Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
Pour un lièvre boiteux, il allait vachement vite, le bougre. Et loin, surtout, parce que certes le solitaire n'avait jamais tenté de compter les pas qui séparaient la cabane des marais mais ça faisait quand même un bout de chemin pour une course-poursuite. De la distance qui le séparait des pattes bondissantes qui le narguaient depuis un atrocement long moment, il ne pouvait pas déterminer l'état de fatigue de sa proie déterminée à disparaître au plus loin malgré ses chances de survie plus que réduites avec une patte défaillante, qui le faisait basculer à chaque mauvais pas, mais ce qu'il en savait, c'était que lui commençait un peu beaucoup à entendre les plaintes de ses muscles déjà trop peu nourris pour ce genre d'efforts à rallonge. De se dire qu'il allait devoir refaire tout le chemin inverse pour retourner avec ou sans à son dernier point de ralliement et sa maigre réserve ne faisait qu'affirmer ce que la fatigue lui disait; abandonne, laisse-le se jeter dans la gueule d'un caïman si ça l'intéresse tellement. Oui mais non. Pour le peu qu'il pouvait manger quotidiennement, ce n'était sûrement pas un trois-pattes qui allait lui échapper. Certes, il respectait moyennement le critère d'optimisation qui était de ne pas dépenser plus d'énergie à chasser qu'à manger, mais sérieusement il n'en avait rien à faire. Etant un ermite de première, il n'avait rien non plus à faire qu'il se trouvait bien plus proche du nouveau territoire de la troisième meute - vous savez, celle avec laquelle il n'a pas encore eu d'ennuis - parce que les hellhounds les avaient chassés de la chapelle d'où il avait déjà tenté un pillage avec un espèce de solitaire dégénéré qui avait pensé pouvoir tout prendre pour lui. Les odeurs de loup qui flottaient, étonnement nombreuses pour une terre neutre, dans l'air alentours, il n'y prêta aucune attention, trop concentré sur sa proie. Celle d'une louve seule - qui sentait la plante d'ailleurs, les empreintes dans le sol boueux, non plus. Peut-être qu'il aurai dû. Oui, peut-être qu'il aurai dû, qu'il pensa un court instant lorsqu'il atterit littéralement sur la louve en question, en sautant par dessus un tronc placé trop haut pour ne pas la cacher. Peut-être, effectivement, alors que l'inespéré lièvre trébuchait juste à côté et s'étalait de tout son long dans la boue, à cinq mètres des deux blancs. Sauf que la proie avait déjà disparu pour le fantôme qui avait sauté sur ses pattes, tendu à claquer et les poils hérissés face à ce qu'il se méfiait d'être un potentiel adversaire. Une navnik, blanche comme lui.
Je errais depuis plusieurs heures sur ces terres en quête de plantes à présenter à ma mentor et de quoi me ressourcer. C'est sans compter sur la boue qui tâchait déjà mon beau pelage blanc. Je grogna. Je ne pouvais m'empêcher de sentir les bonnes odeurs de lapins et de grenouilles qui me faisait déjà baver rien qu'à l'idée d'en manger.
La pluie. Oui il commence à pleuvoir.
Génial ce temps va vraiment m'aider à trouver de la nourriture et encore plus des plantes. Je m'abritait donc près d'un tronc plutôt massif qui appartenait à un énorme chêne sûrement dérassiné par des tempêtes.. Quel bel journée. Mon ironie toujours disponible. Bam en pleins dans la figure un objet ou plutôt un être me percuta de tout son poids et on fit des galipettes. Grr. Je me leva un peu sonné par cette rencontre et vit un mâle plus puissant me faire face. Le poil hérissé, il grognait. Bien il voulait m'intimider. C'est normale j'ai envie de dire.
"Regardes où tu vas, aveugle."
Je fis un petit grondement de mécontentement. Le pire dans tout ça il me défiait sachant évidemment qu'il avait l'avantage. Je détourna la tête de sa silhouette et vit la pauvre petit proie filait en douce en titubant.
"Si tu veux rattraper ta bouffe c'est maintenant, fis-je d'un petit sourire en coin narquois et d'un regard le défiant.