Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
Et pourtant, malgré les avertissements plus que clairs de la louve, l'Esobek ne lâchait pas prise. Au contraire il s'accrochait, comme une puce à un pelage. Noire fut prise d'une nouvelle envie furieuse de se gratter, ou plus clairement de s'arracher la peau du dos, mais fut coupée par le mâle qui poursuivit son petit discours.
"Parce que c’est ce que je fais, ce que je me suis promis de faire : d’aider tous ceux qui en ont besoin. Et je ne peux pas te garantir que je pourrai faire s’envoler tes problèmes, mais au moins j’aurai essayé."
La solitaire ne voulut même pas lui jeter un coup d'oeil, et se contenta de fixer le lointain, les yeux dans le vague. Son dos la démangeait. Sa blessure la démangeait. Elle se tortilla maladroitement, mal à l'aise, tout en se forçant à ne pas regarder sa peau ni le guérisseur. Les deux lui faisaient du mal.
"Laisse-moi au moins regarder tes blessures. Tu n’as pas besoin de t’infliger ça, il y a d’autres alternatives beaucoup moins violentes."
Elle gronda, suspectant une arnaque et refusant à la fois la marque de pitié que ce loup lui témoignait. Cela la mettait mal à l'aise, très mal à l'aise. Et pourtant, elle ne bougea pas. Elle resta immobile, figée, permettant donc au guérisseur d'examiner son dos. Mais elle resta muette, ne voulant pas lui donner la permission par la parole. Très tendue, elle attendit que le mâle se rapproche pour lui examiner le dos. Ce serait bien la première fois que quelqu'un observait une de ses blessures. Et celle-là n'était pas très belle à voir, malheureusement.
“Leave the guilt and shame and all the anger and the fear Let's trade it for the will to find a way to persevere”
force 9 | agilité 14 | endurance 17
La louve noire ne fut d’abord pas très sensible aux paroles de Reaven et continua de fixer l’horizon, totalement immobile, en contraste par rapport au mâle qui tenait difficilement en place, si ce n’était pour les spasmes qui la secouaient de temps à autre, sûrement son dos qui la dérangeait encore. Elle se contenta de grogner légèrement lorsqu’il lui fit sa proposition, sans plus de réaction. Si elle n’avait pas voulu qu’il s’approche, elle aurait sûrement reculé, non ? Ou du moins elle l’aurait dit à voix haute ... Pas le temps de se justifier, Reaven était déjà parti, s’approchant doucement de la louve et, voyant qu’elle ne bronchait pas, s’arrêta juste à côté d’elle pour examiner son dos.
Ce n’était pas beau à voir.
Une large plaque recouvrait toute la partie de son dos entre ses deux épaules, formée de plusieurs petites blessures visiblement causées par des crocs. Peu de poils y poussaient encore, la peau était recouverte de croûtes à moitiés grattées et de blessures ouvertes et rouvertes à nouveau, encore, et encore ... Un carnage qui aurait rebuté n’importe qui. Heureusement, il n’y avait pas de pus qui s’écoulait des plaies, ce qui était encore bon signe, mais le risque d’infection restait grand, surtout si elle continuait de se gratter ainsi. Comment pouvait-on s’infliger cela à soi-même ?
Il recula. Il n’y avait pas grand-chose qu’il pouvait faire. Pas ici en tous cas.
“Je pourrais soigner ces plaies, les aider à cicatriser, mais je n’ai rien ici pour accomplir cela.”
Il ne lui avait même fait la proposition de venir à sa tanière, elle aurait directement refusé. Mais voir cette désolation, ce carnage ... Tout ce que ça avait fait, c’était de lui donner encore plus envie de l’aider, quand bien même ce fut difficile.
Il lui offrit un petit sourire triste. Il aurait tant aimé faire tout ce qui était en son pouvoir pour la soigner, mais si elle ne voulait pas de son aide ... que pouvait-il faire de plus ?
Le mâle se rapprocha d'elle, et la solitaire frissonna de dégoût... Et de peur. Elle n'était pas habitée à ce que d'autres loups examinent ses blessures et proposent de les soigner. Noire se renfermait toujours seule dans ses douleurs, elle ne voulait pas d'aide. Si elle en avait eu besoin, elle aurait tout de suite rejoint une meute, ce qui n'était pas le cas. Mais Reaven n'avait pas l'air de comprendre. Il semblait au contraire totalement figé dans ses idées, animé par la seule envie d'aider la femelle noire, même contre son gré. Mais Noire ne comprenait toujours pas pourquoi il s'obstinait tant dans ce but. Elle sentit la brûlure du regard de l'Esobek qui observait ses plaies. Noire n'avait jamais eu l'occasion de les voir, mais elle savait très bien que ce devait être affreux. La douleur qu'elle s'obligeait à s'infliger devait l'être plus encore, malheureusement, mais c'était le seul moyen que Noire avait trouvé pour se punir. Et en même temps, c'était également des sortes d'actes manqués. En se blessant, elle se raccrochait à sa mère, même si elle l'avait fuit pour éviter les coups, et la mort assurée avec un parent comme elle.
