Le Guérisseur transformé temporairement en chasseur avançait lentement et sans bruit, la truffe au ras du sol, à la recherche de l’odeur d’une proie qu’il pourrait ramener à la meute. Il naviguait dans l’environnement, passant de la terre rocheuse à l’herbe, de sommet de colline en vallée, quand lui parvint aux narines la mince trace olfactive qu’un lièvre avait laissé derrière lui, et commença à la suivre, relevant le museau pour avoir un meilleur champ de vision.

Il n’y avait pas de vent ce jour-là, il ne lui offrait donc pas l’avantage de repousser son odeur loin des cellules olfactives de sa proie, ni le grand désavantage de l’en rapprocher. Prédateur et proie étaient donc à armes égales, ou presque. Le lièvre, beaucoup plus petit, était capable de se faufiler dans des endroits où Reaven ne pouvait même pas rêver d’entrer. Il garda cela à l’esprit, préparant déjà sa chasse.

La trace olfactive devenait de plus en plus forte. Reaven ne devait plus être loin désormais. Il s’affaissa sur ses pattes, et avança encore plus lentement, aux aguets. Ses pas le menèrent au rebord d’une balafre creusée dans le sol par un obus ou un missile qui n’aurait pas explosé à l’impact mais aurait glissé et creusé cette grande cicatrice dans le versant de la colline. Reaven put alors voir le lièvre en contrebas, mâchant nonchalamment des pousses de trèfles, ne se doutant visiblement pas du prédateur qui le regardait. Le rongeur semblait être en assez bonne condition, pas très dodu, mais quels animaux l’étaient encore à cette époque ?

De là où il était, si Reaven prenait un assez bon élan, il pourrait bondir sur sa proie insouciante et la tuer sur le coup, en espérant qu’elle ne se retourne pas au dernier moment. Le loup noir et blanc fit donc marche arrière sur quelques pas, puis se redressa un peu et tendit ses muscles avant de s’élancer. Il courut sur quelques foulées avant de se propulser du rebord grâce à ses pattes arrière, transformant sa course en un saut en longueur plutôt impressionnant.

Certainement alerté par le bruit, le lièvre se retourna et s’apprêta à déguerpir. Trop tard. Le loup arrivait déjà sur lui, ses crocs se refermant autour de la nuque du pauvre rongeur qui se vit ôter la vie instantanément, ses cervicales broyées sous l’impact. Les pattes du loup retombèrent à ses côtés, arrachant l’herbe du sol alors qu’elles amortissaient le choc de sa rencontre avec le sol.

Le tout était passé très vite et sans heurt. Satisfait, Reaven assura sa prise et repartit au petit trot vers le quartier général des Esobek, où il irait déposer son offrande dans la garde-manger avant de nourrir sa meute.