Noire en avait plus qu'assez de cet hiver. Il venait à peine de débuter, mais la solitaire avait déjà envie de hurler aux cieux qu'ils feraient bien mieux d'arrêter de faire tomber la neige. A cause d'eux, les proies s'enfuyaient et les estomacs des loups hurlaient famine. 
Les loups de meute, eux, pouvaient survivre correctement -du moins Noire le supposait- car ils partageaient leurs réserves, et possédaient de nombreux terrains de chasse. Mais les solitaires, eux, devaient se débrouiller sur leurs maigres parcelles, sans que personne ne leur vienne en aide.
Mais de toute manière, Noire voulait toujours tout faire toute seule. Elle détestait se faire aider, et apporter de l'aide à quelqu'un. Sauf... Si elle pouvait trouver quelque chose de bénéfique pour sa petite personne en retour.
Noire, forme sombre sous la neige blanche, se dirigeait vers le Village des Hommes. Elle comptait bien y piller quelques morceaux de viande, de quoi bien se remplir la pense. 
Mais alors qu'elle se rapprochait du village, elle entendit des coups de feu, tout près. Aussitôt, la panique la gagna, et elle fonça se cacher près des arbres les plus proches, se tapissant contre le sol pour passer inaperçue. Les bruits des balles résonnèrent à ses oreilles, puis pendant plusieurs secondes, rien, et enfin le bruit d'un camion qui s'éloignait. Noire se redressa lentement, scrutant le paysage autour d'elle pour vérifier qu'il n'y avait aucun bipède à l'horizon. L'auraient-ils repérés avant même qu'elle n'arrive, ou bien avaient-ils tiré sur quelque chose d'autre ?
Par précaution, la solitaire décida de ne rien tenter aujourd'hui. Elle repartit en sens inverse, faisant tout de même un petit crochet vers la provenance des tirs, qui avaient désormais cessé. Peut-être y avait-il là un animal blessé, qu'elle pourrait dévorer ?
Elle arriva alors tout près d'une structure de pierre, qui lui sembla être un puits. Un gémissement de douleur résonna à ses oreilles, et Noire s'approcha prudemment du trou. Elle hissa alors ses pattes avants sur le puits, et scruta le fond avant de pousser un hoquet de surprise.

"Reaven !" Aboya t-elle en apercevant le loup gris, qui gisait dans l'obscurité du puits.

La neige avait redoublé de force, s'étalant peu à peu sur son pelage noir et elle s'ébroua en réfléchissant à toute allure. Que faire désormais ? Aider cet Esobek, ou le laisse pourrir en bas ? Il était voué à une morte certaine si elle ne faisait rien. Voulait-elle vraiment avoir sa mort sur la conscience alors qu'il l'avait aidé à plusieurs reprises ?

"Tu es blessé ?" Demanda t-elle tout de même.

La question était idiote, mais elle avait besoin de savoir. Si le mâle ne pouvait pas tenir debout, le sauvetage n'en serait que plus difficile et périlleux...

Reaven ne semblait pas si mal en point qu'elle ne l'avait cru au début. Il saignait, la louve le voyait. L'eau qui stagnait au fond dui puits était désormais de couleur pourpre, qui fit grimacer la solitaire. Mais ce qui l'inquiétait le plus, c'était le fait de trouver une solution pour sortir le guérisseur de là.
Il lui annonça qu'il n'avait rien de grave, une patte foulée et une balle à l'épaule. Noire se retint de gémir. Elle se souvenait de la douleur que provoquait une balle. Heureusement, Kali l'avait sauvée, sinon la louve aurait eut bien du mal à imaginer la douleur grandissante.

"Regarde autour de toi, est-ce que tu vois quelque chose qui pourrait t’aider à me tirer hors d’ici ?"

Noire acquiesça et dut malheureusement arrêter de fixer le mâle gris pour se mettre en quête d'un objet pouvant le sortir de là. Le regard en alerte, elle scruta les alentours avec attention. Elle dénicha un bout de bois, mais qui était bien trop court à vue d'oeil. Elle poursuivit donc ses recherches avec attention. 
C'est alors qu'elle arriva au pied d'un arbre. Elle se dépêcha de casser une branche avec ses crocs, et courut en direction du puits en traînant son fardeau derrière elle. Elle doutait grandement qu'il fasse la taille nécessaire, mais préféra tenter le coup. 
Elle se pencha donc au bord du trou et jeta la branche vers le bas, tout en gardant le bout dans sa gueule. Malheureusement, elle était trop courte comme elle le craignait, et elle aboya à Reaven, marmonnant à moitié à cause de sa gueule entravée par le bout de bois :

"C'est trop court ! Je ne trouve rien d'autre !"

