La beauté n'est pas dans les choses, elle est dans nos yeux.

Yû marchait depuis déjà un long moment, elle avait parcourue quelques kilomètres depuis ce matin, la louve noire cherchait quelque chose à se mettre sous les crocs, se remplir l'estomac. Elle n'avait pas mangé depuis quelques jours et un grognement sourd s'échappait répétitivement de son ventre, d'ailleurs elle avait maigrit la jeune noiraude, elle savait chasser mais les proies manquaient. Et elle s'était donc rabattue vers cette forêt en espérant dénicher de quoi se nourrir, elle se demandait d'ailleurs comment cela se passait en meute, il n'y avait qu'à attendre que des chasseurs rapportent de quoi manger et c'était bon, plus qu'à se servir. La belle vie, et si elle rejoignait une meute tiens ? Ah, non, trop de responsabilités pour elle. Et puis c'était la misère d'avoir des ordres, surtout ; trop de loups. Elle péterait un câble à force de côtoyer ces toutous de meute. Surtout, elle n'était pas habituée à faire partie d'une meute et ne s'habituerait certainement jamais.

Yû s'arrêta un instant, un soupire franchissant ses lèvres, elle en avait marre de marcher sans trouver de proie valable. Et trouver, c'était une chose mais attraper en était une autre ! Ah, vivement qu'une des meutes ai besoin d'elle pour une chose quelconque, à elle la bouffe facile ! Enfin pour le moment si elle ne voulait pas mourir de faim elle devait impérativement se bouger l'arrière-train, elle repartit donc la noiraude, aux aguets, filant à travers la sombre forêt, évitant ces fichues toiles d'araignées. Décidément, les territoires neutres n'étaient pas de tout repos, mais dés qu'on rôdait un peu trop sur les territoires de meute, on se faisait presque agresser par des loups, disons que par ces temps, piquer de la nourriture chez une meute serait peut-être une mauvaise idée, Yû n'avait aucune envie qu'une bande de cinq loups enragés lui tombe dessus la bave aux crocs.

Chasser, chasser. Quel flemme, si elle n'avait pas si faim, si elle s'écoutait, notre belle noiraude serait couchée sur une pierre à pioncer tranquillement. Oui, c'est une flemmarde et elle assume complètement, en fait elle assume tout mais là ce qu'elle assume pas c'est sa faim. S'enfonçant silencieusement dans la forêt, Yû émit un léger grognement d'agacement, la patience n'était pas une de ses qualités disons.

La beauté n'est pas dans les choses, elle est dans nos yeux.

Soudainement, la louve noire se stoppa et se baissa légèrement. Elle avait enfin repérée une proie, un sanglier de taille moyenne, assez gros pour lui remplir l'estomac et assez petit pour le capturer, elle en avait l'eau à  la bouche, il paraissait si appétissant. Et surtout il ne semblait se douter de rien, fouillant tranquillement le sol à la recherche de quoi se nourrir lui aussi. Yû se prépara, observant avec une grande attention le gigot sur patte et... elle s'élança vivement, bondissant par-dessus un buisson, retombant dans les feuilles mortes, galopant droit sur le sanglier qui se mit à pousser des cris aigus, apeuré par le démon noir qui lui fonçait dessus. Crocs découverts et grognant comme une bête enragée, elle ne regardait que ce sanglier qui prenait la fuite en hurlant, galopant droit devant lui, évitant les arbres et bondissant par-dessus les troncs. Yû accéléra la cadence, prenant appui sur un tronc pour tenter de se propulser, ses muscles se contractant à chaque poussées.

Elle devait l'avoir, c'était important, elle devait manger ! Yû accélérant encore sans quitter des yeux sa belle proie devant elle. La louve noire bondit sur le sanglier mais... il disparut ! Il disparut ?! Non, il venait de chuter d'une plateforme, hurlant encore ses insupportables cris, roulant dans les feuilles, disparaissant beaucoup plus bas. Est-ce qu'il était mort ? La chute était raide, il avait roulé avant de tomber dans un endroit assez rocailleux, ses cris ne se faisaient plus entendre à travers la forêt. Yû plissa un peu ses yeux, au bord de la plateforme de terre, fixant plus bas d'un air irrité, énervé que sa proie ai ainsi disparue sous ses yeux. Soudainement, des bruits se firent entendre et elle aperçut le sanglier sortir de l'endroit rocailleux, ensanglanté, partant en trottant faiblement, s'éloignant dans la forêt. Superbe, elle avait lamentablement raté sa chasse.

