Je gémis dans mon sommeil, alors que ma cicatrice me brûle. J'aurais tant aimé oublier ce jour là, mais il reste inscrit dans ma mémoire. Il me hante. Il me torture toujours. Je roule sur mon autre flanc, regardant l'extérieur d'un œil morne. Il fait encore noir et l'aube semble bien loin.

Je me tourne à nouveau, hésitant à me lever. Après les images qui défilent dans ma tête, je ne risque pas de retrouver le sommeil avant un moment. Je pense à d'abord calmer un peu ma respiration, je ne veux pas alerter les autres de mon état. C'est vrai, qui montrerait ses...faiblesses aux autres? C'est la loi de la jungle ici. Laissez connaitre vos douleurs, et ne vous étonnez pas de vous faire poignarder en plein coeur. Mon passé n'appartient qu'à moi, c'est tout.

Je me dresse sur mes pattes, m'étirant longuement. A quoi bon restez coucher, vous me direz. Je quitte ma petite caverne proche de l'aile de l'avion, profitant du courant d'air frai qui me chatouille la truffe. La quiétude de la nuit est parfois reposante en réalité, personne pour vous dire quoi faire, personne à ne pas offusquer alors que vous pensez très sérieusement quelque chose de désagréable. Oui, en quelque sorte, cette solitude est une forme de liberté.

Je m'en vais me promener un moment, courir un peu pour me vider la tête. Je crois qu'au bout d'une bonne heure de course, autour de la zone, je reviens à pas léger, les muscles à vif et la tête vide de toutes pensés superflues. Je lève la truffe doucement vers le ciel, regardant les étoiles qui brille malgré le voile flou qui essaye de les cacher. Ces humains ont vraiment ruinée la beauté de la nature...

Je soupire, secouant la tête alors que je rentre dans la nuit noire. Je trouve un endroit sympathique, proche d'une odeur où je m'allonge tranquillement, la tête sur les pattes. 

Mon odorat me chatouille alors qu'un léger sourire étire mes babines. Sans bouger de ma position, je dis avec un ton ironique dans ma voix.

Je me redresse alors pour m'asseoir, lui faisant face en me tournant vers elle. On ne parle pas à quelqu'un de dos, surtout si c'est une personne que l'on respecte. Par contre, je n'irais pas jusqu'à coller mes oreilles à mon crâne ni à lui lécher les pattes, c'est pas mon genre.

-Veux-tu me tenir un peu compagnie? Demandais-je sans soucis, n'hésitant pas non plus à la tutoyer. Elle n'a qu'à me rembarrer si elle n'aime pas ça au pire... Moi j'adore jouer avec le feu!

La louve ouvrit lentement les yeux. Un bruissement l'avait tiré de son sommeil, si l'on pouvait parler de sommeil. Habitué à veiller et surveiller constamment les intrusions, les dangers, les menaces. Toujours un oeil au ciel, c'est ce que son père, l'ancien alpha lui avait appris par le passé. Les plus terribles menacent viennent du ciel. Quand cela ne concerne pas les avions bombardiers des hommes, les bombes, ce sont les pluies acides ou pire qu'il faut surveiller. Mais les menaces ne manquaient pas non plus sur terre. Les hommes, les prédateurs, les vagabonds…Il fallait toujours être prêt à combattre ou à s'enfuir. Cela n'enchantait jamais la louve de devoir fuir, mais parfois, on ne nous en donne pas le choix.

Tout étaient obscur. La nuit n'avait pas encore quitté son trône lunaire et reposait sur les terres ses longues ailes noires. Mais Empress n'avait pas rêvé. Un bruissement, des pas. Quelqu'un qui se lève pour quitter la carcasse de l'avion. La louve se méfiait toujours des sorties nocturnes des autres.Toujours cette impression de complot, de trahison. L'alpha se releva sur ses pattes, s'étira et approcha de la sortie pour humer le passage du loup. Sa trace olfactive suffisait à la louve pour l'identifier. Elendil. Qu'allait-il encore manigancer ? Empress s'étira de nouveau et décida de quitter l'épave proue profiter de la fraîcheur de la nuit. Rien de tel que l'air nocturne pour se purifier l'esprit. Ce qui n'était pas une mauvaise chose par les temps qui cours. La famine, l'épidémie… Il ne manquait plus que des bombes et des pluies acides ! Mieux ne valait pas y penser. La louve s'assied dans l'obscurité, guettant les alentours. La nuit était calme, ce qui n'était pas désagréable. La louve pouvait prendre le temps de fermer les yeux et écouter, ressentir l'air et la terre. Mais bientôt, un nouveau bruit vient rompre sa tranquillité. Le retour d'Elendil, qui ne manqua pas de lancer quelques piques.

