La lumière du jour l'avait tué sur place lorsqu'il l'avait revue. Le vent qui soufflait dehors, fût-il chargé de soufre et de cendres, avait presque fait exploser ses poumons ; la vacuité de l'espace autour de lui lui avait donné le tournis.
C'est fou comme, en si peu de temps coincé entre quatre grilles, on peut perdre tout sens de la réalité.

Et maintenant, Zwey arpentait sans but les terres qui étaient siennes, déchu de ses responsabilités de sentinelles pour un grade paraît-il plus important, perdu au fond, bénéficiant de temps à ne savoir qu'en faire.
En vérité le loup au pelage bigarré avait remarquablement employé ce temps, dès le lendemain de son retour au grand jour. S'il n'avait pas enduré de sévices physiques comme certains de ses congénères, Zwey avait tout de même passé un nombre incalculable de jours - deux lunes, lui avait-on appris - roulé en boule au fond d'une cage, entouré par les hurlements et les pleurs des bêtes qui se jetaient contre les barreaux. Dans le noir. Avec cette bête immonde qu'était la faim occupée à lui dévorer les entrailles petit à petit.
On deviendrait cinglé pour moins que cela.
Alors il avait chassé. Encore. Et encore.
Le premier jour il avait laissé tellement de cadavres dévorés dans son sillage qu'il avait dû s'arrêter pour en vomir la moitié. Et le soir, la douleur dans ses entrailles contractées par les privations était si vive qu'il en aurait hurlé. Ce qui ne l'avait pas empêché de recommencer le jour suivant. Et encore. Et encore. Même alors qu'il était rassasié, une crainte déraisonnée le poussait en avant ; il arpentait les terres esobek comme dans l'unique but de massacrer la totalité du gibier qui s'y trouvait.
Au moins cette débauche d'énergie, qui ne lui était pas coutumière, avait eu l'avantage de réchauffer et raffermir ses muscles atrophiées par l'immobilité à laquelle on l'avait contraint pendant des lunes. Cependant, pour ne rien arranger, sa patte tordue le faisait souffrir autant que ses entrailles tordues par l'angoisse.

La vie était belle, en résumé.

Mais ce jour-là, le loup était plus calme que jamais depuis son retour. Il avait mangé presque raisonnablement le matin même, comme si les sursauts de paranoïa qui paniquait tout son système nerveux se calmaient petit à petit. Il s'était retrouvé désœuvré, et moins oppressé que dernièrement par la nécessité de chasser. Pour tuer l'ennui, Zwey avait donc décidé d'effectuer une ronde sur son ancien parcours de sentinelle, histoire de se tenir au courant de l'état du territoire. Et de voir combien de fois Koschei avait dû rager à lui laisser des signes de sa présence en son absence, aussi.
Mais il ne trouva rien de très changé, mis à part quelques lieux où la neige n'avait pas totalement fondu. Zwey renifla la poudreuse avec une vague curiosité : emprisonné avant que le blizzard ne se mette à souffler, il n'aurait jamais su qu'une telle couverture neigeuse s'était installée pendant ce temps si sa meute ne le lui avait pas raconté. Mais en soi, il se moquait de l'avoir manquée. Les proies dormaient sous la neige lorsque celle-ci était trop dure.
Le canidé en était là de ses pérégrination, trottant entre les buissons calcinés du bosquet, lorsqu'une odeur étrange heurta son museau. Il ne la reconnut pas, et ses oreilles se plaquèrent immédiatement sur son crâne.

Oui, en ce moment, Zwey n'était pas d'humeur à poser les questions en premier. Qui s'introduisait sur son territoire sans montrer patte blanche allait tâter de ses crocs, et il s'empressa de le montrer en bondissant en avant pour, depuis un promontoire surélevé qu'il connaissait bien, bondir sur la louve en contrebas.
Avec un grognement, le loup brun fit tomber sa congénère au sol à l'aide de son poids puis la retourna pour la plaquer à terre sur le dos : ses mâchoires claquèrent à quelques millimètres de la truffe noire, et s'apprêtaient à en faire bien plus lorsque quelque chose attira son attention.
Zwey suspendit ses geste et fronça les sourcils. La louve noire lui renvoyait un regard vairon plutôt rare à priori, qu'il avait déjà vu quelque part. Pas longtemps, mais c'était tout de même une couleur particulière et... le nom lui revint à l'esprit :

« Osmium ? »

