Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
C'est une nouvelle journée qui naît dans l'aurore pâle. Une nouvelle journée que le loup passera a arpenter des terres inconnues. Une nouvelle journée durant laquelle il devra s'entraîner dur pour obtenir du monde ce qu'il attend : devenir plus fort. Le loup n'est pas ambitieux. Il veut seulement valoir quelque chose de plus que le chien de combat qu'on lui a toujours fait croire être. Il sait désormais qu'il y a autre chose, derrière les cages, et il ne veut pas y retourner. Pour rien au monde il remettra les pattes sur le territoire des bipèdes, sauf peut-être pour les faire souffrir, pour leur faire payer ce qu'ils lui ont pris. Le loup soupire, il arpente des rues désertes sans aucune conviction. Le monde est bien plus grand que ce à quoi il s'attendait, il n'aurait pas cru voir un jour tant de lieux différents, tant de ses semblables sur une même terre. Il pensait être le seul. Le seul de son espèce, que tous les chiens haïssaient. Il n'entendait que la haine derrière les barreaux, la haine que les autres combattants lui portaient. Pourtant, le loup ne leur a jamais rien fait, à ceux du hangar. Ils avaient le même Dieu, il ne s'est jamais battu contre eux. Il soupire à nouveau, il essaie de chasser tous ces souvenirs de son esprit. Après tout, c'est une nouvelle vie qui s'est offerte à lui, et il veut désormais la vivre libre, comme il aurait dû toujours le faire. Même si, au fond, il sait que quelque chose le rattache aux bipèdes. Il ignore encore quoi, mais il sent que quelque chose l'attire inexorablement vers eux, comme s'il savait à l'avance qu'un jour, il retournera là-bas. Il sursaute lorsqu'un caillou roule sous une patte qui ne lui appartient pas. Il se tourne vivement pour faire face au danger potentiel, mais ce n'est que l'un des membres de son espèce. Alors, il fait ce qu'il a appris durant les deux premiers jours : il salut.
- Bonjour. Quel est ton nom ?
Il a bien compris que c'est ainsi, la formalité d'une rencontre. Il faut souhaiter la belle journée, et ensuite demander l'identité de l'inconnu. Ensuite, se présenter à son tour. Mais pour cette partie, le loup a encore des difficultés. Il ignore quel mot pourrait être le sien. Il ne sait pas encore quel nom il pourrait porter.
Véga tachait de faire au plus vite, bien qu'elle redoutait de ne pas réussir à avertir tous les Mercenaires avant demain soir. Koschei lui avait demandé d'en rassembler un maximum, sans quoi ils ne seraient pas suffisamment nombreux pour accomplir la nouvelle mission qui leur avait été confiée. Le meneur des Mercenaires avait effectivement dégoté un contrat plutôt intéressant auprès de la meute Esobek. Tout ce qu'ils avaient à faire était de venir en aide à ces derniers afin de récupérer des territoires aux Navniks, en échange de quoi ils obtiendraient une terre ainsi que des proies. Bien qu'elle ne soit pas ferrure de combats, Véga avait hâte d'y participer. C'était l'occasion rêvée de montrer à Kornorg qu'il avait eu tort de s'en prendre à elle et que le danger qu'il cherchait à éradiquer se révélerait finalement être une alliée pour les siens.
Cependant, la tâche qu'on lui avait demandée d'accomplir était ardue et mettait ses capacités d'endurance à rude épreuve. Rassembler tous les Mercenaires éparpillés un peu partout n'avait rien d'un jeu d'enfant, et elle s'était déjà mise à leur recherche depuis la tombée de la nuit. Parcourant le plus de distance possible, Véga se fiait avant tout à son flair. Bien qu'il s'agisse de solitaire, les membres de son groupe avaient tout de même un petit quelque chose en plus qui lui permettait de les identifier. Elle en avait déjà trouvé quelques uns dans les terres libres, mais il ne fallait pas omettre de passer par la ville des bipèdes. Peut être que l'un d'entre eux y serait. Véga longeait l'autoroute éventré aussi rapidement que possible. C'était un des axes principaux de cet endroit. D'ici, elle pouvait avoir un large champ de vision. Ses yeux balayaient ainsi la région depuis au moins une heure, son flair aussi. Des caillasses jonchaient le sol, crépitant sous ses pattes. Elle en envoya une valser au loin. Celle-ci atterrit en contrebas, près d'un jeune loup. Véga se rapprocha, usant de son flair. Il portait l'odeur d'un Mercenaire, mais elle ne l'avait encore jamais vu. Avant de lui parler de la réunion, elle devait d'abord s'assurer de son identité.
