D'aussi loin que je tente de me souvenir, je n'ai jamais connu ma mère. Mon père me parlait parfois d'elle, me disant qu'elle avait été enlevé par des humains alors que je n'étais qu'un louveteau. Mon père m'avait laissé à une louve le temps que mon sevrage soit terminé. Elle s'appelait... Filia. C'était une mère douce et attentionnée, qui ne me différenciait jamais de ses autres petits. C'était une belle louve, à la fourrure brune, qui venait d'avoir une portée de trois louveteaux. Le premier est mort très tôt, et je ne sais pas ce que sont devenus les deux autres... Pendant ses quelques mois, mon père me rendait visite très peu souvent. Ne venant que pour apportait de la nourriture à la louve. Puis, un matin, il arriva, et son air était différent. Il regarda la mère des louveteaux, puis échangea quelques mots avec elle. Elle semblait... Choquée, et me lançait de temps en temps des regards apeurés. Elle n'arrêtait pas de répéter :
Il est trop jeune ! Tu ne peux pas le laisser comme cela sans mère !
Mais la décision de mon père était irrévocable. Il m'attrapa par la peau du cou, et partit à la course sous les arbres de la forêt. Au loin j'entendais les cris de la louve, et j'étais là, tout secoué entre ses crocs, en train de me débattre en appelant Filia. Après plusieurs minutes, il me posa sur le sol. Il me regarda de haut en bas, puis m'annonça d'un air méprisant :
Arrête de geindre ! Cette louve n'est pas ta mère, elle ne le sera jamais. C'est terminé maintenant. Désormais, je vais t'apprendre à devenir un vrai loup, car ce n'est pas en restant dans les pattes de cette pleurnicheuse que tu apprendras à survivre. Tu m'écoutes ?!
J'étais là, sanglotent, séparé de la louve qui m'avait élevé comme son fils. Mon père se mit en colère, et me donna un coup de patte violent, qui me fit voltigé sur quelques mètres, avant de m'écraser contre un tronc d'arbre mort. Je restais là, assommé, par terre. Mon père s'approcha et grogna :
Debout !
Mais je n'y arrivais pas. J'étais sonné, je n'arrivait pas à bouger et ma tête était au bord de l'explosion. Il me donna un nouveau coup de patte, me faisant voler un peu moins loin cette fois, et je m’écrasai brutalement sur le sol. Il avança de nouveau vers moi et hurla :
J'ai dit debout !
Je devais me lever. Si je ne le faisais pas, il allait de nouveau me frapper. Je me relevai difficilement sur mes petites pattes, tremblant, lui faisant face. Il ne me quitta pas des yeux, me fixant d'un air sévère, puis me dit :
Bien. C'était ta première leçon. Sache que je n'aurai aucune pitié pour toi, et que si tu es trop faible, tu mourras, c'est tout. Je ne peux pas me permettre d'avoir un louveteau qui serait un poids pour moi. Est-ce bien clair ?
Ma tête semblait exploser. Je tremblais, la tête baissée, et je me contentai de hocher la tête. Il fit un sourire satisfait et me dit :
C'est bien. Suis moi maintenant, on a de la route à faire.
Et nous nous mîmes en marche. Il marchait vite, et j'étais presque obligé de courir pour le rattraper avec mes petites pattes. Nous marchâmes pendant des jours. Combien de temps exactement ? Je ne saurais le dire... Quelques jours, des semaines, des mois ?... Il ne m'accordait que trois pauses par jour : une pour le repas, une dans l'après midi et une au coucher du soleil. Enfin, trois pauses... Le matin et le soir était ponctués d'un entrainement au combat. Au début, se fût dur, très dur...
Nous étions dans la clairière, face à face, il faisait le triple de ma taille. Il me regarda durement et grogna :
Attaque moi !
J'hésitais. Attaquer mon père ? Pourquoi faire ? Je restais là sans comprendre pourquoi. Il me fit, et hurla :
Attaque moi j'ai dit !
Je m'élançai droit vers lui. Je sautai dans sa direction, mes petites griffes sorties, et tentant de m'agripper à lui. Il esquiva facilement et me refit face.
Recommence !
