Souffle acide du vent, larmes brulantes du ciel. Le monde ne ressemble plus aux paysages d'autrefois. Les cataclysmes ont frappé, des colonnes de flammes et de fumées se sont élevées sur l'horizon. La guerre. La guerre des hommes. Et nous, les loups n'avons eu d'autres choix que de fuir. Nombreux furent nos congénères emportés. Nous traversâmes les plaines cabossées, les forêts de cendres, poursuivis par la faim, traqués par la mort.
Notre salut, nous le devions malheureusement à ceux qui avaient provoqué notre malheur.
C'est toujours dans les pires moments que l'on se rend compte de ce que l'on a vraiment, de ce que l'on avait. C'est dans ces instants que les plus bonnes choses qui nous entourent prennent réellement un sens. Mais c'est aussi lorsque l'on parvient à une situation aussi critique que l'on prend conscience qu'il est trop tard pour faire marche arrière, et bien souvent cela est source de frustrations et souffrances, car lorsque la machine est engagée, il est bien trop tard, on est déjà perdu, et toutes ces bonnes choses sont déjà loin. C'est pour cette raison qu'il faut profiter de ce qui nous est donné d'apprécier autant qu'on le peut et tant qu'on le peut.
Petit à petit, l'étroite mâchoire qui menaçait les Sekmets se resserrait. Le poids que les Hordiens exerçaient sur eux était de plus en plus pénible à supporter, la vie au camp était devenue une torture pour certains, en particulier pour ceux qui avaient un égaux comme celui du bras droit.
L'extérieur était redevenu habitable depuis peu, mais pas ce que l'on pourrait dire appréciable. Le ciel était gris et morose. Il ne cessait de pleuvoir, comme si les Anciens pleuraient le chagrin de ces pauvres loups asservis, ce qui rendait toujours le sol boueux. La terre était dénuée de tous végétaux vivants, aucune touche de vert n'était perceptible. Dans les forêts, les carcasses de bois mort et épaves de métal s'entassaient là où il y avait autrefois d'immenses arbres verdoyants. Le moral de tous était au plus bas.
Refusant d'aller chasser depuis quelques jours, un loup méditait. Mais ses pensées n'étaient guère mieux que son environnement chaotique : il n'y avait dans son esprit place que pour la misère, la tristesse, et le désir de vengeance. Un soupçon de nostalgie était également noyé à travers toute l'amertume de son coeur de pierre. Oui, le moral de Sageeth était actuellement au plus bas, et rien ni personne ne semblait enclin à y remédier. Tout son monde s'écroulait au fur et à mesure que sa meute se fanait. Il n'avait connu que ça, après tout. Il avait été accepté dans ce groupe, et y avait tracé son chemin. Du vagabond orphelin et fragile, il était devenu un bras droit puissant, mais cela avait pris fin avec l'arrivée de Skull. Il sentait en lui un grand vide, le même qu'il avait ressenti lors de la perte de ses parents. Il était seul, à nouveau. Sa pire crainte était arrivée. Parfois, il ressentait comme l'appel de la liberté. Une partie de son coeur était restée solitaire, même après toutes ces années. Et il envisageait de reprendre son histoire là où elle s'était terminée.
Et pourtant, il restait tout de même des choses qui le rattachaient à ce camp. Ou plutôt, des loups. Bien qu'il se soit promis de ne plus jamais s'attacher à quiconque, certaines personnes avaient pourtant réussi à traverser sa carapace d'acier forgé pour se trouver une place au plus profond de son coeur. Atom. Aussi loin que le Colosse pouvait s'en rappeler, la femelle avait toujours été là pour lui, et ne l'avait jamais laissé tomber. Elle était pour lui comme une sœur, la sœur qu'il aurait aimé avoir. C'est pourquoi il considérait aussi ses fils comme étant de la famille. Il avait fait le serment de les protéger contre tout danger qu'ils pourraient croiser, et donnerait sa vie pour l'un d'eux. Et puis, il y avait aussi Nott. Il avait sauvé la vie de la petite loupiotte et l'avait ensuite adoptée. Elle était pour lui comme une seconde chance, et s'était promis de l'empêcher de devenir comme lui, une bête assoiffée de sang et ivre de violence. C'était sa paix au milieu de la tempête, sa seule vraie famille, même si non scellée par les liens du sang.
