Calme, et réfléchit, Diar n'est pas le genre de petit jeune à se jeter dans un piège facilement. Il sait utilisé sa tête, et ne se gêne pas pour le faire d'ailleurs.
Il se sait assez mince, contrairement à certain autre individu de son espèce, et préfère donc utiliser son crâne pour éviter de tomber dans une mouise dont il ne pourrait se sortir facilement.
Le blond ne s'énerve que rarement, préférant rester calme et réfléchit, car il sait pertinemment que la violence et l'énervement ne mènent pas à une bonne situation.
Mais quand il s'énerve, il change du tout au tout. A vrai dire, le blondinet peut, à partir de cet instant, devenir particulièrement sadique et cruel avec ses victimes, et si jamais il en vient à détester un loup, il fera tout ce qui est en son pouvoir pour lui pourrir la vie.

Diar fuit le plus souvent les autres membres de son espèce. Car, même ceux qui ne sont pas propices à la violence, on peut de chance de réussir à se rapprocher de lui. Tout simplement car le solitaire ne parle pas. Non, il n'est pas muet, mais il ne parle plus. Jadis, le mince canidé était un petit louveteau joueur, et foufou, une vraie pipelette, mais depuis l'accident, il avait tout simplement arrêté de parler. Cela avait été un traumatisme tel, que le blond n'avait plus entendu sa voix.
Peut-être qu'un jour il reparlerait de nouveau, mais pour le moment c'était mal partit, vu comment il fuyait les autres. C'est d'ailleurs pour ça qu'il n'avait pas intégré de meute, préférant la solitude aux regards curieux. De toute manière, se disait-il, sa voix ne devait plus ressembler à grand chose. Mais tout au fond de lui, Diar espère encore rencontrer quelqu'un qui lui fera l'entendre.

Ne supportant pas franchement l'injustice, le blond est protecteur, envers n'importe qui. Meute ou solitaire, louve ou loup, vieillard ou enfant, rien n'y fait. Il ne pourra jamais laisser un membre de son espèce se faire ridiculiser sous son regard émeraude.
Diar cache également un grand coeur blessé, d'une douceur incroyable, qu'il voudrait bien faire découvrir au monde, à défaut de son chant brisé.

La fourrure foisonnante, la marche silencieuse, Diar est un canidé orphelin de 6 ans déjà, de soixante-dix-huit kilos pour un bon 67 centimètres au garrot.
Son reflet renvoie la lumière d'un poil clair, sans pourtant en devenir blanc, un poil blond pour être exacte.
Son museau long et coiffé par une paire de prunelle d'un beau vert émeraude. Personne n'a jamais su d'où ces couleurs venaient. Peut-être avait-il été touché par des radiations à sa naissance, car à ce moment, elles arboraient comme toutes, la teinte bleutée qui caractérisait les regards des louveteaux nouveaux nés.

Sa silhouette svelte lui facilite le passage dans les petits endroits inaccessibles aux autres canidés de son espèce. Son corps est pourtant bel et bien musclé, mais sa masse musculaire n'est pas si importante, et cela se voit.
Aussi, sa duveteuse fourrure pâle ne lui permet pas une discrétion totale, malheureusement. Son oreille droite n'est par ailleurs plus couverte de ce doux pelage. Craquelée d'un sang vieux et sec, la chair partiellement guéri s'est retroussée autour du trou qu'avait causé l'accident qui l'avait fait orphelin. Cette blessure par balle ancrée dans sa chair comme dans son âme apporte à sa silhouette une touche d'impureté, jurant avec sa robe blonde.

Il y a six ans maintenant, on célébrait l'arrivé d'un jeune prince. Fils du strict alpha des Glavcal, et de sa douce compagne, un louveteau à la fourrure blonde naquit, ouvrant ses prunelles bleues sur le monde.
Le jeune prince était destiné à succéder à son père à la tête de la meute. Celle-ci n'était pas énormément puissante, mais elle était prospère, et n'aspirait qu'à la paix et à la tranquillité des autres. Il vivait au bord de ce qu'on appelait la mer, une belle mer fraîche sans danger, pleine de poissons. Mais ça, c'était il y a longtemps.
Peu à peu, tout s'est dégradé. L'arrivée des humains, et de leurs armes de fers, la destruction de leur habitat naturel.
Les Glavcal durent se résoudre à filer plein nord pour échapper à ce massacre. En court de route, ils croisèrent une mère et ses deux petits aux yeux vairons. Mais le chef refusa de les prendre sous son aile, leur fuite étant trop pressée pour s'encombrer de ces nouveaux arrivants.

