Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
note : ce topic ne sera peut-être pas toujours très actif, mais je le surveillerai toujours alors ne vous embêtez pas à le upper. Si je manque de temps sur une trop longue période ou si je m'en lasse j'irai l'archiver.
Trop d'humains aux abords de ses collines. Ils avaient beau jeu de fertiliser les terres des loups, eux, si c'était pour leur tomber dessus à bras raccourcis à chaque coin de forêt. Zwey en avait eu assez, décidé que trop de gibier tuait le gibier et qu'il gagnerait forcément à aller voir ailleurs s'il y était. De fait, la sentinelle s'échappa après son tour de garde pour aller faire un tour vers la forêt aux pendus, où il espérait avoir plus de chance que ces derniers jours. Au moins, vu la fréquentation des lieux, il ne risquait guère de tomber sur des hommes en armes ce jour-là. Quant à savoir si le gibier serait au rendez-vous, ça... il ne lui restait qu'à prier un peu pour que la fortune l'accompagne.
L'ombre des grands arbres, fussent-ils déplumés par les explosions, fondit sur lui comme un oiseau de proie. A peine Zwey eut-il posé les quatre pattes sous leur couvert qu'il grimaça : il avait en fait perdu l'habitude de ne pas voir le ciel au-dessus de sa tête lorsqu'il chassait. Il aurait pu se sentir oppressé, si la nécessité de se nourrir, toujours prédominante dans ses veines, n'avait pas éclipsé toute autre sorte d'inquiétude. En instant, il se mit en quête d'une piste, échine plongée vers le sol. Il ne lui fallut pas longtemps pour dépasser une paire de pieds bottés qui se balançaient dans le vide contre le tronc d'un arbre. Le jeune loup ne s'arrêta tout d'abord pas, mais après une hésitation, revint sur ses pas pour lever la tête sur le cadavre pendu à l'arbre. C'était un homme recouvert de tissu crème, accroché dans l'arbre par une immense toile de tissu emberlificotée dans les branches. Il pendait au bout de sangle que toutes ses armes n'avaient pas réussi à entamer. La seule pensée de Zwey fut que c'était bien fait pour lui. Le gros avantage de cette forêt était que tous ces cadavres pendus dans les arbres devaient inciter les humains à la prudence, car il était rare d'en rencontrer dans le coin. Zwey renifla pensivement la botte à sa portée : plusieurs fois, il s'était demandé si cette viande pendue aux arbres était consommable. Après tout, il se souvenait avoir mangé plus répugnant dans sa vie. Cela dit, il préférait la viande fraîche tant qu'il avait encore le choix. Et à l'heure actuelle, en témoigna l'odeur de lapin qui lui sauta au museau dès qu'il contourna l'arbre, il y en avait pour tous les goûts.
Zwey se retrouva en plein travail de terrassement en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire. La piste qu'il avait remontée menait tout droit à une garenne, et le loup ne fut pas long à s'évertuer à en agrandir l'entrée. Il faut dire que s'il ne se dépêchait pas, la totalité des lapins aurait eu le temps de s'échapper dans les tunnels. En quelques courtes secondes, l'animal avait donc déblayé un énorme tas de terre des ses pattes puissantes, et passé la gueule dans l'ouverture. Un bruit de cavalcade lui parvint aux oreilles, alors qu'il claquait des crocs dans le noir à la recherche d'une prise. Un instant, il crut devoir y renoncer ; puis ses mâchoires se refermèrent sur un repli de peau sous lequel battait un petit cœur affolé. Le loup resserra sa prise et tira de sa cachette un lapin bien gras et bien au bord de la crise de nerfs, dont il acheva proprement et rapidement les souffrances par un coup de crocs bien placé. Voilà qui suffirait amplement pour un repas du soir. Mais alors que la sentinelle satisfait s'apprêtait à s'éloigner, un grognement sourd s'éleva en provenance du terrier, dressant la fourrure sur sa nuque. Avant qu'il ait pu faire un bond en arrière, une mère blaireau surgissait en criant du trou qu'il venait d'agrandir.
