De l'Ardent au Damnée ils naquirent...

Le loup roux accroupit dans la neige, ne bougeait et ne faisait de bruits, observant fixement et patiemment. Ses oreilles aux extrémités noires étaient redressées vers l'avant, son nez remuait en captant une multitude d'odeurs et ses yeux verts profond ne se détachait pas du lapin guère gras, mais ayant un minimum de chair pour la journée du moins. Il misait sur ses capacités et ses sens pour évaluer le terrain sur lequel il se trouvait, la vitesse de sa proie et même ce qui permettrait à cette même proie de s'échapper.
Sköll n'avait que très peu manger durant le mois. Il avait attrapé un raton laveur facilement, mais cela se compliqua par la suite. Le village des hommes était une bonne éventualité, mais sa première tentative ne fut pas concluante et, par la suite, le mâle comprit rapidement qu'il n'y avait plus grands choses à piller par l'agitation des hommes. Les proie se faisaient rares en cette saison froide et cela le préoccupait davantage qu'auparavant. Solitaire, il lui suffisait de chasser deux ou trois fois par mois et cela lui suffisait. Seulement... Il venait d'apprendre il n'y a pas encore si longtemps qu'il avait de nouvelles responsabilités avec sa compagne, Nymeria. Penser à elle, était pour le mâle un répit lorsqu'il réfléchissait trop et à trop de choses en même temps. Cela le faisait sourire d'amusement, se souvenant de sa chaleur corporelle, de son odeur particulière et de son regard d'or. Pourtant, récemment, elle lui avait annoncé une nouvelle plutôt déconcertante et nullement attendu. Sur le coup, il avouait que cela ne l'avait pas tout à fait enchanté, mais la louve Esobeck semblait réceptive envers cela. Sköll n'avait pas réagit tout de suite et, c'est en décidant finalement que ce n'était pas un malheur, qu'il avait hoché de la tête pour démontrer qu'il acceptait ses responsabilités en tant que père. Ils allaient avoir des louveteaux, ils allaient avoir une famille et, malgré que le Mercenaire n'avait pas prévu cela, il refusait d'abandonner Nymeria maintenant. Elle ne le méritait pas. Déjà que le loup roux avait pu voir que sa réaction face à cela n'avait pas vraiment réconforté la grise, Sköll comptait alors l'aider et la soutenir pour lui démontrer que, oui, il ne s'y attendait pas, mais qu'il était content d'avoir des petits qui allaient le mordiller, le bousculer et la fatiguer... Enfin, vous voyez.

Donc, ainsi, Sköll devait nourrir des bouches en plus de la sienne. C'est pourquoi il tentait de chasser, de piller ou de voler depuis, presque, le moment où sa compagne lui avait annoncé qu'elle portait des petits.
Ses crocs se dévoilèrent, sa langue léchant ses babines avant de se préparer soit à refermer sa mâchoire dans la chair du lapin soit à le poursuivre en espérant l'attraper peut importe la manière. Il était dur de trouver des proies à chasser ou un semblant de viande à piller ou voler et il fallait que le jour où il trouvait quelque chose des plus convenables, il le perd par la faute d'un second loup qui ne semblait pas comprendre que la famine était proche et qu'il avait ses petits à venir à nourrir ! Regardant le lapin fuir dans la neige, Sköll gronda de mécontentement. Son humeur n'était plus qu'à un fil de basculer et il prit une grande inspiration avant de se retourner sans les crocs et sans le regard menaçant.

La louve près de lui l'observait tout comme lui la fixait. Son odeur dénonça rapidement son appartenance aux Esobecks et il cherchait la raison de sa venue dans les parages. Elle ne chassait visiblement pas. La louve qu'avait envoyé l'Alpha était dans la région pour autre chose... Chose qui le concernait peut-être, car celle-ci prit la parole. Commençant en signifiant que son Alpha, Plume Rousse, l'envoyait pour un message, en ajoutant qu'apparemment il était urgent qu'il se présente à la tanière de Nymeria. Le Solitaire n'eut pas besoin de plus pour comprendre et, sans même un remerciement ou salutation, il s'élança, regrettant le fait qu'il ne pouvait pas apporter un bon lapin pour sa compagne, pour sa femelle.
La neige et la glace l'empêchait une avancé constante, devant ralentir et accélérer successivement. Ses pattes s'enfonçant dans les butes blanches, dérapant sur la glace, Sköll avait quelques difficultés à se rendre à destination au rythme qu'il aurait voulu. Il devait prendre son mal en patience. C'était trop long, trop lent et il aurait souhaité être déjà rendu au chaud de la tanière de la grise. Lorsqu'il franchit la frontière des Esobecks, le loup galopait le plus rapidement possible, prêt à passer à travers tout ce qui l'empêcherait de continuer. Repérant la tanière, il remarqua les traces de loups sûrement présents et Sköll s'y dirigea pour y entrer enfin.

