Il avait besoin de se retrouver un peu, de regarder les nuages et de ne rien dire. De calmer et travailler sa respiration, de fermer doucement les yeux et de ne faire qu’écouter le monde qu’il entourait. Heure spirituelle diriez-vous ? Non, heure spirituelle est un nom joli pour dire « heure du ras le bol du monde qui nous entoure ». Et en effet, Athos en avait plus qu’assez de toutes ses mauvaises nouvelles, ces complications, ces choses qui n’allaient décidément jamais dans le sens qu’il voulait.

Athos détestait cette impression. Cette sensation de perdre le contrôle, que rien allait comme il ne l’avait prévu. Le loup aimait tout calculer d’avance, il aimait ne jamais être pris au dépourvu. Et là, c’est ce qui s’était passé. Rien allait bien. Empress était morte. Sa soeur était loin. Eesia et leur couple était en péril. Elle avait été enlevé. Gallya avait été enlevée. Anya était rentrée. Les jeunes Sekmets étaient incapables de se battre contre les Hommes. Rien allait bien. Alors il avait besoin de réfléchir.

Il s’était isolé. Loin. Et réfléchissait à des stratégies à adopter pour la libération, quand il entendit un bruit, puis qu’il sentit une odeur qui lui disait quelque chose...

Athos regarda un loup arriver. Ce loup était un champ de bataille à lui tout seul. Des cicatrices, des bouts de chair séchée parsemaient tout son corps, des emplacements entier où plus aucun poil ne poussait. Athos prit un air sérieux en regardant ce drôle de personnage arriver. C’était une impression étrange qu’il eut quand il vit ce loup. Son visage ne lui disait rien de particulier, et même si Athos connaissait cette personne, il n’aurait même pas pu l’identifier comme son visage avait tant était marqué par une guerre, une bataille sans aucun doute. Peut-être même la bataille entre les Navniks, les Sekmets et les Esobeks. Oui, cela ne pouvait être que ça. Mais qui se trouvait face à lui alors, qui cela pouvait-il être ? Le loup balafré, enfin balafré est un bien faible mot, s’approcha doucement d’Athos. Ce dernier aussi sembla reconnaître en Athos une figure familière, ou même une odeur familière mais aucun des deux ne parvint à identifier l’autre. Le loup balafré pour une raison inconnue, mais qui semblait lui faire bien mal au crâne puisque ce dernier avait l’air de lutter contre lui même, et Athos parce que de toute manière, il n’aurait pas pu reconnaitre un visage sous tant de cicatrices.

Cependant, il y avait des airs qui lui semblaient familiers, une démarche, et son odeur... Seulement, l’autre n’avait pas encore parlé et Athos n’avait pas eu de déclic quand à son identité.
Puis, l'autre parla et lui demanda qui il était. Et Athos crut avoir un flash, une image brusque qui remonta en lui et lui afficha l'image d'un loup fort, brun-gris comme lui. Impossible, cela ne pouvait pas être lui... Il fallait être sûr...

Alors, sans agressivité aucune, Athos dit :

« Qui êtes vous ? »


Pas de salutations, pas de gentil bonjour. Athos se souvenait de quelque chose... Il fallait être sûr que ce soit lui, que ce soit Arès.

Athos se retenait fermement de retrouver ce qui avait été un ami. Mais ce qui se tenait face à lui n’était pas le charmant jeune loup avec qui Athos avait sympathisé. D’ailleurs, ce dernier ne portait même pas l’odeur des Esobeks... Mais comment ? Comment était-il possible qu’Arès se trouve face à lui... mais qu’il ne s’agisse pas d’Arès ?! Le loup scarifié de toute parts fit face au général. S’il se battait aussi contre lui-même, il n’en laissait rien transparaitre. Athos entendit la voix du loup. C’était lui. C’était lui ce n’était pas possible qu’il en soit autrement !

"Qui je suis?"


Lui même semblait ne pas savoir répondre à cette question. Alors Athos comprit, et pourtant il était si difficile de le réaliser. On entendait parfois parler de pertes de la mémoire à long terme. Mais jamais on s’imagine que cela peut nous arriver, à nous ou à nos proches... Comment Arès avait-il pu être touché par une telle perte de mémoire ? Ou alors, ce n’était pas Arès... Mais tous les sens d’Athos lui criaient, non, lui hurlaient le contraire de toutes leurs forces.

"Une épave du passé qui n'a pour seul nom Châtiment."


