Un élan ? Est-ce que c'est sérieux ? J'aimerais pouvoir en douter, mais je crois que c'est un peu tard pour me poser des questions. L'animal m'a déjà percuté de plein fouet, me faisant voltiger dans les airs jusqu'à m'écraser entre les branches d'un bosquet, le souffle coupé. Je souffre terriblement, mais il est hors de question que je laisse passer une proie si alléchante. Oui, c'est un pari fou, mais je suis prête à le tenter. Je me relève non sans peine et me cambre sur mes pattes. Déjà, l'élan fait demi-tour et s'apprête à me foncer dessus à nouveau. Je suis une chasseuse, moi, je ne sais me battre ... À moins que ... Trop tard, ce temps de réflexion a déjà permis à l'élan de revenir à la charge et il me percute encore une fois. Je chancelle et tombe à terre. Mon crâne me fait souffrir, ma joue - là où ses pattes m'ont percuté - me lance douloureusement. Il est ... Irraisonnable de vouloir continuer. Pourtant, je vais le faire. Dans un élan (La blague.) de courage, je me remets sur mes pattes.

Le cervidé s'en va déjà prendre de la vitesse plus loin. Je balaie furtivement le paysage du regard. Des arbres aux troncs noueux ... Oui, bien sûr ! En voilà un plan, dingue certes ... Mais un plan tout de même. Je me campe bien droite où je suis, attendant que l'élan revienne à la charge. Il s'élance au galop et au dernier moment, je m'écarte d'un large bond. L'élan dérape dans la poussière et cette fois-ci, c'est lui qui s'écrase au sol. Non peu fière de moi, je réitère l'expérience. Le cervidé se relève, plus furieux que jamais et fonce sur moi avec une incroyable vitesse. Je m'écarte et il percute un arbuste calciné qu'il déracine avec une immense violence. Lorsqu'il parvient à se relever, je remarque les traces sanguinolentes que l'animal arbore désormais. Je sais qu'il ne se laissera pas avoir une autre fois. C'est pourquoi je lui grogne dessus et m'enfuie à toutes jambes. L'élan me suit, évidemment. Je le sens prendre de la vitesse, ses sabots frappant le sol avec force. J’accélère. Puis prends quelques virages serrés, histoire de bien le faire déraper dans la poussière. Et, comme je m'y attendais, il continue de me suivre.

Près d'une zone où les arbustes forment une vraie roncière, je me dis que c'est là que tout va se terminer. Je serais assez rapide pour me décaler, je le sais. Reste à savoir si l'animal en fera de même. J'y suis presque. Je pique un sprint et l'élan m'imite. Plus que quelques longueurs ... À un petit mètre du début de la zone sens dessus dessous, je m'écarte brusquement et fais demi-tour. L'élan n'a pas le temps de réagir. Il fonce tête baissée dans les arbustes noueux. J'entends ses pattes déchirer les arbustes, son corps perdre pied, ses flancs s'écraser dans les racines noueuses. Je me stoppe, hors d'haleine, et m'approche lentement. L'odeur du sang, de la mort, s'élève dans l'air crépusculaire. Je m'avance entre les ronces prudemment et saisis le corps de l'élan. C'est ... Une belle prise. Je plante fermement mes crocs dans son flanc et commence à le traîner vers le camp.