Bon. Après quelques heures acharnées d'entraînement, la nuit tombe. Je m'isole dans ma tanière jusqu'à ce que le soleil disparaisse définitivement du ciel, puis je me prépare pour une longue et interminable nuit de chasse. Je m'étends de tout mon long pendant quelques heures, seul dans ma tanière, à ne penser à rien d'autre qu'aux proies que je pourrais débusquer et faire souffrir ce soir, avant de les abattre sauvagement, et lentement. Paradoxal, comme projet. N'est-ce pas ? Pourtant c'est bien ce que je compte faire. Leur agonie sera un souffle renaissant pour moi, et entendre leurs cris de douleurs et leurs gémissements rauques me permettra d'oublier ma propre douleur, au moins le temps de les mettre à mort. Peut-être que je les ramènerais à la meute que je méprise davantage chaque jour qui passe. Peut-être que non. Il est tout à fait possible que je décide, au dernier moment, de me régaler du fruit de mon travail ou, par pure bonté, de partager ce-dit travail avec les charognards en abandonnant la carcasse dans un endroit où les renards et les belettes grouillent quotidiennement, à la recherche de petites proies comme des mulots ou des musaraignes. Je m'ébroue enfin, et me mets en quette d'un territoire de chasse. Puisque j'ai tenté de traquer une bête sur les terres Esobeks il y a quelques jours, ce soir ce sont les Sekmets qui perdront un gibier. Egalité pour eux, petit plaisir pour moi.

Partant de ma tanière, il me faut passer par la cabane du chasseur et dépasser les marais griffes vertes. Les lieux maudits, comme j'aime à les appeler. Si j'ai une chance d'abattre le chasseur, dans le cas où je le rencontrerais, je n'aurais cependant pas la même veine dans le cas d'une embuscade le long du marais Griffes Vertes. Je gronde doucement, arpentant les environs de ma tanière et réfléchissant, me demandant s'il n'existe pas un autre moyen de rejoindre les territoires Sekmets. Et puis, résigné à prendre le risque, je pars en trottinant, l'air de rien, ne craignant aucun danger. Je n'ai pas peur de la mort, je n'en n'ai jamais eu peur. Alors c'est avec une détermination farouche que je traverse le petit territoire humain, et avec la même fierté que je longe, la tête haute et la queue redressée, les marais Griffes Vertes. Comme prévu, rien ne se passe. Je sors de là sans la moindre égratignure, et il ne me manque plus quelques kilomètres avant d'arriver sur les premières terres Sekmets, la forêt charbonneuse. Là, je ne crains pas les attaques ennemis. Entre ces arbres figés par la mort, il n'existe aucune cachette. Je connais encore bien les lieux pour savoir que personne n'est passé par là récemment, et qu'une patrouille de garde ne débarquera pas avant un moment. Les Sekmets sont imbus d'eux-mêmes et stupides. Ils pensent que leur seul nom repousse les ennemis. Ils se trompent lourdement. Je traverse la clairière fumante en me camouflant à la perfection dans la brume, et j'atterris finalement aux alentours de l'épave d'avion. Si je ne trouve pas de quoi manger, je pourrais toujours voler. Ca les fera au moins chier un minimum.

Je commence ma traque sans conviction aucune, ressentant une légère fatigue après me derniers entraînements. Oui, je suis un acharné. J'ignore où en sont les autres membres de la Horde, mais qu'en j'aperçois un compagnon aussi chétif que Appledore ou Alweda, ou même Rake Maâr ... Je préfère ne pas savoir à quoi ils passent tous leurs journées. J'aurais certainement envie de les égorger tous, les uns après les autres, et je doute que Skull approuverait grandement l'idée. Alors, soupirant à l'idée de leurs corps si frêles malgré le temps que nous sommes censés avoir passé à nous entraîner, je pose ma truffe au sol et je renifle les odeurs. Je repère rapidement la direction exacte à emprunter dans le cas où je voudrais aller m'amuser près de leur garde-manger grâce à l'odeur des proies mortes, mais je m'obstine d'abord plusieurs minutes à chercher de quelconques pistes malgré la neige et le blizzard. L'une camoufle les odeurs, l'autre les envoie bien plus loin que l'emplacement de leur dépôt, mais je ne me dégonfle pas et je n'abandonne pas. Lorsqu'un loup est en chasse, la chance peut tourner à n'importe quel moment. Et au pire des cas, si je venais à ne rien trouver, j'aurais au mieux gagné un combat pour m'entraîner, au pire amélioré mon endurance pour tenir plus longtemps la prochaine fois. Les premières recherches se soldent par un échec. Peu m'importe, je continue de chercher encore et encore, des fois qu'une bestiole me tomberait sous la truffe en n'ayant pas eu le temps d'identifier mon odeur assez tôt.

Malheureusement, il semblerait que les astres ne soient pas un soutien nécessaire en cette nuit étoilée et translucide. Si la lune brille d'un éclat fantomatique et merveilleux à la fois, elle ne me mène sur aucune piste et je me vois dans l'obligation d'essuyer un second échec. Tout en continuant de traquer de quelconques créatures malchanceuses, je me rapproche du coeur des territoires Sekmets pour le cas où j'aurais la soudaine envie de les emmerder un peu. Même tomber sur les protecteurs de leurs réserves me serait une joie, puisque ça me permettrait de m'amuser un peu, même si je devais perdre un combat contre eux. Me baladant en toute impunité sur les terres de mes ennemis jurés, je me permets même de laisser mon odeur partout où je passe pour les narguer davantage. Je tourne autour de leur garde-manger à quelques kilomètres de distance pour ne pas me faire repérer trop vite, mais assez près tout de même pour sentir l'odeur des animaux morts qu'ils surveillent si précieusement. Je m'en amuse fortement d'ailleurs. Comme s'ils étaient à l'abris d'un pillage en tournant ainsi autour de leur bouffe. Non mais que croient-ils ? Que les voleurs viendraient leur demander poliment la permission de piller leurs réserves ? Non bien sûr. Un voleur est un espion en plus fourbe. Il se cache, se camoufle, trompe ses ennemis par divers moyens et astuces. Il est intelligent et vil et parfois même, tout aussi fort que doué. Je souris, me rapprochant peu à peu de ma cible finale à défaut de ne pas trouver une piste convenable.

Je ne me lasse qu'après plusieurs heures d'une traque veine et sans résultat. Me rapprochant petit à petit de la réserve des Sekmets, mais finalement les loups présents ne m'intéressent pas plus que ça. Je vois d'office qu'ils sont faibles et inutiles, ce serait un combat trop simple pour moi et je me refuse à me battre contre plus faible que moi. Je rebrousse chemin sans plus attendre, et je rentre chez moi l'air renfrogné. Bof ... J'aurais au moins pris la vie d'un puma, aujourd'hui.