Nomade traversait les terres de l’Est. Il vagabondait, comme toujours, au gré de ses pensées. Le regard vide, il longeait ce gouffre. Ce gouffre si large. Sombre. Fissuré. Abimé. Et pourtant, là. Présent, existant, résistant. Oui, il ressemblait à tout ces êtres vivants qui se battent pour survivre, et qui même à moitié vivant, à moitié mort, continue à avancer. Ils se relèvent. Vidés de toutes émotions, ils poursuivent cependant avec une certaine hargne, une certaine inconsistance des choses. Ravivés par ce que l’on appel plus communément l’espoir. L’espoir, si proche de l’instinct et même plus fort. Ce gouffre porte donc bien son nom: La blessure.. Murmura le jeune loup, posté au bord de cette abime.

La tête penchée, il lançait un regard au fond de cette oeuvre de la nature qui portait si bien son nom. La douleur l’avait rendue plus forte, plus résistante. Tel une cicatrice creusée dans la terre. Comme les abysses les plus ténébreux. D’apparences trompeuses. Et pourtant si vivante.

Nomade soupirait. Il avait faim. Comme toujours. Comme tout le monde. Il ne se plaignait pas. Il restait silencieux. Mais son corps hurlait. Gémissait. S’affaiblissait. Il devait manger. Les sens aux aguets, il marqua un temps d’arrêt et se concentrait sur ce qui l’entourait. Il scrutait chaque parcelle visuelle, olfactive, également à la recherche du moindre son qui pourrait atteindre ses oreilles pointues, qui comme toujours se balançaient à gauche. À droite. Durant un lapse de temps éternel et répétitif.

Rien. Calme plat. Mais cela ne le déstabilisait pas pour autant. Nomade continuait à avancer, comme toujours, il ne s'arrêtait pratiquement jamais de marcher. Il dormait rarement. Insomniaque et étrange penseur, il poursuivait sa quête de savoir. Comme toujours. Écartant son esprit et ses questions existentielles, il focalisa toute son attention sur sa sensation olfactive. Il avait espoir, lui aussi. Lui aussi, il était là, vivant ou pas, existant ou pas, il avait faim. Il avait soif de posséder. De posséder pour assouvir ses besoins. Pour survivre.

Toujours rien. Pas étonné. Nomade n'u aucune réaction. Indifférent. Il n'avait qu'à essayer de dormir. Demain sera un autre jour. Et lui, il vivait au jour le jour, tel un Vagabond, reculé dans son esprit. Penseur face à cette vie éphémère.

Il s'allongeait, sur le sol froid, contre la racine d'un arbre aigrie de vieillesse, d'expérience, de la vie. Il a vécu. Ou plutôt survécu à côté de ce gouffre. Il allait fermer ses yeux. Lorsque tout à coup. Ses oreilles se mirent instinctivement en activité. Elles se balançaient et pointaient vers un point qui semblait lointain. Son nez aussi, frémissait, percevait cette odeur. Cette odeur si alléchante, si forte et familière au roux qui s'en laissait les babines. Les effluves de ce parfum si séduisant planaient, dansaient et se tordaient dans l'air.

Avec un désir sans faille qui naissait dans ses yeux, Nomade se dressait sur ses pattes. Silencieusement, il prenait garde à ne pas marcher sur les branches qui jonchaient sur le sol dur. L'odeur devenait plus forte à chaque pas. Le loup du se contenir pour ne pas accourir vers elle. Ses pensées et son esprit étaient loin. L'instinct sauvage avait prit tous contrôle sur lui. Ses dents claquaient. Ses narines se dilataient et se contractaient, prenant garde à ne perdre aucune parcelle de cette odeur. Il se dirigeait vers La Blessure. Il commençait à prendre une position de chasse tout en avançant. Son buste frôlait le sol. Postait derrière un buisson, il scrutait à travers quelques feuilles et branches.

Cette odeur qu'il avait reconnue se confirmait. C'était un faon. Il n'avait pas encore perçut la présence de Nomade. Il grattait le sol, la tête penchée, il humait les branches, à la recherche de nourriture. Le dos en forme de voute, il se tordait avec l'espoir de trouver ne serait-ce qu'une petite parcelle d'herbe, ou un fruit, sec, moisi, ou juteux. Il tournait le dos au loup. Ce loup qui prenait son mal en patience. Il n'avait pas le droit de le rater. Sa faim était trop grande. Il n'avait pas le droit à l'erreur. Il se faufilait derrière un autre buisson, plus proche de sa proie. Il n'était plus qu'à quelques longueurs de queues de renards de da proie. Nomade avait confiance en ses pattes, il savait courir. Il allait cependant avoir besoin de force pour l'achever.