Et enfin, le loup de charbon s'était finalement allongé sur le sol, en attendant que le temps passe, et surtout qu'un nouveau plan tordu ne bourgeonne dans son esprit.
Un louveteau a trois choses en tête, de manière permanente dans une journée : Nourriture, Repos, Jeux. La nourriture, nous l'obtenons de maman. Régulièrement, elle nous appelle par un petit glapissement, nous indiquant que la sortie de la tanière est sûre et que nous pouvons la rejoindre. Elle régurgite de la nourriture pour nous, lorsqu'elle ne nous ramène pas des morceaux fraîchement arrachés à leur hôte. C'est délicieux, de découvrir le goût de la viande, l'odeur du sang et de sentir l'excitation monter lorsqu'elle nous apprend qui a droit à quelle partie, et comment on doit défendre notre part lors d'un repas. Le repos, c'est ce qui occupe une grande partie du temps que nous passons seuls, dans la tanière. Lorsque maman s'en va, nous dormons. Lorsqu'elle revient, nous dormons. C'est une période calme, chaude, silencieuse et réconfortante. Elle nous permet de gagner de l'énergie pour la partie la plus intéressante de la journée : le jeu. Là, c'est la débandade. Mais attention ! Pas de jeux si maman n'est pas là. Il serait trop dangereux de japper et de couiner alors que personne n'est là pour nous protéger, dans l'hypothèse où un prédateur traînerait dans les parages. Mais maman a beaucoup, énormément même, de responsabilités. Alors lorsqu'elle n'est pas là, des nourrices tournent autour de la tanière pour s'assure que nous dormons, que nous sommes sages et en sécurité. C'est leur travail, de veiller sur nous pendant que maman remplit ses obligations, quelque part ailleurs. Parfois, depuis quelques temps, papa vient nous voir. Nous savons, désormais. Nous savons enfin. J'ai attendu si longtemps ce jour, que je tremblais d'excitation lorsque j'ai entendu papa m'appeler par mon nom, et faire pareil avec mes soeurs et mon frère. C'était probablement le plus beau jour de ma courte existence, et même si je ne comprends pas encore toute l'ampleur de son identité par rapport aux Sekmets et à la Horde, je sais que je suivrais papa au bout du monde. Evidemment, je suivrais aussi maman. Me reste à espérer qu'ils s’uniront pour de bon, bientôt.
En attendant, j'ai réussi à fausser compagnie à ma fratrie et aux nourrices Sekmets. Un louveteau d'un mois est si petit qu'on ne le voit pas passer, et encore moins une petite boule de poils brune qui longe des mottes de terre humide. Il a suffit de quelques secondes pour que je disparaisse de leur vue, et elles n'y ont vu que du feu. Ce n'est pas la première fois que je fais ça. Dans les tunnels, il y a quelques temps, je filais souvent entre les pattes des nourrices. Mais ce ne sont jamais les mêmes qui nous surveillent, alors elles se font avoir à tous les coups. Dans les galeries, les promenades se soldaient par des rencontres avec d'autres Sekmets, ou parfois avec des rats et autres rongeurs sous-terrains. C'était amusant et je n'avais presque jamais peur. J'étais courageux, téméraire. Ici en revanche, à la surface, c'est une autre histoire. La terreur noue mon estomac, parce qu'à chaque pas je pourrais tomber sur un prédateur sanguinaire ou sur un adversaire bien trop fort pour moi. Alors je suis encore plus méfiant, même si ma curiosité naturelle bat à plate couture la peur de l'inconnu. Aujourd'hui, j'essaie de découvrir de nouvelles odeurs. Je ne suis pas sorti depuis longtemps, et j'ai envie d'apprendre de nouvelles choses, de retenir des effluves pour savoir les analyser plus tard et connaître la réaction exacte