Rares sont les fois où un Alpha s'éloigne de son territoire. Il doit être là pour les surveiller ou tout simplement pour se protéger et protéger sa famille. Car un Alpha représente la stabilité même d'une meute, s'il devait lui arriver quelque chose, cela pourrait mettre l'intégralité de la meute en péril. Plus de stabilité, plus d'équilibre, et tout s'effondre. Cela avait été vu notamment à la disparition de la vieille Alpha Sekmet, Empress. Elle était forte et sage, et un jour, elle a disparu. Hige a scandé qu'elle était morte et s'est proclamé Alpha à sa place avec l'aide de Torka, qui n'avait nullement envie d'assumer la galère que sa mère a enduré toute sa vie. Athos avait pris la place d'Alpha, on l'avait mis à cette place, on l'avait élu pour qu'il le devienne. Plus encore qu'une simple prise de pouvoir, le fait qu'il ait été choisi par sa meute rendait les choses totalement différentes. C'est une acceptation de la meute qui engage l'Alpha,et lui donne le devoir et la légitimité dont il a besoin. Athos avait vu juste. Le devoir avant tout, la légitimité l'avait aidé. Mais autant que l'on puisse en voir, Athos n'était pas un Alpha comme les autres, il n'était pas de ceux qui restaient tranquillement cloîtrés chez eux. Il avait toujours aimé découvrir et voir du pays, il était un conquérant et rêvait sans cesse à de nouveaux horizons. Et même s'il connaissait chaque terre de la région, il ne se lassait pas de les inspecter encore et encore. Et c'était ainsi que le Conquérant était allé sur cette sorte de crevasse gigantesque qui faisait plusieurs centaines de mètres de long. Il s'en était approché d'abord, sans pour autant aller au bord, il la regardait de loin comme pour mieux en comprendre son étendue et sa complexité. Il était fasciné par les mouvements de la nature. Quel tremblement des entrailles de la terre avait été assez puissant pour provoquer telle blessure en son sein.Il inspectait du haut d'une petite colline, droit, fier, de sa posture habituelle dont il ne se rendait même pas compte. Ses yeux avides de savoir scrutaient les parois, d'où on voyait s'échapper une chaude lumière des couleurs du soleil. Doucement, méthodiquement, il suivait la ligne de la Blessure du regard, lorsqu'une chose attira son attention. De loin, il ne distingua pas tout de suite ce que c'était. Mais cette chose avait forme canine et portait une armure. Athos grinça des dents. Un Hellhound? Il était trop loin pour s'en apercevoir. Avant de faire quoi que ce soit, comme tout bon stratège, il inspecta les horizons pour s'assurer que rien ni personne ne pourrait l'empêcher de tuer la bête immonde qui se trouvait en au loin. Non, il n'y avait personne, alors il pourrait y aller. Il connaissait cette région. En cas de problème, il savait comment se replier. L'ancien général descendi doucement de la colline, sans se faire voir, car l'autre semblait ne pas l'avoir vu, pas encore. Alors il s'approcha, traversa les broussailles jusqu'à n'être plus qu'à une centaine de mètres de la blessure. Une chose sauta cependant aux yeux de l'Alpha Sekmet. Le canin était bien grand, et n'avait pas tant la physionomie d'un chien que ça. Cela intrigua le jeune loup qui s'approcha encore, discrètement, s'arrangeant pour que le vent ne porte pas son odeur. Oui, c'était bien une forme lupine. Ce n'était pas un chien, mais c'était un loup, un loup très amoché. Athos était encore trop loin pour le distinguer et son odorat était quelque peu troublé par l'odeur de souffre et la chaleur qui émanait de la Blessure. Athos fit un léger détour, puis s'arrêta net lorsqu'une odeur lui parvint. Serait-ce possible que... Non. Arès? Non. Châtiment? Non ! Mais c'était pourtant son odeur, mais au physique rien ne laissait croire qu'il s'agissait bien de lui! L'armure le rendait plus petit, affaissé, il était décharné, blessé de toutes parts... Comment cela pouvait-il être Arès? Il avait certes été quelque peu abîmé en devenant Châtiment, et ils ne s'étaient pas vu depuis des mois, mais comment un tel changement avait-il pu s'opérer! C'est là que sa rencontre avec Kobalt lui revint. Des loups avaient été capturés et drogués par les Hommes, puis harnachés d'horribles armures explosives. Des loups tels que Abysse, ses enfants, Koschei, Véga, ou encore... Arès.