C'était ça. Les yeux bleu et jaune. Une espionne arrivée pendant sa captivité, qu'il avait rapidement croisée au camp. Son rôle au sein de la meute devait expliquer son odeur étrange ; mais bizarrement, il avait tout de même l'impression que quelque chose clochait.
Ce qui ne l'empêcha pas, marque suprême de courtoisie, de relâcher la louve au poil noir et de reculer d'un pas avant de la considérer des pieds à la tête.
Puis ses manières cinglantes revinrent au grand galop :

« On t'a jamais dit que tu sentais la rose ? Le batifolage avec les Sekmets est interdit par l'article 309.b du code d'honneur Plumeroussien, d'ailleurs, tu le savais ? »

Foutaises que tout cela, évidemment. Il suffisait d'ouvrir les yeux pour comprendre qu'un peu tout le monde copulait joyeusement avec n'importe qui. De quoi se réchauffer les nuits d'hiver ; quoi qu'il en soit, cela n'allait pas l'empêcher de lancer des piques à tout va. Même si c'était à l'adresse d'une inconnue.

Parfois ses semblables le faisaient rire avec leurs histoires de conflit et d'honneur et leur clanisme hypocrite. Sérieusement ? Il suffisait de voir Nymeria et son solitaire. Ou la jolie colombe noire qui ondulait en lui tournant littéralement autour.
Le général ne s'embêta pas à bouger ou la suivre des yeux. S'il y avait bien quelque chose que Zwey n'était pas, c'était naïf. Ou stupide. Devant le ton et l'attitude d'Osmium, il capta immédiatement le message.
Eh bien. Il y en avait pas mal qui avaient souffert de l'hiver dans le coin, apparemment.

« Je suis tête en l'air, tu peux me rappeler ton nom s'il te plaît ? Avec les derniers événements, j'avoue être un peu bouleversé encore ! »

Zwey considéra un instant la louve aux yeux vairons, se demandant ce qu'il gagnerait à copiner ainsi avec elle.
... De quoi se distraire de sa morne journée, déjà. Et c'était déjà pas mal.
Sans compter que vu son humeur depuis son retour, il devait pas se faire aimer de tout le monde en ce moment. Et en tant que nouveau général, il aurait été bête de perdre les voix de ses concitoyens, n'est-ce pas ? Sérieusement, qui avait eu cette idée.

« "Hey, beau gosse". C'bien ça non ? » Répondit le loup tricolore sur un ton mordant.

Ahh, il se sentait mieux quand il pouvait parler, mine de rien. Saloperie de muselière. Il la sentait encore sur son museau, celle-là.

« Sinon, Zwey. Si t'as pas d'humour. »

Et la qualité de ton humour déterminera grandement la suite de cette conversation.

« Alors, ta nouvelle liberté ? Ça n'a pas dû être facile là-bas, tu devais te sentir bien seul, quoique tu ne l'étais pas tant que ça. »

Zwey fronça le sourcils et prit un moment pour se demander si la louve se payait sa tête ou si c'était une question de sollicitude. Il décida finalement que cela n'avait pas d'importance. Après tout, il allait bien. Pas comme si deux mois dans le noir avec une tripotée de couineurs incapable de la fermer allait lui faire quoi que ce soit, franchement.
Et puis, même si c'était le cas, ça ne regardait franchement personne.
Le loup brun lâcha un reniflement moqueur :

« Au moins faisait chaud. Mais si la bande de mauviettes avait pu la fermer deux minutes ça aurait peut-être été plus marrant. On aurait pu, je sais pas, jouer aux devinettes ou un truc du style. »

Ben ouais après tout, pourquoi pas ?

« Et sinon, tu fais quoi de beau chez ces andouilles de Sekmet, à part draguer ? Y a des trucs de commère à raconter ? »

C'est ton général qui demande, soldat. La pensée tira un sourire amusé à Zwey.

Elle était bavarde celle-là, dites donc. Ça lui changeait des grognements de Nymeria - déclinés en mille nuances de ronronnements maintenant qu'elle avait sa tripotée de louveteaux, certes - et des phrases monosyllabiques de Minuit. Zwey s'attarda un moment à détailler les yeux vairons qui le fixaient tandis que la femelle parlait. Il n'avait jamais vu une combinaison de couleurs aussi étrange. Des ancêtres canins, peut-être.