Éberlué, Zwey s'écarta un peu trop tard, recevant un coup des longues griffes fouisseuses de la blairelle dans la manœuvre. La blessure l'élança comme un trait de feu lorsque, ramassé sur lui-même, les oreilles aplaties et les crocs à découvert, il tenait l'animal en respect ; ses méninges tournaient à toute vitesse. Les blaireaux étaient d'ordinaire des animaux discrets et peureux, qui en aucun cas ne choisissaient l'attaque comme première option. Il savait qu'ils partageaient leurs tanières avec les lapins et parfois même des renards, mais ne s'était pas inquiété de leur présence pour cette raison. Sauf que manque de bol, à tous les coups il avait dû tomber sur une femelle allaitante. Qui avait cru ses petits menacés. Vu les griffes de la bête, une retraite prudente aurait été de mise. Mais Zwey n'était ps non plus l'incarnation du bon sens. Un grondement sauvage monta de ses entrailles et il se jeta violemment à la gorge de la blairelle. Des touffes de poils volèrent et du sang gicla tandis que les deux belligérants projetaient tout autour d'eux des mottes entières de terre sèche. A un moment, Zwey crut qu'il aurait le dessous, en sentant ses coussinets déraper sur la pente qu'il avait lui-même creusée en direction du terrier. Mais dans un dernier effort, le loup se redressa et crocheta la femelle à la gorge pour ne plus la lâcher. La lutte dura encore quelques minutes, puis la proie de Zwey expira dans quelques soubresaut. Le loup la relâcha et s'assit pour, langue pendante, reprendre son souffle. Puis, par acquis de conscience plus que par compassion, il s'enfonça à nouveau dans le tunnel, à la recherche des blaireautins. Un souffle de déconvenue lui échappa, projetant de la poussière devant lui, lorsqu'il sentit l'odeur de la mort dans le caveau. Les petits étaient déjà morts. Triste histoire. Mais Zwey n'était pas du genre à s'émouvoir de ce genre d'histoires. Il recula pour s'extraire du terrier et, attrapant le lapin, courut jusqu'à la tanière Esobek dans le but de ramener quelqu'un qui l'aiderait à transporter sa plus grosse proie.
Tu tentes d'attraper un écureuil qui parvient à t'échapper. Te trouvant au pied de l'arbre où il a trouvé refuge, tu t'aperçois soudain qu'il parle ta langue ! Imagine le dialogue que pourraient nouer les deux animaux, tout ceci dans un rp de minimum 400 mots. /!\ Tu n'auras pas le droit d'utiliser le mot "écureuil" dans ton post.
Quelques jours plus tard, Zwey était de retour. Slalomant au petit trot entre les arbres, le jeune loup cherchait de nouvelles pistes de gibier. Il était déjà venu dans le coin quelques lunes auparavant, et connaissait un peu les pistes les plus courantes. Il y avait du daim dans le coin, ainsi que de nombreuses garennes habitées autant par des lapins que par des renards et - il avait pu s'en rendre compte et sa cuisse le lançait encore - des blaireaux. Sans compter les oiseaux qui malheureusement, laissaient bien moins de traces de leur passage. Mais il avait bon espoir de pouvoir se remplir le ventre ce jour-là. C'était sans compter avec la vivacité de son premier visiteur. Zwey fut totalement pris au dépourvu lorsqu'un éclair roux épais comme la traînée d'une balle humaine traversa son champ de vision juste au milieu de sa route, frôlant ses jarrets d'un poil rêche. Un instant, la sentinelle suivit la trace rousse qui s'évaporait dans les fourrés d'un air stupide et hébété. Puis elle émergea d'un coup de la transe dans laquelle cette apparition l'avait plongée pour aboyer son indignation et se jeter à la suite de la proie qui se payait ainsi sa tête. On n'avait pas idée de se jeter ainsi entre les pattes d'un prédateur cinq fois plus gros que soi ! Non mais ! Quel culot. La sentinelle en était profondément insultée. Après plusieurs bonnes minutes de course-poursuite dans les fourrés, Zwey se retrouva forcé de freiner brusquement des quatre pattes pour ne pas percuter violemment un gros chêne qui venait de surgir d'entre les fougères sans aucune compassion pour sa vitesse de pointe du moment. Le loup dérapa dans la poussière et se retrouva assis sur son derrière, museau à tronc avec ce grossier personnage, en songeant au bruit qu'auraient fait ses os en s'écrasant contre ledit pilier de bois. Quelque chose comme crac. En plus lugubre. Le petit-gris qui avait eu l'outrecuidance de le provoquer pour le jeter ainsi contre son ami l'arbre grimpait joyeusement le long du tronc, avec autant d'aisance que pour Zwey de traverser une plaine rigoureusement plate au triple galop. Son indignation grandissant de seconde en seconde, le loup se remit sur ses pattes et aboya rageusement contre l'importun, qui se contenta d'aller se percher sur une haute branche pour se pencher vers lui et le regarder de haut. Ça, c'était fort. Zwey le fixa de ses yeux noisette et retroussa les babines sur ses crocs.