Je fis demi-tour, enragé par le combat désormais. Je me lançai de front sur lui, mais il fit quelque chose auquel je ne m'attendais pas. Il leva sa grande patte, griffe sorties, et l’abattit sur moi. Je vis du sang gicler et je ressentis une vive douleur à la lèvre qui me fit couiné. Je me recroquevillai sur le sol, le sang coulant de ma plaie. Il se mit au dessus de moi et susurra à mon oreille :
Un ennemi n'attendra pas sagement que tu l'attaques. Il t'attaquera lui aussi. Cette cicatrice te laissera une marque qui te rappelleras que ceux contre qui tu combats n'ont aucune pitié, et tu ne dois pas en avoir non plus. Tu dois les avoir pas surprise, sinon tu perdras. Ceci est ta deuxième leçon.
J'étais toujours, au sol, la douleur à ma lèvre était insupportable. Il me souleva par le cou et me déposa un peu plus loin. Il s'absenta quelques minutes, me laissant là, blessé et terrorisé. Il revint avec des toiles d'araignées qu'il appliqua sur mon museau.
Les toiles d'araignées servent à arrêter une hémorragie. Tu devras t'en servir quand tu te blesseras, car maintenant, je ne soignerai plus tes blessures. Je te laisse trente minutes, puis nous reprendrons la route.
Une année passa. Une année où il fit de moi une machine à tuer. Les entrainements devinrent de plus en plus violents, laissant de profondes entailles dans nos corps, qu'il nous faillait soigner par la suite. Mon père perdit le bout de sa queue en combattant contre moi, mais il me le rendit en m'arrachant un bout de l'oreille droite. Ma blessure à la lèvre avait cicatrisé, laissant un trait rose sur mon museau noir. Cette cicatrice m'était insupportable, car elle me défigurait, le trait rose était plus visible que jamais, mais aussi car elle me rappelait ma faiblesse. Enfin, celle que je possédais avant, car désormais, je n'étais plus bon qu'à tuer et verser du sang. Et nous marchions, tout le temps, ne nous arrêtant jamais plus de trois jours au même endroit. Ces marches m'avaient rendues robustes, et désormais nous ne nous arrêtions que lorsque le soleil était au zénith, et lorsqu'il était couché.
Mais un jour, tout bascula. Nous traversions une plaine, moi en tête, lorsque un « crac » suivit d'un hurlement me fit me retourner. La où aurait dû se trouvait mon père, se trouvait un trou. Je m'approchais, tremblant, et je regardais à l'intérieur. Au fond, des pics en bois étaient réparties méthodiquement. Mon père était transpercé par l'une d'elle, au niveau de l'abdomen, et un râle de douleur ainsi qu'un filet de sang s'échappait de sa bouche. Sa plaie saignait abondamment. Je paniquai, glissant dans le trou en faisant attention à ne pas être transpercé moi aussi. Mon père me regardait, droit dans les yeux, puis d'une voix faible et rongée par la douleur il me dit :
C'est fini... Il est temps de mettre en pratique... Ce que je t'ai appris...
Il grogna de douleur, se contractant un peu, et me dit :
Il est temps pour toi... De faire couler... Le sang... Achève moi, maintenant !
Je restais pétrifié, n'osant pas bouger, le fixant. Je balbutia :
Je... Je ne peux pas...
Il me regarda, d'un regard remplie de rage, et cria :
Je savais bien... Que tu n'étais qu'un faible ! Un bâtard... Un bon à rien ! Tu n'es pas mon fils, tu es...
Il ne put jamais terminer car, fou de rage, j'avais refermé violemment mes crocs sur sa gorge, le tuant sur le coup. Je reculai, terrifié, et je m'extirpa du trou. Je me mis à courir. Je courus, longtemps, même après que le soleil se soit couché. Puis, au bord de l'épuisement, je m'écroulait de fatigue, par terre, le gout amer du sang de mon père encore dans la bouche...
Une autre année est passée désormais. Depuis la mort de mon père, je suis devenu plus violent, plus sanguinaire, tuant parfois des animaux juste pour le plaisir de gouter leur sang, qui me rendait presque fou, avant de laisser leur cadavre déchiqueté aux charognards en tous genres. J'ai appris à survivre seul, ce que je faisais presque déjà auparavant. Mais un jour, mon voyage pris enfin fin. Je rencontra une meute de loup, menée par Skull, une louve qui me rappelait étrangement mon père. Je lui est prêté allégeance, rejoignant les rangs de la Horde, pour semer la destruction et la mort, mais aussi pour manipuler les loups constituent la meute Esobek et la meute Sekmet.
Je m'appelle Likas, et ceci est mon histoire.