« Oh tu sais, des trucs de meute barbant ! Des réunions, des promotions ! Puis leurs mâles sont pas très sympathiques pour la plus part, par contre leurs femelles sont adorables ! »

Oui, en gros rien d'intéressant. Zwey fronça le museau avec contrariété : s'il avait espéré rapporter des infos croustillantes à Koschei, c'était raté. Quoique, le loup noir devait bien avoir une taupe chez les Sekmets, vu son profil. Zwey considéra la question un instant, remarquant avec curiosité qu'il ne se l'était jamais vraiment posée.
Pendant ce temps, Osmium avait cessé de gigoter pour surenchérir :

« Oh et ne t'inquiète pas, aucun là-bas n'arrive à ta cheville ! Ils n'ont pas ton charisme ! »

Zwey leva ses yeux noisettes vers elle et faillit éclater de rire. Au lieu de quoi il claqua simplement des mâchoires avec un amusement chargé d'ironie. C'était bien la première fois qu'on lui sortait un truc pareil. S'il était commun de le voir manifester une pédanterie moqueuse, le loup brun était parfaitement lucide en réalité : il n'entrait pas dans la catégorie belle bête de base, et sa patte tordue n'arrangeait rien. Sans compter qu'il était flemmard, grincheux, et que le charisme dont parlait Osmium, c'était surtout de l'humour acide, noir, voire déplacé. Alors franchement, des éloges ? Soyons sérieux.
Lui s'en moquait. Elle par contre, elle devait avoir un sacré truc à lui demander.
Zwey plissa les yeux : il ne la connaissait absolument pas, et ne voyait en rien ce qui pouvait intéresser chez lui une jolie louve à la langue bien pendue pour qu'elle se démène à ce point. Louche, ça.
Mais marrant tout de même.

« Mouiis, vas-y petite, flatte-moi j'aime ça. »

Petite, petite... Ça ça restait à voir. Elle pouvait très bien être plus vieille que lui, de ce qu'il en savait - et il en savait peu. Peut-être que le rang de général venait à lui monter à la tête et allait le transformer en paternaliste débonnaire ? Le loup brun réprima un frisson de répugnance à cette idée.
Quoique. Débonnaire rime avec bonne chère. Ça valait peut-être le coup finalement.
Quoi qu'il en soit, flatter l'ego de Zwey n'allait rien apporter à la louve noire... mis à part de la méfiance. Le canidé roux partait du principe qu'on a rien sans rien et qu'on ne fait pas l'éloge de quelqu'un sans vouloir quelque chose en retour - tout simplement parce que c'était ainsi que lui-même procédait dans la vie. Son amour-propre, il n'en avait pas grand-chose à faire, contrairement à la majorité des mâles de cette planète. Il y avait plus important dans la vie.
Passer le temps, par exemple.

« Alors sinon, vu qu'on en est à bavarder. » Reprit le loup. Et que visiblement ni toi ni moi n'avons mieux à faire de notre journée. « D'où tu viens, toi ? Solitaire en manque d'affection quelque chose comme ça ? »

Et de lui sourire de toutes ses dents.

La louve noire fit alors quelque chose qui était très familier à Zwey : elle s'étendit de tout son long avec un bâillement sonore. Son attitude tira un sourire au général : est-ce qu'il était si ennuyeux que cela, ou est-ce que c'étaient plutôt les Sekmet qui la fatiguaient ? Elle lui aurait presque donné envie de faire la sieste, tiens.

« Je suis originaire de ces terres. » Racontait Osmium sans rechigner. « On m'interdisait d'approcher les meutes petite alors, quand j'ai enfin pu, j'ai décidé de rejoindre une meute. A force de ne pas côtoyer de loup on finit par se sentir seul. »

Zwey agita vaguement les oreilles, sans réellement comprendre la logique derrière un tel comportement. Interdire d'aller voir les meutes, pas en rejoindre une parce qu'on se sent seul. Enfin, lui ne se sentait jamais seul. Il comprenait la nécessité de vivre en groupe pour d'autres raisons.

« Et toi ? Tu as toujours été chez les Esobek ? » Répliqua alors la femelle, sans surprise.

Zwey claqua des dents sans agressivité :

« Non. Mais c'était il y a très longtemps. Alors ça compte pas. »

Ce qui comptait surtout, c'est qu'il n'avait pas envie de s'étendre sur le sujet. On a pas gardé les cochons ensemble ma mignonne. Un sourire énigmatique aux babines, le loup brun se releva et s'étira, avant de commencer à marcher en poursuivant sa partie de la conversation. Il n'avait pas de but particulier - c'était surtout ça, son problème de la journée - mais n'avait pas non plus l'envie de rester assis pendant des heures.
Au pire, si Osmium de son côté ne voulait pas se relever, elle pouvait toujours rouler à sa suite.

« Vu que t'as l'air curieuse, on va faire un truc ok ? Tu me poses une question, je te pose une question. Si tu refuses de répondre on arrête tout. » Et j'ai gagné. Enfin il ne le dit pas à voix haute, mais y pensa rapidement avec une once d'amusement.

