil. Mes griffes se mettent à labourer avec fureur faisant virevolter des lambeaux de cuir en un nuage qui se relèverait être sanglant en d'autres circonstances.
Les crocs ne tardent pas à venir suppléer les griffes qui continuent pourtant leur brutale besogne. Je m'acharne encore et encore tandis que mon rythme cardiaque se fait intense sous l'effort et que de la transpiration rend mon pelage moite. Mes coups perdent peu à peu de leur virulence tandis que la fatigue commence à pointer le bout de son museau en moi. Je bondis en avant et descends par la même avant de décocher un coup de patte arrière. Je me retourne dans un claquement de mâchoire marquant la fin de l’entraînement. Direction la tanière pour pioncer un coup.
Nouveau jour pour trimer. Nouveau jour pour suer. Encore une occasion de progresser et tout donner. C'est ragaillardi sans vraiment savoir pourquoi que je me dirige vers la ville morte pour un nouvel entraînement aussi intensif que les précédents entre ces murs délabrés semblant cracher leur désarroi à la face du monde. J'arpente les rues à une allure modérée et tranquille, observant les lieux comme à mon habitude à la recherche de quelque chose en particulier. En l’occurrence, il s'agit dans le cas présent d'un morceau de bois ou autre pouvant me servir de poids à traîner histoire d'augmenter la puissance de ma mâchoire. Je finis par dénicher ce que je cherche dans une rue encombrée d'une multitude d'objets et carcasses en tout genre. D'ailleurs la première chose que je déniche est une carcasse de sanglier dont il ne reste presque plus rien mis à part des ossements. Je ne sais pas vraiment ce qu'un sanglier a pu venir faire ici mais je ne me pose pas plus de questions que cela parce que cela n'est pas le moment et que je ne suis pas venu ici pour disserter sur les mystères de la nature. Je plante mes crocs sur les ossements et entame de traîner la carcasse à ma suite.
J'avance très lentement, ce genre de proie pesant déjà un certain poids lorsqu'elle a la peau qui va avec les os mais même sans ce n'est pas une partie de plaisir. Je sens mes muscles se contracter sous mon pelage tandis que j'avance un pas à la fois en tirant à la force de ma mâchoire l'imposant poids à ma suite. Je traîne la carcasse comme Atlas portant le monde sur ses épaules. Ma mâchoire ne tarde pas à me lancer en raison de l’envergure du poids que je tire mais je n'en démords pas et continue mon avancée d'une extrême lenteur. Je finis pourtant par lâcher quelques mètres plus loin histoire de reposer mes crocs, ma mâchoire et également de reprendre mon souffle. Une fois cela fait, mon regard se pose sur une barre métallique de premier choix qui ferait un poids bien plus abordable alors j'enserre de nouveau un os dans mes crocs et me remets à tirer en prenant la direction de cette barre scintillante. Je tire sans forcer sur la carcasse, optant pour l'endurance plutôt que de risquer une blessure par témérité. Un pas puis un autre, un pas puis un autre, et ainsi de suite jusqu'à arriver à quelques pas de la barre métallique. Je laisse tomber la carcasse de sanglier et fais quelques pas autour en claquant des mâchoires pour m'assurer qu'elles vont bien et accessoirement me reposer. Puis, je saisis la barre métallique entre mes crocs.
Je fais attention à ce qu'elle ne glisse pas et me mets à la traîner derrière moi en tirant. D'abord au même rythme que tout à l'heure soit extrêmement lentement. Mais, le fait que le poids soit moins lourd me pousse à augmenter ma vitesse sans même que je ne m'en rende compte et je me retrouve bien vite à trottiner en tirant durement sur le métal froid. J'avance à une allure plus rapide donc mais pas excessive compte tenu du fait que vouloir aller plus vite, trop vite pourrait me blesser stupidement. Alors je tire sur mon poids dont le contact avec le sol produit des grincements désagréables aux oreilles avec patience et mesure. Je traîne le bâton de métal sur plusieurs mètres supplémentaires avant de le laisser tomber dans un bruit sourd. Je repose mes crocs durant quelques minutes avant de récupérer le morceau de métal et de recommencer à tirer sans me presser sur une vingtaine de mètres. Puis, je le laisse définitivement tomber et prends de nouveau quelques instants pour me reposer. J'arpente la rue à la recherche d'un dernier poids, bien plus léger celui ci histoire que je puisse prendre de la vitesse.
