Il n’y avait pas beaucoup d’étoiles dans le ciel cette nuit-là, ou tout du moins pas autant que d’habitude. De grands nuages rendaient le ciel encore plus sombre qu’il ne l’était déjà, masquant également la demi-Lune, plongeant les terres dans l’obscurité presque totale. Mais les ténèbres ne gênaient pas Koschei, tout du contraire, il s’y faufilait discrètement, son pelage se confondant avec les ombres ; quoiqu’aujourd’hui il ne cherchait pas à se faire discret, voilà plusieurs jours que l’Alpha Esobek, Freux, lui avait promis de le recontacter pour finaliser un contrat entre les Mercenaires et les Esobeks, et la prudence aurait voulu que cette rencontre se fasse loin des yeux des curieux ; autrement dit la nuit et en territoire neutre. Alors Koschei attendait chaque soir à la Fête Foraine ou aux alentours, ce qui n’avait rien de suspect puisque là se trouvait sa tanière.

Cette nuit était apparemment la bonne. Une odeur Esobek apparut alors qu’il était perché sur un tas de gravats, et une silhouette grise s’approcha, méfiante. Peur de lui ou peut de s’être trompé entre tous les loups noirs Solitaires ?

“Vous êtes Koschei ? Le leader des Mercenaires ?”

La deuxième option donc. Il sourit, ravi que les Esobeks aient enfin reprit contact avec lui, et descendit de son promontoire pour rejoindre son invité en contrebas, la dévisageant de ses yeux dorés caractéristiques.

“Lui-même.”

Mais à qui avait-il l’honneur ? Même dans l’obscurité il pouvait deviner le pelage gris de la louve. Freux n’aurait pas envoyé n’importe qui à sa rencontre, elle devait donc être haut gradé et ... oh était-ce là un collier métallique autour de son cou ? Son identité ne faisait donc plus aucun doute.

“Nymeria, je présume, enchanté de faire votre connaissance.”

Il s’assit devant elle, totalement à l’aise et confiant, après tout il n’y avait aucune raison pour qu’elle lui fasse un coup bas et vice-versa. Ce n’était qu’une simple discussion entre alliés potentiels.

La louve grise fut surprise qu’il l’ait reconnu. Étant Bras Droit depuis peu, elle ne devait pas encore être habituée à être connue. Pourtant voilà tout ce que Koschei savait d’elle : qu’elle était Bras Droit ; hors de cela il ne connaissait rien de son parcours, ni d’où elle avait dégoté ce collier intriguant qui attirait l’oeil du loup noir. Elle avait dû voir les hommes de plus près que la plupart des loups. Mais bon, ils n’étaient pas ici pour discuter de leur passé, mais bien de leur futur.

“De même … Venons en au but car je pense que vous vous en doutez après tout … Les Esobek ont besoin des services des Mercenaires.”

Ils avaient besoin de lui, hm ? Tout dépendait de lui, au final. S’il décidait de ne pas sceller l’accord et qu’il trouvait preneur chez les Navniks ... Les Esobeks seraient foutus. Le destin de toutes les Meutes était entre ses pattes, et même s’il ne le montrait pas trop à l’extérieur, tout ce pouvoir le faisait jubiler.

“Nous souhaitons que vous nous aidiez à reprendre la dune de sable, en échange, vous aurez le droit de passage sur cette terre ainsi que quelques proies.”

Moui, intéressant, mais rien de bien original, quelque chose d’autre ?

“De plus, si le contrat dure au delà de la récupération des dunes de sables, nous vous offrirons les ruines dans lesquelles vivent actuellement les Navnik pour que les Mercenaires aient un endroit où se retrouver.”

Koschei sourit légèrement. Avaient-ils lu dans ses pensées ? Voilà plusieurs semaines que l’idée d’un quartier général lui était venu en tête, mais il n’avait pas encore trouvé d’endroit où l’installer ... Les Ruines de la Chapelle, voilà un bel emplacement, symbolique qui plus est, il deviendrait un symbole de leur puissance, une garantie que quand un contrat est accepté, il sera toujours exécuté.

Une terre, c’était d’ailleurs quelque chose que les Navniks auraient été incapables d’offrir, si ce n’est s’ils avaient décidé d’attaquer le camp des Esobeks, mais il fallait être suicidaire pour tenter cela. Non, l’offre des Esobeks était unique, et imbattable de surcroît. Adjugé vendu.

“Pour les proies, nous pouvons définir le nombre à récolter une fois la dune notre. Est-ce que cela vous intéresse ?”

Le sourire de Koschei s’élargit encore plus :

“A dire vrai, je suis infiniment intéressé. Je doute que qui que ce soit puisse être capable de battre cette offre. Considérez-nous engagés.”

Est-ce que tous les Mercenaires le suivraient ? Forcément, aucun ne serait capable de résister ainsi à l’appât du gain, et quand bien même ils tenteraient de refuser sans une très bonne raison, voire pire : de décider d’aider les Navniks ... La porte n’était pas loin.

Il se releva avant de finaliser les derniers détails :

“Je vous fournirai une liste des effectifs totaux lors de notre prochaine rencontre qui, j’ose l’espérer, se tiendra cette fois-ci sur vos terres. Des oreilles traînent parfois pas ici, il serait inopportun que notre stratégie parvienne aux oreilles de nos ennemis.”

Au fur et à mesure de ces paroles il s'était lentement approché de la louve, diminuant le volume de ses paroles à chaque mots jusqu'à ce qu'ils ne devinrent que murmures ; plus par effet théâtral qu'autre chose. Les temps avaient beau être sérieux, il avait tout de même le droit de s'amuser.

Il était surtout très curieux de voir de plus près les terres Esobeks. Jusqu’ici il ne s’était approché que du Bosquet Tortueux, en bordure du territoire. Connaître leurs défenses et leurs entrées serait très utile en cas de ... retournement de situation.