J'ouvre le yeux. 10 secondes. C'est le temps qu'a mis mon cerveau pour comprendre. Qu'est-ce que je peux être bête. Vraiment. Il a fallu que je m'endorme comme une patate le jour où je dois rejoindre l'Alpha et quelques membres de la meute pour un entraînement. L'ultime entraînement. Désormais, de nombreux guerriers sont plus forts que moi, et j'ai l'impression qu'ils méritent plus le titre de Général que moi. Je dois m'améliorer. Par respect pour eux aussi. Pour les efforts qu'ils fournissent. Je me lève, m'étire longuement. A cause du froid qui mord sans cesse mes muscles, j'ai du mal à bouger. Sérieusement, je déteste l'hiver. 'Fait trop froid. Mais bref. Les autres doivent m'attendre depuis un moment. J'ai intérêt à vite bouger mon popotin. Sans plus attendre, je me mets à courir. Au moins, je serai déjà échauffée. Le neige me rentre dans les yeux et le vent glacé me fouette le museau. Une vraie partie de plaisir, c'est moi qui vous le dis. Faut être maso pour courir sous un temps pareil. J'suis pas maso, juste obligée de courir pour rattraper mon retard, hein. Mais je dois l'avouer, c'est beau. Vraiment. Lorsque l'on court plus vite que la neige tombe, on dirait que celle-ci se déplace au ralenti. Elle danse sur la mélodie du vent. Elle tourne, et retourne. C'est merveilleux. Très peu parviennent à voir une telle beauté dans ce monde, on peut le dire, de brutes. Moi, j'ai le don de m'émerveiller sur les beautés de la nature aux mauvais moments. Je continue de courir, encore et toujours plus vite, en pensant à rien d'autre sauf l'entraînement d'aujourd'hui. Je vais être contre de valeureux guerriers. En gros, je vais me faire éclater. J'arrive au lieu de rencontre, langue pendante. Super, tout le monde est là. Bravo Dae', tu sais vraiment de faire remarquer, toi. Je m'avance, totalement essoufflée et prête à cracher mes poumons à cause de ma petite course. C'est grâce à un pur miracle que j'ai pu dire sans tomber dans les pommes :

- Excusez-moi... pour le retard... j'dormais...

Wouah, ça c'est d'l'excuse. Je m'assois et tente de retrouver mon souffle. Super, je suis déjà morte alors que les combats n'ont même pas commencé. Je sens que la journée va être dure.

Freux est là. Adieu, monde cruel. Se battre contre cet entassement de muscles, c'est comme aller tirer la queue d'un Hordien. Du suicide. Puis il y a Naïa. Je ne connais pas cette louve, mais j'aime pas les gens qui me reprochent de dormir. Je passe outre sa remarque et regarde le suivant. Qwint. Il devrait s'ébrouer, son pelage est couvert de neige. Il a fait ça comment ? Bichou. Puis Yroen. Elle explique les règles, qui d'ailleurs n'existent pas, vu sa dernière phrase. Elle veut qu'on s'entre-tue ? Il aurait fallu un jeu qui aide à nous unir, pas qui donne envie de nous battre entre nous. Non ? Tous les coups sont permis. C'est tout de même intéressant. Pas besoin d'utiliser la force. Je regarde Freux. Je connais une technique qui le désarmera. Ça va être drôle ! Ni une, ni deux, Yroen est déjà partie. Tricheuse.

Je m'élance à mon tour. L'arbre centenaire, je sais exactement où il se trouve. Trouver le totem sera un jeu d'enfant, mais pas avec les autres dans les pattes. Je vais devoir faire des stratégies. Ça me plait. Quelle bonne idée, Yroen. Je cours plus vite. L'adrénaline monte, elle en demande encore. Mais plus je cours, plus je sens en présence dans mon dos. Yroen est devant moi, ça ne peut être elle. A moins qu'elle se soit cachée pour éliminer la première personne derrière elle. Si c'est le cas, je peux déjà faire ma prière. Freux a aussi pu me rattraper. Ainsi que Naïa, nous avons pratiquement la même endurance. Je réfléchis à toute vitesse. Evaluer la situation. Et trouver des solutions pour chaque cas. Plus le temps de réfléchir, le loup est déjà à mes côtés. Alors, qui c'est ?   

 Naïa. C'était elle. Tranquillement elle vient, me pousse, et me dépasse. Franchement, y'a plus aucun respect dans ce monde de brutes. Je perds l'équilibre à cause de son coup de flanc, et tombe un peu plus bas. Super, du temps perdu, j'adore ça. 
Pas le temps de tout remonter, je continue tout droit. Je dois courir plus vite. Naïa est devant moi, ainsi qu'Yroen. J'espère que les autres se sont cassés une patte, ou même deux. Le chemin est plutôt long, mais si je traverse ce qui nous sert de rivière, je pourrais me retrouver devant eux un peu plus vite. Bah, à l'action ma vieille. T'as une vengeance à préparer. Je n'oublie pas les coups de flanc comme ça. Je me mets en route, tranquillement. Rien ne presse, sinon je vais m'épuiser et me noyer en posant seulement une patte dans l'eau. 

Je finis mon petit footing et arrive à la rivière. Je saute dedans. Frooooooid. Putain. J'ai le don pour oublier que nous sommes en hiver. C'est froid, froid, froid. Je nage aussi vite que je peux, mais mes muscles s'engourdissent. Chaque mouvement devient alors une douleur. Putain, pourquoi c'est toujours ces moments-là qui semblent interminables ? C'est pas juste, hein. Au prix d'un effort incroyable, j'arrive à rejoindre la rive. Et plus incroyable encore, je me remets à courir direct. Rivière froide, neige froide, vent froid. Je hais l'hiver. Tiens. Yroen et Freux. Ils ont pas attendu longtemps pour se bagarrer eux. Si tout va bien, je vais pouvoir les dépasser. Croisons les griffes. Cette expression est vraiment moche, hein ?