« Eh, toi là ! Descends de là tout de suite ! »
Le loup brun se prit la plus belle claque philosophique de sa vie lorsque le rongeur se pencha au bout de sa branche et répliqua :
« Tu m'prendrais pas un peu pour un con quelque part ? »
Et Zwey d'écarquiller les yeux, gueule ouverte, à se demander s'il n'aurait pas un peu pété les plombs.
« Hin hin. Ça fait moins le malin maintenant pas vrai ? Amateur, va ! »
Non, non, il ne rêvait pas. Un putain de rongeur roux à la queue touffue était bel et bien en train de se foutre de sa gueule. Il en resta sur le cul quelques bonnes secondes, que l'animal haut perché mit à profit pour le siffler copieusement. Puis il reprit ses esprit en secouant la tête et lança un aboiement furieux et sonore. Le rongeur lui lança une insulte en retour. La vapeur redescendit et Zwey se décolla du tronc pour s'asseoir dans la mousse, museau levé vers sa proie hors d'atteinte. Sa langue passa sur ses babines, tandis qu'il se mettait à réfléchir. Après tout, il était le premier à dire que foncer bêtement dans le tas était la technique de chasse la plus stupide du monde. Un rongeur, ça devait pas être bien intelligent après tout - rien que rapport à la taille de son cerveau - alors pourquoi ne pourrait-il pas l'entourlouper pour le pousser à descendre ?
« Ok, je reconnais, t'es plus malin que moi. » Déclara-t-il au petit monstre perché loin au-dessus de lui, fort de cette décision. « Mais je savais pas qu'on pouvait communiquer... » je veux dire, les loups et les proies, quoi. « ... ça m'intrigue. Pas toi ? Viens voir un peu que je te regarde. »
Le petit-gris se pencha un peu plus encore, puis se redressa brusquement et dressa sa queue touffue d'un air insolent. Et d'insolence, Zwey n'en avait jamais entendu autant dans une voix animale, pas même chez les louveteaux de sa meute - qui pourtant n'étaient pas mauvais en la matière :
« Te fatigue pas coco, t'es pas assez jolie minette pour me faire du charme. » Une veine commença à pulser dangereusement sur la tempe du loup brun. C'en était trop. Ses babines se retroussèrent sur ses crocs et il aboya furieusement après le rongeur perché sur sa branche. Fallait pas déconner non plus !
« Je vais bouffer toute ta famille, espèce de rat volant ! - Où est-ce que tu vois des ailes, tas de viande ? T'as une si mauvaise vue que tu me confonds avec un passereau ? - On va voir si tu voles pas quand j'en aurai fini avec toi ! »
Ce petit échange bien sympathique se poursuivit pendant de longues minutes qui virent Zwey revenir à la charge contre le tronc de l'arbre, faire des rondes sous la branche en espérant vainement que son interlocuteur finirait par tomber, poussé par sa propre bêtise ; et évidemment, se casser la voix pour rien. Finalement, il abandonna la partie.