En réalité, Zwey n'avait jamais été joueur. Il ne s'aventurait à ce genre de choses que lorsqu'il était certain de n'avoir rien à perdre. Risquer quoi que ce soit sans que le jeu en vaille la chandelle lui était inconcevable ; il ne dansait pas sur la corde raide pour le plaisir de parier. Préférait laisser ce plaisir aux casses-cous de service. Après tout il y en avait bien assez sur terre.
Mais là, le loup au pelage bigarré s'ennuyait vachement, et la journée ne prévoyait pas de devenir plus intéressante dans les heures à venir. Alors autant tuer le temps avec ce qu'on pouvait.

« Mon tour donc. » Reprit-il sans cesser de marcher tranquillement, « Pour quelle raison bizarre peut-on interdire à une grande fille comme toi d'aller voir ces méchants loups de meute, dis-moi ? »

La louve se releva avec un air contrarié - comme il la comprenait - et emboîta le pas à Zwey. Le fait de l'avoir à nouveau dans son champ de vision permit au loup brun de constater que la question lui demandait réflexion : quelque part, elle avait peut-être agi sur un coup de tête en décidant de rejoindre la meute. Il ne pouvait pas non plus la blâmer pour cela.

« Mon frère et ma sœur. Notre frère nous a été retiré tôt par un rapace et on a essayé de le retrouver longtemps. Puis on a eu un peu de mal à se décider avec ma sœur, d'autant plus que les guerres ne nous ont pas laissé l'occasion de rejoindre une meute. On avait pas non plus envie de rejoindre une meute en pleine guerre ! »

Le général hocha vaguement la tête. Cette raison lui parlait. C'est à la fois logique et sensé. Pas exactement ce qu'il aurait attendu d'Osmium, qui lui semblait être une petite bête bien agitée.

« Est-ce que notre cher Zwey possède-t-il une quelconque famille encore en vie ? » Demanda alors l'intéressée.

Ah oui, c'est vrai. Ils étaient en train de jouer. Le général renifla.

« Défaitiste ta question, dis donc. » Commenta-t-il, caustique, avant de répondre : « J'ai une hm... demi-sœur. Qui se balade quelque part, elle et sa mauvaise tête. On est pas super potes. »

Pragmatique, le rouquin ne précisa pas qu'il devait avoir toute une tripotée de parents plus ou moins lointains éparpillés sur tout le continent. Après tout, lorsque son groupe s'était scindé en petits îlots autonomes, certains avaient bien dû s'en sortir de leur côté ; et vu qu'ils étaient tous plus ou moins apparentés... Mais il n'estimait pas cette information pertinente pour répondre à la question d'Osmium. Trop imprécise.
Sans compter, petite vacherie de sa part, qu'elle en révélerait trop sur lui.
Sans cesser de marcher, accompagné par son caractéristique boitement, l'ancienne sentinelle reprit - histoire de prendre la donzelle de court :

« A moi, hm... T'as parlé d'une sœur. Elle est comment, aussi curieuse que toi ? »

Il sentait qu'il allait vite se trouver à cours de questions, lui... C'est qu'il n'avait pas vraiment l'habitude de s'intéresser aux autres. Ou même de faire semblant.

Tout en poursuivant son chemin de son tranquille pas claudiquant, Zwey écouta sa camarade lui livrer quelques détails supplémentaires sur sa vie. Enfin, un seul, en réalité. Que toute sa famille était apparemment aussi bavarde et fouineuse qu'elle. Eh bien, il ne savait pas que c'était génétique.

« Visiblement tu n'as plus que t'as demi-sœur en famille, » reprenait justement la louve noire sans faire de pause : « pas de compagne du coup je suppose ! Déjà eu une petite histoire avec une belle louve, hein ? »

Il ne voyait pas bien de quoi elle pouvait déduire cela - avec son remarquable sens de la famille, le général passait parfois à côté de quelques évidences - mais coup de bol, elle avait plutôt raison. Exclusivement centré sur son propre bien-être, le loup brun n'avait aucune raison de se trouver une femelle pour venir l'embêter. Les chaleurs ne lui avaient jamais fait un effet monumental, quant à l'affection profonde qui liait certains canidés entre eux... non, encore une fois, il était trop égocentrique pour se laisser aller à ce genre de distractions. Et c'était très bien comme ça. Une tonne d'emmerdes en moins.

« Hrmnnoo... ah, si. » Entama-t-il, avant de s'interrompre soudainement.

