“Sometimes I believe that this less material life is our truer life, and that our vain presence on the terraqueous globe is itself the secondary or merely virtual phenomenon.”

l faisait un froid de canard dehors. Et c'était un euphémisme au vu de l'hiver digne des périodes glacières qui s'était abattu sur les terres d'AFF. La nuit comme le jour, Odyssée se les gelait. Littéralement. Elle avait dû se trouver un abri d'urgence, histoire de ne pas mourir bêtement comme ces animaux crevés qu'elle croisait parfois complètement congelés. Les gelées nocturnes se faisaient particulièrement mortelles pour ceux qui voulaient tenter l'expérience de dormir à la belle étoile. Puis je n'ai toujours pas abordé le chapitre des blizzards. Vous savez ? Ces tempêtes de neige dans lesquelles il est impossible de voir à plus de deux centimètres, transformant les chemins qu'on parcourait tous les jours en de véritables labyrinthes. Il était aisé de se perdre puis de mourir d’hypothermie dans ces circonstances.

Mais ce qu'il y avait bien dans le fait d'être Odyssée, c'était que celle-ci n'en avait rien à taper. Ça faisait des heures qu'elle marchait dans la neige sans avoir la moindre idée d'où elle pouvait bien se trouver. Et surtout, question vitale si je puis dire, si elle allait savoir se tirer de cette situation. Ses coussinets étaient gelés, elle ne les sentait même plus. Le mistral qui sifflait dans ses oreilles s'engouffrait avec violence dans son pelage, réduisant celui-ci à l'état de vulgaire décoration. Et pourtant Odyssée était une louve Arctique. Elle plaignait les autres loups, ceux qui possédaient une fourrure deux fois moins épaisse qu'elle. Parce qu'en ce moment ce devait être un véritable handicap. Surtout qu'elle même crevait de froid malgré tout. Ses dents s'entrechoquaient entre elles tellement elle se trouvait glacée même de l'intérieur. L'échine basse, la tête au ras du sol et les yeux plissés, elle tentait vainement de trouver son chemin dans la tourmente. Ses yeux orangés fixaient ses pattes qui s'enfonçaient quasiment entièrement dans la neige à chaque pas. Les flocons s’amassaient lentement dans sa fourrure, elle avait plus l'air d'un bonhomme de neige vivant que d'autre chose. Et peu importe le nombre de fois qu'elle se secouait, c'était peine perdue ; avec la neige qui tombait dru, elle en revenait vite au point de départ. La fatigue commençait à s'immiscer en elle malgré qu'elle espère toujours trouver un endroit où se reposer. Ses membres étaient maintenant parcourus de spasmes. Ce n'était pas bon signe. Il était temps qu'elle trouve quelque chose.

Pourtant la journée avait bien commencé. Elle avait quitté sa tanière ce matin avec dans l'idée de se dégourdir les pattes. Après tout, avec ce temps de merde elle restait la plupart du temps prostrée dans le vieux terrier abandonné qu'elle avait trouvé aux alentours du Lac Acide. Et elle se faisait chier. Odyssée n'avait jamais été le genre de louve à aimer rester sans bouger. Cette louve était une bombe ambulante, jamais tranquille, toujours à chercher quelqu'un à emmerder. Comme si son liquide vital contenait quelques grammes de coke en permanence. Enfin bref, elle était donc sortie. Le temps semblait être stable à ce moment là. Le ciel était nuageux et le vent soufflait fort, mais il ne neigeait pas. Il n'y avait qu'une étendue blanche ponctuée de quelques arbres nus et autres carcasses délaissées de la guerre la ponctuant à perte de vue. Et encore, ceux-ci étaient à peine visibles tant la poudreuse recouvrait tout sous une épaisse chape immaculée. Les problèmes n'avaient toutefois pas tardé à se pointer. Le temps s'était emballé ; le vent s'était levé, puis la neige s'était mise à tomber. Odyssée avait voulu faire demi tour, mais c'était trop tard. Elle s'était pas mal éloignée de la maison, et comme elle ne voyait rien ses repères avaient été brouillés. Depuis elle n'avait fait qu'errer à la recherche d'un abri histoire de ne pas mourir. Sans succès jusque là.

Malgré tout, elle ne perdait pas espoir. Il fallait reconnaître que son nom de lune lui collait à la peau dans ce genre de circonstances : Éternel Espoir. Au début elle l'avait trouvé un peu ridicule, mais au final ça lui allait plutôt bien. Et, miracle ! Quelque chose se trouvait enfin visible ! Odyssée remercia son karma et accéléra le pas pour se diriger vers l'abri. Le Tunnel. Jamais elle n'avait été aussi contente que de trouver ce lieu glauque à souhait, plein de cadavres de véhicules et de rats. En quelques foulées elle y était. Un soupir de soulagement s'échappa de sa gorge. Elle avait bien cru qu'elle allait y passer un instant. Mais non ! On abattait pas Odyssée comme ça après tout. Épuisée par ces longues heures de marche, la louve s'écroula sans élégance sur le tarmac.

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“Quand j'étais petit j'me faisais courser du collège jusqu'à chez moi. Courez courez, vous m'attraperez pas ! Y'avait toujours un p'tit bâtard qui voulait m'casser le bras. Courez courez, vous m'attraperez pas ! Depuis j'considère qu'la Terre entière a une dette envers moi.”

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