La journée à été rude, mais cette nouvelle aube est aussi le début d'une nouvelle journée, d'une nouvelle période d'entrainement. Nocturne a encaissé mes coups, ma rage, ma frustration et toute la peine que la trahison des miens m'a infligé. Il est resté à mes côtés malgré son tempérament solitaire et égoïste, pourtant il continue de clamer haut et fort qu'il ne pense qu'à lui et que le monde ne lui importe pas. Je crois que je commence à me rappeler, ce qui tournait dans ma tête avant que je sois réinitialisé par les humains. Il y avait d'abord ma soeur, puis la Horde, puis Atom et nos petits. J'ai fini par vénérer les Navnik après les avoir créer, et j'étais celui qui les respectait le plus. Pourtant, ils ont tous suivi des Sekmet, qu'ils avaient pour certains, fui. Ils les ont suivi, ils leur ont obéis, ils leurs sont devenus loyaux. J'ai encore bien du mal à comprendre comment les miens, ma propre famille, on put changer ainsi de camp et se retourner contre celui qui avait fondé leur entente. Mais je reste silencieux, là face à Nocturne, réfléchissant à tout ce que j'ai manqué.

- Le gamin, le blanc, c'était qui ?

Parce que non, je n'ai pas oublié ce soir où ils sont venus me libérer. Il y avait mes deux fils et ma fille. J'ignore où était Ersatz ce soir-là, mais je pense deviner. Un jour, je saurais ce qui lui est arrivé, et je vengerais ce qu'on lui aura fait. Mais si Ersatz n'était pas là, un autre a pris sa place. Fils de Nocturne ? Un allié des Dragon ? Peu importe, il a participé à ma libération, et qui qu'il soit, je le remercierais un jour.

- Je te le dirais.

Mais le temps traîner, les secondes se poursuivent et mon dernier allié reste silencieux. Je redresse la tête et l'observe, silencieux moi aussi, attendant enfin les révélations.

- Quand tu m'aura attaqué.

Je penche légèrement la tête. Ainsi, il n'est pas temps de se reposer. L'heure n'est pas au calme ou à la sérénité, j'ai encore trop de travail. Alors, puisque Monseigneur à pris sa décision, je me lève et m'ébroue, m'étire de tout mon long et laisse passer encore plusieurs secondes. Pourquoi me cacher qui était le môme ? A-t-il peur de ma réaction ? Suis-je encore trop instable à ses yeux ? Je vais mieux. Je suis loin du résultat qu'il attend et encore plus de celui que moi-même, j'attends. Je m'approche lentement de lui, le toise, l'examine comme j'examinais autrefois mes adversaires. Avec calme, avec patience.

Et puis, brutalement, je bondis en avant. Je concentre tout mon poids sur le loup sombre et le renverse avec brutalité, plongeant mes crocs dans son encolure en maîtrisant ma force pour la première fois depuis qu'il m'a sorti, accompagné de mes fils, de cet Enfer qu'était l'arène. Je gronde par réflexe, mais c'est ainsi que se battent les nôtres. Je balance mes pattes dans tous les sens pour griffer son corps et labourer son pelage, arrachant des touffes sombres qui restent coincées entre mes doigts. Je me débats alors que ses propres crocs se referment sur moi, et sa force toujours supérieure à la mienne me flanque au sol avec autant de facilité qu'un ours en aurait eu. Je roule sur moi-même pour esquiver une potentielle offensive, me retourne vivement et me projette une nouvelle fois vers lui. Je plonge sur ma droite, me redresse en une fraction de seconde et viens lui percuter le flanc d'un violent coup d'épaule. Et avant qu'il n'ait le temps de se remettre de la surprise, je lui mords la croupe pour l'attirer à moi et le coller au sol avec force. Je me redresse, lâche ma prise, plonge vers son encolure. Tous crocs dehors, grondant férocement, je vise sa gorge comme s'il était ma proie et que je désirais le tuer. Je mords dans sa peau épaisse, plante mes griffes dans son épaule et égratigne sa chair sans la moindre pitié. Mais encore une fois, dans un retournement violent, il se libère de mon étreinte et me flanque au sol comme si je n'étais rien, comme si je n'en valais même pas la peine. Eveillant en moi un instinct primitif, un sentiment violent de frustration, il me pousse encore une fois avant que je me reprenne et que je charge à nouveau.