Athos avança d’un pas, comme si les quelques centimètres qu’il allait franchir l’aideraient à mieux voir, à trouver le détail qui lui prouverait que le loup d’en face n’était pas Arès. Pourtant, Pourtant ! Le loup défiguré par la guerre lui dit alors :


"Tu es Athos, général Sekmet, c'est bien ça?"


Athos frissonna. Il savait, et pourtant il ne savait pas. Ce n’était pas possible... C’est alors qu’Athos se rappela d’une chose. Les circonstances de la disparition d’Arès qu’on avait cru mort. Il s’était retourné, retourné contre son camp. Tout le monde l’avait traité de traitre à sa cause, mais Athos connaissait Arès, ce n’était pas son genre de trahir les siens. Il devait y avoir une bonne raison, une très bonne raison. Certaines voix lui avaient soufflé qu’Arès s’était retourné pour protéger un Navnik, qui était incapable de se défendre face à l’affluence de ses ennemis. Athos comprenait mieux d’où pouvait venir toutes ces cicatrices. Détester un ennemi, c’est une chose, mais la rage des loups face aux traitres en était une autre, bien plus dure, bien plus sanguinaire. La volonté de faire souffrir. Athos connaissait cela. Et c’est ce qui avait dû arriver à son ami. Du moins, c’était une possible plus qu’envisageable.
Athos. Oui c’était bien son propre nom. Mais l’autre en face de lui. C’était Arès.

« Oui, c’est cela. Et toi tu es Arès. Rescapé de guerre et ancien Esobek. »

Athos affirma cela, ce n’était pas une question, ce n’était rien d’autre qu’un postulat. Parce que si Athos avait raison, même Châtiment ne serait pas capable de lui répondre. Châtiment... Rien que ça.. Athos se demandait bien où il avait trouvé l’idée de se donner ce prénom. Mais l’heure n’était pas à la curiosité, du moins pas celle des détails. Mais qu’était-il donc arrivé à Arès ?


« J’ai connu Arès il y a ce qui me semble être une éternité. C’était un loup droit et fier, un combattant. »

Athos regarda « Châtiment » de haut en bas.

« C’était un ami. Où vis-tu maintenant ? »



Il grinça des dents. Arès n’aurait peut être pas pu survivre seul après tant de dommages qui lui avaient été infligées avec la guerre.

Athos écouta calmement ce que le loup défiguré avait dire. Oui; sans nul doute, il n'était pas Arès. Pas encore.  Mais il pourrait le redevenir un jour peut être. Les Hommes... Tout s'explique.  Arès avait été capturé comme lui par les humains. Comme lui, Arès avait été enfermé dans une cage. Comme lui, il avait subi des traitements humains. Mais bien plus qu"Athos, Arès avait souffert, tant souffert qu'il n'était plus Arès.  Mais Châtiment.  Non terrible donné par ceux là même qui lui avaient infligé ses blessures et ses propres sentences, le châtiment d'une vie de loup, la châtiment d'être né comme il était.  Ils l'avaient brisé. Ils lui avaient sauvé la vie tout en le tuant de l'intérieur. N'était ce pas pire dans un sens ? Athos plongea son regard dur dans celui qui bouillonnait  d'émotions contradictoires, ce qui se voyait dans ses yeux.  Athos écouta  tranquillement ce qui fut son ami. Mais pouvait il vraiment parler au passé ? Tout son être ne lui criait il pas, instinctivement, que ce loup n'était rien d'autre qu'un ami et non pas un étranger comme il le prétendait ? Athos parla sans aucun mal, de sa voix fluide et dure, sans appel, mais assurante à la fois.

" Il semble en effet que tu ne sois pas Arès, plus maintenant, Châtiment.  Mais tu apprendras sûrement à le redevenir. S'il le faut, je m'occuperai moi même de faire ressurgir le loup fier et fort qui était un jour en toi bien que tu sembles avoir du mal à le croire. "


Après une courte pause, il décida d'avouer lui aussi certaines choses. Après tout, il fut un temps où il pouvait parler à Arès,  pourquoi je serais-ce  pas de même avec Châtiment. 


" Tu as été enlevé après la guerre.  Lorsque les Navniks  se sont battus contre les esobeks et lez Sekmets,  à la fin de la bataille, les hommes ont débarqué et attrapes tous les loups qu'ils ont pu. Tu en faisais parti. Et moi aussi. A la difference que j'ai été très peu atteint par les coups et blessures.  J'ai donc pu m'évader.   "

Il n'en dit ni plus ni moins. Cela se suffisait à lui même. 