que je dois avoir face à tel ou tel animal. Lorsque je remarque les senteurs de l'un des miens, j'hésite d'abord un peu. Il pourrait être un ennemi de mon père, je sais qu'ils sont nombreux, chez les Sekmets. J'ignore encore pour quelle raison ils haïssent mon père, mais je l'apprendrais et le comprendrais bien assez tôt. C'est papa et maman qui me l'ont dit. Alors, prudemment, je m'avance en me camouflant derrière les mottes de terre qui font presque ma taille. Je suis l'odeur jusqu'à trouver une piste assez fraîche, et j'identifie son propriétaire rapidement, parce que je la connais déjà. Ravi de tomber sur une nouvelle occasion de jouer, je me tapis au sol et je le guette, allongé un peu plus loin. Les secondes s'étirent, il semble s'ennuyer à mourir. Moi, je ne pourrais pas rester couché ainsi à ne rien faire. Brusquement, je bondis en avant et je saute sur son échine, l'attaquant par la gauche. Je lâche des grognements qui se veulent annonciateurs d'un grand danger, et je commence à mordre son encolure de toute mes forces. Puis il s'ébroue, et je roule sur le côté en me battant avec une touffe de son pelage d'ébène. Je m'immobilise enfin, et je lance un grand sourire à mon oncle.
[Désolée, c'est nul... Je n'arrive pas à me mettre dans la peau de Sageeth en ce moment, et je n'arrive pas non plus à faire des RP "joyeux".]
❝LA PAIX N'EST QU'ILLUSION❞
Petit Adriel deviendra grand~ F:100 | A:90 | E:94
Alors qu'il restait couché dans l'herbe et prisonnier de ses pensées, quelque chose vint le percuter de plein fouet à sa gauche. Il fut bousculé par la surprise, mais la puissance du coup ne le fit pas tomber à la renverse. Très vite, la chose s'était glissée dans son encolure et c'est ainsi qu'il découvrit l'odeur ainsi que le petit corps d'Adriel, fils d'Atom. Pourquoi était-il étonné au final ? Il avait toujours su que de tous les petits de sa presque sœur, Adriel était le plus énergique et le plus fougueux. Il était d'une curiosité à couper le souffle ce qui, il ne pouvait le nier, avait quelques côtés angoissants. Mais bon, pouvons-nous vraiment retenir un louveteau curieux dans une tanière ? Et est-ce seulement ce que nous devons faire ? Sageeth partait du principe qu'il ne fallait pas cacher le monde aux petits, que le plus tôt ils seraient dans le bain, meilleurs leurs chances de survie en seraient. Il pouvait parfois se montrer dur avec les louveteaux ou encore ses apprentis, cela restait pour leur bien. Et les laisser dans l'ignorance et la peur serait réellement leur nuire. C'est en tout cas ce qu'il avait fait pour Nott qui, ces derniers temps, l'accompagnait bien souvent. Il était devenu rare de voir le Colosse Hurlant sans avoir une boule de poils noirs entre les pattes, surtout avec la menace de la Horde sur leurs tête. Il ne laissait que rarement sa garde à quiconque., même si cette fois elle était avec l'une des nourrices car il n'avait vraiment pas l'humeur à s'occuper d'elle, et de toute façon il avait besoin de réfléchir. Mais bien sûr, l'arrivée de son neveu était venue tout chambouler.
Le Bras Droit d'Empress se leva et s'ébroua en soupirant, afin de faire lâcher le petit qui jouait maintenant avec une touffe issue de sa propre fourrure. Et puis, le loup d'ébène s'était assis, le regardant faire et immédiatement toute sa mauvaise humeur s'était envolée. Il avait beau chercher, cette boule d'énergie était capable -de par ses pitreries et son innocence- de lui remonter le moral dans n'importe quelle circonstance. Et ce n'était pas uniquement dû à ses grands yeux ronds qui ne demandaient qu'à jouer.
