Depuis longtemps, Athos ne s’était pas entraîné avec son apprentie Alkaine. Il faut dire que beaucoup de choses s’étaient passées depuis leur dernier entrainement, c’est à dire juste avant la grande bataille. Athos avait alors été enlevé par les Hommes avec la mère de son apprentie entre autres. Par ailleurs, il avait mis des semaines avant de s’enfuir. Puis, il avait du faire plusieurs missions d’éclaireur, puis en tant que seul général présent et sans présence du bras droit il avait dû élaborer un plan de libération de ses anciens camarades d’infortunes alors qu’Hige tentait de négocier des alliances avec les autres meutes, et il avait raison de le faire. Seuls, c’était du suicide et Athos le lui avait dit. Il connaissait à peu près les effectifs, les pièges et les emplacements des cages des prisonniers. Enfin, sauf s’ils avaient été déplacés entre temps en attendant.

C’est pour s’entraîner avant tout que Athos avait donné rendez vous à Alkaine dans la forêt charbonneuse, là où ils avaient l’habitude de s’entraîner en temps normal. Cela faisait déjà quelques semaines qu’ils n’avaient pas vraiment parlé, depuis qu’il était revenu il était tellement occupé... Pourtant il passait son temps à aider les siens, à entraîner les jeunes, à faire ses plans de libération de prisonniers... Mais il n’avait certainement pas oublié sa princesse. Lorsqu’il la vit enfin arriver, il eut un choc, si bien qu’il en restait un instant bouche bée. Il ne s’était même pas aperçut à quel point elle avait grandi. Quel âge avait-elle à présent ? Presque 11 Mois, presque une louve... Lui qui voyait encore devant elle la petite princesse teigne qui lui tenait tête comme une vraie princesse au caractère bien trempé !!

« Enfin, ce n’est pas trop tôt ! »

Athos lança ça avec son petit sourire sarcastique habituel que sa jeune apprentie connaissait très bien. Lui et elle ne cessaient de s’envoyer des pics. Après tout ils étaient comme ça, presque pareil.

Athos prit un regard dur. Bien entendu, il n'était pas fâché le moins du monde et comme d'habitude, il prenait cela comme une sorte de jeu, des pics qu'ils se lançaient.  A chaque fois, ça finissait de 2 manières différentes. Ou en joutes verbales et Alain travaillait alors ses talents d'orateur dont elle aurait très certainement besoin des jours prochains, ou alors, ils se battaient et c'était alors un entraînement physique pour la jeune princesse. Athos commença part tourner un peu des pattes. Si le grand loup brun avait maigri après son séjour aux cages, il avait rapidement repris du poil de la bête car il refusait de ressentir une quelconque faiblesse. Maintenant, il était au meilleur de sa forme, comme avant. La jeune louve quand a elle, bien qu'elle avait une carrure à laisser deviner qu'elle serait très forte quand le moment sera venu,  n'était pas du tout prête à se battre, et encore moins contre un homme. Le jeune loup commença à marcher doucement de côté, regardant la louve comme l'épervier qui chasse le mulot. Il lança un sourire, mais pas le même qu'auparavant. Ce sourire aussi, Alkaine le connaissait c'était son sourire sadique, assoiffé, qui précède le combat.  Il tourna autour de la jeune louve, doucement, le lion procéda à sa marche funèbre autour de la gazelle. Un autre sourire.  Ignorant les pics de son élève, il reprit la parole d'une voix forte et impérieuse.


" Plus maigrichonne encore que dans mon souvenir.  Tu souffles,  tout s'envole. Tu m'étonnes que tu te sois faite avoir. Une petite louve comme toi est bien plus facile à attraper qu'un faon collé aux pattes de sa mère "


Il lança un regard à son épaule pour appuyer ses dires,  un sourire satisfait de sa preuve ultime.  Il la cherchait et il savait qu'il allait la trouver. Interieurement, il se dit qu il aurait détruit pièce par pièce le pourceau qui avait osé toucher à sa protégée, s'il avait été présent. Mais il n'était pas là. Il avait été enlevé, capturé, soumis à des traitements humains. A présent, il était revenu.   Et tout changerait .  Il pausa les yeux sur son apprentie. Il allait la trouver oui... Mais ce n'était pas à lui de sauter le premier, c'était à elle. Il voulait voir. Voir comment elle s'en sortirait,  comment elle attaquerait.  Comme une idiote se laisserait elle avoir tête baissée ? Ou réfléchirait elle avec son impulsivité, en s'en servant comme force. Car si certains mentors enseignent à ne pas agir avec l'impulsion; Athos avait expérimenté tout le contraire. Il fallait se servir de cette rage. C'était une arme précieuse.  A condition qu'elle soit bien utilisée. 
 

