f.8 — a.9 — e.12 Lentement mais surement, je me hisse jusque là, tentant de faire le moins de bruit possible. Mon but est d'attendre patiemment qu'un mouton soit un peu plus loin que les autres pour ensuite l'attaquer et avoir le temps de le ramener. Seulement, je devais choisir un animal pas trop gros, que je puisse le porter, voire le tirer aisément, mais aucun agneau ne peuplait le troupeau. Tant pis, je dois me résigner à en prendre un adulte, espérons seulement que la lutte ne sera pas trop difficile.
Je choisis mon moment et m'élance vers le troupeau, mince ! Je pensais qu'il n'avait que deux chiens, mais en voilà un troisième qui sonne l'alerte ! Il se met à aboyer bruyamment, le berger me repère, les autres chiens aussi. J'ai voulu atteindre un objectif trop élevé pour mon niveau, je suis à présent en difficulté. J'ai deux cartes à jouer : Soit j'affronte mes adversaire, soit je m'enfuis. J'hésite de ma réponse, et alors que je mets trop de temps à réfléchir, ils m'encerclent. Pris au piège entre les trois chiens qui se rapprochent de moi, en dévoilant les dents. Quant à tout le troupeau, il s'est rassemblé et ne fait que bêler. A ce rythme là, tout le village va se précipiter sur moi pour me capturer.
Moi aussi je me montre menaçant; je gonfle mon poitrail, hérisse mon échine et grogne. Je fais un tour sur moi même afin de tous les observer, je repère facilement le plus faible. Ils ne s'attendaient pas à ce que j'attaque aussi facilement, je m'élance avec fureur vers le plus petit, le faisant basculer. Je contourne mon adversaire et espère rapidement m'en aller, mais un des chiens m'attrapent ma patte postérieure droite et me tire en arrière. Je tombe et me voilà sous ses pattes, il s'apprête à plonger ses crocs dans mon cou, il n'est pas si faiblard qu'il en a l'air, mais j'ai déjà battu des molosses bien plus gros, ce n'est pas ce chiot qui va me blesser.
La plaisanterie est finie. Je tambourine son ventre avec mes pattes arrières, puis profite de ce moment d'inattention pour attaquer. J'enfonce mes crocs dans son épaule, et les remue. Ca lui arrache un cri de douleur, et il tombe sur le sol. Il ne va pas prendre trop de temps pour se relever, je me retourne vers les deux autres. Celui que j'ai fait tomber est parti se cacher dans les jambes de son maitre, le dernier m'attends, déterminé. Je bondis sur lui, la rage s'emparant de moi :
Je suis le plus fort ici, les chiens ne m'effraient pas. Il se retrouve à plat ventre sur le sol, je mords son échine férocement, il couine plusieurs fois. Son sang se répand dans ma bouche, pas assez pour le tuer, mais ce qu'il faut pour le faire reculer. Je m'arrête, je ne dois pas trainer davantage, ils savent maintenant à qui ils ont affaire et n'oseront plus m'approcher. Je me retire rapidement pour partir de cet endroit, tant pis pour le gibier, je ne le trouverai pas ici.
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Après une course folle, je dois reprendre mon souffle. Je ralentis mon rythme peu à peu, et me mets à marcher à pas lourds. Je suis bredouille maintenant, et vais encore devoir profiter des efforts des autres, j'aurais dû être vigilant.
Idiot, me dis-je,
ça t'apprendra à viser trop haut. Car oui, je suis devenu faible ! J'ai perdu un peu de mon instinct en restant trop longtemps avec les Hommes, je leur en veux terriblement. Je ne peux pourtant rien faire contre eux à cause de tous leurs chiens de gardes qui rôdent et surtout leur baton-de-métal-qui-tue.
Je remarque pas très loin de moi un petit faisan, pas plus gros qu'un poulet. Peut-être pourrais-je l'attraper celui-ci? Je me rapproche petit à petit, je l'entends piailler et m'en lèche les babines. Je l'aurai cette fois ! A cause de l'excitation, je me précipite vers lui mais j'ai très mal calculé ma trajectoire, il a eut le temps de s'envoler. Le bruit de ses battements d'ailes me fait saliver, et pourtant je ne devrais pas y penser, il ne sera pas pour moi.
Je me dirige vers notre territoire, ce n'est pas mon jour de chance. La prochaine fois, je n'irai plus à proximité du village des Hommes.