Athos cligna un instant des yeux, puis crispa la mâchoire, la rage à la tête, une boule au ventre. Il avait dû endurer plus de souffrances que jamais. Athos se souvenait de son séjour en cage. Il avait été piqué aussi, mais par chance, les piqûres lui sauvèrent la vie. Et il avait pu s'enfuir. S'enfuir de cet horrible endroit. Avec Anya. Athos se crispa. S'il est drogué et explosif, il est donc dangereux. Il fallait agir avec précaution, ne pas le surprendre. Puis, Athos vit une chose : Arès s'approchait dangereusement du bord de cette falaise rouge... Comme s'il allait... Non ! Athos sortit des fourrés, bruyamment pour se faire remarquer et pour qu'Arès se retourne. Il s'approcha alors de front sans se cacher, et s'arrêta à quelques mètres seulement du loup harnaché d'une bombe. Il ne le laissera pas faire, ça non. Arès avait été son ami, malgré ce qu'il avait fait aux siens, malgré son éloignement, malgré son, ou plutôt ses brusques changements. Il était tout de même son ami. Et Athos avait la réputation d'être droit et loyal. Il ne laisserait pas son ami tomber, ni au sens propre ni au figuré.

Il s'était donc arrêté, non loin, le regard plongé dans celui d'Arès. Doucement, il tourna la tête vers le gouffre lumineux, puis son regard revint sur Arès.


"Arès."

Une brève salutation, un nom venu d'ailleurs. Même si l'autre ne voulait pas le porter, il resterait malgré tout Arès, il avait toujours été Arès, au fond. Athos en restait persuadé.

A la réponse de son vieil ami, Athos esquissa un léger sourire espiègle. On pouvait pour le moins dire qu'Arès n'avait pas encore perdu sa répartie. Il semblait avoir gardé cette partie de lui, cette façon de répondre au tac-au-tac; sur ce même ton qui lui était caractéristique, à la fois égal et... comment le qualifier. Provocateur? L'air de dire "ca te plait ca te plait pas, j'm'en fous!"C'était bien lui. Et le Arès que Athos avait connu avait un cœur d'or, en plus de cette répartie et cette sincérité là, cette façon d'être toujours fidèle à soi-même. C'était pourtant dur par les temps qui courent, rester fidèle à soi-même. On changeait si vite avec les éléments. Les Hommes étaient entre autres un facteur crucial à prendre en jeu. Une chose à ne pas oublier. C'est étrange de dire ça pour quelqu'un qui s'est fait autrefois lui-même capturé. Car Athos aussi avait séjourné quelques jours dans une cage. Certes, il n'avait pas été torturé ou on ne sait quoi d'autre, il avait, par le plus grand des hasards, été choisi pour tester un remède, alors même qu'il était malade. Et le remède avait été une réussite. Le hasard fait parfois bien les choses. Enfin, autant ne pas trop s'y remettre quand même, la chance ne fait pas tout; d'ailleurs elle ne fait souvent rien. On arrive à obtenir que son qu'on mérite. On récolte ce que l'on sème. Bonne ou mauvaise graine. Tout ne dépend que de nous.


Athos regarda son ami dans les yeux alors que ce dernier restait dangereusement proche du bord de la falaise, les pierres s'effritaient sous ses pattes et tombaient parfois dans un bruit sourd, comme un cri étouffé d'une douleur incommensurable. Athos n'y faisait pas attention. Tout loup avait certaines envies, besoin de se tester peut être ou tout simplement ressentir la sensation vertigineuse que la vie ne tient qu'à un fil; sensation tout aussi effrayante qu'exquise.

" Ô mais tu es tout pardonné."

Déclara-t-il avec un petit geste de la tête accompagnant ses paroles.

" Il parait que les temps sont durs. Il parait. Mais tu as pourtant l'air en forme mon ami ! , ironisa-t-il avec un sourire mordant.

Athos regardait son ami droit dans les yeux alors que ce dernier se rapprochait dangereusement du vide. Allait il commettre un acte qu'il ne serait plus en mesure de regretter? Athos en doutait. Arès n'était pas du genre à fuir ses problèmes. Et Athos doutait qu'il n'en fut pas de même pour Châtiment. Non, il affronterait, il s'affronterait, quitte à perdre contre lui même, il essaierait. Et peut-être qu'il échouera. Peut-être. Mais au moins il aura essayé, et c'était bien mieux comme ça, du point de vu d'Athos. Il reconnaissait là son ami, celui droit, loyal et fidèle, un loup entier et brave. C'était bien ce qu'il avait vu en Arès, il devait forcément en rester des reliques en Châtiment. Forcément.

Athos regarda l'autre loup défiguré d'un air grave. Ce dernier, dans un souffle désespéré, venait de demander à son ami de le tuer. Enfin, plus ou moins directement. Il ne voulait pas mourir, il n'avait pas le courage de provoquer sa propre mise à mort en demandant à son ami de le tuer. Mais il le voulait pourtant, il voulait avoir ce courage et c'était pour ça qu'il avait conseillé à son ami de le tuer, en conseil et non pas en supplication, en ordre ou en prière. Non ce n'était pas ce que voulait Châtiment, une mise à mort. Il voulait qu'on le tue par dégout, par haine, pour le monstre qu'il se sentait être, et non pas être mis à mort par pitié. Athos comprennait cela.