Son petit sourire à la fois ravageur et rageant sur les lèvres, Athos continua d'agacer encore et encore la bête. 

" Si tu as besoin de causer libre à toi. De nous deux, nous savons très bien toi comme moi que tu es la pipelette, pire que la pie. Regarde toi.  Les mots, les mots. En fait, j'ai du me tromper.  Après tout, je devrais peut être ne pas espérer.  Peut être que finalement , tu n'es capable de rien.  J'ai cru que tu étais l'héritière de ta lignée.  Finalement, quelle ironie, tu ne te trouves plus héritière de rien du tout.  "


Il connaissait son apprentie. Si elle avait résisté à la pique sur son physique, elle était très susceptible sur ce qui concernait les siens et son héritage.  Athos plaça la carte de la mère à  côté et la remis à plus tard. Même si c'était un sujet plus que jamais sérieux, il garderait la colère qu'il voulait provoquer pour le niveau suivant... Résisterait elle a l'envie de le plaquer au sol et de lui ficher une raclée ? Évidemment, il disait bien "l'envie" .

Athos tourna la tête de côté lorsqu'Alkaine lui répondit deux fois. Ils se cherchaient tout le temps et Athos connaissait bien se jeu puisqu'il le faisait dans la vie de tous les jours, son ironie mordante était devenue célèbre.  Mais cette fois ci, c'était différent et il le sentait. Dans sa voix, ses gestuelles, da rancoeur. Doucement, car on sait que les mâles sont peu rapides à comprendre les fluctuations d'un coeur, il comprit. Le louveteau devenu jeune louve s'était sentie abandonnée, oubliée, livrée à elle même alors même qu'elle avait traversé une des pires épreuves de sa vie. Son destin, son existante entière avait été balayée par un seul loup. Celui qui l'avait mise elle et toute sa famille hors jeu jusqu'à preuve du contraire. Athos pensa une fraction de seconde durant laquelle il ne détacha pas son regard de la jeune louve.  Oui, il avait raté presque deux longs mois de sa vie. Il avait raté une période de l'évolution de son apprentie, il avait raté la mort d'Empress et la défaite de sa famille; car quoi qu'on en dise, il s'agissait purement et simplement d'un changement de dynastie. Il savait combien Alkaine espérait être un jour comme sa grand mère, la même fière et fort cheffe de meute.  Rien d'autre. C'était son but ultime, le but de toute une vie. Et il sentait qu'elle le lui reprochait. Il n'avait pas été la dans cette épreuve, il n'avait pas été la lorsque la personne qu'il considérait comme sa fille, sans aucun doute l'une des personnes qu'il chérissait le plus au monde, avait le plus besoin de lui. Mais rien ne servait de ressasser le passer. Les Hommes l'avaient capturé en traître. Ils l'avaient soumis à des expérimentations dans cet affreux laboratoire.  Mais heureusement pour lui, ces expérimentations s'avéraient être fructueuses et bonnes.

Soudain, Alkaine le tira de ses pensées. Par une petite feinte, elle sauta un peu partout, se roula puis atterrit à quelques pas d'Athos, devant lui. Le général ne broncha  pas. En fait, il réfléchissait encore tout en regardant la jeune louve. Il crispa les mâchoires. Aucun sourire cette fois quand il parla. Certes, il n'était pas tombé dans le piège que lui avait tendu son apprentie, car il était le maître en la matière, c'était lui qui lui avait enseigné comment jouer avec les nerfs.  Et il fallait avouer une chose au moins. Elle était particulièrement douée.


" Tu jacasses,  tu sautes partout comme une sauterelle. Le tout n'est pas seulement de savoir contrôler ses attaque, et de savoir quand il ne faut pas agir. Le tout est de savoir quand il faut attaquer."


Ses yeux bleus corbeau semblerent alors s'illuminer. Et sur ce, dans une sorte de rugissement féroce qu'il sentit à peine s'échapper de sa gorge et qui survint pourtant le plus naturellement du monde, comme dans la ferveur d'une bataille, il bondit tout net sur son apprentie et la plaqua violemment au sol. Mais par réflexe d'attention presque paternelle (ou même pas "presque" peut être...) il fit bien attention de ne pas toucher la blessure. Fermement, il tint son apprentie au sol, si bien que même si elle essayait de bouger et de se débattre,  elle ne pourrait pas lui asséner le moindre coup. Le ton toujours aussi mordant mais presque dans la rage cette fois, Athos déclara d'une voix plus forte, dure, celle qu'il utilisait pour cracher des injures aux guerriers qui ne faisaient pas exactement comme il voulait.