« Je reviendrai sale rat d'égout ! Pelure de chat ! - A d'autres sac à puces ! »
Et tel le guerrier défait qui traîne sa dignité agonisante hors du champ de bataille, Zwey s'en alla d'un trot rageur, la queue battant contre ses flancs, sous les huées du jacquet gris-roux qui jubilait en haut de son perchoir. La défaite contre le gibier allait mal à Zwey, qui passa ses nerfs sur toutes les pauvres brindilles et arbrisseaux qui eurent le malheur de croiser son chemin. Son esprit perfide commença aussitôt à ourdir les plans les plus machiavéliques contre le rongeur qui, il se le promettait - peut-être en vain ceci dit, il nous faut bien l'avouer - ne passerait pas la lune avant de tomber entre ses pattes, et alors... Alors, impuissant et fou de rage, Zwey alla se défouler sur un pauvre merle qui eut le malheur de passer par là. Et après lui avoir copieusement volé dans les plumes, le loup brun furibond quitta les lieux en le mâchonnant avec rage. En voilà un dont pas grand-monde ne voudrait lorsqu'il le ramènerait au camp, tiens.
Force : 52 - Agilité : 68 - Endurance : 67
Code de la fiche by Helya
Destin
Fiche de personnage force: (100/100) agilité: (100/100) endurance: (100/100)
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Âge Personnage :
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Niveau
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Blessure :
Détails blessures :
Pas de Blessure
Détails maladie :
Pas de Symptôme
Bonus Force :
+0
Bonus Agilité :
+0
Bonus Endurance :
+0
Bonus score de chasse :
Score de chasse : +0
Nombre de lancers quotidien :
Nombre de Chasse : +0
Bonus Santé :
Bonus Santé : 0
Bonus/Malus Autres :
Bonus/Malus Autres (autres dés)
Compétence d'élite :
Mer 19 Aoû - 22:49
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Sur le chemin du retour, le loup furibond ressentit le besoin de chasser encore pour dissiper le souvenir désagréable de son humiliation récente. L'écureuil l'avait vraiment mis hors de lui, et en règle générale, Zwey n'aimait pas rester énervé sur une longue période. C'était mauvais pour son karma, pour sa santé et pour sa réputation. Il préférait cacher ces accès de colère soudains autant que possible et avoir l'air le plus placide qu'il en était capable. C'est pourquoi, après avoir dissimulé son merle, Zwey repartit sur une autre piste. Elle était fraîche, parsemée de ronces mâchonnées et couvertes de salive odorante, et il n'eut aucun mal à la suivre. Entre les arbres, il s'avança à pas de loup jusqu'à apercevoir la touffe de poils blancs représentant la queue du daim. Alors il bondit , fonça dans les pattes du cervidé pour le faire trébucher, et prit un grand plaisir à lui sauter à la gorge pour faire un vrai saccage de sa fourrure. Mais un bruit de galopade l'arrêta dans son élan destructeur : le daim n'était pas seul, il y en avait un autre qui s'enfuyait à grandes foulées. La sentinelle bondit au-dessus du cadavre encore geignant et se lança à sa poursuite en silence. Malheureusement, il s'y était pris un peu tard. Dès le début de la poursuite, Zwey se rendit compte qu'il avait trop de retard. Cependant, il ne rendit pas les armes et persévéra, bandant les muscles de ses pattes et accélérant du plus qu'il pouvait. Ses longues courses dans les collines avaient rendu la sentinelle endurante : elle pourchassa sa proie pendant de longues minutes avant de perdre du terrain. Lorsqu'il s'aperçut que le toupet blanc de sa proie s'éloignait irrémédiablement, Zwey cessa de tirer sur ses muscles en feu et ralentit petit à petit, avant de s'arrêter totalement. Il se lécha les babines : il était loin de sa position d'origine. Mais trop agacé pour y prendre garde, il colla le nez au sol, où s'attardait une odeur de garenne fraîche. Intéressé, le loup la remonta prudemment. Moins prudemment, il lança une patte dans le trou du terrier dès qu'il le repérera. A l'intérieur, un couinement se fit entendre : la fourrure du lapin racla contre ses griffes trop épaisses et il sentit le petit corps élastique glisser vers le fond du terrier. Un aboiement furieux fut lancé dans le tunnel en réponse : le jeune loup y plongea brusquement la tête, et manqua de peu les oreilles d'un second lagomorphe d'un bruyant claquement de mâchoires. Pas moyen d'en choper un aujourd'hui décidément... La sentinelle sentait son humeur s'assombrir de nouveau. Mieux valait arrêter les frais, lui souffla la partie raisonnable de son cerveau. Qu'en bon stratège il décida d'écouter, et se retira de la garenne pour essuyer la terre qu'il avait sur le nez. Avec un dernier grognement de dépit, Zwey fit demi-tour et entreprit de retrouver son daim et son merle. Il aurait plus de chance une autre fois. Si tant est qu'aucun écureuil ne montre cette fois le bout de son sale museau roux.
