Tu t'étais levé, lassé d'une journée n'ayant pas encore commencé. Cela n'allait pas vraiment, ces derniers temps. Tu soulevas le cadavre qui te servait de corps, épuisé par toutes ces facéties, entre les meutes. Il te sembla être une bonne idée que de chasser; tu n'avais rien de plus pitoyable à faire, à ce qu'il te semblait. Alors tu décidas de te rendre en terres neutres; plutôt te fallait-il te rendre loin, là où peu de loups erraient. La présence d'une meute menait toute chasse en dérision; il te fallait un endroit plus propice, légèrement plus calme. Moins dévasté serait une énorme absurdité. Tu passas quelques temps à errer, puis te redirigeas avec un peu plus de volonté vers une terre neutre. Espérant y trouver quelque chose, quelque chose qui constitua une sorte de repas. Cela te semblait être une bonne idée. On avait jamais trop de ces conneries, tu songeais. Mais c'était dangereux. Quoique ça te travaillait assez peu l'esprit, pour le moment. Le plus avantageux te semblait d'y aller. Peut-être que tu y crèverais enfin, aussi. Tu aurais aimé que quelque chose de plus fort que toi t'accorde enfin un repos éternel; tu priais pour y rester tous les jours. Mais ton heure n'était pas aujourd'hui, et ton instinct, stupide et bestial, te forçait à étouffer cette terrible faim.

Tu humas l'air. Mais rien ne se trouva être à ta portée. Tu erra un peu, cherchant. Cela te prit péniblement du temps, lentement. Rien ne semblait être aux alentours; complètement vide. Tu avais pleinement conscience que tes échecs semblaient définitifs. Parce que tu aurait été étonné qu'une autre proie se décida à sortir brusquement, pour une raison aléatoire. Simplement, il te suffisait de chercher avec plus de volonté. Probablement. Tu cherchas dans de nombreux endroits, amer de ne rien trouver. Peut-être qu'une zone aurait échappé, de par son odeur étrange, à ton odorat. Cependant, cela ne semblait pas le cas. Tu étais lassé de ces échecs, et frustré de par leur répétition. Un vide complet, sans qu'aucune âme vivante ne semblait être en ces lieux. Cependant, cela ne te permettrait nullement d'abandonner. Tu n'avais pas de stupide honneur qui te forçait à revenir avec quelque chose, simplement, après avoir perdu ce qui te sembla une éternité, tu refusais de ne pas y laisser quelques secondes de plus; doucereusement, elles s'accumulaient. Alors, tu continuas à chercher, avançant un peu plus profondément dans les terres.

Toujours rien. Tu soupiras lourdement. Tu n'avais décidément pas de chance. Les mêmes démarches, lassantes au possible, qui reprenaient, indéfiniment. Peut-être aurais-tu plus de chance un autre jour. C'est ce que tu conclus, te décidant, après quelques interminables heures d'échec, à revenir le lendemain, non sans avoir cherché à nouveau. Mais lorsqu'il n'y avait tout simplement rien, c'était une chose établie, que rien ne pouvait changer.

Tu retentas, dans la même zone, une seconde fois. Cela te semblait tout de même relativement improbable, néanmoins, tu n'avais pas énormément d'autres choix. Assez surprenamment, au bout d'un quart d'heure de recherches, tu trouvas quelque chose. Une proie, à distance, relativement rapide, et que tu avais peu de chances d'attraper; tu pouvais déjà le jauger. Néanmoins, la faim te poussa à tenter tout de même. T'approchant lentement, très lentement, à pas feutrés, prenant garde aux zones où tu posais les pattes. Ce n'était pas très ardu, de réduire la distance de quelques mètres; mais les derniers se révélèrent énormément plus marqués. La zone n'était pas propice à la discrétion, après tout. La proie releva la tête; confuse de ce bruit soudain. Tentant au moins quelque chose, tu bondis et tentas de l'attraper. La distance, encore trop grande, lui révéla immédiatement ta présence, et lui permit de s'enfuir.

La poursuivant, tu fis de ton mieux; dépensa toute ton énergie dans ces quelques pas si importants; mais eut peu de chance. Tu perdis du temps à escalader un arbre tombé tandis qu'elle se faufila à l'intérieur; et perdit complètement toute trace de son passage. Aucune idée de si elle était restée dedans, retournée en arrière, ou avait continué de tracer devant, sans penser la moindre seconde à s'arrêter. Tu soupiras lourdement. Tu ne désirais pas tenter de la retrouver, mais tu te disais que s'il y en avait une, il y avait de grandes chances pour qu'une autre subsiste. Probablement.

Et c'était le cas. Tu soupirais, errais. Encore. Une journée qui te semblait relativement perdue. Exceptée lorsque tu sentis la présence de quelque chose; enfin. Tu ne laissais pas tes sens te trahir sous la surprise, couplée au bonheur d'avoir une chance, aussi infime puisse-t-elle être, d'enfin avoir quelque chose. Rien que le fait de ramener une proie te rendrait satisfait, peu importait sa taille. Il le fallait.

C'était un castor, de ce que tu en savais. A un endroit fort incongru. Il se tenait là, plutôt loin de toi, mais tu l'avais flairé. Alors tu t'approchas, plus discrètement que pour la précédente proie. Cette fois-ci, ta discrétion fut notable, et tu eut la bête. En un bond, tu te jetas sur elle, et l'acheva. Ce fut rapide et efficace, à ce qu'il te paraissait. Tu trouvais cela presque irréel, d'enfin tomber sur quelque chose après tant d'échecs et de temps gaspillé inutilement en errance. Tu te décidas à revenir le lendemain, pendant que tu rapportais cette proie-ci. Il était déjà tard.

Le lendemain, tu revint au même endroit. Te questionnant sur si tu allais trouver quelque chose, à nouveau. Et assez étrangement, ce fut le cas très rapidement. A peine eut tu posé les pattes à ce qui semblait être la limite de la forêt; quelque chose à peine marqué, tu remarquas la présence d'un lièvre au pelage immaculé. Elle semblait si proche; tu te stoppas un instant, jaugeant si la bestiole t'avait vu ou non. Et ce ne semblait pas être le cas; d'une terrible imprudence. Tu t'avanças avec précaution, mais l'environnement semblait propice à cela, pour changer. Alors tu te jetas dessus impulsivement, trop près. Elle te repéra, et commença à courir. Néanmoins, cela ne dura que quelques secondes avant que tu ne la rattrapa de quelques grands bonds, et l'acheva définitivement. C'était une chose de faite. Relevant la tête, tu comptais encore miser sur l'abondance de proie en ce lieu. Après deux trouvées, cela n'était pas impossible qu'une troisième survienne. Ou peut-être que tu comptais trop sur ta chance stupide. Tu ne savais pas vraiment, mais ça ne risquait rien. C'était ce que tu te disais, tout du moins.