Elle espérait que le guérisseur à l'esprit vif allait trouver une solution... Mais dans tous les cas, la solitaire ne partirait pas d'ici, avant de l'avoir sauvé. Elle lui devait bien ça.

La panique commençait à gagner la solitaire, mais elle n'en laissa rien paraître, comme toujours. Ses yeux jaunes parcouraient les alentours à la recherche d'une autre branche, assez longue pour aller jusqu'à Reaven, assez solide pour ne pas casser, mais assez légère pour que Noire puisse supporter le poids du loup à son bout et le remonter.

"Essaye d’envoyer de la neige dans le puits, je vais la tasser pour en faire un promontoire duquel je pourrai atteindre la branche !"

La louve lâcha la branche sur le côté du puits, et s'empressa d'exécuter l'idée du guérisseur. Elle se pencha et prit une grande bouchée de neige dans sa gueule, sans hésiter, qu'elle s'empressa de recracher dans le puits. Elle recommença son manège plusieurs fois, mais avait l'impression que cela ne suffirait jamais. Elle travaillait trop lentement.
Redoublant d'efforts, la femelle prit de plus grande bouchée de neige, malgré le fait que cela lui glace le palais et lui entrave la gorge. Elle manqua de s'étouffer à trois reprises, mais après quelques longues minutes, jugea qu'il y avait assez de neige au fond. Elle attrapa la branche entre ses crocs et se repencha le plus possible au bord du puits, en serrant bien fort. A Reaven désormais de faire le reste...

L'ascension débuta, rude et difficile mais Noire fit de son mieux pour aider le guérisseur blessé. Elle fit abstraction du reste du monde, n'essayant pas de penser à ce qui se passerait si les humains revenaient, et se contenta de tirer de toutes ses forces sur la branche, priant pour qu'elle ne se brise pas.
Finalement, la tête grise du mâle apparut, et il lâcha la branche pour se hisser sur le rebord du puits. La solitaire recula de quelques pas, essoufflée, et mit un certain temps pour reprendre sa respiration. Les battements de son coeur se calmèrent peu à peu, tandis que Reaven l'observait, tout sourire.
Le mâle la remercia pour son aide, et Noire répondit pas un petit grognement, le regard rivé sur le sol. Elle savait que l'aide qu'elle venait de lui apportée était la moindre des choses. Lui, l'avait sauvée bien des fois de la mort. Alors pour une fois qu'elle pouvait lui renvoyer la pareille...

"Nous ne devrions pas traîner ici, allons dans un endroit plus sûr."

Noire acquiesça, et observa Reaven se hissa sur ses pattes flageolantes. Après un lourd instant d'hésitation, elle marcha jusqu'à lui et l'épaula pour l'aider à avancer plus facilement. Maintenant qu'elle lui était venu en aide, autant aller jusqu'au bout. 
Ensemble, leurs pelages se touchant l'un et l'autre, ils marchèrent jusqu'à un "endroit plus sûr", comme disait Reaven. C'était tout près d'un petit bois, assez loin du village des hommes, mais pas trop tout de même. Le guérisseur ne pouvait pas encore marcher sur de longues distances. D'ailleurs, Noire se demandait comment il allait se débrouiller pour rentrer jusqu'à sa tanière.
Abandonnant le mâle, Noire s'assit pour reprendre encore une fois son souffle. En l'aidant, elle s'était fait mal à la patte, et elle lécha sa blessure qui saignait à peine. Juste une petite éraflure. 
Elle laissa ensuite son regard dévier vers Reaven. Allait-il se soigner seul, ou bien avait-il besoin de remèdes ? Hésitante, elle attendit un long moment, avant de grogner :

"T'as besoin d'aide ?"