- Bonjour. Quel est ton nom ? Lui demanda t-il. Elle descendit le rejoindre.
- Véga, répondit t-elle, depuis combien de temps as-tu rejoins les Mercenaires ?
Elle attendait de lui qu'il confirme son intégrité aux Mercenaires, sans quoi elle ne s'attarderait pas ici.
- Véga. Depuis combien de temps as-tu rejoins les Mercenaires ?
Le loup penche la tête, comment sait-elle ? Elle ne le salut pas à son tour ? Il ne comprend pas. N'était-ce pas là le fondement de leur espèce ? Lui qui pensait avoir enfin saisi les prémices du langages, il se rend compte qu'il a encore une quantité énorme de choses à apprendre. Tant pis pour aujourd'hui, il a bien des jours devant lui pour mémoriser d'autres leçons. En attendant, la louve lui a posé une question. Depuis combien de temps, au juste ? Deux soleils se sont couchés depuis qu'il a fait la rencontre de Pandémonium et de Sköll. Depuis qu'il fait parti des rangs. Et, maintenant que sa truffe hume l'air, il réalise que Véga, elle aussi, est des leurs. Il la fixe dans les yeux, sans une once de peur et sans le moindre zeste de défi. Il ne sait pas qu'il pourrait lui donner l'impression d'être défiant, voilà tout. Il réfléchit un instant, recompte encore les soleils qui se sont levés. Et lorsqu'il est certain, il se redresse, comme illuminé par sa certitude.
- Deux jours.
Mais, finalement, quelle importance ? Donnent-ils des missions seulement aux membres qui ont déjà fait leur temps dans leurs rangs ? Ne méritera-t-il leur intérêt qu'après un nombre de jours bien défini ? Les règles sont-elles si strictes ? Si injustes ? Un noeud de frustration se forme dans son estomac. Il a rejoint les mercenaires pour avoir un rôle, pour donner ses services contre de la nourriture. Il a voulu les suivre pour avoir enfin une vraie raison d'exister. Vont-ils le priver de la seule chose qu'il attend d'eux ? Si c'est le cas, le loup n'hésitera pas. Il partira, il fera son chemin seul comme il l'a toujours fait, et il finira bien par trouver un moyen de vivre pour autre chose que pour attendre la mort sagement. Il ne restera certainement pas assis, les pattes croisées, à regarder d'autres loups s'entraîner et devenir plus fort sans avoir lui-même l'autorisation de progresser en parallèle. Non, le loup ne sera plus jamais spectateur de sa propre existence.
Bien qu'elle n'en ait jamais entendu parler, Véga devait reconnaitre que le loup qui se tenait face à elle portait bel et bien l'odeur des Mercenaires. Son corps était celui d'un jeune mâle d'environ un an, et malgré son poil brun aux allures mal entretenu, il paraissait en parfait état de santé. Il n'y avait rien dont elle devait se méfier, chez-lui, cependant, quelque chose la perturbait... Depuis tout à l'heure, son visage n'avait affiché aucune expression. Il ne montrait aucune joie, aucune méfiance, aucune colère, rien, et par dessus tout, son regard était vide.
Véga lui laissa le temps de répondre, bien que sa question n'avait rien de compliqué. Était t-il en train de chercher à la tromper ? - Deux jours.
Finit t-il par dire. Une réponse simple et courte qui en disait long sur le fait qu'elle n'ait encore jamais entendu parler de lui. Ce mystérieux loup n'était peut être pas en train de lui mentir, mais elle préférait tout de même s'en assurer avant de le considérer comme digne de confiance.
- Je vois, reprit t-elle calmement en le fixant droit dans les yeux, qui t'a recruté et comment t'appelles-tu ?
