Un long hurlement retentit dans les sous-bois, parce que c'est l'heure pour la Horde de se remuer enfin. Partout sur les terres, la guerre se prépare. Chaque loup s'entraîne dur, dans un commun accord, pour devenir un fort et vaillant combattant. Si les terres sont a peu près calmes et que rares sont les combats qui résonnent ces derniers temps, chacun sait que partout les loups veillent à entretenir et développer leurs capacités individuelles. Des plans se réfléchissent, des alliances se forment, et bientôt la guerre éclatera. En tant que meilleur maillon de la Horde, je me suis donné comme objectif d'entraîner les plus faibles jusqu'à la dernière seconde. Et s'ils ne rattraperont certainement pas le retard qu'ils ont, ils mangeront par contre mes entraînements intensifs tant qu'ils tiendront sur leurs pattes. Aujourd'hui, c'est notre jeune femelle que j'attends. Celle en qui je n'ai pas la moindre confiance, mais que je formerais cependant sans aucune différence.

Bientôt, la jeune louve montre le bout de son museau. Elle n'a pas gagné grand depuis la dernière fois que je l'ai croisée. Affligeant, vraiment. Je la regarde d'un oeil désapprobateur, mais ne dis mot. Je détaille ses muscles, son corps, ses pattes et leur longueur. Elle est loin d'avoir le corps d'une combattante, tout juste pourrait-elle se contenter de chasser pour la Horde, afin de nourrir les vrais combattants. Si seulement nous avions la possibilité de choisir des rangs pour tout un chacun, bien sûr. Mais ce n'est pas le cas. Parce que quand les véritables batailles hurleront dans les collines et que les vallées résonneront des cris de guerre, nous n'aurons plus le temps de se demander qui soit chasser et qui doit combattre. Nous devrons tous nous jeter corps et âme dans les conflits quels qu'ils soient, pour espérer ramener au camp un maximum des nôtres. Oui, certains mourront. D'autres pas. Et ce sont ceux-là, les survivants, qui devront vivre plus tard avec la mort de leurs frères d'armes dans l'esprit. Moi je n'ai plus rien à perdre en ce monde. Qu'en est-il de ma jeune compagne ?

- Bonjour.

Je constate un mieux. La première fois que je l'ai prise en charge, elle n'a même pas pris la peine de me saluer. Elle était insolente et arrogante. Aujourd'hui elle sait que son intérêt est de me suivre et d'écouter ce que j'ai à lui enseigner. Je la salut d'un simple signe de tête.

- Je veux que tu m'abatte.

Evidemment, je sais qu'elle n'en aura pas les capacités. Première étape, lui faire prendre conscience de ses lacunes. Ensuite seulement, l'entraînement débutera.

Elle hésite. Longtemps. Bien trop longtemps. Elle me fixe avec intensité, elle ne sait pas comment elle est censée agir. Elle commence à me tourner autour, mais ses attentes ne comblent pas les miennes. Je monde les dents en la toisant.

- Tu sais très bien que je n'y arriverais pas, que si j'essaie, c'est moi qui le regretterais.

Je claque des mâchoires dans sa direction avec un petit bond en avant pour la mettre en garde, et je gronde sourdement.

- C'est que tu dira à tes ennemis ? Espérons qu'ils auront pitié de tes faiblesses !

- Alors dois-je juste essayer de te faire tomber avec ce que je sais faire pour que tu m'évalues, ou te faire tomber à mes risques et périls ?

Sans un mot de plus, je saute en avant et lui balance un violent coup de patte au visage. Passez fort pour la blessée, mais suffisamment pour la réveiller et peut-être, la mettre un peu en colère.

- Je suis ton ennemi ! Cesses de réfléchir, petite !

Je me remets en garde, attendant ses attaques, analysant chacun de ses mouvements pour l'entraîner au mieux, la guider vers le meilleur chemin.