Reaven lui expliqua alors qu'il n'y avait rien à faire pour sa patte. Il lui fallait simplement du repos, le temps que tout cicatrise bien, certainement. Noire l'observa avec attention, tentant de décrypter la blessure d'un simple coup d'oeil, mais elle n'était pas guérisseuse. Pour elle, impossible de déterminer si c'était quelque chose de grave, ou non, et sa la balle avait touché l'os ou simplement la peau, ou encore si Reaven s'était gravement blessé en tombant dans le puits. Rien de tout cela n'était déterminable par la solitaire.

"Te voilà coincée avec un vieil infirme pour quelques temps, j’en ai peur."

Elle lâcha un petit grognement tandis que le mâle gris recouvrait sa blessure de neige, et reposait sa tête sur ses pattes, visiblement fatigué. La louve quant à elle, se contenta de l'observer silencieusement durant un instant, avant de répondre :

"Je ne suis pas obligée de rester. Je peux partir si, et quand j'en ai envie."

Puis, elle rajouta, un grognant et grommelant à moitié, tout bas, mais assez fort que que Reaven l'entende.

"Et tu n'es pas vieux."

"Je ne suis plus tout jeune non plus."

Noire remua la tête. Était-elle plus jeune ou plus âgée que lui... ? Elle n'osait pas lui demander son âge, ce serait une question bien trop déplacée. A vrai dire, elle ne connaissait même pas le sien clairement. 5 ans, 6 ? Depuis combien de temps vivait-elle sur cette terre ? Depuis combien de temps ses frères étaient-ils morts ? Le temps passait bien trop vite, et parfois bien trop lentement. Noire le détestait profondément.

"Si tu voulais vraiment partir, tu serais déjà partie de toute façon, n’ai-je pas raison ?"

Certes. Noire évita de croiser son regard. Les yeux rivés au sol, elle léchait lentement les petites plaies qui parsemaient ses pattes, dues au froid et au sol dur, parsemé d'obstacles. Chaque bout de bois s'apparentait à un couteau. Elle avait la peau si fragile en hiver...
Reaven, après lui avoir souri, se leva enfin. Avait-il reprit assez de force ? Immédiatement inquiétée par le fait qu'il puisse de nouveau tomber entre les salles pattes des hommes, Noire se leva à son tour, sans trop montrer sa précipitation. Elle se donna un dernier petit coup de langue, avant d'interroger le guérisseur du regard, pour savoir ce qu'il comptait faire.

"Je me suis assez reposé et nous ne devrions pas nous éterniser ici. Je devrais être capable de rejoindre les terres Esobeks sans m’arrêter, si tu veux bien m’aider..."

La louve hocha la tête, et se rapprocha de lui pour l'épauler. Leurs deux pelages se touchèrent, et elle frissonna légèrement à ce contact. Elle avait toujours beaucoup apprécié Reaven. Il lui avait sauvée la vie, plusieurs fois, sans jamais rien demander en retour. Emarok non plus, certes, mais elle lisait toujours dans le regard de l'Esobek gris, une certaine gentillesse, et même peut-être autre chose. Chose qu'elle ne se permettait pas d'espérer. La vie l'avait tant déçue.... L'amour était un sentiment auquel elle n'osait même pas songer.

"Tu ne te sens pas un peu seul dans ta tanière ? Lui demanda t-elle soudain, alors qu'ils marchaient tous deux côte à côte, elle l'aidant à se stabiliser. Je veux dire... Tu n'es pas solitaire, tu es un loup de meute, alors ce doit être assez bizarre de vivre comme ça, tout seul, non ?"

Sa question avait été formulée de sa voix toujours aussi sauvage et rauque, mais on pouvait tout de même y sentir une pointe de sympathie. Le fait de voir ce sympathique loup tout seul dans sa tanière pleine de plantes lui faisait un peu de peine. Un peu.

A vrai dire, en y réfléchissant mieux, Noire se rendait compte de la solitude pesante du guérisseur. Il vivait renfermé dans sa petite tanière, tout en appartenant à sa meute, mais en restant éloigné de ses camarades. Noire au moins, vivait seule, définitivement seule, et portait d'ailleurs le "titre" de solitaire. Elle n'avait jamais rien connu d'autre que sa solitude, même du temps où sa famille était encore vivante. Mais pour Reaven... Cela devait bien plus inconfortable, et difficile aussi... Même s'il n'avait pas l'air le moins du monde perturbé. 
Cependant, après une rapide réponse, il changea de sujet, ce que Noire respecta. Elle comprenait qu'il ne veuille pas parler de son passé, de sa solitude, de son actuelle vie reculée.