- Je vois, reprit t-elle calmement en le fixant droit dans les yeux, qui t'a recruté et comment t'appelles-tu ?
La louve n'attaque pas, mais il sait bien, il voit dans ses yeux qu'elle cherche la vérité dans son son regard. Le loup n'esquisse pas un seul mouvement, ne fait à aucun moment mine de partir ou d'hésiter. Si elle ne lâche pas ses yeux, il en fait autant. Il n'a pas peur et, puisqu'elle fait partie du groupe que le loup a rejoint, il se doit de répondre à ses questions autant de fois qu'il en aura les réponses. Du moins est-ce ce qu'il suppose. Mais, au fond, les membres d'un même groupe n'ont-ils pas le droit de posséder aussi leurs propres secrets ? Il l'ignore, peut-être le demandera-t-il a Pandémonium lorsqu'il croisera à nouveau sa route. Il l'a vu il y a deux jours, mais le jeune mâle lui manque déjà. Sa présence était rassurante, sa voix apaisante. Le loup se sentait moins seul à ses côtés, alors qu'il n'a ressenti ça pour aucun autre de ses congénères. Oh, sauf un, peut-être. Ce grand mâle brun qui lui a sauvé la vie alors que le loup l'avait attaqué comme un sauvage. La question de son identité revient jour après jour, rencontre après rencontre. Mais le loup ignore encore quel est ce mot qui le différencie des autres. Il se rappelle de sa rencontre avec une Navnik, il avait apprécié qu'elle le nomme "loup" sans chercher à l’individualiser.
- Loup. Sköll m'a accepté.
Une bonne chose de faite. Maintenant le loup pourra se souvenir de ce mot, et s'en servir comme nom jusqu'à ce qu'il trouve le mot idéal pour se différencier du reste de ses semblables.
Loup ? Véga pencha légèrement la tête vers l'avant. Son nom n'avait rien de commun, si l'on pouvait appeler ça un nom. Cela ressemblait d'avantage à une simple appellation pour le designer qu'à autre chose. Sa queue s'abaissa doucement et ses yeux cessèrent de le scruter avec autant d'intensité. C'était donc Sköll qui l'avait recruté... A moins qu'il ne soit un très bon espion - et il n'avait pas l'air d'en être un -, ce jeune loup ne lui mentait pas. Il avait bel et bien rejoint leur groupe.
Véga détendit peu à peu sa posture. Elle n'aimait pas se montrer hostile, surtout lorsque son vis-à-vis n'avait rien fait de mal. Si il avait menti ou si il avait été agressif, elle n'aurait eu aucun remords à sortir les crocs, mais le Loup répondait à ses questions sans rien faire de tout cela.
Malgré le sentiment de malaise qu'elle éprouvait avec lui, elle commençait à comprendre que quelque chose chez lui n'était pas "normal". Elle n'allait pas avoir l’indiscrétion de le questionner à propos de son passé, mais elle supposait que ce loup sans nom n'avait jamais eu de famille ni même de congénères pour le sociabiliser. Il avait l'air un peu perdu. Il avait l'air de réciter ce qu'on lui avait appris. Savait t-il même comment réagir, au delà de ses instincts ? Il n'avait même pas un véritable nom. Véga allait tacher de l'aider à mieux comprendre ce qui l'entourait. Avant de lui parler de la réunion, la louve voulait prendre le temps de lui expliquer en quoi consistaient les Mercenaires, si ce n'était pas déjà fait.
- Très bien, répondit t-elle plus amicalement, est-ce que Sköll t'a expliqué en quoi consiste le rôle de Mercenaire, Loup ?
La louve semble moins sur le pied de guerre, comme si elle accordait au loup quelque chose, une certaine dose de confiance. Elle accepte de le croire, il le sent. Pourquoi ne pas croire, de toute manière ? Si le loup a parlé, pourquoi ne pas le croire ? Pourquoi ne pas croire quelqu'un qui parle ? Il ne fait aucune remarque, pas même pour lui-même. Elle se détend, c'est tout ce qui compte à ses yeux. Le loup a appris à ne plus attaquer le premier, il est désormais capable de réfléchir, de communiquer dans la mesure du possible avant de devenir agressif. Il a appris à canaliser ses premiers instinct de tueur, de chien de combat.
