Chasse:

Le jeune loup explorait à peine les terres, nouvellement délivrées de leur couche de neige. Il n'était pas stupide, et il savait donc parfaitement qu'absence de neige signifiait retour conséquent des proies. Il allait enfin pouvoir se mettre quelque chose sous la dent, sans nécessairement prendre trop de risques en pillant le village des Hommes. Il avait tenté d'aller débuter sa partie de chasse sur la plage blanche, mais la vision de plusieurs groupes d'Hommes et d'énormes engins de fer l'en avait rapidement dissuadé. Trop occupé à chercher de quoi manger, il ne s'était pas trop posé de questions sur les desseins de ces Bipèdes. De toute façon, leur comportement ne lui importait que peu.

Il slaloma rapidement entre les arbres de la forêt aux pendus, évitant soigneusement la tanière de sa mère. Il n'avait franchement pas envie de lui tomber dessus. Il se mit à flairer le sol, le museau plissé par une grande concentration, et ne tarda pas à tomber sur la piste encore fraîche d'un lièvre. Un sourire carnassier éclaira son faciès, et il s'élança sur les traces du rongeur à vive allure. Ses pattes foulaient le sol avec souplesse, sans faire de bruit, et il remonta rapidement jusqu'à un terrier, autour duquel les effluves étaient les plus fortes. La proie devant se trouver à l'intérieur, le jeune loup se mit à creuser l'entrée avec frénésie, faisant voler des gerbes de terre en tous sens. Il sentait la présence de l'animal affolé, et redoubla d'efforts mais il ne parvenait pas à se frayer un passage assez large pour ses mâchoires, malgré tout la force et la bonne volonté mises en oeuvre. Il changea donc de stratégie et se mit à reboucher l'habitacle : la terre tombait à l'intérieur du terrier, et le rongeur allait finir asphyxié s'il s'entêtait à rester dans son trou. Enfin, alors que ce dernier était presque totalement bouché, le lièvre jailli brutalement de terre d'un bond prodigieux. Pandémonium s'élança immédiatement à sa poursuite. En quelques bonds, malgré la rapidité du lièvre, il parvint à le rattraper et le faucha net dans sa course d'un coup de patte adroit et précis. Il acheva le rongeur en lui brisant la nuque d'un coup de crocs gourmand.

Chasse:

Pandémonium n'attendit pas pour dévorer sa pitance : le lièvre disparut rapidement sous ses canines affamées et il n'en resta bientôt que quelques os. Le jeune loup s'affaira à enterrer les os dans le même terrier où le lièvre avait trouvé refuge - ironie qui le fit sourire d'ailleurs - et se remit en chemin. La chasse n'était pas terminée pour aujourd'hui, il éprouvait encore le besoin de se dérouiller un peu les articulations.

Il se mit donc à courir un peu au hasard, galopant dans la forêt le plus silencieusement possible. L'air froid couchait sa fourrure sur son corps sec, et le vent apportait avec lui toutes sortes d'odeurs inintéressantes. Ce fut uniquement lorsqu'il capta l'effluve de quelque chose de comestible que le jeune loup s'arrêta net dans une glissade incontrôlée. Il peina quelques secondes à conserver son équilibre mais ne tomba pas, et il flaira avec beaucoup d'attention l'air ambiant. Quelque chose de vivant se terrait non loin d'ici, quelque chose avec un cœur qui palpite et du sang qui circule. Quelque chose de chaud, de la viande. De la nourriture.
Pandémonium mit un certain temps à identifier le faisan comme tel et surtout, à remonter sa piste. Celle-ci faisait des tours et des détours dans les bois, se coulant sous des buissons, des épineux dont le jeune loup eut souvent du mal à s'extirper. Mais lorsqu'il aperçut l'oiseau, au milieu de la clairière, il se rappela que le jeu en valait la chandelle. Il se cacha derrière un bosquet - un peu maigre, mais amplement suffisant à le dissimuler - se plaquant contre le sol, la queue battante d'excitation. Son unique oeil restait fixé sur l'oiseau, attendant son heure. Les minutes semblaient ne jamais passer, le temps était figé et, lorsque le faisan fit l'erreur de lui tourner le dos, le loup s'élança hors de sa cachette.
L'oiseau l'entendit et tenta de décoller immédiatement mais malheureusement, il était trop lourd pour être réellement rapide et Pandémonium l'attrapa d'un bond prodigieux vers le ciel, agrippant entre ses dents une de ses pattes fragiles. Prédateur et proie retombèrent lourdement sur le sol, et le jeune loup lâcha prise l'espace d'un instant. L'oiseau en profita pour retenter un décollage que Pandémonium empêcha d'un coup de patte avant, toutes griffes dehors. Plaquant le faisan contre le sol, ses crocs s'enfoncèrent dans sa nuque savoureuse.