HRP:

Là, dans la pénombre d'un soir d'hiver, la clarté de la lune brille dans la blancheur de la neige. Pas de ciel grisâtre ce soir, uniquement l'obscurité réconfortante d'un ciel étoilé, guidées toutes par une Lune éclatante. Je la fixe, cette lune. Elle a toujours été là pour moi, me guidant dans les chemins les plus tortueux, me frayant une route sur les sentiers les plus escarpés. Je souris légèrement, parce qu'elle est la plus fidèle, la plus loyale des compagnes que j'aie pu avoir. Mais une odeur me turlupine, m'arrachant à la contemplation de l'astre lunaire. Qui, en ce monde détruit, ose troubler le peu d'apaisement qui comble si rarement mon esprit torturé ? Je reconnais l'odeur de la Horde, mais il me faut encore du temps et de la distance avant d'identifier l'individu avec précision. L'un de nos nouveaux petits camarades. Comme les autres avant lui, il apprendra à me haïr puis à me respecter. Il est nouveau, il est frêle et faible. Et je grogne doucement en le rejoignant, de mon grondement supérieur qui défie quiconque d'essayer de me faire face. Il me fixe de son regard étrange, presque fou allié. Je montre les dents, immobile, les oreilles et la queue portées bien hautes.

- Ami hordien ! Je suis bien content de trouver une silhouette familière parmi tous ces crétins d'Esobek.

Je m'approche un peu plus, son air suffisant ne me plait guère et je ne supporte pas que l'on m'appelle ainsi. Cependant je patiente, encore un peu, avant d'annoncer la couleur.

- Que dirais tu d'une chasse, j'ai une grande soif de sang, lupin ou non d'ailleurs.

Et au dernier moment, je bondis à sa rencontre pour le renverser violemment dans la neige froide. Campé sur mes quatre puissantes pattes, je le toise de toute ma hauteur et je le fixe dans les yeux, les crocs à l'air libre.

- Refroidis tes hormones, gamin. Je n'suis pas ton ami. Tu es là parce que tu veux tuer, comme chacun de tes compagnons de meute. Mais nous ne sommes pas des amis. Tu as beaucoup de choses à apprendre.

Et ce n'est certainement pas en une soirée qu'il apprendra tout cela. Ce n'est pas maintenant qu'il comprendra que dans la Horde, ça reste chacun pour soit. Que dans la Horde, seuls les désirs de vengeance et de sang font office de point commun, de point d'ancrage. Ce n'est pas tout de suite qu'il saura dans quel pétrin il s'est véritablement fourré en suivant sa nouvelle Leader. Je grogne doucement, lui laissant tout le loisir de se relever.

- Chassons, puisque tu veux chasser. Tuons, puisque tu veux tuer. Et montres-moi ce à quoi tu nous servira. Ou meurs.

Je lâche le dernier mot en murmure, mon regard saphir planté dans le sien comme une lame tranchante, m'assurant que la menace portera plus loin que le pavillon de ses oreilles poilues. Il va rapidement apprendre à me connaître, et savoir à qui il doit le respect ou non. J'affiche un air légèrement agacé. Foutus nouveaux.

HRP:

Pendant un instant, le mâle en face de moi semble en proie à des tremblements inexpliqués. Aurais-je été un peu trop brusque ? Avec tout ce que je me suis entraîné, il m'arrive de ne pas contrôler ma force. Non pas que je m'excuserais si je lui avais fais mal, mais il faudrait que j'apprenne à mesurer la puissance de mes attaques, parce qu'avec les membres de la Horde c'est un risque supplémentaire de les blesser inutilement, et nous n'avons certainement pas besoin de cicatrices supplémentaires par les temps qui courent. Je l'observe qui me fixe, en silence, et un orage semble poindre le bout de son museau entre nous deux. Tant mieux, si déjà il ne m'apprécie pas. Je ne suis pas là pour être adulé de tous, je suis là pour faire respecter les règles et apprendre aux faibles à devenir forts. Rien de plus. Je ne suis là que pour servir les desseins de mon Alpha, et ce n'est pas le caractère jovial de ses nouvelles recrues qui me rendra plus amical que j'ai pu l'être dans ma vie. Je suis né pour tuer, j'ai été dressé pour abattre et ne pas éprouver la pitié. Je ne l'éprouve pas plus aujourd'hui que je ne l'éprouvais hier. Et ça ne changera certainement pas demain, sous prétexte que je fais bobo à mes petits camarades. Dans la Horde, nous ne tolérons que les plus forts.