Le bon côté, avec les lapins, c'est qu'ils finissaient toujours par revenir. Ainsi Zwey félicitait-il la nature en cette belle journée d'été, alors que le soleil brillait haut dans le ciel et que les oiseaux chantaient joyeusement entre les feuillages bruissants des grands arbres. Il la félicitait notamment que ces andouilles de lapins soient assez gras et flemmards pour se prélasser devant leur terrier alors que lui, tapis dans les fourrés, ne les quittait pas des yeux. Il faut dire qu'il avait le vent pour lui, et qu'il faisait si bon s'allonger au soleil pour piquer un petit somme. Zwey ne pouvait pas nier que lui-même n'aurait pas dénigré un tel luxe. En attendant, il avait faim. Avec toute la délicatesse du monde, le prédateur surgit des buissons comme un diable hors de sa boîte et fondit sur les lagomorphes alanguis au soleil. La plupart d'entre eux se redressèrent d'un bond, comme électrocutés, et beaucoup s'enfuirent en tous sens. Ce fut la pagaille. Profitant du chaos, Zwey parvint à en attraper un au vol, qui retomba mort entre ses pattes, puis en poursuivit un autre qu'il rattrapa très vite. Lorsque la place se fut vidée de ses occupants, la sentinelle avait deux lapins pour le garde-manger. Pas mal. De quoi contenter leur bras-droit et contrer les accusations portées à l'encontre de sa soi-disant fainéantise - accusation on ne peut plus justifiées mais cela, monsieur n'était pas prêt à l'admettre publiquement.
Content de lui, Zwey alla tout de même fureter dans les buissons aux alentours, histoire de ne pas laisser passer un petit surplus potentiel ; mais les lapins étant de petites bêtes très peureuses, et assez malignes quand elles ne prenaient pas des bains de soleil, il n'en trouva pas un seul. Dommage. Revenant à son point de départ, Zwey s'aperçut néanmoins qu'un corbeau tentait ni vu ni connu de lui voler son repas. Quelque part, rien n'aurait pu lui faire plus plaisir. On l'a déjà dit, Zwey adore les corbeaux. Il s'est fait de leur chasse une spécialité. Il contourna donc précautionneusement l'oiseau très accaparé par les deux petits cadavres, et en un instant lui vola dans les plumes. Sauf qu'à part une bonne dose de duvet sur la langue, le loup ne récupéra pas grand-chose. Le corbeau s'envola avec un croassement indigné, et Zwey resta sur terre à cracher des plumes partout. Dommage.
N'empêche qu'il avait eu deux lapins avec le moins d'efforts possible. Il était content et satisfait, et il pouvait rentrer au camp sans la crainte de se faire tirer les oreilles. Ce qu'il fit de bon coeur après avoir ramassé ses proies. Sa sieste l'attendait.
Malheureusement, les hommes étaient là aussi. Les hommes étaient partout. Zwey décida malgré tout de rester éloigné des zones trop foisonnantes de gibier : il s'estimait assez bon chasseur pour constituer un beau butin, même sur un territoire moins giboyeux que les autres. Peut-être cette considération était-elle un poil prétentieuse ; mais malgré tout, en pesant les chances, la sentinelle estimait qu'elle y gagnerait à faire profil bas auprès des humains... le plus possible. Vrai qu'il aurait du mal à attraper la moindre proie une fois mort. Mort ou attaché à une poubelle jusqu'à la fin de ses jours, d'après ce que Plume et Nymeria avaient rapporté de leur mésaventure. Chouette perspective en tout cas.