- Très bien, est-ce que Sköll t'a expliqué en quoi consiste le rôle de Mercenaire, Loup ?
Il acquiesce sans l'ombre d'une hésitation.
- Servir pour manger.
Il se réjouit de constater qu'à mesure du temps, les mots sont plus rapides à venir à son esprit. Il sait de mieux en mieux parler, il sait de mieux en mieux trouver les mots qu'il veut partager avec ses semblables et bientôt, il le croit, il saura communiquer longtemps, et il pourra poser des milliers de questions, partager des milliers de mots avec Pandémonium.
- Servir pour manger. Avait t-il répondu du tac-au-tac.
Il voulait certainement dire chasser; du moins c'est ce qu'elle comprit. La simplicité de sa réponse n'avait rien d'étonnant. Sköll n'était pas du genre très bavard. Qu'il n'ait pas expliqué au Loup en quoi consistait son rôle plus en détails n'était pas surprenant.
- Oui, approuva t-elle, mais ce n'est pas tout. Tu dois d'abord trouver des loups qui ont besoin de ton aide. On appelle ça des clients, et ce qu'ils te demanderont de faire s’appelle un contrat. Ils pourront te demander de chasser pour eux, de les protéger, d'être leur espion ou même de tuer. Son regard était revenu sur le jeune mâle avant qu'elle ne poursuive :
- Mais tu ne dois pas faire ça sans raison ! Un contrat est une sorte d'échange. Il faut toujours que tu fasses quelque chose en échange d'une récompense. Si un client n'a rien à te proposer, refuse-le.
Elle s'attendait maintenant à ce qu'il lui pose des questions. Pour elle, tout cela paraissait simple, mais pour lui, les choses ne seraient peut être pas aussi compréhensibles.
- Oui, mais ce n'est pas tout. Tu dois d'abord trouver des loups qui ont besoin de ton aide. On appelle ça des clients, et ce qu'ils te demanderont de faire s’appelle un contrat. Ils pourront te demander de chasser pour eux, de les protéger, d'être leur espion ou même de tuer. Mais tu ne dois pas faire ça sans raison ! Un contrat est une sorte d'échange. Il faut toujours que tu fasses quelque chose en échange d'une récompense. Si un client n'a rien à te proposer, refuse-le.
Le loup grave les informations dans sa mémoire. Il ne doit pas accepter tous les contrats. Il ne doit pas être au service de tous les clients. Il doit choisir selon les récompenses, il doit réfléchir avant d'agir, faire un choix judicieux et être certain du chemin qu'il emprunte. Alors que la louve semble avoir terminé ses explications, le loup remarque son regard inquisiteur. Elle attend quelque chose de lui, mais il ignore de quoi il s'agit. Il essaie de réfléchir, en vain. Qu'attend-elle ? Que veut-elle ? A-t-il manqué une information ? Une question à laquelle il aurait dû répondre, et dont Véga attend la réponse ? Il danse d'une patte sur l'autre, cherche à comprendre ce qu'il a loupé. Mais la louve ne bouge pas, ne répète pas. Alors, il s'immobilise face à elle et affiche un regard plus déterminé que jamais. Il acquiesce sèchement, les yeux froncés, comme pour lui signifier que oui, il se rappellera.
- Oui.
Oui, il cherchera les loups qui ont besoin de lui. Oui, il demandera toujours quelque chose lorsqu'il donnera ses services. Oui, il choisira selon l'offre, et selon ses besoins du moment. Oui, le loup a compris. Le loup veut se battre, rendre fier celui qui a accepté de devenir son Leader.
Le Loup fut long à répondre. Ce qu'elle venait de lui expliquer n'avait pourtant rien de compliqué, mais si il avait besoin de faire une pause, Véga ne voulait pas le brusquer. A la manière dont il se dandinait d'une patte à l'autre, le jeune Mercenaire semblait en pleine réflexion. Ce qu'elle venait de dire ne lui paraissait peut être pas si clair que ça - après tout elle n'avait rien d'une pédagogue. Elle s'attendait donc à ce qu'il lui pose quelques questions, voire qu'il lui demande de répéter, mais il se contenta d'un seul mot.