"Je pourrais soigner ces plaies, les aider à cicatriser, mais je n’ai rien ici pour accomplir cela."
Noire ne voulu pas croiser son regard, mais elle savait bien qu'il avait pitié d'elle. Et la pitié, c'était bien une chose que la louve détestait. Elle était solitaire, elle pouvait se débrouiller seule, même sans plantes médicinales ou remèdes quelconques. Reaven était bien gentil de lui offrir son aide, mais Noire n'en voulait pas. Elle gardait sa fierté.
"Non. Je peux me débrouiller toute seule. Soigne plutôt les membres de ta meute."
Elle laissa passer quelques instants, le temps que le guérisseur puisse se demande s'il devait la contredire ou non, mais elle ne le laissa pas reprendre la parole et rajouta d'elle-même :
"Je suis solitaire, tu comprends ça ? J'ai pas besoin de ton aide !"
Elle plissa le museau, découvrant ses crocs, puis se leva pour repartir d'où elle venait. Si elle restait encore ici, Reaven insisterait, et elle finirait par se fâcher jusqu'à le blesser. Noire ne se contrôlait pas dans ses moments de colère furieuse. Lorsqu'on l'agaçait, il fallait s'attendre à des représailles. Et la louve n'avait aucune envie de faire du mal à l'Esobek. Il ne voulait que l'aider après tout, même si elle refusait... Mais elle supposait que ses paroles devaient déjà lui faire assez de mal comme ça. Il était donc temps de partir.
"Ne me suis pas, avertit-elle, menaçante, alors qu'elle commençait à s'en aller. Retourne auprès de ta meute, avant de croiser un solitaire plus violent que moi. Tu risques ta peau par ici."
Elle le dévisagea quelques secondes, puis se détourna avec une pointe de regret et quitta ce mâle pour retourner dans sa tanière. Il était guérisseur, il devait souvent vagabonder tout seul à la recherche de plantes ou autres bêtises. Alors Noire le savait... Leurs routes se croiseraient de nouveau.
“Leave the guilt and shame and all the anger and the fear Let's trade it for the will to find a way to persevere”
hrp:
Je te laisse demander l'archivage quand tu as fini de lire :3
force 9 | agilité 14 | endurance 17
Noire restait stoïque, même lorsqu’elle repoussa son offre implicite elle ne bougea pas d’un poil, ne lui adressa pas un regard, lui offrant juste sa voix tendue :
“Non. Je peux me débrouiller toute seule. Soigne plutôt les membres de ta meute.”
Reaven acquiesça en hochant la tête, non pas qu’elle pouvait le voir mais c’était sa manière de se dire à lui-même qu’il était temps de laisser tomber, qu’il n’y avait plus rien à faire. Il n’allait pas essayer de la faire changer d’avis maintenant, il en avait déjà fait assez. Si elle ne voulait pas de lui, il n’était dans l’intérêt de personne qu’il continue à essayer de faire tomber le mur, quand bien même son envie d’aider était aussi forte.
“Je suis solitaire, tu comprends ça ? J'ai pas besoin de ton aide !”
Les crocs de la louve se découvrirent alors qu’elle refusait toujours de tourner la tête. C’est à ce moment qu’il comprit qu’elle aurait vraiment pu lui faire du mal s’il avait insisté, mais il restait convaincu que ce n’était en rien ce que la femelle voulait faire, au fond, elle cherchait juste à se protéger ... mais de qui ? Pas de lui, n’importe qui pourrait voir qu’il était inoffensif ...
Elle se releva et fit quelques pas vers la sortie. Voilà donc comment ça se terminait.
“Ne me suis pas. Retourne auprès de ta meute, avant de croiser un solitaire plus violent que moi. Tu risques ta peau par ici.”
Sa voix se voulait menaçante mais ses yeux exprimaient le regret. Reaven garda le silence, lui adressant un regard compatissant comme seul au revoir, ne la quittant pas des yeux jusqu’à ce qu’elle disparaisse au détour d’un mur. Peut-être qu’un jour ils se reverraient ...
Il resta encore debout un instant, à mentalement faire le point sur tout ce qu’il venait de se passer, puis lâcha un soupir en accordant un dernier regard vers le soleil couchant, reprit ses plantes médicinales et prit la direction opposée à celle de Noire. Il était temps de rentrer à la maison. Seul.