Quel idiot, il avait failli oublier Koschei.
La malice lui revint aux yeux instantanément, alors qu'il adoptait ce ton un tantinet théâtral qu'il réservait habituellement à ses rencontres avec le leader solitaire.

« J'ai pour amante une adorable créature aux yeux d'or ; mais je ne la vois pas souvent. C'est une petite » - très petite - « personne très... volage. »

Qu'est-ce qu'il se faisait rire, parfois.
Zwey laissa ses babines afficher un sourire carnassier, alors qu'il enjambait prudemment un entrelacs de racines pour descendre une petite ravine dans le cœur des bois brûlés. La piste qui les attendait en bas était couverte de cendres, mais il savait qu'elle ramenait doucement mais sûrement au camp esobek.
Il ne put s'empêcher de lancer une petite pique au passage.

« Le concept ne doit pas t'être inconnu, jolie créature. »

Et bim. Que je te charrie sur ta petite vertu. Disons que supporter les moqueries serait le prix du silence de Zwey sur les batifolages d'Osmium avec la meute rivale.
Enfin, pas sûr que la jeune louve, espionne qu'elle était, aurait encouru une quelconque réprimande. Comme déjà dit, Zwey avait l'impression que tout le monde était un peu coulant sur les relations conjugales inter-meutes en ce moment.

« Qu'est-ce que tu faisais de beau chez les Sekmet d'ailleurs, tout à l'heure ? »

Et hop, on retourne dans le vif du sujet. Qui sait, peut-être Osmium avait-il appris quelque chose d'intéressant lors de sa petite partie d'espionnage. Quelque chose que Zwey pourrait opportunément vendre à sa susnommée petite amante volage, par exemple.

hrp. 'tain j'avais écrit une première réponse et je l'ai perdue... ;v;

Les mots de Zwey faisaient se peindre sur les babines de la louve des sourire amusés. Du coin de l'oeil, il la regardait le lorgner en ondulant, et il se demanda l'espace d'un bref instant si elle n'avait pas dans l'idée de le bouffer tout cru.
Ce qui, en soit, ne l'aurait pas tant dérangé que ça. Tant qu'elle avait de quoi le rétribuer pour l'effort, évidemment. Du chevreuil, par exemple - fou comme la plupart des loups sous-estimaient le prix de la viande par rapport à celui d'une femelle.
Enfin bref.

« Je cherchais des informations, évidemment mais, je n'ai rien entendu de bien intéressant, malheureusement. Du coup j'en ai profité pour me balader sur leurs terres. »

Zwey fronça le nez. Dommage. Avec deux trois infos croustillantes entre les crocs, il aurait pu faire semblant de faire son boulot de général, peut-être. Enfin. Il serait peut-être bien, d'ailleurs, de commencer à se demander à quoi exactement correspondant ce fameux nouveau job. Parce que pour l'instant, à part glander...

« Et bien et bien, je pense que je ferais mieux d'aller chasser, je commence à avoir un petit creux ! » Osmium reprit la parole en bâillant, interrompant le cours de ses pensées.

Le loup s'arrêta pour la fixer, puis haussa les épaules. Il la retenait pas hein, elle faisait ce qu'elle voulait après tout. Elle était libre. Le vieux ronchon boiteux qu'il était ne risquait pas de l'empêcher d'aller où bon lui semblait.
Ou de lui conseiller de lutter contre les instincts primaires de son estomac.

« Peut-être reviendrais-je te voir avec un quelque chose à se mettre sous la dent, qu'en dis-tu ? Nous pourrons parler davantage. » Ajouta-t-elle enfin.

Et soudain, alors qu'il s'apprêtait à faire demi-tour avec un vague salut, passant déjà à autre chose, Zwey capta la lueur dans ses yeux. Cela lui fit faire une pause. Il y avait quelque chose dans ce regard qui en disait plus long que sa gueule ; et quelque part c'était bon signe pour lui. Surtout que la notion de bouffe était passée entre les crocs de la femelle - comment refuser cela ?
Mais il avait un frisson désagréable qui lui courait entre les omoplates. Un bon et mauvais pressentiment à la fois. Est-ce que c'était lui, ou est-ce qu'elle avait un instant paru plus maligne qu'elle en avait eu l'air depuis le début de la conversation ?
... Ouais, non, les récents événements le rendaient juste parano. C'est ça. Le loup brun cligna des yeux, puis hocha vaguement la tête avant de poursuivre son chemin comme si de rien n'était. Il se sentait un peu mou en terme de répartie en ce moment. C'était agaçant.
Et en plus, il avait la dalle.