" Vas y, c'est bon maintenant Alkaine. Dis le. Dis ce que tu as à me dire et qui te brûle les lèvres presque autant que ta blessure te brûle la chair.  Dis ce que tu caches sous le visage d'un simple entrainement. Dis le ! "


Puis durement mais sans aucun contact, il dégagea la jeune louve pour lui faire face. Il savait que ces pics étaient plus que sincères, et apparemment, il était plus que temps que lui et elle se parlent, s'expliquent, se disent elle ce qu'elle avait vécu ici et lui la bas. Athos savait aussi qu'Alkaine n'allait pas s'en tenir la, à pleurer dans ses pattes et extérioriser sa peine. Il savait que malgré tout, elle continuerait à se battre, s'entraîner, parce que finalement l'un n'allait pas sans l'autre.  Elle s'entraînait par rage d'avoir perdu son trône, et s'entraînait pour le récupérer.  Elle s'entraînait par rage qu'Athis n'aît pas été la pour elle, mais aussi pour le punir. Ils continueraient à s'entraîner mais il voulait parler aussi.  Il voulait qu'ils ne se cachent rien. Rien.  Car on le sait, entre eux, c'était un peu comme un père et une fille. L'enfant s'énerve, jusqu'à parfois détester son père du plus profond de son être mais au fond, au fond, ils s'aimaient à en perdre la vie. Et le père était la. La pour protéger, pour guider. Pour porter.

Alkaine. Enfin il la retrouvait.  Sincère,  honnête.  Pas seulement un masque. Une boule de feu. Une braise ardente qui enflammerait un jour tous les Sekmet. Un sourire carnassier aux lèvres, il ricana, de ces rires de fous furieux qui se fichent de la vie ou de la mort, même si le contexte n'était pas si grave que ça.  Mais enfin, il la retrouvait. Et c'était comme ça que ça allait se passer. Comme ça que ça devait se passer. Ils étaient à la fois mentor et apprentie, mais d'un autre côté ils s'entendait comme chien et chat, grand frère et petite soeur, père et fille. Athos tourna autour de sa protégée. 

" Il faut savoir Alkaine;  il faut savoir quand montrer un masque et quand dire la vérité sous forme de masque. Il y a de fois où tu dois sincèrement mentir, paraître la plus honnête possible pour le pire des mensonges. Et d'autres fois, faire passer la vérité pour un mensonge. Dis la vérité. Fait croire que tu mens. Déstabilise.  Manipule. Soit maître de tout ce qui se passe ici bas. Oui, tu m'as fait sortir hors de moi. Parce que tu n'as étais ni l'une ni l'autre.  Transparente; prévisible. Surprend. Quand on croit que tu es folle de rage, semble ne pas avoir été atteinte. Quand on pense que ça ne te vexe pas, mets toi en furie ! C'est toi qui est maître du jeu. Toi et personne d'autre, ne laisse jamais personne te faire croire le contraire. "


Il tourna encore. Oui il parlait beaucoup. Mais c'était important.  La théorie avant la pratique; ne pas prendre les choses à l'envers.  Elle savait se défendre verbalement déjà, c'était une grande chose que beaucoup de loups adultes et prétendus aguerris ne connaissaient ni ne maîtrisaient pas.

" Déstabilise.  Sers toi de ta maîtrise pour attaquer. On ne naît pas imprévisible.  On le devient.  Attaque Alkaine.  Si j'avais etz un ennemi Alkaine, ça aurait ete exactement maintenant quil aurait fallu attaquer. J'ai l'impression de te captiver par mes paroles, et toi tu sembles suspendu a ce que je dis parce que cela t'offusque, te vexé,  mais te fais réfléchir en même temps. Ne montre pas que tu as compris ma façon de captiver ton esprit pendant que je cherche tes failles. Fais moi croire que jai le contrôle.  Mais toi, ne le crois pas toi même.  Tu as le contrôle Alkaine , sers-t'en! "

Et sur ce, il laissa attaquer son apprentie. Place à l'entraînement physique. Ensuite, il parlerait de sa mère.  Et de lui. Elle avait le droit se savoir. Car lui aussi mettait en application exactement ce qu'il enseignait.