A ses trois ans, le jeune prince avait pris de l'allure.
Le petit loup plein d'énergie explorait le nouveau territoire déniché par les espions de sa meute. Mais il détecta une odeur inconnue qui réveilla sa curiosité. Rassemblant tout son courage, le petit héros parvint jusqu'à une meute inconnue.
Ces êtres n'avaient que la peau sur les os, le regard vide et la démarche flegmatique. Étonnement, aucun louveteau ne se trouvaient là. Mais ce qui impressionna encore plus le petit prince, ce fut leur nombre. Ils devaient être une bonne centaine. Le blondinet n'avait jamais vu ça, et, alors que son regard médusé parcourait la scène, une des bêtes se retourna vers lui. Immédiatement, il s'enfuit, terrifié, courant le plus rapidement possible alors que ses petites pattes le portaient loin de ce spectacle.
Sa course ne dura pas bien longtemps, car, alors qu'il lançait un regard en arrière pour vérifier que personne ne le suivait, l'enfant trébucha et fit un rouler bouler jusque dans un trou de terre. Il atterit brutalement sur quelque chose de dur, qui craqua sous son arrivée brutale. Secouant sa petite tête douloureuse, le prince se redressa et jeta un coup d'oeil sur ce qui avait amortit sa chute, avant de hurler.

Un matelas d'os recouvrait le sol. Plusieurs choses se mélangeaient: herbivores, chiens, hommes...loups. Des loups. Non, trop petits. C'est à ce moment que Diar compris qu'il devait absolument s'enfuir. C'était des louveteaux. Les louveteaux qui auraient dû gambader comme lui le faisait à travers les siens.
Un grognement inconnu atteint ses oreilles alors que l'hyperactif terrifié se laissait glisser au fond du trou. Sa patte dérapa sur un morceau de chair en décomposition, pour finir entre les côtes d'un louveteau éventré. Il sursauta, s'éloignant en jappant de peur, de terreur et releva son regard tremblant vers l'animal décharné qui le surplombait.

C'était une véritable vision d'horreur. Ce qui jadis avait dû être un loup n'était plus qu'un animal de cauchemar. Son regard vide et blanc était écarquillé et posé sur lui, alors que sa colonne vertébrale formait un arc bien trop voûté pour être naturel. Il n'avait presque plus de poils, sa queue était à moitié rongé et tous ses os ressortaient de sous sa chair grisâtre et pleine de croûtes. Ses crocs ressortirent lorsqu'il grogna de faim, se baissant vers lui. Des dents cassées pour la plupart, mais pointues et irrégulières.
Il se préparait à sauter, alors que le blond ne pouvait rien faire. Il ne pouvait même pas bouger, tant ses membres tremblaient de peur. Et tout à coup, le fantôme se ramassa sur lui-même pour lui sauter à la gorge, alors que le malheureux fermait les yeux en pignant.

Mais jamais rien ne vint. Quand il rouvrit les yeux, c'était pour voir la bête pendante, déchiquetée par les crocs luisants de courage d'un autre loup, beaucoup plus rassurant. Son père.
Il lui somma de remonter, mais l'aida malgré tout, avant de repartir en courant vers sa meute. Diar avait du mal à marcher, n'en revenant pas d'être vivant. Immédiatement, sa mère le lava, faisant disparaître de son pelage doré, la crasse et la chair qui l'avait sali.
Cette nuit là, le louveteau traumatisé ne put s'endormir, tourmenté par la vision d'horreur qui avait failli l'emporter. Le soir suivant, il se réveillait, terrifié, à intervalles irréguliers. Les cauchemars ne semblaient pas vouloir s'arrêter. Il en perdit presque le sommeil.

Un jour, alors qu'il jouait tranquillement avec ses camarades, profitant du repos qui lui était accordé, un espion de meute arriva en courant, la peur au ventre. Il entra prestement dans la tanière du couple alpha, et ils en ressortirent tous les trois. Le chef de meute jeta un regard inquiet à son fils qui accourut vers lui, lui demandant ce qu'il se passait. Sans lui répondre, l'alpha rassembla toute la meute.