Le faible mâle me fait face, le regard sévère, en colère. Il gronde et me montre ses dents, je hausse les sourcils, intrigué par ce qu'il pourrait bien tenter, puis je les fronce et je plisse les yeux pour lui montrer qu'il n'a pas intérêt à tester mes limites. Elles sont infranchissables pour un loup dans son genre, et il le comprendra bien vite, comme tous les autres avant lui. Il gronde férocement, comme s'il était prêt à m'égorger. Mais j'ai trop confiance en moi pour me laisser impressionner par ses mimiques de louveteau capricieux. Je reste là, parfaitement immobile, prêt cependant à en démordre s'il veut chercher les ennuis. Son regard me fait bien comprendre qu'il n'a pas du tout apprécié mes salutations, et peut-être qu'en soit elles n'étaient pas si justifiées que ça. Mais, la Horde est-elle connue pour ses loups affectueux ? Non. On entend surtout parler de prédateurs violents et agressifs, et je ne fais pas exception à cette "règle". Je suis un Hordien, et le meilleur atout des miens. Je le sais, et si je ne m'en vante pas, je ne fais cependant pas semblant de ne pas être au courant.

Il s'approche de moi pour me pousser violemment, et comme je m'attendais plus à une attaque de face, je me fais avoir et perds l'équilibre. Je manque de peu de percuter l'arbre derrière moi, mais me redresse immédiatement. Et plutôt que de lancer un conflit, je roule des yeux, exaspéré par son attitude de louvard immature, et je le laisse lancer la traque.

- La nuit progresse, allons-y. Nous verrons bien qui se fera tuer en premier.

Je pars à sa suite sans hésiter, laissant derrière nous nos présentations quelque peu houleuses. Qu'importe ce qui est passé. Seul m'importe ce qui m'attend. A mon tour, je lève la truffe au ciel à la recherche d'une odeur familière, de la présence d'une proie quelconque.

HRP:

Bien vite mon élégant ami déniche une piste. Le voilà qui part à une allure effrénée, comme s'il venait de trouver le chemin du Saint Graal. Je retrousse légèrement mes babines en une grimace agacée, mais je le suis sans un mot. Qu'il me montre un peu ce qu'il sait fait, je veux voir à quoi je peux m'attendre de lui. Il semble sûr de son coup, il m'a l'ait de connaître son boulot, de savoir ce qu'il fait. Aussi, lorsqu'il bondit dans une cachette tout près de notre proie et qu'il fait craquer une branche, je ne peux m'empêcher de lever les yeux aux ciel. Qui m'a fichu un imbécile pareil !? Je gronde doucement, gardant le plus fort de ma voix caché dans mes entrailles pour ne pas affoler davantage la bête. Après tout, peut-être a-t-il encore une chance, s'il joue bien. Mais non. Malgré une tentative presque honorable, mon jeune compatriote se vautre royalement dans la neige boueuse, et je regarde s'éloigner l'animal sans guère plus de compassion. Quel idiot.

Je le rejoins d'un pas mesuré, lourd, menaçant. Je plante vivement mes crocs dans son échine et le relève, puis gronde. Qu'il ose faire à nouveau le malin, tiens !

- Debout, sombre crétin ! Comment t'as pu la laisser filer !?

Sans attendre de réponse, je pars à la suite de notre proie. L'arrière-train blessé, elle ne sera pas partie bien loin et se sera probablement arrêté rapidement pour lécher ses plaies. Je suis les effluves sucrées du sang frais pendant quelques centaines de mètres, et c'est dans les sous-bois que je retrouve la biche blessée. Je m'immobile, mes oreilles guettent une seconde la position du loup derrière moi, puis je pars en chasse dans un bon agile. Je me rue sur la créature encore bien vivante, et je capture sa gorge aussi rapidement que lui l'aura laissée filer avant moi. Je des grognements nerveux, je m'agrippe furieusement à sa veine vitale jusqu'à la sentir battre contre mes crocs, et même lorsque ma proie s'étale au sol après de nombreuses et brutales ruades, je ne la lâche pas encore. J'attends plusieurs secondes, voire même quelques minutes, qu'elle s’étouffe et meurt entre mes mâchoires puissamment liées. Cela fait, je me redresse pour toiser le jeune Hordien et j'affiche un regard dur.

- Approches, et vois le travail d'un véritable loup.

La bête morte à mes pattes, semble figée dans un monde bien loin du notre. Ses yeux révulsés, sa tête renversée en arrière me paraissent arrivés d'un autre âge. Depuis combien de temps n'avais-je pas chassé ? Bien longtemps, je crois. Je soupire tandis que le jeune mâle s'approche de moi. Quel est son nom, déjà ? Me l'a-t-il dit ? Je ne me souviens pas. C'est que je ne porte jamais grande attention aux nouveaux venus, jusqu'à ce qu'ils prouvent leur valeur et me montrent qu'ils sont dignes de mon intérêt. Je ne suis pas n'importe quel loup, après tout. Je n'ai aucun intérêt à donner mon attention à de jeunes mâles imbus de leur entité qui se croient supérieurs au monde entier. Le jeune regarde la proie morte.