Un morceau de bois issu d'une planche brisé apparaît au coin de la rue et je vais le chercher. Mes crocs se plantent fermement dessus et je mesure son poids dans ma gueule avant de m'élancer au trot le poids entre les mâchoires. Je trottine tranquillement le morceau de bois dans la gueule et accélère par pallier tous les dix mètres. Je trottine en sentant le poids tirer. Je manque de le lâcher mais le rattrape in extremis puis prend de nouveau de la vitesse. Finalement, je me retrouve à galoper le long de la rue en serrant fermement l'objet entre mes crocs. Mon cœur bat la chamade tandis que j'augmente peu à peu ma vitesse de course. Jusqu'à atteindre ma vitesse de pointe, celle pendant laquelle j'entends le vent siffler dans mes oreilles. Le poids augmente parallèlement à mon avancée au fur et mesure que la fatigue me saisit. Je finis par le balancer vers une vitre qui se brise sous l'impact avant de ralentir et de m’allonger sur le flanc pour prendre un repos bien mérité.
Je fais le tour des rues que je connais désormais à la recherche de quelque chose de bien précis. La montagne de débris dont j'avais déjà tenté l’ascension il y a quelques temps. Cela avait failli mal finir pour moi la dernière fois mais cette fois, je comptais bien me montrer aussi prudent que déterminé à mener à bien ce projet. Je finis par mettre la patte sur la montagne de débris. Un amas tout ce qu'il y a de plus impressionnant qui amène à se demander comment les bipèdes peuvent refaçonner le monde à leur image et ce même sans le faire exprès parfois. Peut être que c'est parce qu'il leur manque un prédateur tout simplement. Il n'y personne pour les réguler comme c'est le cas pour la plupart des espèces. Nous prédateurs avons nos propres prédateurs en la présence de l'homme. Mais eux n'en avait aucun. C'était sûrement pour cela qu'ils s' auto-détruisaient. Enfin, ce n'est pas que m'interroger sur les raisons du merdier qu'était devenu ce triste monde mais si j'ai cherché cette montagne artificielle c'était bel et bien pour une raison précise. Alors, je m'étire et entame le tour complet de la merveille de débris aussi divers que varié au petit trot histoire de préparer mon organisme à ce qu'il va suivre. Puis, à l'issue du deuxième tour je bifurque vers ce qui m’apparaît comme un chemin praticable sûrement parce que c'était celui que j'avais crée la première fois.
Je m'élance et bondis prestement pour gagner du terrain dans mon ascension et atteindre une sorte de plate forme improvisée composée d'une planche de bois. Je prends de nouveau appui sur mes antérieures et pousse puissamment dessus pour bondir de nouveau un peu plus haut. Je manque de glisser sous quelque chose de glissant. Puis, me mets à trottiner le long de la pente tout aussi artificielle que la montagne auquel elle appartient. Je fais bien attention à ou je pose mes pattes pour éviter de trébucher et de dégringoler lamentablement. Je trottine en mettant toute la puissance de mes muscles au travail car le fait d’être sur une pente me demande plus d'efforts. D'autant plus lorsque je souhaite la gravir. Mes pattes portent ma masse corporelle avec bravoure tandis que je bondis une nouvelle fois pour gagner du temps et de la distance avant de me remettre à trotter à la même allure que précédemment. Je sens mes muscles chauffer tandis que je continue mes efforts. Un pas après l'autre, je commence à ressentir la première vague de fatigue. Celle qui voudrait dire : allez arrête toi là mais à laquelle je n'accorde pas la moindre attention et continue ma route au même rythme. J'ai quasiment atteint la moitié du chemin lorsque je décide de puiser dans mes forces pour accélérer la vitesse de croisière. Je passe du trot au galop sur la pente abrupte et avale donc plus de distance en un laps de temps plus court. Mais m'épuise également plus vite ce qui est somme toute logique. Je manque de glisser sur quelque chose d'étonnement lisse et plonge mes crocs dans un morceau de bois pour ne pas dévaler la pente. Puis, je prends quelques instants pour reprendre mon souffle. Avant de repartir à l'assaut de la pente.
Je bondis pour gagner quelques mètres avant de repartir au trot privilégiant par la même l'endurance à la vitesse. J'atteins finalement le sommet cette fois ci et savoure la vue à sa juste valeur. En soi, le panorama n'est en rien différent de ce que m'offre l'exploration de ce ramassis de pierres éparpillées portant encore le nom de ville si ce n'est un détail de première importance. La hauteur, oui la hauteur donne une autre perspective à la vie. Une perspective que je pourrais me surprendre à apprécier. Après avoir profité du grand air du sommet d'un amas de débris au milieu d'une ville déserte. Je m'élance dans la descente à toute allure. Bondissant de temps en temps pou dépasser quelques obstacles. Je sens mes muscles rouler sous ma peau et un sourire étire lentement mes babines. Je savoure l'ivresse que me procure la vitesse extrême d'une galopade en descente avant de bondir une dernière fois pour atterrir sur la terre ferme. Haletant, je prends la direction de la plaine de cendre la langue pendante.