Entrant dans la chaleur de la petite grotte, le mâle roux s'arrêta dans l'entré en regardant les deux loups voulant aider Nymeria. Pénétrant finalement, il resta à l'écart en ne sachant pas tout à fait où se mettre. La rousse était près de la jeune mère et le loup également non loin devait être le guérisseur de la meute. Il ne voyait pas ce qui se passait vraiment. Était-ce terminé ou non ? Est-ce que cela c'était bien passé ou cela augurait mal ?
Silence Ardent ne montrait aucune émotion, mais il était incertain de savoir comment agir et encore moins ce qu'il devrait ressentir étant donné la situation. Ainsi, incertain sur tous les points, il savait un minimum être légèrement nerveux, voire anxieux sachant les risques.

De l'Ardent au Damnée ils naquirent...

Les odeurs de la tanière lui fit se rappeler que deux autres loups, jeunes, vivaient avec la femelle, avec sa femelle.
Il était venu une fois dans cette tanière, lors de sa première rencontre avec Nymeria. Tous deux traquaient une proie. En fait, la même proie. Ils avaient repéré la piste et l'avaient suivi chacun de leur côté, sans savoir l'inattendu. La grise s'était positionné et avait attendu patiemment le bon moment pour frapper et ce moment fut avant qu'il ne s'élance lui-même. Silence Ardent était alors sortit de sa cachette, sans réel but face à elle. Le loup étant légèrement blessé à la patte et la louve étant pressée par le temps au vu du trou fait par une dent d'acier dans l'épaule de la carcasse du chevreuil, ils s'étaient finalement entendus pour un accord équitable profitant aux deux lupins. Ainsi, ils se dirigèrent vers le territoire Esobeck. Sköll aida la louve à emmener la proie et Nyméria fit de son mieux pour appliquer des soins sur sa blessure.
Il revoyait donc ce lieu qu'était la tanière, chaleureuse pour le loup sans abri fixe et sans attache, sentait de nouveau les odeurs qui, se souvenant, avaient éveillées sa curiosité. Il lui était apparu qu'elle vivait avec deux loups, jeunes, mais aucune trace d'un mâle pouvant être le compagnon et le père. Il s'était avéré qu'il n'y avait pas de mâle présent dans sa vie et que c'est lui, aujourd'hui qui avait volé son coeur. Cependant, il n'avait rencontré que l'un des deux fils de la louve grise, Keres, durant la guerre des meutes, mais l'autre restait un mystère.