Adriel s'était enfin arrêté, et lui avait fait face avec un grand sourire. A cela, le loup d'ébène avait simplement ri, baissant les oreilles sur son crane dans la détente. Après tout, ce n'était pas forcément facile avec les louveteaux d'être un énorme loup noir, avec des yeux rouges et des cicatrices : mieux valait ne pas avoir en prime une attitude pouvant sembler menaçante, et ce même s'il connaissait très bien les petits !
- Dis Sageeth, pourquoi tu fais rien ?
Ceci eut le don de le faire rire. C'était rare, surtout en ce moment. Mais c'était surtout la situation qui fit rire le Colosse : quelqu'un d'autre aurait eu le malheur de dire ceci, Sageeth lui aurait probablement fondu dessus en moins de deux, crocs et griffes en première ligne. Mais encore une fois il s'agissait d'Atom junior, et toute la naïveté de ses propos avaient pour lui l'effet contraire.
- Je ne fais pas rien Adriel, je pense, commença-t-il nostalgique.
Mais après, avec beaucoup de malice, le loup de charbon avait plongé son regard dans celui du louveteau, rempli d'amusement face à la situation. Et avec un clin d’œil complice, il lui avait adressé de nouveaux mots de sa voix grave.
- C'est bien de penser, certaines fois. Comme quand tu t'apprêtes à échapper à la surveillance des nourrices. Je suppose que tu t'es encore enfuit ?
A cela, le loup finit par s'allonger juste en face d'Adriel afin d'être à sa hauteur. Il n'allait pas le dénoncer, c'était certain. De toute façon, ce n'était pas son rôle. Et puis il était entre de bonnes pattes, ce n'est pas comme s'il courrait un danger à ce moment là. En revanche, il veillerait personnellement à le ramener auprès de ses frères -non sans sermonner sa nourrice au passage- avant le retour de Dame la Chimère. Mais il savait cette dernière ne rentrerait pas avant un petit moment, ce qui leur laissait un bon moment pour s'amuser. N'a-t-on jamais dit que Sageeth avait un grand instinct paternel ?
Mon oncle s'assied, et je dois avouer que je le trouve terriblement lent, comme s'il ne voyait pas l'utilité de se dépêcher, pour pouvoir profiter de touuutes les choses merveilleuses qui emplissent ce monde. Je le regarde faire en silence, j'attends qu'il réponde à ma question existentielle. Parce que non, je ne comprends pas comment il peut rester là, immobile, couché dans l'herbe à ne rien faire, alors que tant de splendeurs attendent encore d'être découvertes. Les adultes ont cet aspect étrange, comme s'ils n'étaient plus capables de voir à quel point le monde est grand, et beau, et surtout à quel point le temps nous manque pour le découvrir chaque jour. Mais, contre toute attente, il se met à rire plutôt qu'à répondre à ma question. Rire ? En quoi est-ce drôle ? C'est ennuyeux, de ne rien faire ! Je penche légèrement la tête sur le côté, intrigué par une telle réaction. Et puis, il daigne enfin m'expliquer. Il pense. A quoi ? A son prochain repas ? Aux rêves qu'il pourrait faire lors de sa prochaine sieste ? Ou a son prochain compagnon de jeu ? Ne peut-il pas simplement découvrir le monde, et réfléchir plus tard, lorsque ces moments seront venus ? Non, penser, c'est ennuyeux.
Vous savez, je crois que tonton Sageeth entend mes pensées, parfois. Ces moments où il plonge son regard loin dans le mien, si profondément que je ne peux plus le lâcher des yeux. Il reste là plusieurs secondes, comme s'il sondait mon esprit, et juste après, sans que je me sois vraiment aperçu de sa présence dans ma tête, il répond à mes questions. Je ne les lui pose pourtant pas, mais il parle, comme si j'avais demandé quelque chose. Il fait pareil, cette fois. Il plonge son regard dans le mien, ancre ses orbes aux miennes et je ne peux plus le lâcher. Ca dure si peu de temps que je ne m'en rends pas compte. Et l'espace d'un instant, il fouille dans ma tête pour savoir ce que j'aimerais comprendre.