Le roux attendit encore quelques temps. Il observait l'animal qui avait redressait la tête et se dirigeait vers un arbre tout proche pour frotter ses jeunes cornes contre l'écorce. Elles étaient neuves, toutes petites, formant deux minuscules triangles sur sa tête. Ells allaient surement devenir imposantes. Cet animal majestueux était bien l'oeuvre de la nature. Nomade n'attendit pas une seconde de plus. C'était maintenant, ou jamais. Il bandait ses muscles, et bondit, propulsé par ses pattes arrières, vers sa proie. Ses muscles roulaient sous son pelage évoquant l'ocre. Rouge. Attirant. Le faon se décolla instantanément de l'arbre et se mit à courir premièrement d'un pas hésitant puis lorsqu'il jette un coup d'oeil vers le loup qui le poursuivait, ses foulées devinrent plus grandes, plus rapides. Il courrait pour sa vie, par instinct. Nomade se rapprochait encore et toujours vers l'arrière trin de sa proie.


Les paysages défilaient à une vitesse ahurissante. Tel des images flou, elles se déroulaient à gauche et à droite du loup. Ses griffes se plantaient dans la terre à chaque bonds et le propulsé toujours plus prêt du faon. Son regard était focalisé sur le cervidé qui détalait vers une direction aléatoire. Lorsque Nomade fut assez proche, il bondit de toute ses forces sur lui. Il plantait fermement ses crocs sur son arrière trin. Il fut secouait dans tous les sens par sa proie, mais il ne lâcherait pas. Avec une flame dans les yeux. Il y avait de la détermination. De l'envie. Et même une touche de plaisir. D'accomplissement. De fierté. Toutes ces choses qui depuis tout ce temps s'étaient accumulés au fond de Nomade. La genèse de ces sentiments n'était autre que la faim.

Lorsque le jeune animal faiblissait, ralentissait et trainait ses pas. Nomade l'acheva en plantant ses crocs profondément dans la chair fraiche de son cou. Le loup grognait, rugissait, puis cacha prise lorsque sa proie se laissa tomber sur le sol. Le roux marqua un temps. Un temps de silence. Le regard fix sur ce faon échoué. Parti. Cycle de la vie. La vie faite de prédateurs et proies éternelles. Le loup soupirait. Il l'avait fait. Il planta une fois de plus ses crocs dans sa proie pour la trainer. La cacher sous des buissons pointus et touffus. À l'abri des yeux d'autres carnivores. Il prit soin de le recouvrir de feuilles mortes, de branches et autres pour masquer l'odeur de sa nourriture et la laisser la.

Le jeune loup voulait recommencer. Faire des réserves. Se préparer à une éventuelle famine. Il voulait devenir fort. De toute son existence et pour sa quête d'un savoir qui semble si loin et inatteignable. Il voulait grandir. Devenir un loup robuste. Fort. Pour survivre et s'élever face à cette vie injuste. Son désir le plus fort était devenue un besoin. Ce besoin percutait son intérieur, s'élargissait et l'envahissait de tout son être. Prêt à chasser, il se remit à humer l'air.

Nomade repéra très vite une nouvelle odeur qui lui était moins familier, mais qu’il reconnu tous de même. C’était celle d’une hermine. Faible nourriture, mais c’était tout de même mieux que rien.. Il fallait cependant qu’il l’attrape. C’est petites bêtes étaient rapides. Nomade s’aplatissait sur le sol et repéra le rongeur entre quelques pierre. Le loup devait être prudent, les rongeurs captaient plus facilement les présences que d’autres proies. L’hermine était longue, et blanche en cette saison des neiges. Elle devait surement avoir un terrier non loin d’ici, elles s’éloignent rarement de leur repère. Le roux rassemblant ses pattes sous son poids, prêt à bondir. Il devait être agile, rapide. C’était une proie de plus dans son ventre vide. Il était épuisé. Les poils dressés sur son échine, il retroussait déjà ses babines au dessus de ses dents blanches, tachées de quelques traces du sang du jeune cerf.

Le loup était étonné que le rongeur n’avait pas senti cette odeur de sang. Mais c’était compréhensible. Le chaos régné. Tout était détruit. Chaque être vivant avait ses priorités. Il fit le vide dans son esprit pour prendre garde à ne pas s’égarer une fois de plus dans ses pensées et d’un saut puissant et majestueux, il s’étonna lorsqu’il atterrit à côté de l’hermine. L’animal sursauta et commença à paniquer et tenta de se faufiler dans des buissons. Mais Nomade fut plus rapide, il accouru et serra d’un coup sec les flans du rongeur qui arrêtèrent de se soulever. L’hermine expirait pour la dernière fois. Nomade inspirait. Essoufflé, il saisi sa deuxièmes réussite entre ses dents. Le gout du sang envahissait tous ses sens. Il du se retenir pour ne pas tout dévorer d’un coup. Il camoufla l’hermine dans un buisson non loin du cerf, tentant de masquer son odeur. Il s’assit un moment et entreprit une toilette rigoureuse et rapide pour effacer les traces de sangs qui s’étaient imprégnées sur les poils plus clair de son poitrail. Il empestait la mort, qu’il avait causé lui même, pour survivre. Il voulait encore tuer, trouver des proies, se remplir la pense à n’en plus finir, se préparer à une éventuel famine en cette saison des neiges. Il voulait encore et toujours progresser.