Le jeune loup balafré regarda soudain Athos, un éclair de rage dans les yeux :



"Toi qui était là, spectateur de mon trépas, qui? Qui m'a infligé ça? Donne moi le nom du loup qui, dans notre combat, n'a pas eu assez de courage pour m'ôter le dernier souffle de vie qu'il me rester. Dis moi! Dis moi qui est ce loup! Dis moi pour que de cette vie, je retrouve quelque chose à accomplir."


Ainsi c’était ça. Il voulait savoir qui lui avait infligé cela pour s’en venger ? Ce sentiment, Athos pouvait tellement bien le comprendre. Les Sekmets n’étaient-ils pas les maitres dans la vengeance, et tout particulièrement le jeune Général, qui n’attendait que le moment de sauter à la gorge de cette crapule d’Atom ?

Athos réfléchit. Non, il ne savait pas exactement qui avait fait cela, en fait, lui et Arès n’avaient même pas été sur le même front. Mais cependant, Athos savait une seule chose :

« Franchement, je ne pourrais pas poser un nom sur la personne qui t’as fait cela pour deux bonnes raisons. D’abord,toi et moi n’étions pas sur le même front. Je t’avais même cru mort ce qui était la version officielle de ta disparition. Ensuite, et c’est sûrement la meilleure des raisons pour laquelle je ne pourrais pas te dire un seul nom : c’est qu’il n’y en a certainement pas qu’un seul. Arès n’était pas qu’un guerrier. Arès était un grand loup de combat, contre qui on se frotte difficilement et encore pire, contre qui on ne gagnait pas souvent, même rarement. Pour moi, mon ami, ce n’est pas un seul nom qu’il te faut mais plusieurs. Un loup naïf t’aurait dit que ce sont les Navnik, tes ennemis de la bataille qui t’ont infligé tout ceci. Mais ce serait te mentir que de te dire cela. En réalité, il est probable que tu tiennes certaines de ces blessures des Navnik, puisse que tu t’es battu contre eux. Mais on m’a dit des choses que d’autres ont essayé de cacher. Tu as défendu un ennemi, tu as défendu un loup seul contre beaucoup d’autres parce que cela te semblait juste. Si tu veux mon avis, certains ont tenté de faire croire que ce sont nos ennemis les Navniks ou même les Hommes qui t’ont infligé ce sort. Mais si tu veux mon avis, c’est ta propre meute qui s’est vengé de ton retournement. »

Il regarda gravement ce qui était Arès et qui était devenu Châtiment. Il ne savait rien, il disait ce qu’il pensait et c’était tout. C’était son avis, ses pistes, et si son ami lui demandait de l’aider, même si ce n’était plus vraiment Arès, il le ferait. Et avec un grand, un immense plaisir.

Ce qui était Arès sembla bouleversé de la nouvelle. Sa meute aurait pu se retourner contre lui, du moins je lui avais donné ce que je pensais. Et il avait eu confiance en mon jugement. Le jeune loup me regarda et dit :

"Je te remercie de m'avoir été si honnête et fidèle à travers les saisons. Je te dois beaucoup et je ne manque jamais je promesse. Si tu as besoin de moi un jour et que je puisse d'une quelconque manière te rendre la pareille, je vis chez.Manithil dans la forêt aux pendus. N'hésite pas à my retrouver. Merci... mais je dois y aller. Je dois reflechir à toutes ces informations prendre le temps de les digérer. Ou puis je te retrouver si j'ai besoin d'en savoir plus? De te parler?"


Athos hôcha doucement la tête. En effet, il fallait qu'ils se revoient. Et Athos saurait très bien lui demander quelque chose en échange, même s'il n'aimait pas son procédé, Arès n'avait certainement pas perdu au moins son instinct d'antan, ces choses là ne pouvaient pas se perdre,même si son physique était détruit, même si son coeur avait été transformé, il restait celui au moral d'acier. Celui qui l'aiderait un jour où l'autre comme Athos l'avait aidé et l'aiderait très prochainement. Si Athos pouvait alors un jour aider Arès à se venger, il le ferait. Pour avoir perdu son ami, il le ferait.

"Tu peux me trouver là même où logent les Sekmet, sauf que je serais dans le cockpit et non pas dans le corps de l'oiseau de fer. Mais si tu ne veux pas traverser les terres Sekmets, tu me trouveras alors très souvent à sa frontière, la frontière de la Forêt Charbonneuse. Là, si je t'y trouverai si tu t'y trouves. Nous nous reverrons bien plus tôt que nous le croyons. Aurevoir Châtiment. "

Puis, Athos tourna les talons et s'en alla.