"Je suis désolé de t’avoir entraîné dans tout ça. Le moins que je puisse faire, c’est de soigner tes plaies une fois que nous serons arrivés à ma tanière."

Il ponctua sa phrase avec un remerciement chaleureux, et Noire se serra un peu plus à lui pour le soutenir davantage, soulageant au maximum ses douleurs. Elle avait mal elle aussi, il fallait bien l'admettre, et elle serait reconnaissante à Reaven de la soigner... Cependant, cela lui faisait toujours bizarre de se dire qu'elle dépendait de lui et qu'elle acceptait ses soins sans qu'il ne demanda rien en retour. Pourtant, même dans ses conditions, la femelle se sentait bien moins mal à l'aise avec lui, qu'avec Emarok, Manîthil, ou tout autre loup.

"Je ne pouvais pas me permettre de te laisser mourir. Tu m'as déjà sauvée plusieurs fois, c'était la moindre des choses ! Et puis... Pour une fois que je trouve quelqu'un qui sait m'écouter sans porter de jugement trop rapide..."

Consciente de ce qu'elle venait de dire, elle tenta de se rattraper et de s'expliquer plus clairement.

"Je veux dire... Les autres me voit surtout comme une solitaire sauvage et vieille, qui effraye tous ceux qui passent. Mais moi je ne cherche pas la bagarre. Je veux juste être tranquille."

... "Et pouvoir obtenir mon bonheur" se retint-elle d'ajouter. En compagnie de Reaven, tout semblait très simple. Il était seul comme elle, mais ne se plaignait pas de sa vie. Il dépendait de sa meute, mais était toujours vivant. Il avait des camarades, qui ne l'importunaient pas. Tous ces détails prouvaient bel et bien que la vie en meute pouvait être agréable. Tout en étant solitaire...

Reaven avait un bon fond, et Noire s'en voulait profondément de l'importuner avec ses nombreux tourments. Qu'est-ce que cela pouvait bien lui faire, qu'elle se plaigne de sa vie minable ? Il était guérisseur, il devait entendre geindre des loups à longueur de journée. Et même lorsque lui se blessait, il était obligé de supporter les gémissements de sa sauveuse.

"Mais tu n’es rien de tout ça, Noire, sinon tu ne serais pas ici à m’aider ; et tu m’aurais attaqué lors de notre première rencontre mais tu ne l’as pas fait."

Certes. Noire poursuivit sa route, l'épaulant toujours du mieux qu'elle pouvait pour éviter qu'il ne se blesse davantage. Elle ressentait le besoin d'aider ce loup, de rester auprès de lui. Elle le sentait si fragile... Mais pas à la manière d'un petit louveteau sans défense. Non, ce mâle gris était déjà un canidé adulte, affirmé dans sa vie sociale. Mais il n'en restait pas moins fragile. Noire avait l'impression que le moindre prédateur pourrait l'abattre d'un coup de patte. D'ailleurs, elle-même n'aurait aucune difficulté à le tuer si l'envie lui prenait.
Il rajouta après une petite bourrade amicale que la louve "n'était pas vieille". Les mots qu'elle lui avait glissé peu avant. Puis, poussant un peu plus loin encore la conversation, il lui lâcha :

"Tu es une bonne personne, Noire."

Elle en doutait. Mais les paroles du mâle gris lui réchauffèrent le coeur, et elle osa relever la tête vers lui. Leurs regards se croisèrent, l'un jaune comme le soleil, l'autre vert comme l'émeraude. Une douce chaleur s'empara de la louve, et durant un instant elle crut qu'elle allait tout lâcher et s'effondrer aux pattes de l'Esobek. Alors, sans le lâcher du regard, elle lui répondit d'une petite voix :

"Merci."

Puis, après une courte pause, et tout en se dandinant d'une patte à l'autre, elle rajouta :

"Et.... Si tu veux toujours de moi... Je pense que je vais accepter ta proposition. Je vais rejoindre les Esobeks."

