Il aurait vraiment aimé pouvoir éviter ce moment là, ne jamais avoir à s’aventurer sur le territoire Navnik pour autre chose que de le piller, et certainement pas pour devoir parler à leur Alpha. A la naissance des enfants, Athos avait demandé à Anya de prévenir Helya et uniquement Helya. A la limite, en elle, il pouvait au moins croire qu’elle pouvait comprendre que c’était dans l’intérêt des enfants que l’identité d’Athos reste cachée. En aucun cas, Athos aurait accepté de parler à Sageeth.

Athos avait donc dit Anya de prévenir l’alpha Navnik de la venue d’Athos, le soir où la lune apparaitrait seulement à moitié. Alors, comme promis, Athos s’y était rendu, vraiment à l’endroit de la frontière, sans la franchir, mais à seulement quelques mètres de celle-ci, de là où il était, il verrait sans nul doute la louve aveugle arriver.

Il était là pile à l’heure, alors que la lune venait d’apparaitre et que la soleil ne dardait plus aucun de ses rayons. La nuit était légèrement éclairée, d’une lumière de lune douce et morbide à la fois. Athos commençait à piétiner sur place, impatient et peut-être nerveux aussi. Il haïssait les Navniks. Mais il aimait ses enfants. Il devait faire ça. Il le devait.

Alors, il attendit là, sans franchir le pas décisif, attendant qu’Helya la louve aveugle apparaisse au rendez-vous.

Enfin, la louve grise était arrivée. Sans aucun mal, elle avait réussi à le trouver et le reconnaître grâce à son odeur qu'elle avait pourtant pas beaucoup eu l'occasion de sentir. Athos regarda la louve d'un air dur et des plus sérieux du monde, loin d'être déstabilisé par sa venue. Dans un sens, il était soulagée qu'elle ait accepté de venir sur la demande d'Anya, mais il savait qu'en tant que Générale, Anya avait certains privilèges quant aux entrevues avec son Alpha, et c'était tout naturel. Pourtant, Athos n'en savait absolument pas plus quant à leur relation. Le terrain était glissant et Athos devait faire très attention. C'était sur la vie de ses enfants qu'il allait jouer. Si le louve réagissait mal à l'annonce, elle pourrait décider de les tuer, mais si Athos était incapable de voir ou de protéger ses enfants, ou rien que de les connaitre, le résultat pourrait très bien s'avérer être le même. C'était un risque à prendre, et Athos pensait avec une force dont il ne se doutait pas que la louve aveugle serait compréhensive. Il n'aurait pas su dire pourquoi il risquait de faire ça, pourquoi ne pas se dire "Et puis tant pis, Anya les gérera, ce n'est pas mon problème". Non, cela, il n'avait pas pu. Athos était un loup droit, loyal et honnête, et c'était surtout un loup juste. Evidemment, son côté hostile et guerrier ne laissaient pas paraitre certains de ces aspects, mais après tout c'était mieux ainsi. Athos voulait ce qu'il y avait de mieux pour ses enfants. Et Athos risquait gros à partir du moment où il avouerait son secret à Helya, une traitresse des Sekmet qui avait rejoint la pire ennemi d'Athos, qui s'avérait être la mère de la mère de ses enfants. Le jeune déclara alors de sa voix calme et posée; celles qu'on utilise souvent pour jouer les démocrates et faire un pacte. Certes il ne le fit pas exprès, il était ainsi, sa personnalité était forgée dans l'acier et rien ne pourrait jamais le changer. Il était distant et rigide à la fois, pourtant les enjeux étaient gros et il le savait. Il fallait non pas faire au mieux, il fallait faire LE meilleur.


" Ma visite n'a rien d'officiel. Bien au contraire. Je ne viens pas en tant que Sekmet te voir ici, Helya, je ne suis ni un émissaire ni un négociateur de chez moi. Si tu es là, c'est qu'Anya a transmis mon message et que tu as bien voulu lui faire confiance. Et je t'en remercie"

Bon sang, que ça lui brûlait la gorge!


" Je pense qu'une chose ne t'a pas échappée depuis ma dernière visite, il y a eu du changement. Les choses bougent et vont continuer de bouger, et j'aimerai conclure un marché avec toi et toi seulement, qui resterait secret à jamais. Si tu l'acceptes."

Bien évidemment, pour sa dernière visite, il faisait référence à son intrusion en pleine réunion Navnik, ce petit espionnage improvisé des moins discrets au monde lorsqu'Anya l'avait emmené au coeur même de sa meute.


"Les enfants d'Anya. Ce sont les miens."


Il lâcha cette phrase comme une sentence, dure et tranchante. Oui,il était le père des louveteaux Navniks qui avaient vu le jour il y a de cela à peine une semaine. Athos serra les dents. C'est maintenant que tout allait se jouer. Elle était au courant de son secret, mais allait-elle accepter sa demande, allait-elle seulement lui promettre de garder le secret comme il lui avait demandé quelques secondes plus tôt?