- - C'est bien de penser, certaines fois. Comme quand tu t'apprêtes à échapper à la surveillance des nourrices. Je suppose que tu t'es encore enfui ?
Mais parfois, j'aimerais que tonton Sageeth ne lise pas dans mes pensées. Comme les fois où je sais avoir fait une bétise, et qu'il devine dans ma tête l'origine de ce qui va me valoir une réprimande en rentrant. Là, je baisse mes oreilles contre mon crâne, pour lui montrer que je suis désolé. Il sait que c'est un demi mensonge. Il sait que je n'aime pas être disputé, et que je suis conscient de mon erreur lorsque je file entre les pattes des nourrices. Mais il sait aussi que même si je pleurnicherais lorsque je me ferais gronder, ça ne m'empêchera pas de recommencer plus tard. Je suis comme ça, le monde est trop grand pour que je le laisse se faire découvrir par d'autres louveteaux plus téméraires que moi.
Mais par chance, Sageeth n'est jamais celui qui me gronde. Il est notre oncle, après tout. Pas notre nourrice, ni notre parent. Lui, il n'a que les bons côtés des louveteaux. Il joue avec nous, nous apprend des choses, et nous adorons passer du temps avec lui. Moi, en tout cas. Alors, je le regarde qui s'allonge et je souffle de soulagement. Puis, presque aussitôt, ma queue frétille et je trépigne d'impatience. J'ai déjà oublié ma faute, et je suis prêt à jouer.
- Dis, Sageeth, tu sais la nouvelle ? Papa est venu ! Il est venu nous voir, enfin ! Et tu sais, il nous aime ! Il nous l'a dit ! Il a même dit qu'il était absent pour nous protéger, et que c'était terminé ! Et tu sais, il va venir nous voir plus souvent, maintenant ! Et tu sais, en plus, il est trop grand et trop fort ! Et tu sais, un jour, papa et maman, ils partirons avec nous, et on sera juste ensemble ! Enfin ça, ils me l'ont pas dit, mais je suis sûr que ça arrivera ! Hein, Sageeth ? Et tu viendra avec nous, hein ? Dis ? Hein ?
Je me laisse rouler entre ses pattes antérieures, et je joue machinalement du bout des pattes, avec le pelage de son poitrail. Je mordille quelques touffes, tire dessus, les relâche. Parce que tonton Sageeth, c'est le meilleur compagnon de jeu qui existe !
Petite boule d'énergie était déjà de retour entre ses pattes, sa faute oubliée, envolée. Comme si jamais commise. Et bien qu'il en soit ainsi. De toute façon, à quoi bon radoter toujours les mêmes choses ? Ce n'était là en aucun cas le rôle de Sageeth, et il savait tout de même que Adriel se rendait compte de son geste. Ce qu'il ne connaissait pas en revanche, c'était les dangers auxquels il s'exposait. Mais pour apprendre cela, il n'y avait pour le bras droit que l'expérience : les mots n'étaient que du vent tant que le petit n'avait pas encore été confronté à une réelle menace. Et lorsque cela se produirait, Sageeth serait là pour le protéger, il l'avait promis à Atom, promis à sa sœur.
