J'ai faim. La famine me brouille la vue. Elle me tord le ventre. Je ne vais pas mourir de faim. Non je sais juste que cette chose que je ressens est la seule qui est là pour me rendre compte de quelque chose. Que je suis encore en vie. Il faut que je fouille et que je chasse. Je n'en ai aucune envie. Je n'en sais rien. Je ne sais pas ce dont j'ai envie. Je suis perdu comme quiconque. Je ne suis qu'un enfant. Je suis si jeune et déjà confronté à tout ça. Ou est donc ma mère qui doit me nourrir. Alors je ferme les yeux et j'imagine mon lit chaud et mes futurs jeux à venir. A mes amis les écureuils et les oiseaux qui viennent me bercer la nuit.

Il faut que je me concentre sur ma proie et ce que je vais lui infliger. Morsure, perte de ses oreilles ou de ses pattes. Ce ne sera plus qu'un amas de chair entre mes pattes. Rien d'autre qu'un morceau de nourriture inutile. Juste bon à remplir mon ventre. Elle décorera le sol de ses restes. C'est un honneur non. De se voir ainsi tuer par un jeune enfant en soif d'aventure et de combat.

Là ! Quelque chose. Je l'aperçois, elle ronge, elle grignote quelque chose. Elle ne peut me voir, ni me sentir, le vent me faisait face. Je continue de fixer cette forme mouvante. La seule envie qui me traversait actuellement l'esprit c'était d'enfoncer mes griffes et mes crocs profondément dans sa chair. Le regarder mourir devant mes yeux, l'odeur du sang chaud sans la bouche. Ses entrailles éparpiller sur le sol. Les yeux vitreux. Plus de souffle de vie. Rien. Tout ça me donne des frissons dans le dos. Si amusant ! Je pourrais en mourir de rire. Un rire sinistre et aigu sort alors de ma gorge, mes pensées m'enivraient. Je me perdais peu à peu dans l'ivresses de mes songes. Je reporte mon attention sur ma future proie. Oh non, elle semblait m'avoir entendu. C'est mauvais, je m'élance, espérant pouvoir l'attraper. Je saute, et rabat mes crocs sur le vide. Trop tard. Je donne un coup de patte rageur dans une botte d'herbe qui s'arrachent sur la force du coup. Déçu, les yeux fixant le vide, je m'attarde un peu. Quel idiot. Tellement bête. Je continue ma route, le ventre vide. Il fallait absolument que je trouve quelque chose, je vais finir par en crever de cette famine de merde. Quel fin si nulle et si peu valorisante.

Un écureuil ! Je perçois sa fourrure rousse, il ne se cache pas ! Quel idiot ! Je vais finir par le happer. J'en suis sur cette fois. Je ne peux pas perdre une proie si facile que ça. Je serais alors digne d’être tuer sur le champ. La peur de perdre me noue le ventre. Je n'aime pas ça. Je suis né pour briller ! Pour être le meilleur de tous. Alors pourquoi cette impression de voler, de n’être perçu que par les ombres des arbres dénudés. Ils portent le vent doucement à mes oreilles. Non, mon odeur ! Trop tard, encore une fois le temps de m'élancer et cette créature est déjà partie. Rah ! J'en ai marre de cette vie d'esclavage et de famine. Se nourrir seul est une véritable plaie. Une plaie ouverte. Si seulement j'avais un serviteur, il me ferait les courses et moi je pourrai dormir tranquillement. Je pousse un soupir de haine. J'ai vraiment pas de chance aujourd’hui. Mais ne vois pas ce qui peut être pire. Perdre deux proies d'un coup, il n'y a pas pire. Sauf si je venais à perdre la troisième.