Athos regarda sa jeune apprentie faire ce qu'elle devait faire.  Bien; décidément l'entraînement commençait vraiment à porter ses fruits, tellement que Athos était obligé d'esquiver bien plus vivement les attaques de la jeune louve. Athos esquiva les coups et s'écarta vivement lorsque la jeune failli le faire tomber. Cette fois ci, elle s'était surpassée. A travers sa fourrure encore épaisse d'hiver, on voyait transparaître les muscles de la jeune louve qui se bandaient au rythme de ses actions. Athos ne sut pas se décrire à lui même ce qu'il ressentait. Il était fier, une fierté peu commune qu'il avait envers sa jeune apprentie.  Non, en fait non.  Il suffit. Il ne voulait pas se mentir à lui même.  Cette jeune louve était bien plus qu'une apprentie pour lui. Elle était comme sa fille et dans un sens, cela surprit Athos. Il avait toujours ressenti ce lien privilégié entre elle et lui, il avait toujours su qu'il y avait plus qu'une simple relation de maître à élève, de mentor à apprentie.  Mais c'était la première fois qu'il se disait clairement : "Je n'aurai pas pu être plus fière de cette enfant si c'était ma fille". Cette enfant qu'il avait vu grandir à une vitesse affolante. Cette enfant qui occupait une place toute particulière dans son coeur. Mais ça bien sûr, il était trop fier pour lettre clairement des mots dessus.

Après ses efforts, essoufflée, Alkaine  se posa, s'assit et regarda d'un regard plus apaisé son mentor. Et bien finalement, ça lui aura fait du bien de se défouler. Il la connaissait bien. Peut être même mieux que quiconque. Athos arriva près d'elle en lui souriant, ce petit sourire avec un goût d'après, apaisant, fort et impérieux.  D'un air décontracté, car il ne voulait en aucun cas alarmer sa protégée, il déclara :


" Ta mère va bien.  J'étais la les premières semaines , avec elle, tout prêt.  Tu peux être fière de ta mère Alkaine, elle tient le coup, avec courage parce qu'elle pense à sa famille. Je n'étais pas dans sa salle humaine lorsque je me suis enfui. Il n'y avait que moi et Anya alors. Et nous avons réussi à nous enfuir non sans mal, quelqu'un dont la santé n'allait pas n'aurait jamais pu faire ça.  C'était éprouvant; je dois l'avouer.  Mais nous avons réussi et c'est tout ce qui compte. Maintenant je suis la, bientôt, nous libérerons ta mère.  Tout cela n'a que trop durer, beaucoup trop."


Athos tourna la tête à l'opposer de son apprentie pour lui cacher sa propre haine.  Combien de fois avait il attendu presque désespérément que quelqu'un vienne les sortir de cet enfer? Alors il avait utilisé cette rage pour s'en sortir  c'est grâce à ça qu'il avait survécu. Il aurait pu en devenir fou; des semaines dans cette prison ou il pouvait à peine bouger. Des semaines avec ces piqûres. Si Anya n'avait pas été la, s'ils ne s'étaient pas soutenus entre eux, jamais tout cela aurait été possible.

Athos haussa un sourcil, clairement étonné. Il ne s’attendait pas, pour le coup, à une telle réaction de son apprentie. La ménager ? Depuis quand la ménageait-il ? Il ne lui avait jamais rien caché. Il avait parfois minimisé les choses parce qu’elle était trop petite, avant, pour comprendre, mais jamais il ne lui avait caché quelque chose, et encore moins menti. C’est cela qui faisaient qu’elle avait entièrement confiance en lui, et lui en elle. Parce qu’ils ne se mentaient pas, ils se disaient ce qu’ils voulaient se dire sans détour. Ils étaient comme ça, c’était dans leur sang. Alors pourquoi s’était-elle énervée aussi promptement, alors que lui même venait de s’apaiser et de lui dire ce qu’il pensait ? Peut être, oui peut être aurait-elle aussi voulu qu’elle lui parle de lui. Mais que pouvait-il lui dire ? Il avait été capturé, certes, il avait souffert avec ce bâton qui envoyait des éclair, aussi, il avait été piqué, on avait testé des choses sur lui. Mais le hasard a voulu qu’il s’en sorte indemne, le hasard a voulu que les expériences que les humains ont tenté sur lui marchent. Elles ont marché, et lui qui avait été atteint par l’épidémie avait guéri. Avait-il souffert ? Sûrement. Mais il était sorti, seul, et surtout guéri. Il avait pu faire sortir Anya et ils avaient fui ensemble. Finalement, n’était-ce pas le plus important, qu’ils soient tous seins et saufs ?