- Oui.
La louve hocha la tête. C'était tout ? Le regard vide du Loup s'était métamorphosé en un mélange d'assurance et de détermination. Elle fut assez étonnée par ce soudain changement mais n'en démontra rien, satisfaite d'avoir réussi à être suffisamment explicite. L'essentiel était qu'il ait saisi.
- Très bien, approuva t-elle. Maintenant, il était temps de lui faire part de ce pour quoi elle était venue. Alors écoute-moi bien. Ce soir, les Mercenaires vont se réunir pour discuter d'un nouveau contrat qui nous a été proposé. Koschei nous as donné rendez-vous à la tombée de la nuit dans la prairie de grenats. Tu sauras comment t'y rendre ?
Le loup n'a rien d'un être comme les autres. Il est ignorant et si faible qu'il doit probablement passer souvent pour un sot, un pauvre idiot demeuré. Pourtant, il enregistre toujours les informations qu'il entend, et il est capable de graver dans sa mémoire tout ce qu'on lui demande. Aujourd'hui aussi, il a entendu et gravé ce que Véga lui a appris. A l'avenir, il choisira bien ses différents contrats, et il ne laissera pas passer les occasions d'être rémunéré. Parce qu'il faut survivre avant tout. Plus tard, lorsqu'il sera plus fort et qu'il aura, peut-être, regagné des souvenirs, il se permettra de faire moins de contrats, et peut-être même de quitter les mercenaires. Mais en attendant, il leur devra la vie parce que sans ces missions, il ne serait pas capable de survivre. Seul, un loup n'a aucune chance par les temps qui courent.
- Très bien. Alors écoute-moi bien. Ce soir, les Mercenaires vont se réunir pour discuter d'un nouveau contrat qui nous a été proposé. Koschei nous a donné rendez-vous à la tombée de la nuit dans la prairie de grenats. Tu sauras comment t'y rendre ?
Koschei. Il doit être le Leader. Le loup n'a pas pensé à demander l'identité du chef, lorsqu'il a demandé à Sköll de rejoindre leurs rangs. Tant pis, désormais il sait et c'est là le plus important. La prairie aux grenats, donc. Il réfléchir quelques secondes. C'est là-bas qu'il a combattu cette louve Esobek, peu après son arrivée. C'est aussi là-bas qu'il a retrouvé Tybalt se battant contre deux louves lâche et faibles. Oui, il en est certain. Les pierres luisaient comme des roches à la lueur de la lune. Il sait comment aller sur le lieu du rendez-vous. Pour une fois, le loup va être capable de se diriger seul, de prendre une initiative, de contrôler la situation. Une grimace élargit ses babines, mais il ne sait pas sourire comme n'importe quel autre loup.
- Je connais.
Son manque de vocabulaire le frustre, mais il n'a pas assez confiance en lui pour tenter de faire de longues phrases. Il ne connait pas encore assez bien le langage des siens pour se risquer à l'utiliser trop fréquemment, il ne voudrait pas déclencher une bagarre sanglante pour une simple langue fourchue. Pour l'heure, il se contentera de courtes réponses. Un jour, en revanche, il sera capable de communiquer comme n'importe lequel de ses semblables. Il en est intimement convaincu.
Véga pencha la tête vers l'avant. Il savait comment s'y rendre et c'était une bonne chose. Cela lui éviterait de perdre du temps. Elle n'avait plus qu'a partir à la recherche d'autres Mercenaires. Se redressant, la louve se prépara à repartir.
- Alors à ce soir, fit t-elle tout en lui adressant un sourire, ne sois pas en retard.
Elle acquiesce, satisfaite de la réponse du loup. Elle ajoute qu'il ne devra pas être en retard, et il répond par l'affirmative. Bien sûr qu'il sera à l'heure. Hors que question qu'il arrive en retard alors que le rendez-vous est commandité par le chef en personne. Le loup la remercie d'un signe de tête. Il la regarde s'éloigner une seconde, il réfléchit quelques secondes, puis s'en va à l'opposé de la louve grise.