Ce grand jour, manifestement, le mettant dans un état fébrile. Son regard émeraude ne tremblait pas, contrôlant ce sentiment d'impuissance face à la louve qui était sa femelle et maintenant la mère de ses petits... Ses petits. En sachant qu'il avait vécu la majorité de sa vie parmi les hommes et leurs cabots, il était difficile de croire que le loup roux puisse avoir une vie normal, si l'on peut le dire. Avoir une compagne, une famille. C'était loin d'être la priorité du Solitaire, cela ne lui avait pas effleuré l'esprit, mais sûrement était-ce naturel étant donné qu'il avait été entrainé et nourrit dans le seul but de combattre par intérêts et par objectifs. Nulle autre pensée plus saine, plus douce et plus sociable ne l'avait accompagnées pour qu'il puisse un jour vouloir une femelle et une progéniture. Pourtant, il entra dans la tanière pour voir la louve grise allongé ayant partagé avec lui ce sentiment qu'on lui avait privé de connaître. De surcroît, des louveteaux venaient finalement s'ajouter à l'équation.
Alors qu'il était vrai que Sköll avait longuement réfléchi et n'avait pas montré l'enthousiasme qu'une jeune mère souhaiterait, il avait accepté cette nouvelle inattendu qu'elle lui avait exposé quelques temps plus tôt. Sa déception au vu de sa réaction peu enjoué, le mâle avait tenté de la rassurer par une caresse affectueuse qu'il avait démontré en collant doucement son museau au sien. Il savait n'avoir pas été à la hauteur des attendes de sa compagne cette fois-là et le roux comptait donc se rattraper d'une quelconque manière. Il l'aimait, malgré que ces nouveaux sentiments le frustrait autant qu'il le captivait, et il voulait qu'elle sache par conséquent qu'il ne l'abandonnait pas, qu'il était proche d'elle même s'il était sur un autre territoire, qu'il serait toujours là lorsqu'elle en aurait besoin. Nymeria était forte, c'était plutôt le mâle qui se sentait étrangement mal dans certains moments en pensant à la douce louve aux yeux d'or trop loin de lui. Seulement, il était Solitaire et Mercenaire. Oui, l'Alpha des Esobeks avait accorder un droit de passage, cependant, ces terres n'étaient pas les siennes et Koschei et les contrats ne pouvaient être laissés de côté.

Cependant, Silence Ardent ne pouvait en aucun cas omettre d'être présent. Non, surtout pas.

Allongé sur le côté et la tête redressée, son pelage gris ébouriffé et mouillé par les efforts fournient, les iris dorée se posa sur lui. La douleur se reflétait encore dans son regard et, ne montrant rien, il sentit une frustration que trop quotidienne l'envahir. Elle avait souffert et il n'avait même pas été là pour la soutenir. Cela le rassurait de voir un guérisseur qui a pu l'aider durant l'accouchement, malgré qu'il avait facilement de la méfiance envers ceux exerçant ce rang. Et puis, il y avait la meilleure amie de Nymeria. Elle n'avait pas été seule, du moins.
La queue de sa femelle remuant légèrement et les oreilles de celle-ci s'agitèrent, laissant Sköll satisfait du fait qu'elle allait bien après tous. Finalement, la grise lui indiquant de venir auprès d'elle, le mâle roux vint coller son museau au sien auquel elle se frotta doucement. Il jeta inévitablement un oeil vers les trois boules de poils se collant contre le corps de Nymeria, cherchant de la chaleur et du lait. Certes, peut-être que son absence lui a éviter le mauvais suspence de savoir si leur dernier fils vivrait ou non. Mais... Sköll était observateur et il ne manqua pas le caillot de sang sur la terre près du plus frêle. Il ne dit rien, ni ne posant de question, mais il pressentait qu'il avait sûrement manqué un moment important.
Tandis qu'il regardait les trois louveteaux qui étaient les siens, il sentait la tête de la louve contre lui et il ne chercha pas à se dérober. Il n'était pas le premier à aimer les démonstrations d'affection, mais Nymeria semblait en avoir besoin et ce n'était absolument pas désagréable, alors...

« Deux mâles et une femelle ... »

La voie habituellement douce aux oreilles faiblit. Penchant la tête vers sa compagne, Sköll laissa voir un regard vert profond très désabrobateur. Il n'avait jamais assisté à un accouchement, mais il était visible de voir que c'était difficile et douloureux. Elle devait se reposer. D'ailleurs, c'était la première qu'il ressentait le besoin de protéger, de soulager, ce qui reviendrait souvent avec ses louveteaux.

« Tyrell Croc Ardent … Cadeyrn Secret Damné ... »

Il souffla brusquement. Ne pouvait-elle pas fermer les yeux et se reposer ? Sköll força la louve grise à poser sa tête au sol, espérant qu'elle ne donnerait que peu de résistance et consentit à donner un nom au dernier, au plus frêle, au plus incertain.

« ... Owen, Souffle Ardent... »

L'avait-il décidé depuis longtemps, ce prénom ? Non, cela lui était simplement venu, sans qu'il n'y pense vraiment. Des mots qui avaient franchis ses babines spontanément.
Se positionnant au côté de Nymeria, le roux s'allongea pour déposer sa tête au-dessus de son corps, communiquant sa chaleur et, imperceptiblement, son amour.