Sans compter que la sentinelle avait eu vent de fâcheuses mésaventures qui seraient arrivées à ses congénères récemment... Le loup s'interrompit un instant dans ses pensées, alors qu'il marchait prudemment sur une piste de gibier, pour inspirer longuement à ras du sol et se concentrer sur sa manoeuvre, les pupilles étrécies. Tout près... encore plus près... Parvenu à quelques mètres de sa proie, Zwey bondit en avant et s'autorisa à galoper sans retenue : affolé, le renard chercha à quitter la piste et sa petite silhouette se faufila entre les branches basses, mais le loup le rattrapa en moins d'une minute.
... Récemment, disait-il, il avait lui-même aperçu des pièges laissés çà et là près des zones entretenues par les hommes. Et s'il y avait une chose qui terrifiait Zwey en ce monde, c'était bien ces gueules de métal ouvertes sans protection, prêtes à déchirer la chair de quiconque oserai y poser une patte. Personne ne le pousserait à aller chasser là-bas, eût-on aperçu des troupeaux entiers de vaches stupides et sans défenses vagabondant dans ces vertes praires. ... quoique. Pour des vaches, il ferait peut-être une exception. En fait, il ferait sûrement une exception. Estomac vide n'a pas d'oreilles, et celui de Zwey croyait l'être en permanence. Le loup alla visiter une des garennes dont il était l'habitué et en tira une lapine gestante qu'il acheva d'un coup de crocs. Un mâle lui fila entre les pattes en tapant furieusement le sol devant lui ; Zwey chercha à l'atteindre mais ne put le rattraper. Tant pis.
Alors que le loup s'emparait de sa dernière proie dans le but de l'enterrer avec l'autre, des cris parvinrent à ses oreilles. Lesdites oreilles se rabattirent aussitôt sur son crâne avec agacement : franchement, on ne pouvait plus être tranquille nulle part. Il avait intérêt à filer pendant que les hommes étaient encore loin. C'est qu'il ne tenait pas à les narguer au point de se faire atteindre, non plus. Silencieux, Zwey se fondit dans les buissons et le temps que les chiens arrivent, il n'en resta que son odeur.
Quelques jours plus tard, au pris de trésors de discrétion et d'un bon gros détour à l'ancienne, Zwey réussissait à retourner dans la forêt où les hommes pendaient aux arbres comme de très laides et très grosses lianes. Inutile de dire que son agacement allait croissant devant les bâtons que lui mettaient les hommes dans les roues. S'il avait été plus gros... s'il avait eu un ours sous la patte, si... Enfin, il aurait adoré mettre un peu de pagaille dans leur camp pour leur apprendre la politesse. Repensant - presque avec nostalgie - aux razzias effectuées sur leurs avant-postes par le passé, la sentinelle s'enfonça dans les bois, sur la piste d'un faisan qui s'était - comme lui - un peu trop éloigné des prairies. Pas besoin de courir après cette grosse poule grasse. Zwey était toujours admiratif devant la stupidité des faisans. Celui-ci paniqua rien qu'en percevant son odeur, s'emmêla dans ses propres pattes et termina dans un buisson sur le bord de la piste où le loup brun n'eut qu'à le cueillir. Pratique. Et pas trop fatiguant, ce qui était tout aussi bien. Zwey rangea son butin et partit en quête d'une proie un peu plus consistante.
Deux minutes plus tard, le loup filait à toute allure dans les fourrés, sur les talons d'une biche aux longues pattes qui se faisait un plaisir de le balader dans tous les coins de la forêt. Il avait beau être endurant, il commençait à peiner, et songeait même à abandonner la poursuite lorsque soudain, il vit la biche sauter par-dessus un obstacle invisible. Zwey écarquilla les yeux... et trébucha lamentablement sur une masse brune et molle en plein milieu du passage. Le loup roula dans l'herbe et remit aussitôt d'aplomb, l'échine hérissée... pour constater que ce dans quoi il venait de buter était en fait un gros chien de chasse. Blessé de toute évidence. A l'agonie, même, étant donné l'odeur de sang qui s'élevait de sa fourrure. Zwey s'en approcha prudemment : les flancs de l'animal se soulevaient à peine, et ses yeux ne s'ouvrirent même pas à son approche. Le loup fronça le nez devant l'odeur qui se dégageait du chien : ça empestait l'humain à plein nez. Il hésita un moment, puis se dit que si ses congénères étaient assez difficiles pour refuser de la viande de chien, ça en ferait plus pour lui. Il alla donc, avec un sang-froid digne du plus grand cannibale, achever son compatriote canidé d'un bon coup de mâchoire dans la gorge. La respiration du chien s'éteignit avec la fontaine de son sang que but avidement la poussière.
