Storm commençait sérieusement à avoir faim. Elle poussa un grognement, dans le vide, les oreilles orientées vers l'arrière. Elle doutait de trouver quelque chose de bien gros ici, mais un oiseau, même un moineau, aurait au moins apaisé sa faim. Elle s'assit, et observa la route, dans le silence. La brise agitait sa fourrure, elle ferma les yeux. Le silence l'envahit, puis, agacée de n'entendre aucun battement d'aile, elle se leva et se remit en route. Plus loin, peut-être trouverait-elle du gibier?

Plus elle avançait, plus son ventre gargouillait, plus la faim devenait oppressante. Plus elle avançait, plus son humeur se dégradait. Ses oreilles s'agitèrent. Elle slalomait entre les voitures, bondissait par-dessus les failles. Elle grimpa dans un des véhicules et renifla dans le coffre. Il n'y avait pas la moindre trace de miette à lécher. Sans doute les volatiles et les autres animaux étaient passés avant elle. D'ailleurs, quelques touffes de poils étaient éparpillées par-ci par-là.

Le temps passait, les nuages se déplaçaient et les paysages ne changeaient pas. Toujours de la désolation, des morts, des squelettes, des animaux errants hostiles. Tant de présence et de désert à la fois, cela la dépassait. Et puis, elle avait désespérément besoin de changer d'air, d'en trouver un plus respirable. Elle en était sûre, un jour, il se passerait quelques chose, et tout changerait. Les terres seraient verdoyantes, les ruisseaux clairs, les hommes auraient la peau rose et pas de masque. Les loups chasseraient dans les paysages abondants en nourriture. Rien qu'à cette idée, cela lui remit un peu de courage dans la poitrine. Elle s'élança, le museau au sol, cherchant toujours et encore.

Mais la chance ne lui souriait toujours pas. Fatiguée, elle s'installa dans un coin de la route, abritée du vent par une carcasse de voiture contre qui elle se blottit. Il se faisait tard, peut-être tomberait-elle sur quelques chose de mangeable pendant la nuit.

Après s'être assoupie, la louve blanche s'éveilla en plein milieu de la nuit, à cause d'un énorme bruit. Elle se releva en sursaut, descendit de la voiture la fourrure hérissée et les crocs à découvert. Au loin, la ville fumait. il lui semblait bien que cette dernière était assiégée par les flammes, qui tombaient des épais nuages noirs dans le ciel. Mais où elle était, pas une flammèche ne tombait. Elle poussa un soupire de soulagement, et se rapprocha de la ville.

On entendait que le crissement des flammes. Storm s'assit à l'entrée de la ville, les oreilles plaquées contre sa tête et les yeux mi-clos à cause de la chaleur qui s'échappait du four que formaient les ruelles. Des animaux apeurés sortiraient certainement par là pour se sauver des flammes.

La jeune chasseresse avait vue juste, car bientôt, une petite horde d'oiseaux s'envolèrent. Il y avait des pigeons, des corbeaux, des corneilles et des moineaux. L’œil vif, bien que plissé, elle repéra une proie facile. Une grosse corneille semblait s'être brûlé les ailes, et avait du mal à voler. Un groupe d'écureuils apeurés la contournèrent, elle bondit dans les airs et attrapa le volatile blessé par les pattes. Elle le tira en bas et l'acheva, avant de l'emmener, guillerette, la tête haute. La jeune blanche avait réussi à tirer partit de sa ruse et de son agilité pour se remplir l'estomac.

Ne laissant que les plumes sur le bitume, les babines en sang, elle quitta l'endroit au petit trot. Ella aurait à de quoi tenir tranquillement deux jours, après, elle devrait se remettre à chercher de la nourriture.