C'était une décision difficile, mais elle y avait bien réfléchi, plusieurs fois. Elle voyait beaucoup de points positifs, à rejoindre les Esobeks. Pas parce qu'elle se sentait seule, ça, ça ne la dérangeait pas, mais en devenant une louve de meute, elle serait mieux protégée.... Et même si, en échange, elle devait apprendre à compter sur les autres, au moins elle n'aurait plus jamais faim. Et elle aurait Reaven à ses côtés, tout le temps.
Le guérisseur s'arrêta brusquement, comme si cette nouvelle le surprenait. Noire comprenait sa réaction. Jusqu'ici, elle avait toujours catégoriquement refusé de le rejoindre, lui, et les Esobeks. Tandis qu'elle attendait avec inquiétude de savoir s'il était toujours d'accord pour qu'elle fasse partie de la meute, elle se surprit à s'attarder sur son regard vert. Qu'est-ce qu'il était beau... Le regard, et le loup lui-même. En rejoignant la meute, elle pourrait le contempler tous les jours. Même si elle se doutait bien que lui, de son côté, devait la trouver bien laide avec son pelage sale et son attitude sauvage.

"Je suis tellement heureux que tu aies pris cette décision, Noire, et bien sûr que je veux toujours de toi !"

Elle se retint de sourire. Il voulait toujours d'elle. Tant mieux. Cela voulait dire que plus rien ne l'empêchait de rejoindre les Esobeks. Plume Rousse et Nymeria s'étaient toutes deux montrées plutôt accueillantes... Elles ne refuseraient surement pas de la laisser les rejoindre. 
Mais alors que Noire savourait cette nouveauté, le choix qui allait changer sa vie, Reaven lui annonça qu'il avait quelque chose à lui avouer. Un petit silence s'ensuivit, durant lequel la solitaire sentit son coeur s'accélérer, puis l'Esobek se remit enfin à parler.

"Il semblerait que, disons, ... je me suis pris d’une certaine affection pour toi. Quelque chose de plus fort que ce que je pourrais ressentir pour n’importe quel autre patient, et voilà je ..."

Noire aurait voulu disparaître sous terre. Qu'était-il entrain de lui révéler ? Qu'il éprouvait de l'affection pour elle ? De l'affection véritable, plus qu'il ne le devrait ? Noire l'avait bien compris depuis le début, elle avait vu de quelle manière il la regardait en oblique, mais elle avait toujours refusé d'y croire ! Pour elle, elle était une patiente comme une autre. Elle pensait que Reaven témoignait cette affection à tous les loups qu'il soignait !

"Je t’aime, Noire."

Les mots résonnèrent dans la tête de la louve, qui s'écarta du guérisseur, les yeux écarquillés. Ses pattes se mirent à trembler, tandis que son coeur battait si fort qu'il aurait pu s'arrêter. Ses oreilles chauffèrent, tant la surprise était forte. Il l'aimait. Il l'aimait, sincèrement. Il ne mentait pas, Noire le voyait. Elle lisait dans ses yeux l'affection qu'il lui témoignait, une affection sincère. Vraiment sincère. Pour la première fois de son existence, un mâle lui disait qu'il l'aimait, pour de vrai. Et elle n'aurait pas voulu que ce soit un autre loup.
Elle ferma quelques instants les yeux, pour s'assurer que tout était bien réel. Elle l'aimait aussi, elle ne pouvait pas le nier. Cela faisait déjà plusieurs jours qu'elle s'en était rendue compte. Mais elle s'étai voilé la face, car elle pensait que Reaven ne l'aimerait jamais. Elle avait empêché ses sentiments d'éclore. Mais la déclaration du mâle gris changeait tout. Tout, absolument tout.
Alors, elle rouvrit les yeux, et plus heureuse que jamais, lui murmura à son tour :

"Je t'aime aussi Reaven."

Brusquement, sa vie venait de s'éclairer. Elle allait rejoindre les Esobeks, et allait pouvoir vivre son amour avec Reaven, comme bon lui semblerait. Elle ne serait plus obligée de se cacher, seule, terrée dans sa tanière miteuse. Elle allait pouvoir vivre une vie, une vraie. La vie qu'elle n'avait jamais eut. Et ce, grâce à lui, ce loup rencontré à la Ville en Ruines. Il venait de changer son existence, comme personne d'autre ne l'avait jamais fait.