L'aube s'évanouissait petit à petit. Les couleurs violacées et magiques du lever du soleil laissaient petit à petit place aux couleurs bleutées de l'été, et au soleil qui bientôt assommerait de nombreux loups alors que l'eau se faisait rare. Mais à travers ces couleurs vives se déplaçait pourtant une silhouette noire, une ombre dans la lumière. Un loup était sorti de ses terres pour y rapporter quelques gibiers à se mettre sous la dent, c'est tout ce qu'il espérait. Subvenir aux besoins de la meute, c'était primordial, même si à son goût trop peu de loups s’attelaient correctement à la tâche.

La forêt aux pendus, voilà l'endroit qu'il préférait pour chasser. C'était d'ailleurs à cet endroit qu'il se dirigeait avec grande hâte. Une fois atteint, il traversa au travers de tous ces arbres et tous ces squelettes qui en pendaient, tels des branches de saules pleureurs qui lui bloqueraient le chemin. Sauf que dans ce cas, c'étaient des cadavres en décomposition, tout de suite moins charmant. Mais cela ne lui faisait ni chaud ni froid, parce que les hommes méritaient ce triste sort. Après tout c'était tout de leur faute. Ils s'étaient entre tués, et malgré tout continuaient de détruire tout ce qu'ils avaient oublié à leur premier passage.

Après de longues minutes de recherches, le loup avait fini par tomber sue une odeur très familière, et assez fréquente en ce territoire. Un sanglier, il en était sûr. Son flair ne le trompait que rarement, et puis les traces ne mentaient pas. Les branches brisées sur le chemin de l'animal perdu ainsi que les traces laissées dans la terre molle, le pourcentage de chances de se tromper était très faible. En suivant tous ces indices qui lui avaient été offerts, il n'avait pas eu de mal à débusquer l'animal. Comme à son habitude, c'était maintenant un réflexe, il avait ralenti les pulsations de son coeur et sa respiration, afin de devenir le moins détectable possible. Ventre à terre il s'était approché au plus près de l'animal avec beaucoup de patience, jusqu'à pratiquement le frôler. C'est à ce moment qu'il avait choisi de lui bondir dessus, surprenant sa proie qui n'eut pas le temps de s'échapper. Bien sûr, chasser un sanglier adulte n'était pas chasser un petit lièvre, c'était bien plus physique et fatiguant, mais cela nourrissait aussi bien plus. C'est pourquoi un long affrontement entre les animaux avait eu lieu, le loup tentant d'avoir une prise ferme sur le sanglier qui, lui, tentait vainement de se défaire des griffes de son assaillant. Au final Sageeth, bien que s'étant reçu de nombreux coups puissants dans les cottes, lui faisant perdre son souffle, avait réussi à grimper sur le dos du sanglier. De là, il avait pu attraper sa jugulaire et mettre un terme au combat. Il ne restait plus qu'à ramener le cadavre de l'animal au camp....

S'apprêtant à regagner son territoire avec son nouvel animal à traîner derrière lui, Sageeth avait soudainement été arrêté par des sons... Des plaintes discrètes qu'il avait du mal à identifier. Il avait alors stoppé tous mouvements pour tenter de dénicher la source du bruit se voulant silencieux. Fermant les yeux dans le but d'accentuer la capacité de son ouïe, il avait finalement trouvé ce qu'il cherchait, dissimulé dans un buisson. Un marcassin. Il devait sans doute accompagner le sanglier que le loup venait de chasser. Et bien, il pourrait alors l'accompagner plus loin que simplement dans cette forêt... Il pourrait l'accompagner dans le garde manger de la meute. Et alors que le marcassin apeuré avait commencé à déguerpir, voulant conserver sa vie si précieuse, le loup avait été plus rapide. Il l'avait rattrapé en quelques foulées bondissantes et lui avait donné un violent coup de pattes qui l'avait fait rouler. Gémissant de douleur, le jeune animal s'était relevé et avait tenté de fuir à nouveau... Comme c'est mignon, se moqua intérieurement le loup. Et comme la première fois, il rattrapa de nouveau le petit, lui mordant les pattes pour jouer un peu. Une fois qu'il était à terre, le loup d'ébène lui tourna autour, s'abreuvant de la terreur du marcassin. Et finalement, au bout de quelques minutes, il lui sauta à la gorge, et c'en fut terminé. Il rapporta la carcasse de l'animal auprès de son père, un sourire déformant honteusement son visage. Et puis son hurlement s'était élevé dans les airs, afin de demander de l'aide à la meute pour rapporter son gibier.