De sa voix innocente, le modèle réduit de la générale commença à poser des questions, toutes sortes de questions. Son père était venu au camp. Adriel avait toujours adoré son père, même sans le connaître. Il semblait complètement fasciné par cet être qui marquait un vide dans sa vie. Mais ce n'était pas le cas de Sageeth. Son père, il le connaissait très bien. Isha. Le Hordien. Et il était venu dans leur camp. L'idée ne ravit pas Sageeth, mais il devait s'y faire. C'était le père des petits d'Atom, c'était le compagnon de la louve blanche. Cela avait été vraiment difficile au début pour le loup de charbon, que de voir partir celle qu'il aimait tant avec celui qu'il détestait autant qu'il appréciait. Mais il était grand et fort, il était protecteur. Il ne lui ferait pas de mal, et il avait fini par accepter l'idée. De toute façon, avait-il eu le choix ? Pas vraiment. Mais s'il y avait une chose de laquelle Sageeth ne doutait pas, c'était de l'intégrité du mâle auprès de sa famille.
- Et tu sais, un jour, papa et maman, ils partirons avec nous, et on sera juste ensemble ! Enfin ça, ils me l'ont pas dit, mais je suis sûr que ça arrivera ! Hein, Sageeth ? Et tu viendra avec nous, hein ? Dis ? Hein ?
A ces dernières paroles, le coeur du loup Sekmet vola en éclats. Il s'en doutait, lui aussi. Il savait que ce jour arriverait, et qu'Atom partirait. Il savait qu'elle suivrait son propre chemin. Elle n'était plus chez elle ici, il avait ce sentiment depuis des mois maintenant. Et maintenant qu'elle avait une famille, ce sentiment n'allait qu'en s'accentuant, ce n'était plus qu'une question de temps. Son cauchemar allait se réaliser, sa soeur lui avait été volée, il allait se retrouver seul. Mais lorsque ce jour arriverait, un choix s'imposerait. Un choix qui définirait le reste de sa vie, un choix qui allait être dur. Il devrait choisir entre Atom et les Sekmets. Une partie de son coeur avait beau appartenir à la louve, l'autre partie était toujours tournée vers les Sekmets. Sa meute. Il avait beau être un parfait connard avec un grand nombre de loups, il restait quelqu'un de digne, loyal et fidèle. Il avait fait beaucoup d'efforts pour appartenir à cette meute et Empress lui avait fait confiance pour en faire son bras droit. Il n'était pas un traître, il éprouvait trop de respect envers elle pour l'abandonner. Pas maintenant. Quoi qu'il en soit, une chose était sûre : il ne nuirait en aucun cas à Atom ou à sa famille, c'était une certitude.
Immédiatement après cette fusillade de questions, petite boule de poils était de retour dans sa fourrure, comme si n'attendant aucune réponse. Ce qui devait être le cas d'ailleurs. Après tout, ces petites choses étaient si innocentes, si naïves. Si ignorantes. Le jeu demeurait leur principal soucis. Le loup d'ébène laissa le petit s'amuser avec ses pattes sans émettre la moindre résistance. Ce dernier lui agrippa de nouvelles touffes de poils et les lui tira. Il fallait bien admettre qu'il avait de la force pour son âge ! Mais enfin, l'adulte se sentit tout de même obligé de répondre à l'une de ses questions au moins. Cela lui tenait particulièrement à coeur.
- Je ne sais pas, Adriel. Mais tâches simplement de te rappeler que quoi qu'il arrive, ou quoi qu'il ait l'air d'arriver, je serais toujours avec vous. Les apparences pourront vous dire le contraire, mais je ne laisserai rien vous arriver. Je t'en fais la promesse.
Sa voix sérieuse devait faire comprendre l'importance capitale de cette phrase au louveteau. Même s'il ne comprendrait pas sur le moment, alors au moment venu ces paroles devraient refaire surface dans l'esprit du petit, et l'aider à comprendre certaines choses. Comme l'absence de son oncle dans sa meute, ou le fait qu'il soit chez ceux qui les considèrent comme des traîtres, qui voudraient les éliminer. Mais il avait besoin de leur confiance, de leur entière confiance. arce que si même eux commençaient à douter de lui, il n'avait plus personne.
Et au bout de quelques minutes de calme, le loup noir bondit sur le petit, le bousculant du museau et le faisant trébucher avec ses pattes. Le moment de jeu qu'il semblait tant attendre débutait et Sageeth comptait bien en profiter.