La douleur le cuisait. Les blessures infligées par le chien, à la fête foraine, le brûlaient comme autant de flammèches de bougies que l'on aurai posé sur son corps, roussissant son poil et faisant pulser la douleur par vagues, à chacun de ses pas. Pourtant, le mâle se devait de continuer. Continuer à chasser, continuer à chercher la nourriture encore et encore. C'était à cela que la vie de solitaire l'avait condamné. Mais tout ça, il l'avait choisi. Délibérément, de son plein gré.

Il n'avait pas à se plaindre. Il avait juste à marcher, continuer à marcher et à traquer, continuer à traquer.

Pourtant, il n'y avait désespérément aucune odeur, aucune piste pour le mener à un repas aussi maigre fut-il. Le fantôme avait erré jusqu'à la forêt, cette forêt du nord qu'on qualifierai de macabre si le tableau des terres en général n'était pas meilleur, toutes catégories. Les cadavres d'hommes pendaient aux arbres et si ils n'étaient pas squelettes ou carcasses dans un tel état de putréfaction qu'elles vous auraient tué pour une bouchée, il les aurait rongées pour passer sa faim, et espérer pouvoir faire un ou deux pas de plus avec le peu de viandes des corps humains.

Désespéré, il huma de nouveau l'air. Il finirai bien par trouver...

Mais la chance ne pouvait pas rester en sa défaveur éternellement. Il y avait encore quelques âmes, sur cette terre-là, et il finit bien par tomber dessus.

Un lapin.

Un lapin blessé. Il sentit un frisson électriser ses muscles endoloris. Peu lui importait la douleur, la faim, la fatigue, il y avait enfin une proie juste là devant lui! Une goutte de salive s'écrasa sur le sol dur et craquelé, et il s'élança à la poursuite du lagomorphe. Ce dernier s'enfuyait en boitillant. Visiblement blessé à la patte. Une patte arrière même. L'excitation le gagna et il accéléra.

Elle était là, sa proie, son repas. Tout proche.