... Pas tout, mais ça allait être difficile à transporter ce truc. Zwey contempla un moment le cadavre, très contrarié, en se demandant si un esobek accepterait de venir lui donner un coup de main. Ça n'allait pas jeter un froid, si ? Sinon il gardait ça pour lui, mais laisser pourrir la moitié de la carcasse lui aurait vraiment fait mal au coeur. Sans compter qu'un homme pourrait passer et le récupérer. Zwey décida donc de procéder comme d'habitude, et au diable la sensiblerie. Il fit demi-tour et revint sur ses pas ; à mi-chemin, il s'arrêta pour bondir sur un merle qui se baladait non loin de la piste. L'oiseau eut le temps de s'envoler à moitié avant que la sentinelle ne le rattrape et ne rentre au camp, sa dernière proie entre les crocs.
Un grognement au fond de la gorge, Zwey revint sur son terrain de chasse du moment. Le ciel était couvert ce jour-là : les nuages grisâtres, obèses, charriaient des gouttelettes de pluie qui, sans le détremper entièrement, gonflaient sa fourrure d'une humidité désagréable. Il détestait ce temps comme la boue fine qui s'insérait traîtreusement entre ses coussinets. Inutile de dire que chasser pour lui-même n'était pas son occupation préférée, depuis quelque temps. Mais bon, il fallait bien donner le changer, songea l'animal, truffe collée au sol humide, en relevant la trace d'un lapin. Il s'avança à pas de loup jusqu'à la touffe d'herbe verte qui abritait le petit lagomorphe, et interrompit brutalement le repas de ce dernier en lui sautant proprement dessus. Le lapin détala et parcourut quelques mètres avant que Zwey ne le rattrape pour lui briser proprement la nuque.
Un peu plus tard, la sentinelle chassait le renard. Il en leva deux à la sortie de son terrier et le poursuivit longtemps entre les arbres. Lorsque tous trois, traînées roux flamme et roux noisette à la suite les unes des autres, surgirent hors des bois, le mâle bifurqua brutalement à gauche dans l'espoir de semer son poursuivant. Manque de chance pour lui, Zwey était agile. Ses pattes dérapèrent dans un nuage de poussière, mais il parvint à reprendre son équilibre et à bondir sur sa proie. Ses dents se refermèrent sur le dos du renard, qui glapit de douleur et tenta de le mordre au cou. Les deux carnivores luttèrent un instant, jusqu'à ce que Zwey ne jette le plus petit contre l'arbre le plus proche. Un instant plus tard, il l'achevait et le goupil cessait de remuer. Les flancs encore brûlant de ses morsures, Zwey s'élança à la poursuite de la femelle, dont les yeux luisaient douloureusement dans la pénombre des fourrés. Mais bien qu'elle n'ait pu s'enfuir sans son compagnon, elle était déjà loin de lui, et dès lors que son demi-tour fut fait le loup ne pouvait plus la rattraper. Il abandonna en quelques foulées.
Revenu près de son butin, Zwey fondit sur un corbeau qui s'attaquait déjà à la dépouille. Ses crocs claquèrent dans le vide, une fois, deux fois, avant de trouver les plumes rêches du volatile. Dans un croassement de découragement, l'oiseau fondit entre ses mâchoires. Zwey fut presque étonné de la rapidité avec laquelle il trouvait sa pitance ce jour-là. Peut-être le ciel avait-il décidé de le prendre en pitié. Après une seconde de réflexion, il ramassa tout ce petit monde, résigné à devoir faire des aller-retours, et rentra au camp sans plus se poser de questions.