Après une bonne heure de repos, il se remit à la recherche de gibier dans les environs.

Toujours les sens aux aguets. Il fut empli d'une certaine fierté. Il avait attrapé deux belles proies. Deux victimes. Elles expiraient. Lui, il inspirait. Il emplissait ses poumons de cet air qui lui paraissait si frais. Si neuf. Il se surprit lui même. S'observa, son comportement. Tentant de déchiffrer un certain sentiment qui s'accroissait au fond de lui. Un sentiment gênant. Mêlé à une certaine culpabilité. Un sentiment perçu comme mauvais dans la vision manichéenne de ces personnes qui ont eu une transmission bien précise de ce qui est bien et ce qui est mal. Ils ont toujours eu une représentation bien distinct de la morale qui semblerait être juste. Mais cette morale n'est qu'un résultat de multiples compromis. Ces compromis, définissant une transaction, une alliance et une concession pour parvenir à un ‘accord’ mutuel. Le compromis peut être un moyen de résolution de situations conflictuelles ou peut avoir l’attribution d’une image de balance d’éléments qui effectuent un contre poids. Ces éléments s’accommodent et s’assemblent pour aboutir à un objectif le plus souvent commun. Ils semblent le plus souvent inclure des sacrifices, par exemple, notre vie de tous les jours est construite de compromis. Nous observons donc aussi que le compromis conspire à altérer certaines formes d’égoïsme. Et ce sentiment final, enjeux et élément de 'la morale' que le jeune loup ressentait n'était rien d'autre que de la cruauté. Oui il aurait pu être considéré comme cruel. Semblable aux humains, il voulait toujours plus. Posséder. Désirer. Vouloir. Sans jamais s'arrêter.

Dévoilant ses crocs, les babines retroussés, son nez faisant des plis, retroussés. Nomade abordait une expression carnassière, courroucée. Il avait prit gout au sang. Il voulait planter une fois de plus ses crocs dans la chaire tendre d'une proie. Tout en progressant et slalomant dans les bois. Tel un monstre. Il s'imprégnait de chaque odeurs, il n'en laissait échapper aucune. Il ne tarda pas à trouver un sanglier qui laissait ridiculement pendre sa fine queue dans les airs, fouillant la terre avec ses défenses, muant ses mouvements en des gestes disgracieux. Nomade faisait parcourir sa langue sur ses dents, soulevant ses babines à son passage. Il prit de l'élan, et sans réfléchir, prit par ses pensées obsessionnelles et abusives, il s'élança à la poursuite de l'animal.

Le sanglier laisser échapper des gémissement rauque tout en courant. Il percutait des branches et se frayait des passages inconcevable à travers les arbres, les buissons, détalent à toute vitesse. Nomade endurait chacun des gestes de sa proie. Inconsciemment, il était fatiguée de ses deux chasses précédentes. Sans le réaliser, ses foulaient devenaient plus lente, moins fortes. Le sanglier s'éloignait de sa vue. Essoufflée, le roux réduit son allure jusqu'à arriver au pas. Un pas irrégulier, emplis de frustration. Le loup pestait, grognait. Seul au milieu de ces bois. Au milieu de ces arbres. De ces lieux. De cette vie. De cette existence. En même temps? Qu'est-ce qu'il imaginait? Il n'était pas de taille. Il était trop jeune.

S e u l.

Nomade ouvrait à nouveau les yeux. Allongé non loin de ses deux proies, il fallait qu'il se remette à chasser. Subissant une poussée de colère dû au sanglier qui avait réussi à s'échapper, il avançait, pestant dans ce silence qui habitait les lieux. Les environs semblaient être totalement vide, seul les multiples odeurs trahissaient l'apparence de l'endroit. Nomade fut vite interpellait par un buisson qui tremblait, remuait. Quelques une de ses feuilles s'écrasaient sur le sol. Il aperçu quelques plumes, brune. En humant l'air, il reconnu l'odeur d'une poule faisane. Il se camoufla derrière un buisson côte à côte avec le 'buisson vivant'. Il attendit que les mouvements recommences, s'assurant que sa proie était occupée à faire autre chose, puis, avec de l'élan, il se jette, s'enfonçant dans les feuilles du buisson. Il se glissait avec finesse entre les branches apercevant vite le faisant qui s'affolait et surgit hors du buisson. Nomade à sa suite, le faisan courait à une vitesse étonnante malgré ses petites pattes. Le jeune loup le poursuivit sur une courte distance avant de le plaquer au sol et de planter ses crocs dans la jugulaire de sa proie.