- Et il semblerait que je ne sois pas la seule dans cette situation…

La louve enroula sa queue autour de ses pattes, levant les yeux vers les étoiles. Les étoiles ne sont pas t-elle meilleure compagnes que tous les autres loups de la terre en ces sombres nuits ?

- Je ne suis pas certaine que ce soit une bonne idée pour moi…

Un peu d'ironie ne faisait pas de mal. La louve baissa les yeux sur la silhouette d'Elendil qu'elle devinait plus qu'autre chose.

- Alors ? Que faisais-tu tout seul dans la nuit ?

Légèrement méfiante, la louve préférait aborder le sujet de façon direct.

Mauvais rêves. Au jour d'aujourd'hui, même la nuit ne se révèle plus être le refuge et l'apaisement de l'esprit qu'il avait pu être autrefois. Même les louveteau les plus jeunes ont le sommeil dévoré par l'ombre des cauchemars. Empress inspira longuement, écoutant la réponse du loup. Elendil était digne de confiance, c'était à n'en point douter, mais les dernières intrusions de vagabonds, les tensions naturelles provoquées par le manque de nourritures, toutes ces choses obligeaient l'alpha à garder un oeil sur les membres de sa propre meute. Une simple précaution qui ne lui plaisait pas de prendre. Empress balaya ses pensées d'un battement de queue. Son regard se promena dans l'obscurité brassée par les vents refroidis par la nuit.

- Laisse tombé le passé, il ne t'apportera rien de bon. C'est devant toi qu'il faut regarder si tu ne veux pas te taper les arbres.

Empress gratta le sol avant de se relever, les oreilles en alerte, inspirant profondément l'air dans la nuit. La louve s'ébroua vivement, observant vaguement l'horizon. Elle répondit d'une voix distraite.

- Ne t'inquiète pas pour ça, je dors toujours d'un seul oeil…

La louve fit danser ses griffes contre le sol poussiéreux. Empress s'étira un instant, s'échauffant silencieusement. Elle se retourna finalement vers Elendil.

- Récemment, des vagabonds et d'autres petits prédateurs visitent nos terres pour chasser, ou essayer de trouver quelques charognes. Je me demande parfois si quelqu'un ne leur facilite pas la tâche dans mon dos…

Empress doutait d'avoir un traître dans ses rangs, mais certains Sekmets ne le sont pas de naissance, il n'était pas impossible que l'un d'entre eux ai décidé de venir en aide à des bandes de vagabonds amis avec qui ils auraient pu être lié.

- Je vais faire un tour du territoire, si tu veux m'accompagner...

Empress n'attendit pas de réponses pour s'élancer sur le territoire. Malgré la fatigue accumulée, il était bon de se dégourdir les pattes dans la nuit venteuse. Les vents du sud apportaient quelque chose. L'alpha ne savait pas encore quoi, ni si cela serait bon, mais les vents, quelque soit la direction, portaient toujours quelque chose avec eux. La louve longea la carcasse de l'avion pour emprunter un chemin qu'elle avait pris l'habitude d'emprunter pour accéder aux frontières les plus proches. Le vent souleva des poussières et branches mortes, obligeant Empress a retenir son élan pour protéger son visage des saletés.

- Cette tempête ne cessera donc jamais !

S'il n'y avait que la tempête ! Quand cesserait le calvaire des pluies et des guerres, là était la véritable question. Mais avec ces vents violents, difficile de suivre correctement une piste.

- Je crains que les vagabonds ne profitent de ce vent pour échapper plus facilement à nos sentinelles…

Chacun de ses pas soulevaient un peu de poussières et s'infiltrait dans son pelage le grisonnant. Cette terre sèche, ce vent qui l'assèche d'autant plus. La louve s'ébroua vivement avant de se retourner vers son compagnon de chemin. Empress n'était pas forcément une grande bavarde. Son langage était celui du regard, du corps. Son poste d'alpha concentrait au maximum son attention, la détournant de l'aspect vivant et charnel des autres loups. Tout ce poids sur ses épaules la rendait robotique, machinale, toujours soucieuse. S'ouvrir aux autres sans penser aux responsabilités étaient un exploit pour la louve.

- Elle te hante cette blessure, est-ce qu'elle te fait souffrir ?

(Vraiment désolé du temps de réponse ! >_>)