Il regarda son ami d'un air très dur et très sévère, il n'avait jamais regardé Châtiment ainsi, son regard bleu-nuit était dur et froid. A vrai dire, n'importe qui en voyant cela, en voyant son ami changer de visage, aurait été pris d'un sentiment de panique et d'instinct terriblement pressant ... de fuir.


" Très bien, si c'est ce que tu veux."


Athos était on ne peut plus sérieux, il s'avança d'un pas lent vers Châtiment, comme une sentence, comme un lion qui avançait vers la proie que les lionnes avaient déjà collée au sol, cette proie encore en train d'agoniser, de se vider de son sang, qui, alors même qu'elle est incapable de bouger, voit la mort arriver.


[A cet instant du rp, il s'avance seulement, doucement, pour laisser le temps à Châtiment d'avoir une réaction, telle qu'un changement d'avis]

C'était impressionnant de voir à quel point ce loup était perdu. Il me regardait de son air à la fois furieux et désespéré, comme si, même s'il avait envie de mourir, il tentait malgré tout de se battre, de faire quelque chose pour éviter que sa vie ne s'arrête ici, pour éviter que son existence se termine alors même qu'il se répugnait lui-même. Athos avait-il vraiment l'intention de tuer celui qui avait jusqu'alors été un ami si cher pour lui? Non bien sûr que non. Quand bien même Arès prétendait être un meurtrier, et même si c'était vraiment le cas, Athos n'était pas de ceux qui tuait pour rien. Certes, il avait ce tempérament si emblématique des Sekmet, ce tempérament de vainqueur, de loup qui ne se laisse jamais dépasser par qui que ce soit et qui écrase plutôt que d'être écrasé. Mais tuer un ami, non. Certainement pas.

Athos s'arrêta net quand Arès se mit à approcher. Arès était toujours là, l'Alpha le sentait. Alors, quoi maintenant?


" Alors quoi maintenant? Je te tue et nous en avons fini avec tout ça? Tu crois vraiment que c'est aussi facile de surmonter ces épreuves? Tu es bien des choses Arès, ou Châtiment, ou peu importe le nom que tu as envie de porter, ça m'est bien égal. Tu es ce que tu es et je ne t'ai pas connu lâche. J'ai vu ce dont tu étais capable de faire. J'en ai strictement rien à faire. Tu es qui tu es, je te connais et je te parle en toute connaissance de cause. Tu veux fuir ta peur, contourner tes craintes, tu veux tout abandonner parce que cela te semble trop dur? Lâche. C'est tout ce que j'ai à te dire. Tu es mon ami, je ne tue pas mes amis, et même si tu me forces à te battre je te laisserai encore en état de vivre, peu importe comment tu seras, réduit en charpie, paraplégique, peu m'importe je ne t'aurai pas tué parce que tu sais quel est mon code d'Honneur, tu sais ce que ça représente pour moi. Tu es mon ami, meurtrier ou non, je n'en serai pas à ça près , j'en ai bien d'autres qui ont fait pire. "


Athos émit un profond grognement, poussa d'un coup sur ses pattes pour écraser Châtiment qui, presque inconscient de ce qu'il se passait s'écrasait comme une masse, ses pattes griffant l'air furieusement alors que son esprit était vide. Athos plongea ses crocs dans son épaule pour qu'il reste immobile, il sentait le sang couler dans sa gorge.

Etais tu un ami ou un ennemi Arès? Arès était un ami.

Toi Châtiment, la chose infâme qui donne de la force à ces pattes, tu es un ennemi. Tu es l'ennemi d'Athos. Et Athos va te laisser là.


Le jeune Alpha força Châtiment à rester à terre, alors que ce dernier tentait tant bien que mal de se dégager. Tu l'auras eu, finalement, ton combat, Châtiment. Malheureusement pour toi et heureusement pour Arès, tu l'as perdu.

Athos enfonça ses griffes de toutes ses forces dans les membres d'Arès et d'un coup sec, envoya un coup dans la nuque de Châtiment, qui tomba, inconscient mais vivant.

Athos avait respecté sa parole. Il s'était battu avec Châtiment, avait gagné le combat. Mais l'avait laissé en vie. Il se réveillerait bientôt, seul.


"Tu seras toujours mon ami Arès. J'espère que tu trouveras la force de tuer Châtiment, notre ennemi commun. "

Et Athos partit, du sang perla sur son coude avant droit.


(Avec l'accord du joueur).