La mercenaire poussa un hurlement de frustration avant de faire demi-tour, toujours animée par l'envie de manger, son estomac criant famine. Elle marcha de nouveau à travers les bois, regardant avec une grande attention autour d'elle, elle ne devait rien rater. Ses pas lui firent arriver au niveau d'étranges machines, certainement des engins de bipèdes. Yû en renifla un, l'observant avec une naïveté enfantine, le touchant avec son nez, elle en avait déjà vu voler dans le ciel assombrit. Il y a quelques mois, et là il y en avait à moitié détruits, c'était bizarre de près. Enfin, la noire ne s'attarda pas plus longtemps, animée de son ultime quête : manger.

La beauté n'est pas dans les choses, elle est dans nos yeux.

Yû avait, en quelques sortes, élu domicile dans le Cimetière. Pourquoi ? Parce qu'elle se sentait bien là-bas, loin de tout, personne ne venait l'embêter et elle pouvait prendre du repos seul, en paix. Et la louve noire aimait la solitude plus que tout, elle détestait qu'on lui parle trop, une rencontre de temps en temps ça allait mais au bout d'un moment raz le bol ! Donc, la louve noire était partit au petit matin de sa petite planque, partant en direction de la forêt aux pendus pour faire sa chasse et ramener ensuite tout cela au Cimetière, un lapin suffirait amplement, ou plusieurs souris. De quoi faire des réserves, même s'il fallait faire des allers-retours cela ne la dérangeait pas plus que ça, après tout, qu'avait-elle d'autres à faire d'autre de ses journées ?

Sentant le sol, évitant de poser ses pattes dans la boue -parce qu'il y avait des endroits vachement boueux- pour ne pas glisser lamentablement et rater sa proie, la louve observait avec une grande attention autour d'elle, se faisant discrète et furtive. Mais disons que cela était devenu une habitude pour elle, elle était légère de nature avec sa petite taille et son poids plume elle faisait vraiment peu de bruits, passait partout et craquait rarement des bouts de bois. Enfin, nous ne sommes pas ici pour parler de cela mais de la chasse de la louve noire.

La beauté n'est pas dans les choses, elle est dans nos yeux.

Ce fut seulement au bout d'une dizaine de minutes que Yû finit par débusquer un gros lièvre broutant de l'herbe aux côtés d'un arbre tombé au tronc pourri, il ne semblait pas s'être aperçu de la présent de la louve, broutant tranquillement, remplissant son estomac. Il était déjà de bel taille et la noiraude s'en léchait les babines d'avance, certaine de son coup. Après tout, tuer un animal de ce genre était plus qu'un jeu de louveteau, il mourrait en deux temps trois mouvements mais, avec eux il fallait être rapide, bien plus qu'avec les autres cervidés. Planquée derrière son buisson épineux, Yû observa sa cible en s'aplatissant d'avantage, plaquant ses oreilles sur sa nuque. Brusquement, elle fit un bond par-dessus le buisson, évitant de s'écorcher les pattes dessus, elle atterrit directement sur le lièvre qui n'eut même pas le temps d'esquisser un mouvement.

Un seul coup de patte dans la nuque fut suffisant pour mettre fin aux jours du petit rongeur brun, étendu entre les petites pattes griffues de la louve noire qui se pencha pour prendre le cou mou de l'animal entre ses crocs, elle allait l'embarquer jusqu'au Cimetière puis revenir chercher un autre rongeur à emmener dans sa réserve. Sous-terre. Ainsi, aucun autres loups ne viendraient piquer sa nourriture, surtout pas au Cimetière, qui allait là-bas ? Enfin, peut-être d'autres loups errants. Elle se chargerait simplement de les faire partir à coup de crocs et de griffes, ce n'était pas sorcier. Emportant donc son butin du matin, Yû fila.