Je ne suis pas seule cette fois-ci. L'enchevêtrement de métros aurait pu m'effrayer, mais je sais que cet endroit est le plus sûr de regorger de trésors. Bon, le porc que j'ai attrapé la dernière fois était peut-être un coup de chance, d'autant plus qu'il résidait d'un vol à un homme. Mais j'ai senti les odeurs de proie. J'aurais chassé, si l'entraînement ne m'avait pas pris tout le temps. L'occasion avait juste été trop tentante. Je soupire. Quel monde pouilleux. Les Lames de Foudres, encore, ça passait. C'est vrai, c'est pas comme si c'était la toute première fois que des merdes nous tombaient sur la tête. Mais la famine pesant sur la meute ... Je ne m'y attendais absolument pas. Je ne peux pas revenir en arrière, et ce n'est que nous que nous pouvons blâmer. Les chasseurs. Oh, et puis zut, quelqu'un m'explique pourquoi c'est Minuit, une espionne, qui m'accompagne ? ... Bon, je m'invente peut-être des problèmes. Nous sommes là, toutes les deux, à déboucher dans le métro. Ce n'est pas du tout la même parcelle du quai que la dernière fois, et j'en suis bien heureuse. Je jette un regard à la louve. Les paroles sont un plus. On sait ce qu'on a à faire.

Nous aurions eu l'air fines si nous étions rentrées bredouilles, tiens. Minuit me suit donc, de quais en quais, de voies en voies. Bientôt, je sens une odeur de gibier forte. Un regard à l'autre louve me renvoie mes propres excitations retenues. Je me faufile vers la direction, le plafond s'abaissant dans un tunnel et l'odeur exhalant de là. Une taupe, j'en étais sûre. Réfugiée au fond de ce tunnel, un cul-de-sac, s'enfonçant dans la roche. La taupe doit être terrée au fond de son nid, ce tunnel, effrayée.

YAN'KA - « Je rentre dedans, j'le fais sortir et tu l'attrapes ? »

Je conçois qu'une question nécessite une réponse. Mais bon. Je me faufile déjà dans le tunnel. Avec un peu de chance, il y en aura plusieurs ... enfin, j'ai le droit de rêver ...

C'est une belle réussite que nous avons là. Minuit me fait signe qu'elle est d'accord, je m'engouffre dans la tanière et aussitôt le rongeur en sort. Il ne faut pas beaucoup de temps à l'autre louve pour le tuer, et nous pouvons ajouter une proie de plus au garde-manger Esobek. La louve m'interroge du regard. Ses yeux croisent les miens, comme s'ils me demandaient "On continue ?" et comme si les miens lui répondaient "Oui.". Non. En vrai j'ai juste quitté la tanière ridiculement, essayant de m'extirper durement, et puis en la regardant et j'ai acquiescé. Mais il faut avouer que la vision poétique était mieux. M'enfin, nous ne faisons que chasser. Je repasse devant, poussant le rongeur sur le bas côté, en lieu sûr, et nous reprenons notre chemin.

Nous repartons donc. Ma taupe est, je l'espère, en sûreté, mais je préfère ne pas trop m'éloigner. Il nous faut moins d'une minute pour repérer une autre odeur. J'imagine que Minuit l'a repéré aussi, je ne lui pose pas la question. Je fais halte, reniflant l'air. Un pigeon, j'en suis sûre. Je fais quelque pas et au même moment, je le vois se poser. Quelle chance, vraiment. Je jette encore une fois un regard à l'autre louve, me re-concentre sur l'oiseau et me tapis au sol. Fais quelques pas, ventre collé au béton ...
 

Encore une fois, il ne faut pas longtemps à l'autre louve pour comprendre mon idée. Bientôt, elle s'approche, en tête l'idée de faire s'envoler l'oiseau vers moi. Je contourne doucement le pigeon tandis que Minuit se positionne de l'autre côté. Il ne nous faut pas longtemps pour mettre en place l'embuscade. Minuit le fait s'envoler et le pigeon décolle dans un cri de surprise et un large battement d'ailes. Au même instant, je prends appui sur mes pattes arrières et bondis avec puissance. Je saisis le cou de l'oiseau qui se débat violemment avant que je retombe au sol en lui brisant la nuque. Non peu fière, je vais le placer avec la taupe. Puis je tourne les talons et repars dans l'autre sens pour rejoindre Minuit.