Il fait nuit lorsque je m'élance à toute allure dans les ruelles délabrés et désertes de la ville morte. Je fonce tel un limier ayant flairé le goût du sang et galope à vive allure à travers la ville morte. Mes foulées sont amples et rapides. Mes coussinets effleurent à peine le sol dallé de l'avenue sur laquelle je suis engagé. Je galope à toute allure comme si je poursuivais un ennemi que je voulais, que je devais à tout prix abattre. Je sens mes muscles rouler sous mon pelage grisâtre et savoure la sensation d’être au faite de ma puissance physique. Mon cœur bat à toute vitesse comme si ce dernier voulait rivaliser avec moi dans une course interne à ma personne. Le sang pulse dans mes veines et résonne à mes oreilles. Je continue d'avancer le long de l'avenue à cette allure folle avant de commencer à ralentir peu à peu par pallier. Je galope à une allure moins sauvage sur une bonne douzaine de mètres avant de continuer de ralentir à un rythme régulier. Peu à peu mes foulées se font plus mesurées et moins puissantes. La charge dans mes pattes diminue lentement mais sûrement. Ma langue pendouille mollement hors de ma gueule tandis que je passe à un trot rapide. Je bifurque dans une rue adjacente et réduis encore ma vitesse pour me mettre à trotter à l'allure que l'on associe traditionnellement à un trot. Je trotte sur quelques mètres avant de tourner sur moi même en décrivant un arc de cercle parfait pour me mettre à observer les alentours à la recherche de quoi traîner un poids à ma suite.
Contre toute attente, ma patte percute un morceau de poutre aux dimensions idéales que je ne tarde pas à enfourner dans ma gueule. Je pousse sur mes pattes pour prendre une première impulsion déterminante avant de tirer mon morceau de bois avec vigueur. Je traîne le poids en marchant dans un premier temps. Ne me souciant aucunement de ma vitesse. J'accumule les mètres les uns après les autres. Un pas après l'autre sans jamais m’arrêter. Un pas en avant. Une poussée sur mes pattes arrières. Un pas en avant et ainsi de suite. De l'écume s'écoule de mes babines pourtant fermées et je resserre ma prise sur le bois avant de me mettre à élever la cadence de mes pas. Sans me presser cependant. Après une bonne trentaine de mètres, je me mets à trotter en tirant rigoureusement mon poids à ma suite. Ma mâchoire commence à me lancer et je décide d'atteindre un tas de débris un peu plus loin avant d'achever cette session musclée sous les étoiles par un ultime parcours d'obstacles. Je tire dans un ultime effort d'un coup de mâchoire avant de lâcher le poids puis de souffler bruyamment. Je me mets à arpenter les lieux doucement pour ne pas refroidir mes muscles mais me reposer en mouvement.
Je m'élance finalement une demi douzaine de minutes plus tard dans une autre rue aussi encombrée que bien d'autres dans cette ville. Je galope à vive allure de nouveau bien décidé à travailler ma vitesse et mon agilité. Je bondis par dessus un tas de débris et atteins l'autre coté pour esquiver à temps un poteau. Puis un autre, et finalement je me retrouve dans un slalom. Un bond à droite un autre à gauche bis répétita puis l'inverse. Avant de ralentir l'allure pour ramper sous un renfoncement. Je traîne ma carcasse sur plusieurs mètres en faisant abstraction des rats passant juste devant mon museau. Je pousse encore et encore jusqu'à émerger de l'autre coté. Puis, je repars au trot avant de bondir sur un espèce de tonneau proche d'une carcasse en piètre état qui ne tarde pas émettre un son grinçant lorsque ma masse s'abat en son sommet. Un autre bond et je suis de nouveau sur le bitume. J'esquive un mur crée par une chute de briques et roule sur moi même le long du mur avant de bondir sur mes pattes et repartir au galop sur une bonne dizaine de mètres. Finalement, mon corps me fait clairement comprendre que je viens d'atteindre mes limites. Je ralentis et me laisse tomber sur le flanc. J' halète durant de longues minutes le temps pour mon rythme cardiaque de diminuer jusqu'à redevenir normal.