Depuis quelques temps, mon moral est au plus bas. Il faut dire, j'ai beau tenter de chasser, il n'y a rien à faire. Je reste cloîtré là, à ce niveau de louveteau insignifiant, sans pouvoir progresser comme je le voudrais. J'aimerais pourtant tellement rejoindre les hauts grader ! Pouvoir rivaliser avec les colosses qui foulent quotidiennement les mêmes terres que moi ! Je gronde de frustration, et je continue de errer entre les arbres sans même prendre soin de savoir où je vais. Après tout, si je tombe sur un quelconque ennemi, ce ne sera qu'un entraînement supplémentaire. Peu importe que je gagne ou que je perde. A l'heure actuelle, le principal pour moi est de me bouger, de me dépasser, de continuer à progresser même à cette vitesse minable. Si la progression se refuse à moi, je n'abandonne pas pour autant et je continue de chasser, d'échouer et de recommencer encore. Frustré, mais pas moins déterminé. Et je n'en serais que plus fier lorsque j'arriverais enfin à faire mes preuves au sein de ma meute natale. Je soupire, je pense à ma mère qui semble si peu en forme, ces derniers temps. Elle ne sort plus de la tanière, elle ne chasse plus, ne combats plus. A tel point qu'elle s'est tant affaiblie, que je me pense physiquement supérieur à elle. Pas que je sois macho, mais j'ai un léger pincement au coeur à la regarder ainsi, inerte et sans vie, dans l'ombre de notre tanière. Pour autant, je ne parviens pas à trouver ce qui lui manque. Son fils est rentré, n'est-ce pas tout ce dont elle avait besoin ? Je gronde à nouveau et je tape rageusement dans une pierre, lorsque j'entends un bruit sourd sur ma gauche. Intrigué, je redresse immédiatement la tête vers son origine et j'écoute, attentif. Un danger ? Un ennemi ? Ou un simple Sekmet ? Je reste parfaitement immobile et j'attends d'en entendre davantage. De longues secondes. Plusieurs minutes. Mais rien. Rien que le silence et la solitude. Alors, curieux et confiant, je m'avance vers l'origine du bruit et j'observe, aux aguets, surveillant le moindre mouvement ou le moindre son suspect que je pourrais capter. Mais c'est un effluve qui m'étreint doucement. Un effluve que je connais bien : celui de mes semblables. En revanche, ce n'est pas l'odeur de ma meute. Alors, si je peux tirer un nouveau combat, un nouvel enseignement de cette rencontre, je fonce. Sans hésiter, je débarque dans la prairie avec assurance, le poil hérissé et la queue haute, prêt à en découvre. Mais, en son centre, ce n'est qu'une louvarde. Plus jeune que moi, elle est aussi plus petite, plus frêle, plus ... inocente. Je penche légèrement la tête sur le côté. Comment a-t-elle pu tomber dans un pièg e si bas de gamme ? Je m'approche d'elle, parfaitement immobilée face contre terre, et j'esquisse lentement un sourire moqueur.

- On dirait que petite Princesse a perdu ses bodyguards ?

Et tandis que je m'amuse de sa situation plus qu'embarassante, je me permets deux choses. La première, observer le filet qui la maintient captive. La façon dont il est fait, la forme et la masse approximative des poids qui la clouent au sol, mais aussi l'épaisseur de chaque maillon, et la largeur de ces derniers. Hm. Bien. La seconde chose, l'observer elle. A travers le filet, je peux deviner un corps fin, jeune, mais svelte et plein de vie. Il semblerait qu'elle serait bien le genre de louve qui m'attirerait physiquement : tout mon contraire. Jusqu'à la couleur de ses yeux, d'un bleu envoûtant, quand les miens sont d'un vers pénétrant. Je m'assieds, un tantinet provocateur, et je la regarde qui se débat avec hargne contre cet objet inanimé, en vain.