Athos pencha la tête de côté et regardé Alkaine d’un air sévère, presque un air de père, peut-être, mais qui aurait-pu dire d’Athos qu’il saurait se comporter en père ? Pour lui, il n’y avait aucun doute. Il était un général, il était un commandant d’armées, un guerrier impulsif et effrayant lorsqu’il était lancé dans la bataille. Athos était bien des choses. Mais était-il capable d’être un père ? L’avenir le montrerait bien assez tôt, et il le savait. Bientôt, de nombreuses épreuves viendront changer sa vie. Et peut-être que cette étape en fera partie.


Le jeune loup posa un regard noir sur sa jeune apprentie, pas par colère, ni par dépit, mais parce que c’était comme ça quand il disait vrai, et qu’il parlait des plus sérieusement du monde.

« Je ne te ménage pas Alkaine, je ne t’ai jamais, jamais, ménagé de quelque manière que ce soit. Et tu sais pourquoi ? Parce que je t’habitue et j’ai su t’habituer à tout. Pour que tu sois capable de tout affronter, et être plus forte que ça. Je ne te ménage pas. Je ne spécifie simplement pas les détails. Que voudrais-tu que je te dise de plus. A quoi te servirais de savoir ça ? Je suis en vie, guéri, sauf, plus fort que jamais. Oui, ils m’ont fait des piqures, des expériences, certes. Mais ça a dépassé leurs espérances. J’étais malade, je suis guéri. J’étais prisonnier, je me suis échappé. C’est tout ce qui compte Alkaine. C’est tout. »


Athos plongea son regard bleu-corbeau dans celui de sa jeune apprentie. Il ne voulait certes pas qu’elle s’inquiète, mais il voulait surtout lui montrer qu’il était le même. Il n’avait pas changé. Ou plutôt, si, il avait changé. Il était bien plus fort.

Elle lui fit une pirouette à laquelle il je s'attendait absolument pas pour la première fois de sa vie.  Elle fut extrêmement rapide; tant et si bien qu'il vit à peine ce qu'elle avait fait. Mais... c'était quoi ça? Le grand loup brun écarquilla les yeux, encore plus surpris.    Juste après ; la petite louve lui adressa un beau signe d'affection, un petit échange de geste et un coup de langue. Ils avaient toujours été extrêmement proches. Toujours. Mais c'était un cap qu'ils passaient; comme si c'était presque officiel maintenant. Elle était comme sa fille et lui était comme son père et c'était cela que symbolisait cette marque d'affection de la part d'Alkaine, ce lien,  leur lien. Athos était bien plus grand qu'elle, de ce fait il passa doucement sa tête au niveau de l'encolure de la jeune louve, dans un petit geste à la fois éphémère et tendre. Jamais il n'avait exprimé de tendresse. Mais cette gamine, cette boule de feu sur patte qui ne savait pas ce qu'était un marcassin il y a de ça quelques mois, cette gamine était comme sa fille. Sa grande fille qui grandissait. Et jamais; ô grand jamais  il n'avait cru un jour être capable de se comporter ainsi.  Les temps changent. Et bientôt ils changeront définitivement.  Serait elle capable de vivre ça ? Il en était certain. Cette louve était la force incarnée, il avait foi en elle. Elle ferait une splendide reine. Sa petite princesse. Même si plus si petite que ça.  Puis, lorsque tous deux se regardèrent et que Alkaine  poussa.un grand rire franc, il ne put s'empêcher de rire avec elle. Qu'ils avaient l'air bête comme ça ! Mais pourtant,  ils n'étaient pas gênés. Ils se connaissaient trop.


Mais l'entraînement n'était pas fini! D'un sourire malicieux, Athos bondit sur son apprentie mais au lieu d'atterrir sur elle, il se poussa d'un coup de rein pour atterrir juste à côté, d'elle, de sorte qu'il tombe prêt à se rouler à terre  au moment où il allait toucher le sol, il fit un énorme croche patte à son apprentie avant de dévier sur le côté en roulant. La seconde d'après, il était déjà debout et elle... et ben par terre.  Dans un ricanement triomphal et avec les sourcils haussé,  il s'amusa à la taquiner.


" Un par tout, mais c'est tout de même moi qui ait le plus de classe. "

Il ricana et attendit la réplique de son apprentie.