Athos attendit patiemment la réponse de la louve d'un pelage entre le gris et le brun. Il était tendu, mais à la fois serein. Les mots d'Helya tombèrent sur les épaules du grand mâle, mais au contraire de ce qui aurait pu se passer, il s'en sentit plus rassénéré que sous pression. Athos avait vu juste, c'était bien à Helya qu'il devait en parler, elle était posée et sage dans chacune de ses paroles. Néanmoins, Athos comprit qu'elle n'avait pas saisi la raison de la venue du jeune général Sekmet. Il n'était pas là simplement pour annoncer sa paternité, non, loin de là. S'il le fallait il l'aurait gardée cachée. S'il était là, c'était pour une toute autre chose. L'Alpha Navnik semblait septique dans ses paroles, comme si elle redoutait pour Anya et les petits qu'Athos les laisse à l'écart de sa vie, qu'il ne les considère pas, les ignore ou pire encore, les renie. Mais là n'étaient pas les intentions du jeune loup et cela n'avait jamais été ainsi depuis le jour où Anya lui avait annoncé sa grossesse, suite d'une nuit qu'ils avaient passé ensemble à panser leurs plaies intérieures. Mais Athos n'était pas de ceux là, pas de ceux qui voient leur vie propre avant leur famille, son dévouement à sa meute en était l'une des toutes premières preuves, et à présent, celui à sa famille en serait une autre. Certes, Anya et lui n'avaient prévu en aucun cas d'avoir ces enfants. Mais ils étaient là et dès qu'Athos les avaient vu, couchés au ventre de leur mère dans la tanière d'Emarok pendant qu'Anya les lavait, il avait ressenti une chose dans son coeur; une chose étrange qu'il ne connaissait pas, une sorte d'amour qu'il n'avait jamais éprouvé auparavant, mêlé à de la fierté et... de la tendresse. Helya avait dit "Tes enfants souffriront de ne pas avoir de père". Athos regarda gravement la jeune louve et parla avec aplomb, sa voix de général prenant le dessus, un ton calme et posé, sûr de lui, pesant et calculant chacun de ses mots.


" Et ce ne sera pas le cas. Ils auront un père. Ce sera moi et personne d'autre. Ce n'est pas pour te dire que je suis le père que je suis venu ici. Je suis venu à toi pour une autre raison. Tu sais comme moi, et tu l'as dit, il est difficile d'admettre pour nos deux meutes qu'une telle union soi possible, et elle ne sera certainement pas acceptée, même si tu reconnais les petits en tant que Navnik. Tu sais comme moi que les autres leur reprocheront leurs ascendances, les adultes comme les enfants, qui sont si cruels entre eux. Je ne veux pas qu'on leur reproche quoi que ce soit, et encore moins leurs origines. Le temps viendra où je montrerai au grand jour ma paternité, et ce temps viendra très bientôt. Mais pour l'instant, il est mieux pour les enfants que ta meute comme la mienne ne sache pas que le père, c'est moi. Et c'est pour cela que je voulais te parler à toi et personne d'autre. Ils sauront garder leur langue, je le sais. "


Athos marqua une pause. On en était déjà à la moitié de ce qu'il voulait. Le silence et le cautionnement d'Helya. Si elle acceptait déjà le fait qu'il soit le père, c'était une bonne chose. Maintenant venait le plus dur.


" J'ai une autre chose à te demander. J'ai juré à Anya de l'aider à élever nos petits pendant les premiers mois de leur vie. De ce fait, je me suis engagé à lui apporter une proie par semaine et par enfant en complément de ce qu'elle chassera, pour l'aider à nourrir les louveteaux. Mais j'aimerai aussi pouvoir bénéficier d'une chose que toi seule pourrai m'accorder. Un droit de passage périodique, au moins jusqu'à ce que les enfants soient en âge de sortir du territoire. J'aimerai pouvoir traverser la dune de sable où je pourrais retrouver mes enfants deux fois par semaine. Je suis leur père Helya, et il est hors de question que je laisse mes enfants grandir sans moi. "


Les yeux toujours fixé sur la figure neutre de la louve, il espérait sincèrement qu'elle accepte. Si Athos voulait contribuer à l'éducation de son fils et de sa fille, et surtout, d'apprendre à les connaitre et de les voir grandir, il fallait qu'il puisse les voir. Ils en avaient besoin, et lui aussi. Parce que quoi qu'on puisse en dire, il aimait ses enfants.

" Je ne refuse pas votre Union, chacun a le droit d'aimer la personne qu'il souhaite. Je pense en être l'expérience même, on ne choisis pas et je n'ai pas le droit de refuser cette union si sérieusement est-elle. Quant a ton laisser passer, il va de soit, si tu compte elever ses petits tu aura tous les droits de traverser les frontières ... quant a ton secret, je ne suis pas sur qu'il tiendra longtemps ... te voir ramener des proies, et te voir être en compagnie des enfants ferons doutes les membres de la meute. Je refuse que les petits ou toi-même soyez en danger. Cette meute, les Navnik n'ont pas été crée pour être l'ennemie des Sekmet .... elle a été crée pour que tous soit accepter, quelque soit leurs meutes, leurs origines ou leurs sang. Je punirais tous seul qui oserons te refuser ici ou te faire du mal a toi ou au petit. "





Athos hocha doucement la tête, dur et impérieux. D'un ton assuré et calculé, il déclara:


"Bientôt viendra le temps où plus rien n'imposera ce secret. Mais pour l'instant, il vaut mieux pour eux que personne ne sache pour l'instant que je suis, moi, le Général Sekmet, leur père. Nombreux sont ceux contre qui je me suis battu chez toi Helya. Même si cela était pour des raisons toutes autres, je ne veux pas que quiconque puisse avoir la stupidité de le reprocher à mes enfants. Je ne veux pas que ni ma fille ni mon fils ne courent le moindre danger, jusqu'à ce que je sois en mesure totale de les protéger quel qu'en soit la situation. Mais je te remercie. Je te remercie de m'accorder ce dont j'ai besoin pour protéger les miens, c'était essentiel. "


Athos commença a tourner les talons, puis, dit :


"Je pense que nous nous reverrons, bientôt. "


Puis, il partit.