- C'est bien, bientôt tu sauras tuer un animal sans que personne ne mâche le travail.

Son corps collé au mien, je suis désagréablement surpris qu'il ose se montrer si entreprenant et si ouvertement insolent. Dans un sec mouvement d'épaule, je le bouscule et je montre les dents dans le même temps. Je tourne ma lourde tête brune vers lui et le fixe de mes yeux azur, pour lui signifier clairement qu'il fait une grave erreur en testant mes limites. Pourtant je ne fais rien de plus, je reste immobile de longues secondes devant le cadavre. Il va nous falloir transporter le corps jusqu'à la réserve des nôtres. Et la bête n'est pas un simple lapin, c'est une biche adulte qui était en pleine forme et dont les muscles saillent encore sous sa peau tendue par la rigidité cadavérique qui se développe déjà dans tout son organisme sans vie. Je grogne.

- J'aurais pas b'soin d'terminer ton travail si tu savais faire ton boulot correctement.

Il s'en est déjà allé, je n'sais pas s'il a entendu et a préféré ignoré ma tirade, ou s'il est seulement sourd comme un pot. Laissant là le cadavre pour le moment, je suis mon jeune acolyte d'un pas assuré, analysant toutes ses tactiques les unes après les autres pour m'enquérir de ce qui lui manque pour ne pas louper toutes les parties de chasse auxquelles il devra participer à l'avenir pour nourrir les membres de sa nouvelle "meute". Pendant longtemps, il ne trouve rien. Mais il ne perd pas courage et continue ardemment de chercher. Un point de gagné, c'est mieux que rien.

EDIT:

Le jeune mâle cherche avec détermination, malgré les pistes qu'il ne déniche pas. Pour ma part, en passant derrière lui je parviens à dénicher une odeur. Elle n'est pas nette et je pense que l'animal s'est montré particulièrement discret, mais elle est là tout de même et c'est notre seule chance de ramener de quoi nourrir notre meute. Je soupire en suivant le jeune Hordien dans différents sentiers, il n'a visiblement pas trouvé la même piste que moi. Pourtant je ne dis rien et le suit.

Et puisqu'il décide en silence de laisser tomber, je me résigne à faire part de mon rapport à notre Alpha. J'ignore où elle a déniché cet incapable, mais il a beaucoup de choses à apprendre et encore plus de progrès à faire. Je soupire doucement, lorsqu'un gros lièvre s'extirpe brusquement d'un buisson juste à côté de nous. Le jeune mâle est deux mètres devant, aussi n'a-t-il pas le temps de planter ses crocs dans la proie nouvellement arrivée, mais moi j'ai le réflexe de dresser haut mes oreilles.

Dans un bond rapide et puissant je pars à la poursuite de la bête poilue sans m'assurer que le jeune mâle me suit, et je cours à toute allure entre les arbres en passant par-dessus différents obstacles pour ne pas perdre de vue le lapin. Il me faut quelques minutes pour parvenir à le rattraper, et ce n'est qu'après avoir effectués de nombreux sauts agiles et virages brutaux, que j'arrive enfin à raser l'animal de mes crocs meurtriers. Il me faut encore quelques longues secondes avant de planter mes dents dans sa cuisse tendre.

L'animal lâche un cri de surprise et de douleur, mais sans m'affoler je resserre ma prise et freine lentement ma course sans lâcher ma proie qui se débat furieusement entre mes mâchoires tueuses. Je trotte finalement, ma tête dodelinant de tous côtés au rythme des secousses provoquées par les tentatives de fuite de ma cible, mais il n'y a plus rien à faire, je la tiens fermement. Ses postérieures prisonnières de mes dents lui rendent la fuite impossible et je fini par l'achever dans une secousse brutale.

Je rejoins alors rapidement mon comparse qui a déjà dans la gueule la nuque de la biche et la traîne derrière lui. Le regard franc, l'attitude fier du combattant victorieux, je marche à ses côtés en portant ma propre proie et nous repartons vers les terres de notre meute pour remplir les réserves des Hordiens. Ce fut une belle partie de chasse malgré l'incompétence de ce nouveau venu, et j'espère qu'il saura apprendre de ses erreurs et que cette défaite le poussera à s'entraîner davantage à l'avenir.

HRP: