J'observe la fine couche de boue qui recouvre mes poils entremêlés. Cette sacrée frousse me parcourt encore l'estomac. Je ferme les yeux, respire un coup, faisant état des lieux. Bien sûr, je divague et n'y arrive pas. Cela me tracasse depuis quelques temps... : Suis-je vraiment faite pour être dans la Horde ? J'en suis sûrement la plus pacifiste. C'est ce que je me dis. Face à l'autre Esobek, j'étais minable. Je ne prends jamais part à aucun combat, et je suis rarement en compagnie des autres. Je suis toujours en train de vagabonder à droite, à gauche. Eh bien voilà la conclusion ; je suis tombée bien bas, autant au sens propre qu'au figuré. Mais revenons au début, voulez-vous.

Aujourd'hui, j'étais venue chercher des plantes pour soigner misters Hordiens qui ne savent pas le faire eux-mêmes. Quels bouffons. Bref. Je cherchais des toiles d'araignée, mais par les temps qui courent, ce n'est ce qui est le plus facile à trouver. Je me suis mise en quête de prêles, hélas, impossible d'en trouver. J'ai vagabondé d'un endroit à l'autre, jusqu'à arriver ici. Je suis très près du village des hommes, j'en ai conscience. Mais je ne pouvais résister à l'appel de cet espèce de puits. Profond, boueux, humide. Dangereux. Mais riche en plantes. En penchant la tête au-dessus, j'ai aperçu toutes ces merveilles au fond et sur les parois. Quelle mine d'or.

Mais telle la rose, qui s'approche s'y pique. Et comme une conne, j'ai tendu le museau pour tenter d'en cueillir les plus proches. Mais mes pattes, sans appui, ont dérapé. Par chance, le puits est assez peu large en haut pour me permettre de ne pas tomber au fond. J'ai tout de même eu les pattes dans le vide une bonne fraction de secondes, les pattes avant cramponnées aux rebords et une peur me nouant les entrailles. J'ai eu une sacrée chance, mais j'en garde encore les sentiments d'angoisse. J'aurais pu tomber tout en bas ...

Maintenant, je reste là, tremblante, les pattes lourdes, au bord de ce puits. Il me faut ces plantes, il me les faut. Malheureusement, j'ignore comment m'y prendre. Ce n'est pas comme un combat, ce n'est pas comme une discussion, évidemment. Là il suffirait de fuir ou d'attaquer. Mais là ... Je me mords la babine et me surprends à la faire saigner. Je m'arrête aussitôt et tente de me concentrer. Je ne peux pas descendre en bas, j'y serais bloquée. Je balaye l'endroit du regard - un petit espace dégagé entouré d'arbres -, à la recherche d'éventuels objets ou éléments pouvant m'aider. Je ne trouve rien. Une corde, un récipient, des planches, quelque chose d'hommes. Ou même une longue branche. Mais il n'y a rien qu'un espèce de marécage asséché et des arbres. Bordel.

Je soupire et cille. Pour trouver, dit-on, il faut chercher ... J'hésite un instant. Il pourrait se passer tellement de choses en une absence, si courte soit-elle. Si un autre guérisseur s'approchait ? Non, aucun risque à mon avis, nous sommes trop près du village des hommes. Des hommes ? Oui, là par contre, ce serait plus probable. Et plus dangereux. J'inspire à fond, lance un regard inquiet à la cuve boueuse. Je me retourne vers le couvert des arbres. Et finalement, le cœur battant, je m'écarte et m'enfonce dans les sous-bois.

Destin a écrit:

Tu trouves, enfoui dans la neige, un large piège posé par les hommes. Heureusement que tu fouillais le sol, sinon tu aurais été mordue par les dents d'acier du mécanisme. Tu y aurais sans doute perdu ta patte !

Un instant, j'hésite à retourner au puits. Serait-ce un choix plus juste ? En remarque, je ne pourrais rien y faire. Quoique ? Je reste songeuse. Je jette un regard vague autour de moi. Inutile de chercher à l'aveuglette, j'y passerai trop de temps. Il me faut une idée en tête. Une corde ? D'accord ... Mais comment ferais-je pour attacher les plantes ? Et les remonter ? Non, non ... Pas de corde. Un loup ? Pourrais-je être capable d'amadouer un loup pour cela ? C'est un peu farfelu comme plan.

Je me résigne à fouiller les alentours. Ce geste m'étant devenu habituel, je n'y prête pas plus d'importance. Mon museau se fourre dans les plus étroits taillis, derrière un tronc, dans l'herbe. J'ai appris, aux côtés d'une ... Certaine louve de ma connaissance, à ne pas négliger les plus infimes détails. Ainsi, j'ai beau m'y appliquer soigneusement, le temps passe et je ne trouve rien. Je jette un coup d'œil en arrière, afin de m'assurer, la mine inquiète, que personne ne m'a pris la place.

SLACH ! Je me permets un sursaut et un petit cri de surprise. Qu'est ce que c'était ? Les sens en alerte, je balaie l'endroit du regard, paniquée et tremblotante. Mon regard se pose sur le sol, et là, je le vois. C'est un piège en métal - d'une pâte humaine, il n'y fait aucun doute - ressemblant vaguement à une mâchoire. Elle est ancrée de le sol, et vient tout juste de se refermer.

U.C