-Nous allons être attaqué.

Cette simple phrase fit frémir de tout son être le jeune blond. Il savait par qui.
Quand les cannibales morts arrivèrent, Diar cru mourir de peur. Celui qui avait voulu le dévorer devait être un des meilleurs de sa meute. En tout cas l'un de ceux en meilleur état. Parce que les autres n'avaient plus rien de lupin. Du trou où il était, Diar vu les guerriers de sa meute reculer d'un pas, terrifié devant les airs de démons de cette meute morte qui tuait pour tuer. Ils n'avaient aucunes lois, aucune fierté, aucun honneur. C'est sans doute pour ça qu'ils décimèrent sa meute sous ses yeux, alors que les loups adultes qui étaient restés avec eux les faisaient sortir pour s'enfuir.

Son père et sa mère s'étaient battu férocement, mais avait été emportés sous le nombre. Mais pas tués non. Ils avaient été dévorés. Dévorés vivants. Le prince déchu avait entendu les hurlements de douleur de sa mère, les plaintes et les pleurs de son père, alors que les bêtes leur arrachaient une patte, une oreille, la queue pour les dévorer.

Alors qu'une louve nommé Iloa croyait les avoir mis en sécurité, les cannibales leur retombèrent dessus, ne faisant pas de pitié, massacrant ses camarades alors que lui s'enfuyait de peur. Son avantage était surement sa rapidité car il réussit à mettre de la distance entre lui et les monstres. Mais pas assez. Car après quelques minutes de courses, le blond terrorisé pouvait déjà entendre le galop faibles des cadavres ambulants à ses trousses.
L'adrénaline qui courrait dans ses veines comme du magma le força à accélérer, dépassant ses limites, par peur.
Et soudain, un bruit sourd retentit, suivit d'un couinement derrière lui alors qu'un souffle d'air passait près de son oreille. Encore un autre résonna, plus près encore de lui.

Des hommes. Le loup arriva près d'une maison où se dressaient, un homme, fusil en main qui abattait l'un après l'autre, ses poursuivants, et une petite fille d'une dizaine d'année qui se tenait en retrait.
Le blond bifurqua juste avant de leur rentrer dedans. Mais le chasseur, inquiet tira sur lui, l'atteignant à l'oreille. Le petit couina, trébuchant pour tomber par terre, alors que le tireur reprenait ses tirs sur les cannibales. La petite fille se précipita vers le prince, touchant du bout du doigt sa fourrure, les yeux brillants.

Sa plaie le lançait, il avait très mal, et ne fit pas attention à la fille qui disparu dans sa maison pour revenir avec deux étranges objets entre ses pattes. Les yeux fermés, le loup ne put que sentir la chaleur du feu, puis sa morsure cuisante sur sa plaie, lâchant un hurlement de douleur alors que sa plaie cicatrisait. Immédiatement, elle renversa de l'eau sur l'oreille qui brûlait, pour calmer la douleur, alors que Diar se relevait, agressif envers la petite. Juste au moment où le père se retourna, pointant son arme sur lui, criant quelque chose à sa petite fille qui secouait la tête en regardant tour à tour, le petit loup orphelin, et le fusil meurtrier.
Puis, elle se jeta dans ses bras de son père, faisant exprès de faire tomber l'arme. C'est de cette occasion que Diar profita pour s'enfuir, loin de ces terres, loin de ces monstres qui l'avaient détruits, loin de cette humaine qui l'avait sauvé.

Depuis lors, Diar, trois ans, parcoure les terres d'Angels fall first, calme et prudent, rejoignant la meute aldark quelques mois plus tard par pur hasard. Une rencontre inattendue avec un certain Xyrion qui l'avait traîné à sa suite. Il n'avait pas eu le coeur à refuser. Malgré tout, le loup se promit à lui-même de ne plus jamais parler. Mais au bout d'un temps qui lui parut une éternité, cette promesse s'envola loin de lui. Il l'oublia comme il avait oublié ce qui avait été son enfance, et l'amour qui lui avait été porté. Il l'oublia comme il oublia le son de sa voix, la vibration de ses cordes vocales lorsqu'il parlait ou riait. Désormais, les seuls sons qu'il pouvait entendre de lui-même, était des plaintes, des pleurs, ou des grognements.