Athos regarda fièrement sa jeune apprentie. Oui, petit à petit, elle devenait plus forte, meilleure. Bientôt, elle serait imbattable, peut-être même pour lui. Athos accepta la remarque de sa jeune apprentie avec un grand sourire.

« Ah oui, vraiment ? »

Il lui tourna autour, les yeux tel un rapace. Ils jouaient, s’entraînaient, et en ce moment même Athos ne pensait qu’à cela et à rien d’autre. Il ne pensait qu’à la jeune louve devenue presque adulte qui se trouvait devant lui. Elle était devenue grande, belle, une vraie louve qui aurait plus tard la meilleure des vies, il en était certain, où qu’elle soit, du moment qu’elle était heureuse. Il ferait tout pour cela. Alkaine était comme sa fille. Il l’avait rencontrée comme ça, quand elle était petite, jeune louvette imbue d’elle même, qui pensait que de par son lignage elle avait un ascendant certain sur tout loup devant elle, elle savait qu’un jour elle remplacerait sa grand-mère et que tout Sekmet devrait se soumettre à elle. Elle était bien insupportable quand elle était petite, une vraie boule de feu qu’Athos avait pris en chage. Elle avait longtemps été en manque d’amour ou de reconnaissance selon Athos, et c’était de là d’où venait le problème. Athos n’avait jamais eu de famille et n’en avait jamais vraiment voulu. Il s’était habitué à son indépendance, et cela lui semblait même mieux de n’être attaché à personne. Puis, irrémédiablement, il avait fini par aimer. Aimer Rajaa découverte comme sa soeur, aimer Alkaine, qu’il avait comme apprentie et qu’il considérait, dans les faits, un peu comme sa fille. Une famille, des amis, des soutiens.

« C’est vrai, tu m’as surpris ma belle, mais ne croit pas que l’élève a dépassé le maitre pour autant ! »

Dans un rire narquois, il se jeta sur elle et ils roulèrent, de sorte que chacun essayait de faire pencher le corps de l’autre pour pouvoir le tenir à terre. Un corps à corps, rien de mieux pour entrainer sa force. La phrase d’Athos était provocatrice, mais bien évidemment, il savait que ce n’était pas du tout ce que son apprentie pensait, loin de là. Il savait qu’elle le respectait et qu’elle l’aimait. Mais il fallait bien la stimuler pour qu’elle donne le meilleur d’elle même !

Athos regarda sa jeune apprentie tomber sur le dos de fatigue. Oui, c’est vrai, ça commençait à faire beaucoup pour une seule journée. C’était encore un peu une petite fille, il ne fallait pas l’oublier, il devait la canaliser un peu, il devait lui apprendre tout ce qu’il savait, bientôt, toutes les clés seraient entre les mains de la jeune louve, il lui aura appris ce qu’il sait, mais il ne pourra pas s’entrainer à sa place. Il peut l’aider, comme maintenant, mais il ne peut pas faire beaucoup plus, pourtant il aimerait tellement faire plus ! Alkaine était comme sa fille, c’était sa petite protégée, celle qu’il avait choisie comme apprentie autant qu’elle l’avait choisi comme mentor. Personne ne les avaient attribués, ils s’étaient tout simplement trouvés, parce qu’ils avaient une essence similaire. La jeune louve, essouflée, dit :
- Peut-être que ce n'est pas encore le cas, mais cela arrivera plus tôt que tu ne le penses !


Athos ricana à son tour, se redressant alors que la petite louve était encore étendue au sol, vidée de ses forces après tant d’efforts. Elle avait bien, même très bien travaillé. Athos esquissa un sourire malicieux qu’elle connaissait bien, son petit sourire qui le qualifiait, lui.


« C’est fort possible, et j’espère être bien là en face de toi pour le voir. En attendant, entraîne toi si tu veux devenir ce pourquoi tu es faite »


Il n’avait pas d’idée précise de ce « ce pourquoi tu es faite ». Mais il avait bien une idée globale dont il était certain. Une fille forte, une fille Grande, une fille qu’on respecterait et qui serait une meneuse, parce qu’elle était comme ça, c’était dans son essence, dans chaque cellule de son corps, elle avait toujours été comme ça, téméraire, volontaire, forte. Elle était comme lui à son âge, ils avaient cette sorte de rage qui les poussait à toujours se surpasser. Finalement, même si les deux loups avaient beaucoup de différences, ils avaient au moins autant de points communs.