Je gronde, le percute à nouveau, me remets de mes émotions alors que sa force brute me force à me déplacer au gré de ses envies. Il m'énerve à constamment gagner des rounds et à m'empêcher de reprendre cette confiance aveugle que j'avais en mes propres compétences. Je me jette en arrière pour esquiver une nouvelle offensive, roule sur moi-même et me jette dans une course de quelques mètres pour m'éloigner du noir, mais alors que j'arrive près d'un arbre, je me propulse en avant par la puissance de mes quatre pattes et je prends brutalement appui sur le tronc pour me projeter dans l'autre sens, atterrissant de tout mon poids sur mon adversaire du jour. Je gronde de fureur, ouvre grand mes mâchoires et si le temps me semble s'arrêter l'espace de cet instant, je n'en n'oublie pas mon objectif ultime. Je plonge mes crocs dans l'encolure de Nocturne avant que son corps n'ait toujours le sol et alors que nous roulons ensemble dans la boue, je tors ma tête dans l'autre sens et l'oblige à suivre l'arc de mes crocs pour le propulser par-dessus moi. Dans un coup de pattes furieux, je balance son corps de l'autre côté et me propulse au-dessus de lui en tâchant de garder mon équilibre le plus longtemps possible, sans relâcher la pression sur la peau épaisse de son cou. Je ne resterais pas faible indéfiniment, et c'est aujourd'hui que comment l'élévation du Dragon. Dans un monstrueux coup de patte je lui griffe le visage avant de relâcher son encolure pour me propulser en arrière, m'arrêtant finalement face à lui, pattes écartées et tête basse, pour reprendre mon souffle sans cesser de le fixer.

J'écope d'une violente morsure, de coups brutaux dans les côtes et les flancs, mais je m'accroche à ma détermination et je continue de lui foncer dessus et de mordre dans toutes les parties que je peux atteindre de son anatomie. Grondant avec colère, je me roule avec lui dans la boue, me retourne aussi vivement que possible pour l'attaquer et lui asséner de violents coups de pattes et de crocs. Il se contorsionne pour m'empêcher de l'atteindre et lorsque mes crocs se plantent dans son encolure il parvient à se dégager aisément pour m'envoyer rouler au sol dans un grondement sonore. Mais je me redresse en quelques secondes pour bondir à nouveau dans sa direction et le percuter alors qu'il s'est relevé aussi vite que moi, attendant mon offensive avec fermeté. Il maintient brutalement mes mâchoires entre ses crocs et m'empêche de le mordre comme je le souhaitais, m'obligeant à lancer les pattes antérieures dans tous les sens pour essayer de labourer son poitrail et son épaule et parvenir à me libérer de son étreinte mortelle. Finalement, après un long moment de bousculade et de grondements menaçants, je fini par m'écrouler au sol sous la force de mes mâchoires et retiens ma douleur en serrant les dents sur ma langue qui commence à saigner dans ma gueule et dont la chaleur me monte rapidement au cerveau pour tambouriner à mes tempes, me faisant monter une migraine violente qui m'oblige à m'immobiliser. Je laisse passer de longues secondes, maintenu entre ses mâchoires puissantes, jusqu'à ce qu'il me lâche enfin et me laisse reprendre mon souffle. Alors, je me relève lentement, m'ébroue et prends le temps de reprendre mon souffle, perdu depuis me semble-t-il trop longtemps.

- Remus. Adriel dit que c'est un Dragon. Un de tes fils.

Je retiens mon souffle et mon regard s'écarquille de stupeur. Un fils ? Un autre fils ? Mais alors que je reste silencieux à fixer le vide, et que les blagues sarcastiques de Nocturne me passent au-dessus de la tête, la réponse s'élève dans mon esprit. Oui, j'ai flirté avec des louves. Pas au point d'être appelé un "lapin" cependant. Et c'est pour cette raison que je ne me demande pas longtemps qui peut bien être ce fils inconnu qui m'a été si longtemps caché. Il n'y a qu'une louve qui ait pu vouloir cacher l'existence d'un fils à son père. Une louve qui me haïssait assez de l'avoir quitté pour le faire, pour vouloir empêcher deux loups du même sang de se retrouver.

- Imala ...

Je lâche son nom dans un souffle, sans quitter des yeux le vide absolu que je fixe depuis plusieurs secondes. Mais en réalité Nocturne a déjà certainement changé le cours de ses pensées pour se concentrer ailleurs. Il n'est pas ce genre de loup qui attend les derniers ragots. Et, trop perturbé par cette révélations, je ne pense pas à vérifier qu'il est réellement parti. Toujours dans mes pensées, dans mes souvenirs, je fais un demi-tour sur moi-même et j'emporte cette nouvelle avec moi, au fin fond des bois où est cachée ma tanière. Demain. Oui demain, sera une autre longue journée.