L'oiseau cessa de bouger au bout de quelques dernières convulsion. Nomade. Lui. Satisfait. Saisi la poule faisane dans sa gueule pour aller la déposer au près de ses deux autres victimes. Tachés de sang, sa fourrure rousse s'était dégradée, salis, pourpre. Un filet de bave s'écoulait de la gueule du jeune loup. Il voulait se reposer, lorsque soudainement, un chevreuil passa à toute allure devant son nez. Abasourdi, étonné, il mit u temps avant de s'élancer à sa poursuite. Il courrait à toute allure, mais le chevreuil était loin. Le roux n'avait aucune chance de l'attraper. Lorsque soudainement, l'animal pris un chemin vers la droite. Nomade décida de coupe sa route et prit comme un raccourci. Il s'approchait progressivement de l'animal qui accélérait, hors d'haleine. Il fuyait. Pour sa survie. Instinct protecteur. Instinct si étrange mais si réel. Le roux, essoufflé ne lâchait pas prise. Il agrandissait ses foulées, repoussait ses limites. Son désir de devenir plus fort l'envahissait. Le poussait à continuer. Il sentait que son corp commençait à faiblir. Mais sa volonté était plus forte.

Après trois grande dernière foulée. Le roux s'abattu de tout son poids sur le chevreuil qui se débattait. Nomade planta premièrement ses crocs dans son flanc gauche pour l'immobiliser, puis rapidement, avant que l'animal se relève, il lui assena le coup de grace, plantant ses canines dans sa nuque. Il sentit les os de sa proie se brisait entre sa mâchoire, puis immobile. Immobile. Le silence était brisé par l'essoufflement du loup. Nomade haletait, tentant de reprendre ses esprits. Il allait enfin pouvoir se remplir la pense. Avant de retourner vers son repère où ses autres proies gisaient, il prit un temps pour reprendre ses esprits, calmer ses pulsions de loup affamés. Il se sentait mal à l'aise quand il était emplie de cette certaine fierté. Son repère semblait être tellement loin. Il soupira, commençant à trainer le chevreuil, trainant ses pattes, tirant l'animal sur le sol. Ses pattes tremblaient, mais il avait fait de bonnes prises.

Hors d'haleine. Nomade s'était endormi à côté de ses proies sans s'en apercevoir. Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas eu un sommeil convenable qui n'avait pas été obstruer par de quelconques cauchemars ou pensées. Ses proies étaient toujours là. Il avait prit un risque, mais il n'avait pas eu le choix. Ses muscles endoloris et ankylosés lui firent tirer une grimace lorsqu'il se dressa sur ses pattes. Il prit un temps pour s'étirer. Il fallait qu'il recommence. Qu'il chasse. Qu'il fasse passer cette douleur. Il commençait à trottiner dans une direction aléatoire. Longeant La Blessure. Ces abimes qui semblaient prendre vie. Prêtes à accueillir le moindre malheureux qui tomberait dans ce gouffre.

Une effluve de lapin parvint aux narines du jeune loup. Il suivit cette odeur et ne mit pas longtemps à apercevoir la petite touffe blanche de sa proie qui lui servait de queue. Il reniflait le sol. Se déplaçait, insouciant, en petit bond, de gauche à droite. Le roux soupira. La vie était vraiment étrange. Soit tu naissais fort, prédateur, ou tu naissais en proie, comme ce lapin qui ne savait pas ce qui l'attendais. Nomade prit une position de chasse et bondit vers le rongeur qui s'écrasa d'abord sur le sol de peur et se tortilla pour se mettre à courir dans la direction opposée du loup. Nomade gagnait du terrain. Il eu une montée d'adrénaline. Animé d'une nouvelle force. Ses membres semblaient se déplier, s'étirer. Il courrait avec une meilleure aisance. Il poussa sur ses pattes de toutes ses forces, s'approchant du lapin.

Il s'abattu sur la bête et l'acheva aussitôt qu'il avait planter ses crocs dans son coup. On pouvait en effet nommé ça "le coup du lapin". Le rongeur encore chaud dans la gueule. Il ne tarda pas à l'amener au près de ses autres proies. Il en avait fini. Il avait effectué l'un de ses besoins vitaux. Il pouvait maintenant vaquer à ses occupations principales. Penser. Imaginer. Analyser. Découvrir. Poursuivre sa quête de savoir à travers ce temps éphémère et ineffable.